
personnes par an. Il est nettement inférieur à celui des personnes dépistées.
Nous disposons d’un traitement qui guérit jusqu’à 8 personnes sur 10, pourtant le nombre de
personnes dépistées et le nombre de personnes traitées restent faibles ! En ce qui concerne le
VIH (virus du sida) le traitement n’est que suspensif (il retarde considérablement l’évolution
de la maladie, mais ne la guérit pas), mais les patients sont pourtant bien mieux dépistés et
plus souvent traités que pour le virus de l’hépatite C.
Comment expliquer ce décalage ?
Pascal Melin : Bien qu’il s’agisse d’une situation qui dure depuis 20 ans, elle reste difficile à
expliquer. Notons tout de même que les autres pays européens ne dépistent que 10 à 20 % de
leurs porteurs ! Plusieurs facteurs entrent sans aucun doute en jeu.
La voie classique de contamination est la voie intraveineuse. Un usager qui n’a utilisé ce
mode d’administration qu’une ou deux fois dans sa vie ne se considère pas comme un «
injecteur ». Or il suffit d’une injection pour être infecté par le virus. Le plus souvent, elle est
faite par quelqu’un qui est usager depuis longtemps, donc qui a une probabilité assez grande
d’être lui-même infecté. De fait, on constate qu’une grande partie des contaminations ont eu
lieu à l’occasion des premières injections(2). Résistant à l’air libre, le virus peut être présent
dans des traces de sang imperceptibles à l’œil nu sur les doigts de l’injecteur. Parmi ceux qui
abandonneront rapidement ce mode d’administration, la plupart ne se souviendra pas de
l’avoir essayé.
La contamination peut aussi se faire par voie nasale, avec le petit matériel utilisé pour les
injections, ou encore à l’occasion de piercings ou de tatouages. Les usagers ne sont pas
toujours avertis de cela.
D’une manière générale, les messages qui leur sont adressés ne sont pas suffisamment clairs.
Les spécialistes y ont d’ailleurs leur part de responsabilité. Il s’agit surtout d’infectiologues et
d’addictologues, dont les priorités ne sont pas toujours les mêmes à l’égard de leurs patients :
les premiers insistent sur l’état du foie, les seconds sur la stabilité émotionnelle et sociale de
la personne prise en charge. Il nous faut construire des messages communs et précis.
Par exemple, en reprenant les constatations énoncées plus haut, demander à tout nouveau
patient : « êtes-vous sûr que la personne qui vous fait un premier « shoot » n’est pas infectée
? » et à tout usager par voie intraveineuse : « s’il vous arrivait d’injecter quelqu’un, attention
à la façon de le faire ! ».
Du reste, depuis la conférence de consensus de 2002, beaucoup de praticiens hésitent à traiter
un usager de drogues ou un patient alcoolo-dépendant, pensant que chez eux les prises en
charge sont plus difficiles. Depuis, il a pourtant été montré que les traitements marchent très