
C. POITOU 5
I.2. Orientation diagnostique et conduite à tenir
Devant toute douleur abdominale après chirurgie, l’interrogatoire s’attache à décrire les
caractéristiques des douleurs : délai par rapport à l’intervention, facteurs déclenchants (aliments),
siège (épigatrique, périombilicale, hypochondre droit), type de douleurs et durée, signes
d’accompagnement (arrêt matières et gaz, vomissements, troubles vasomoteurs, troubles du transit).
Il faut toujours avoir à l’esprit qu’un patient opéré obèse est un malade extrêmement fragile. De
plus, le montage chirurgical lui-même entraîne des complications potentiellement graves avec un
risque vital non négligeable (hernie interne, occlusion, nécrose du grêle). Au moindre doute il faut
demander l’avis du chirurgien qui a opéré le malade et/ou adresser le patient au centre chirurgical
le plus proche pour une prise en charge urgente.
Différents tableaux cliniques peuvent être décrits :
a) douleurs abdominales persistantes et vomissements avec signes d’occlusion, et/ou altération de
l’état général. Ce tableau oriente vers le diagnostic de sténose d’une anse digestive ou occlusion sur
brides. La ré intervention chirurgicale s’impose en urgence sans réaliser aucun examen
complémentaire.
b) douleurs abdominales à répétition postprandiales à distance de l’intervention (> 3 mois) ou douleurs
abdominales atypiques. La crainte est celle de la hernie interne. Les examens à réaliser sont TOGD
et/ou un scanner avec opacification du grêle et surtout une coelioscopie exploratrice. Si la
coelioscopie est « blanche » il est souhaitable de réaliser une Fibroscopie Oeso-gastro-duodénale
(FOGD) à la recherche d’un ulcère de l’anastomose (douleurs parfois atypiques).
c) douleurs abdominales le plus souvent aigues prédominant dans l’hypochondre droit. L’examen
clinique peut mettre en évidence une défense de l’hypochondre droit. La conduite à tenir est de
réaliser un bilan biologique (bilan hépatique, lipasémie) ainsi qu’une échographie abdominale à la
recherche d’une pathologie biliaire dont le risque est augmenté au cours des amaigrissements
importants.
De même les douleurs lombaires doivent faire évoquer une lithiase rénale dont la fréquence est accrue
au cours d’une perte de poids importante.
d) douleurs abdominales épigastriques accompagnées éventuellement de vomissements ou
d’intolérance alimentaire. L’examen clinique est strictement normal. L’examen à faire en priorité
est une FOGD à la recherche d’un ulcère anastomotique. Celui-ci peut survenir rapidement mais
également à distance de l’intervention. Il peut être potentiellement grave avec le risque
d’hémorragies digestives.
e) crampes intestinales survenant après les repas avec des signes associés abdominaux (nausées,
diarrhées, vomissements) et/ou vasomoteurs à type de céphalées, sueurs, besoin de s’allonger,
tachycardie. L’interrogatoire permet de retrouver des facteurs alimentaires déclenchants (sucré ou
gras notamment). Il s’agit des manifestations du dumping syndrome précoce, fréquent après bypass
et qui s’estompe parfois lors de la deuxième année. Les conseils alimentaires (aliments à faible
index glycémique, fractionnement) sont alors nécessaires.
Enfin si l’ensemble du bilan morphologique (TOGD, FOGD et coelioscopie) est normal, le diagnostic de
douleurs fonctionnelles peut être posé (diagnostic d’élimination). Il s’agit alors souvent de douleurs
appartenant au syndrome du colon irritable. Il peut également s’agir d’intolérance au fer ou au lactose.
Il semble néanmoins important, ce d’autant que le sujet a plus de 50 ans et/ des antécédents familiaux
de cancer du colon, de réaliser une coloscopie, les patients obèses ayant un risque accru de cancer
du colon.