Alcool et addictions de mon proche : comment y voir plus clair ? Cet

Alcool et addictions de mon proche : comment y voir plus clair ?
Cet article fait suite à de nombreux témoignages d’aidants déstabilisés face aux
conduites « addictives » de leur proche. Plus précisément, il s’agit surtout de situations
l’aidant est inquiet de la consommation par son proche de produits psychoactifs tels que
l’alcool, le tabac, certains dicaments : « ma mère de 90 ans me demande de lui acheter
de l’alcool, je ne sais pas quoi faire. Surtout qu’elle prend plusieurs médicaments » !
Les conduites addictives de mon proche : De quoi parle-ton ?
« mon mari boit et j’ai peur qu’il tombe » ;
C’est surtout l’alcool qui représente le sujet de préoccupation majeur et pourrait se résumer
de la manière suivante : « dois-je laisser mon proche en perte d’autonomie consommer de
l’alcool en dépit des risques associés?».
Ou autrement dit, quelle position adopter entre le respect du choix de la personne et le
devoir de protection de l’entourage ? « mon père continue de fumer alors qu’il est malade ».
A partir de quand la consommation de la personne aidée peut-elle être qualifiée
d’excessive ?
A quel moment faut-il l’empêcher ? le/la dissuader ? lui interdire ?
On parle aujourd’hui de « conduites addictives » pour désigner l’ensemble des usages de
produits psychoactifs susceptibles d’entraîner (ou pas) un trouble. La « dépendance »
constituant le trouble le plus sévère.
La dépendance peut se repérer par :
Des conduites invariables,
Répétées de manière compulsive,
Avec perte de contrôle,
Et un échec à y mettre fin malgré le désir du sujet et les dommages occasionnés.
Il est utile de préciser que l’absence de « dépendance » n’exclut pas l’existence de troubles
qui peuvent être nuisibles au consommateur.
Comment y faire face ?
Il est donc nécessaire pour les aidants d’identifier la nature des consommations de leur
proche (consommation conviviale ? dépendance ? abus ?) pour sortir du doute et pouvoir
agir si nécessaire.
Pour ce faire, il est utile :
 D’objectiver la consommation (fréquence, nature du produit, rythme…)
 D’évaluer les risques encourus (en termes de santé physique et psychique, de
relations sociales..)
 et enfin de comprendre ce qui motive cette pratique (est-ce que la consommation
est un palliatif à un mal-être ou est-ce un besoin de convivialité ?...)
Par exemple, une aidante me disait : "mon père boit trop". C'est dans ce "trop" que les
choses se jouaient. Il a alors fallu le détailler : trop par rapport à quoi? À qui? À quand?
Cette femme était très inquiète pour son père qui vivait seul à son domicile. Elle imaginait
alors toutes les situations dangereuses qui pourraient advenir du fait de cette
consommation: perte de vigilance, confusion cognitive, troubles de l'équilibre...le tout
pouvant entraîner des chutes, des accidents avec comme finalité - au mieux une perte
d'autonomie aggravée - au pire la mort.
Or en échangeant avec elle, elle s’est finalement rendu compte que son père n'avait rien
changé de ses consommations habituelles et surtout qu’aucune conséquence négative réelle
ne s’était produite. Il y avait donc bien un décalage entre la consommation objective de la
personne aidée et la perception subjective de l’aidante.
Cette prise de conscience lui a permis de diminuer son angoisse et ses inquiétudes.
Mais il est fréquent que les situations d’inquiétude aient des fondements et qu’il soit difficile
pour l’aidant d’agir.
L’exemple de Monsieur Charles
C’est le cas de ce Monsieur Charles qui s'inquiétait de la hausse de consommation d'alcool
de sa compagne. Il avait pu remarquer qu’elle consommait de plus en plus tôt dans la
journée, de plus en plus souvent, qu’elle devenait irritable et agressive, et qu’elle perdait la
mémoire.
Il était d’autant plus démuni que sa femme avait toujours consommé de l’alcool de façon
très occasionnelle. Il avait bien essayé de lui en parler mais elle avait violemment nié. En
échangeant avec Monsieur Charles, il m’expliqua les stratégies qu’il avait mis en place pour
limiter la consommation d’alcool de son épouse (dissimuler les bouteilles, y ajouter de l’eau,
limiter les occasions festives…) mais cela sans succès.
Puis ensemble, nous avons tenté d’identifier ce qui avait pu causer ce changement d’usage.
Monsieur Charles m’a alors raconté que son épouse avait été diagnostiquée Parkinson
l’année précédente. Bien que la maladie ait peu de résonance dans la vie quotidienne de sa
femme, elle se préparait à une perte d’autonomie progressive. Mettre du sens sur ce qui
pouvait expliquer ces changements a ouvert de nouvelles pistes d’action : envisager ses
comportements comme la traduction d’une souffrance psychique, en informer le médecin
traitant et les intervenants professionnels, évaluer s’il s’agit de symptômes dépressifs,
identifier les traitements possibles (accompagnements thérapeutiques ou
médicamenteux)…et enfin, l’importance pour l’époux de ne plus être seul face à ces
difficultés.
Ces témoignages illustrent bien la difficulté d’agir face aux comportements « risqués » de
son proche. Cela peut générer du doute et un sentiment d’impuissance. Qui plus est dans
les situations où les aidants se confrontent au « déni » de la personne aidée.
Il est tout de même possible de retenir que les éléments suivants constituent des signaux
d’alerte qui nécessitent une intervention :
Déclin des aptitudes fonctionnelles, négligence corporelle, réduction des activités,
isolement socio-familial,
Accidents, chutes, dépression, anxiété croissante, insomnie
Malnutrition, infections à répétition…
Enfin, pour faire face à ces situations, il est important de ne pas rester seul(e) : l’entourage
et les professionnels du médico-social peuvent constituer de précieux soutiens pour aider à
y voir plus clair, et de maintenir le dialogue avec la personne aidée et de lui faire part de vos
inquiétudes.
Clémence Boudot
Psychologue
Le Relais des aidants
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