Le théâtre « est l`art de produire des émotions par le rapport actif

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Le théâtre - une manière d’apprendre le français
Sava Adela
Gr. Sc. Dimitrie Filisanu, Filiasi
Le théâtre « est l’art de produire des émotions par le rapport actif aux paroles d’une œuvre
mise en situations ». C’est par cette notion de « paroles » (et non simplement de texte théâtral) et
par cette idée de « mise en situations » qu’il croise la pédagogie du FLE: échanger des paroles en
situations et ne pas simplement se contenter d’un savoir passif de la langue est en effet la base
d’une pédagogie langagière à objectif communicatif.
Depuis longtemps déjà, dans les recherches de la didactique des langues étrangères, il y a
des voix unanimes à proclamer l’utilité et le grand profit de la pratique théâtrale en classe de
langue étrangère. Colloques et ateliers, stages professionnels, dossiers dans des revues
spécialisées, grand nombre de sites internet dédiés au sujet du théâtre en classe de langue,
confirment que le théatre à l’ecole représente une pratique assez répandue.
Le théâtre est essentiellement présent à l’intérieur des enseignements dans trois champs
comme: discipline artistique dans le cadre des enseignements de spécialité; comme partie
intégrante de l’enseignement du français et comme pratique artistique et culturelle en milieu
scolaire.
La pratique du théâtre constitue un formidable outil pour intégrer l’apprentissage du français
dans une activité originale, ludique et motivante. Les étudiants ne se rendent pas compte qu’ils
apprennent la grammaire et le vocabulaire. C’est un apprentissage moins académique et donc
mieux accepté.Quels bénéfices peut-on attendre de la pratique théâtrale pour l’apprentissage du
français langue étrangère ? Quelles activités mettre en place ? Comment se préparer à l’animation
d’un atelier théâtre en classe ?
La pratique théâtrale aide à développer l'expression orale des apprenants, leur permet de
"vivre la langue" et leur apprend à aimer le français. Le théâtre a également un rôle désinhibiteur,
ludique, et entraîne les apprenants à connaître la culture et la littérature francophones. Monter une
pièce de théâtre constitue un projet très motivant pour les élèves, leur permettant de développer
leurs compétences en français de façon ludique et de resserrer les liens du groupe.
Les activités théâtrales sont idéales pour travailler l’expression orale. Pour se faire entendre
et comprendre par le reste du groupe et le public, les apprentis comédiens doivent parler fort et
surtout distinctement ! La répétition permet de mettre en place des sons mal maîtrisés, des liaisons
et des allongements oubliés. Selon le type du texte, vous pouvez aussi mettre l’accent sur le rythme
et l’intonation de la phrase. Les pièces versifiées, comme celles des auteurs classiques, sont les plus
adéquates mais elles ne conviennent qu’aux groupes avancés!
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La mise en voix permet d’explorer différentes facettes du texte. Une même réplique dite sur
un ton enjoué ou fatigué, franc ou ironique, affable ou agressif, peut transformer du tout au tout
l’interprétation de la scène. Sur un même fragment, on peut par exemple faire travailler la classe en
chœur, par binôme (l’un fait les gestes et l’autre les paroles) ou encore en chaîne (chaque élève
propose une interprétation différente de la même réplique). Cela permet de détacher le texte écrit de
sa pratique dramatique. Il est très important de faire prendre conscience aux apprenants de ces
différences, qui sont l’essence même du travail théâtral.
Le théâtre implique dans la majeure partie des cas un travail de groupe: monter un projet
collectif permet aussi de renforcer la cohésion de votre classe grâce à la poursuite d’un objectif
commun et l’entraide mise en place pour y parvenir.
Le jeu théâtral demande de travailler plusieurs aspects qui sont malheureusement souvent
négligés par certains enseignants. Des aspects aussi essentiels que la projection de la voix, les
modulations et les intonations de la voix, les mouvements du corps, l'occupation de l'espace
scénique et la construction d'un personnage sont des préalables qui méritent d'être exploités.
Le théâtre suppose de libérer et de rationaliser des émotions. Pour ce faire, un travail
corporel est nécessaire, qui permette à chacun de découvrir ses sensations et son potentiel expressif:
l’acteur doit faire l’épreuve de la parole d’un auteur par un travail physique, épreuve d’autant plus
importante pour l’acteur-apprenant débutant en langue étrangère : celui-ci doit se confronter à la
langue étrangère, celle de l’œuvre, dans la langue étrangère, celle pratiquée dans les échanges
permanents au sein du groupe. L’apprenant doit passer par la langue étrangère pour interpréter le
texte ou échanger ses idées de mises en scène.
Par le travail corporel, l’apprenant prend progressivement confiance en lui-même, pour
finalement s’exprimer totalement en langue étrangère, et progresser ainsi dans son acquisition.
Du point de vue de la langue, la pratique théâtrale constitue une moteur de communication
authentique : chacun désire parler, écouter et être écouté, chacun se sent légitimé à parler par
l’attention et le regard que lui portent les autres, chacun est en dialogue avec un texte dont la qualité
esthétique stimule la découverte progressive et le passage dans le corps de l’acteur.
Les activités sont multiples. Elles partent toujours d’activités pratiquées dans un cours de
théâtre mais sont transformées de manière à avoir un intérêt pédagogique: il peut s’agir de pratiquer
un acte de parole spécifique, des points grammaticaux ou du vocabulaire ou encore de sensibiliser
l’apprenant à la culture française et aux savoir-être spécifiques à cette culture.
