des techniques provenant des Etats-Unis ont permis, depuis une trentaine d’années, de
négocier autrement, en tenant compte davantage des intérêts véritables des parties en cause,
plutôt que de leurs droits, réputés opposés et inconciliables. L’objectif de la négociation
devient la solution créative, « gagnant-gagnant ». La négociation a également acquis ses
lettres de noblesse, en tant que discipline universitaire à part entière, dans toutes les grandes
facultés de droit (law schools) et écoles de commerce (business schools) américaines.
Si la médiation est très ancienne et se retrouve dans les civilisations les plus diverses, la
médiation contemporaine est l’un des fruits de la recherche en la matière : il a été observé
qu’en cas de blocage, d’impasse lors d’une négociation, le fait d’introduire un tiers, perçu
comme neutre, impartial et indépendant, jouissant de la confiance des parties et chargé de les
aider à trouver elles mêmes une solution au différend qui les oppose, permet (bien) souvent
d’aboutir à un accord.
Contrairement à un juge ou à un arbitre, dont le rôle est, en appliquant les règles du droit, de
rendre une décision qui s’impose aux parties (il y a donc, le plus souvent, un « gagnant » et un
« perdant »…qui peut se révéler un mauvais perdant), le médiateur ne décide rien du tout : il
joue le rôle de confident et de coach des parties sur la route menant au règlement du conflit,
en utilisant diverses techniques, faisant l’objet de formations spécialisées. Tout ce qui se dit
ou s’écrit, dans le cadre d’une médiation, revêt un caractère confidentiel et ne pourra donc
jamais être révélé ultérieurement, à un juge ou à un arbitre, par exemple. Le médiateur
utilisera parfois l’outil du « caucus » (ou entretien séparé) avec chacune des parties, au cours
duquel l’interlocuteur du médiateur sera invité, après avoir reçu l’assurance formelle de la
plus absolue confidentialité, notamment vis-à-vis de l’autre partie, à dévoiler ses véritables
intérêts, motivations et aspirations et également à exprimer librement ses émotions dans le
contexte du litige.
En effet, alors que le juriste classique, avocat, juge ou arbitre, a pour mission d’appliquer le
droit aux faits qui lui sont soumis, le négociateur et le médiateur contemporains, juristes ou
non, ont conscience de l’importance fondamentale des émotions et de l’écoute active de
celles-ci dans la plupart des litiges, familiaux, bien entendu, mais également commerciaux ou
dans les relations de travail. Chaque partie, en négociation directe ou dans le cadre d’une
médiation, sera non seulement écoutée, mais véritablement entendue, ce qui est loin d’être le
cas dans la procédure judiciaire. Or, la volonté d’être entendu et compris n’est-elle pas
souvent ce qui pousse quelqu’un à agir en justice ?
Malheureusement, les facultés de droit belges et européennes sont à la traîne et aujourd’hui
encore, la grande majorité des jeunes licenciés en droit n’ont pas reçu le moindre
enseignement de la négociation et de la médiation (qui peut être définie, en deux mots,
comme une « négociation assistée ») : la seule manière de résoudre les conflits entre les
hommes qui y est enseignée est le recours aux tribunaux. Il n’est donc pas étonnant que ceux-
ci soient bien plus encombrés qu’ils ne devraient l’être…Que penserait-on d’une faculté de
médecine qui n’enseignerait, comme remède à tous les maux du corps et de l’esprit, que la
chirurgie ? L’accès aux blocs opératoires serait également saturé et ce n’est sans doute pas un
hasard que le même verbe désigne l’activité du juge et celle du chirurgien : trancher !
En mai 2005, l’Ordre des Barreaux Francophones et Germanophone recommandait aux
avocats d’envisager avec leurs clients le recours à la médiation et de leur fournir les
informations qui leur permettront de bien apprécier l’intérêt de ce processus. Six mois plus
tard, le conseil de l’Ordre bruxellois allait plus loin en adoptant une recommandation sur le