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Émigration
européenne :
la nouvelle donne
2012/02
Siréas asbl
        Analyses & 
      Études
Migrations
par Philippe
Deboulle
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Service International de Recherche,
d’Éducation et d’Action Sociale asbl
Secteur Éducation Permanente
Rue du Champ de Mars, 5 – 1050 Bruxelles
Tél. : 02/274 15 50 – Fax : 02/274 15 58
[email protected] – www.sireas.be
Siréas asbl
Nos analyses et études, publiées dans le cadre de l’Education permanente, 
sont  rédigées  à  partir  de  recherches  menées  par  le  Comité  de  rédaction 
de  SIREAS  sous  la  direction  de  Mauro  SBOLGI,  éditeur  responsable. 
Les questions traitées sont choisies en fonction des thèmes qui intéressent 
notre public et développées avec professionnalisme tout en ayant le souci de 
rendre les textes accessibles à l’ensemble de notre public.
Ces publications s’articulent autour de cinq thèmes
MonDe et Droits De lhoMMe
Notre société à la chance de vivre une époque les principes des Droits de l’Homme
protègent ou devraient protéger les citoyens contre tout abus. Dans de nombreux pays ces
principes ne sont pas respectés.
ÉconoMie
La presse autant que les publications officielles de l’Union Européenne et de certains
organismes internationaux s’interrogent sur la manière d’arrêter les flux migratoires. Mais
ceux-ci sont provoqués principalement par les politiques économiques des pays riches qui
génèrent de la misère dans une grande partie du monde.
culture et cultures
La Belgique, dont 10% de la population est d’origine étrangère, est caractérisée, notamment,
par une importante diversité culturelle
Migrations
La réglementation en matière d’immigration change en permanence et SIREAS est confronté
à un public désorienté, qui est souvent victime d’interprétations erronées des lois par les
administrations publiques, voire de pratiques arbitraires. Les questions d’émigration sont
également abordées dans cette thématique.
sociÉtÉ
Il n’est pas possible de vivre dans une société, de s’y intégrer, sans en comprendre ses
multiples aspects et ses nombreux défis.
Toutes  nos  publications  peuvent  être  consultées  et  téléchargées  sur  notre  site 
www.sireas.be, elles sont aussi disponibles en version papier sur simple demande à 
Avec le soutien
de la Fédération
Wallonie-Bruxelles
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Le 17 avril 2012, le quotidien algérien Libertés rapportait l’arrestation
de quatre clandestins espagnols par les gardes côtes algériens sur la façade
maritime ouest. Le 2 février 2012 ce sont vingt portugais qui se font interpeller
à l’aéroport de Luanda en possession de faux visas, ils seront renvoyés vers
Lisbonne. Deux faits divers passés quasiment inaperçus dans les médias qui
révèlent une situation bien plus inquiétante : la crise économique pousse un
nombre de plus en plus important d’européens à fuir leur pays. Et ce sont
surtout les pays du sud qui sont en première ligne : l’Espagne, le Portugal,
la Grèce, et au Nord, l’Irlande.
les nouveaux ÉMigrants
Depuis la crise de 2008, la situation de plusieurs classes sociales s’est
dramatiquement aggravée : le chômage des jeunes a atteint des proportions
jamais vues, et surtout celui des jeunes diplômés. Le premier ministre
portugais pousse même ses compatriotes à émigrer : ils devraient « faire 
preuve de plus d’effort », « laisser leur zone de confort » en cherchant du
travail ailleurs, a-t-il déclaré. Et c’est bien ce que font ces gens désespérés
avec des fortunes diverses.
Les ouvriers peu qualifiés qui profitaient de la bulle immobilière comme
en Espagne ont pour la plupart perdu leur travail.
