Techniques et indications de l`hypodermoclyse en

Techniques et indications de l’hypodermoclyse en gériatrie
V. Dardaine-Giraud
Service de soins de suite et réadaptation, hôpital de l’Ermitage, CHU de Tours, 2, allée Gaston-Pagès, 37081 Tours cedex 2, France
Disponible sur internet le 30 octobre 2004
La voie sous-cutanée, encore appelée hypodermoclyse,
est particulièrement utile chez les patients âgés. Cette tech-
nique a été initialement utilisée dans les années 1950 dans le
traitement des déshydratations de l’enfant [1]. Elle a été
ensuite abandonnée au profit de la voie intraveineuse, mais
elle connaît un regain d’intérêt en gériatrie depuis plusieurs
années du fait de ses nombreux avantages [2,3]. C’est une
technique simple, efficace [4] et confortable qui est dénuée
de risques dès lors qu’elle correctement utilisée [5]. Elle
permet d’éviter l’immobilisation et ses conséquences tant
redoutées en gériatrie : perte d’autonomie surtout mais aussi
constipation, infections pulmonaires ou urinaires, escarres,
incontinence... L’hypodermoclyse ne nécessite pas de sur-
veillance intensive, ce qui la rend aisément utilisable à domi-
cile ou en institution et contribue à éviter l’hospitalisation du
sujet âgé. Son impact est donc bénéfique en termes de confort
pour le patient et en termes de coût.
L’hypodermoclyse est une alternative intéressante à la
voie intraveineuse. Celle-ci n’est effectivement pas toujours
aisée à mettre en œuvre chez les patients âgés et n’est jamais
anodine, exposant au risque de septicémie, de thrombose,
d’embolie gazeuse ou encore de surcharge volémique. De
même, la sonde nasogastrique n’est pas toujours bien tolérée
psychologiquement. Le recours à la voie sous-cutanée peut
avoir un intérêt dans plusieurs situations : la déshydratation,
la malnutrition et la fin de vie. Elle est par ailleurs d’une
grande utilité pour l’administration de thérapeutiques.
La déshydratation est fréquente et grave chez le sujet âgé.
La stimulation des apports oraux est indispensable mais
s’avère souvent insuffisante en pratique quotidienne. La per-
fusion sous-cutanée de solutés permet de traiter une déshy-
dratation modérée [6,7], mais elle est plus particulièrement
bénéfique en prévention de la déshydratation, dans tout
contexte clinique ou environnemental susceptible de la favo-
riser. La fièvre, les troubles digestifs à type de diarrhée ou
vomissements, un syndrome confusionnel, des troubles de la
déglutition, une démence... sont autant de situations fréquen-
tes en gériatrie. La canicule est une autre situation à risque
dans laquelle l’administration sous-cutanée de solutés est
d’une grande utilité.
La malnutrition protéinoénergétique est également fré-
quente et de mauvais pronostic chez le sujet âgé, associée à
une augmentation de la mortalité et la morbidité. La perfu-
sion sous-cutanée d’acides aminés peut être intéressante sur
une courte période pour prévenir sa survenue ou son aggra-
vation [8,9]. Des études complémentaires sont néanmoins
nécessaires dans ce cadre.
Le confort de la voie sous-cutanée et son caractère non
agressif rendent l’hypodermoclyse particulièrement adaptée
chez les patients en fin de vie [10]. Elle permet d’apporter des
solutés si une hydratation est souhaitée. Elle permet de plus
l’administration de la majorité des thérapeutiques qui peu-
vent être utiles chez ces patients [11].
Enfin, l’administration sous-cutanée des médicaments
mérite d’être développée dans cette population croissante.
Actuellement, très peu de classes thérapeutiques ont l’AMM
pour cette voie [12] et son utilisation repose souvent en
gériatrie sur des expériences personnelles. Des études visant
à évaluer l’efficacité et la tolérance locale des thérapeutiques
sont indispensables et il importe de convaincre nos laboratoi-
res pharmaceutiques de l’intérêt d’explorer cette voie
d’abord.
En conclusion, l’hypodermoclyse est une technique sûre,
facile à mettre en place, et efficace chez le sujet âgé. Son
bénéfice en termes de confort et de coût doit inciter à la faire
connaître et à élargir son utilisation.
Références
[1] Schartzman J, Henderson AT, King WE. Hyaluronidase in fluid
administration. J Pediatr 1948;33:267–73.
[2] Dardaine V, Ferry M, Constans T. Presse Med 1999;28:2246–50.
[3] Ferry M, Dardaine V, Constans T. Subcutaneous infusion or
hypodermoclysis: a practical approach. J Am Geriatr Soc 1999;47:
93–5.
[4] Lipschitz S, Campbell AJ, Roberts MS, Wanwimolruk S,
McQueen EG, McQueen M, et al. Subcutaneous fluid administration
in elderly subjects: validation of an under-used technique. J Am
Geriatr Soc 1991;39:6–9.
Adresse e-mail : v[email protected] (V. Dardaine-Giraud).
La revue de médecine interne 25 (2004) S353–S354
http://france.elsevier.com/direct/REVMED/
0248-8663/$ - see front matter © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.revmed.2004.10.003
[5] Lamandé M, Dardaine-Giraud V, Ripault H, Chavanne D, Constans T.
Utilisation de l’hypodermoclyse en gériatrie : étude prospective sur
six mois. L’Année Gérontologique 2004 à paraître.
[6] Dasgupta M, Binns MA, Rochon PA. Subcutaneous fluid infusion in a
long-term care setting. J Am Geriatr Soc 2000;48:795–9.
[7] Slesak G, Schnurle JW, Kinzel E, Jakob J. Comparison of subcutane-
ous and intravenous rehydration in geriatric patients: a randomized
trial. J Am Geriatr Soc 2003;51:155–60.
[8] Ferry M, Fichter C, Fournis Y. L’hypodermoclyse ou perfusion sous-
cutanée d’acides aminés. Un complément nutritionnel en gériatrie.
Med Hyg (Geneve) 1990;48:1533–7.
[9] Ferry M, Leverve X, Constans T. Comparison of subcutaneous and
intravenous administration of a solution of amino-acids in older
patients J. Am Geriatr Soc 1997;45:857–60.
[10] Fainsinger RL, MacEachem T, Miller MJ, Bruera E, Spachinski K,
Kuehn N, et al. The use of hypodermoclysis for rehydration in termi-
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[11] D’Avigneau JM, Tenailleau V. Les médicaments injectables par voie
sous-cutanée chez les patients en fin de vie. Revue Geriatr 1994;19:
167–72.
[12] Grumbach Y, Delahaye F. Antibiothérapie et voie sous-cutanée en
gériatrie. Revue de Gériatrie 2001;26:53–6.
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