Pour les niveaux débutants, on fait souvent pratiquer les mimes qui sont très utiles pour
apprendre à raconter ce dont on a été témoin. Pour dynamiser la classe, on utilise des exercices
d’échauffement du théâtre, comme les échauffements vocaux. Pour pratiquer des actes de paroles,
on sert des scénarii d’improvisation. Il s’agit d’un long jeu de rôle, où on impose des contraintes
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(des actes de paroles…) aux étudiants mais où il reste des variables à définir comme les
personnages, le lieu… En général, les étudiants adorent ce genre d’exercices car ils peuvent
s’amuser et à rivaliser d’imagination vis-à-vis de leurs camarades.
Et puis, à partir du niveau intermédiaire, on commence à introduire des improvisations
totales telles qu’elles sont pratiquées dans les cours de théâtre. Cela les incite à mobiliser leur
connaissance de la langue et les oblige à s’écouter attentivement les uns les autres. Ils comprennent
aussi mieux leurs problèmes (prononciation, intonation, grammaire…).
Une fois le texte trouvé, il faudra peut-être l’adapter, par exemple en le simplifiant, en le
réécrivant ou encore en le coupant. Tout dépend du niveau de la classe, du temps dont on dispose et
de l’envergure qu’on souhaite de donner au projet. Comment faire intervenir tout le monde ? Une
pièce déjà rédigée compte un nombre déterminé de personnages. Si les apprenants sont plus ou
moins nombreux, il y a quelques adaptations à faire. On peut diviser des rôles en deux, voire en
trois, et créer de nouveaux personnages. Ainsi, un personnage de mère peut fournir deux rôles en
attribuant la moitié de ses répliques à un nouveau personnage (père, tante, grand-mère…). A
l’inverse, on peut aussi réunir deux personnages en un seul s’ils ont des rôles proches. Autre
possibilité : attribuer deux rôles ou plus (lorsqu’il y a peu de texte) à un même apprenant. Autant
que possible, les rôles doivent être distribués en fonction des goûts et des aptitudes de chacun.
Il faut d’abord accepter les erreurs pour le langage verbal mais être très exigeant en ce qui
concerne la précision du langage scénique en soulignant l’importance du travail gestuel et
émotionnel. La conjonction de ces deux modes d’expression (verbal et scénique) engendre
l’acquisition de réelles compétences communicatives dans le cadre de la pratique pédagogique
proposée, la pratique théâtrale. Par le travail physique du corps et de la voix émergera une « pulsion
communicative », qui enclenchera le travail en langue étrangère et permettra de surmonter les
difficultés langagières. Il faut d’abord que l’apprenant accepte une communication avec des erreurs
mais vivante pour ensuite travailler sur les erreurs d’interprétation du sens du texte.
Les premiers exercices à proposer seront des exercices de relaxation au sol et des jeux qui font
intervenir le contact physique entre les membres du groupe et l’imagination : la confiance s’établira
ainsi par le ludique. On lance une improvisation sur un thème proche de la pièce choisie par
l’enseignant, puis on en aborde pour une première lecture le texte de la pièce. Il s’agit d’une lecture
réplique après réplique fait par les étudiants sans tenir compte des personnages, et sans volonté
d’interprétation particulière. Le troisième moment, c’est la distribution des rôles.
On attribue les personnages et on effectue une correction phonétique précise pour que les erreurs ne
soient pas mémorisées. De nouveau, un travail personnel est demandé pour travailler seul le sens de
la pièce. On suggère aux étudiants de penser à des costumes possibles.
Ensuite on initie les apprenants aux actions théâtrales secondaires qui donnent de l’épaisseur aux
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personnages et on lance une discussion scène après scène. On déroule la première partie de la pièce
avec mise en espace et quelques actions. Une discussion critique générale a lieu devant des chaises
vides symbolisant le public : le groupe devient metteur en scène collectif. Ensuite c’est le moment
du filage partiel double. On reprend cette partie scène par scène, scènes qui sont jouées deux fois, la
première avec les mots de chaque groupe, la seconde avec les mots du texte. La critique du groupe
portera sur cette seconde interprétation, tout comme les corrections de langue. Enfin on refait un
filage général mais les apprenants expliquent eux-mêmes chaque scène. Le travail de précision peut
se dérouler avec correction précise de la prononciation de chacun puisque le texte est enfin intégré
par l’apprenant, avec la gestuelle et l’émotion qui y sont associées.
L’objectif est de mettre en jeu le monde des émotions, de faire varier les tonalités dans la
gestion de sa propre voix, de travailler sur la proxémique, en dernière analyse de donner à tous la
possibilité d’être ‘acteur’ non pas au sens propre ‘d’acteur de théâtre’ – ce n’est pas du tout ainsi
qu’il faut l’entendre – mais dans le sens qui nous concerne de près en tant qu’éducateurs et
formateurs de consciences : ‘celui qui agit’, ‘celui qui fait’, tout en faisant, entre en contact avec un
monde de l’expression qu’il ignore mais qui se dévoile parce qu’il est le véhicule des émotions qui
naissent dans son propre monde intérieur.
Rituel laïque, dramaturgie, participation, transmission d’une culture : ces mots rappellent
que le théâtre et l’École sont essentiellement des lieux où est refusée la violence, où se créent des
citoyens libres. Le théâtre n’est pas un objet d’étude comme les autres : c’est son ambivalence qui
lui donne le privilège d’être en même temps dans la vie et dans l’École.
www.francparler.org
www.edufle.net
www.fdlm.org
http://membres.lycos.fr
http://catalogue.crdp.ac-versailles.fr/docs/avpropostheatre.pdf
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