Les pays concernés communiquent très peu sur ce phénomène et les
médias se complaisent dans des petits reportages montrant une face quasi
idyllique de la situation. Ils nous parlent de ces maçons et ingénieurs
portugais heureux dans leur nouvelle vie au Mozambique, mais rien sur
ces travailleurs dormant dans les gares en Suisse, sur ceux parqués par
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Bouyghes dans des mobile-home dans le cadre de la construction de réacteur
EPR en France. Rien non plus sur ces polonais rentrant dans leur pays en
pleine expansion économique. Et rien sur ces sud-américains d’Espagne
ruinés par la crise qui repartent de zéro dans leur pays grâce à un fonds
d’aide au retour, désormais épuisé.
Il est aussi très difficile d’avoir des chiffres exacts sur ces nouveaux
migrants, certains pays ne comptabilisant que les départs hors Europe. On
constate malgré tout que certains pays ont désormais une balance migratoire
négative.
Mais la situation est sensiblement différente d’un pays à l’autre.
le Portugal
Le chômage atteint désormais environ 15% de la population et plus d’un
jeune sur trois est concerné. Les mesures draconiennes d’assainissement ont
vu baisser les salaires, les pensions et les allocations, les magasins ferment
les uns après les autres. Beaucoup de portugais travaillaient en Espagne
la situation est encore pire. L’an dernier, plus de 120 000 personnes auraient
émigré notamment vers les anciennes colonies (Angola, Mozambique et le
Brésil) en pleine croissance. On compte désormais 100 000 portugais résidant
en Angola soit le triple des angolais résidant au Portugal. Le Brésil attire
surtout une main-d’œuvre qualifiée, des jeunes diplômés à la recherche d’un
premier emploi. Les portugais n’ayant pas besoin de visa pour un séjour
touristique, ils régularisent souvent leurs situation après avoir signé leur
contrat. Pour l’Angola et le Mozambique, il convient d’avoir un contrat
en poche pour avoir un visa, les secteurs engageant sont aussi divers que la
finance, les nouvelles technologies et le bâtiment.
Mais ces anciennes colonies ne sont pas les seules destinations de ces
nouveaux migrants. La France résident un grand nombre de portugais
issus des vagues migratoires d’après-guerre et des années 60, est également
une destination privilégiée. Le salaire minimum étant désormais de 472€ au
Portugal, certains se contentent d’un salaire horaire de 4€/heure. Durant
la décennie 2000-2010, la France a reçu 580 000 portugais devançant ainsi
le Brésil (213000) et les États-Unis (191 800) et la tendance est repartie à la
hausse depuis 2011.
Mais cette émigration devient parfois un trop beau mirage. Certains
mal préparés, ne connaissant pas la langue du pays d’accueil, se trouvent
parfois dans des situations dramatiques. C’est le cas au Luxembourg et en
Suisse notamment des couples âgés de 30 à 50 ans, sans qualification,
débarquent avec leurs enfants mineurs, persuadés de trouver rapidement
un travail. Eduardo Dias a qualifié cette émigration d’« émigration béta ».
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C’est en Suisse que la sonnette d’alarme a été tirée pour la première fois.
Des portugais dormaient dans la rue par des températures glaciales. Manuel
Beja, le président de la Commission des flux migratoires du Conseil des
communautés portugaises et des Conseillers de la communauté portugaise
en Suisse a envoyé les premières alertes en 2008 au gouvernement portugais
qui a très mal réagi : “Le gouvernement de José Sócrates a très mal réagi, 
m’accusant  même  d’être  un  irresponsable.  C’est  dommage,  car  c’est  un 
mouvement  difficile  à  enrayer,  certes,    mais  qui  aurait  pu  être  traité 
différemment.”
Après avoir dénoncé la situation de ses compatriotes qui dormaient dans
des gares encore dans des centres de sans-abris, les arrivées se sont un
peu calmées, mais avec les beaux jours, la crainte de nouvelles vagues de
migrants fait de nouveau surface.
Cette situation n’est pas l’apanage de la Suisse, elle se retrouve désormais
dans la plupart des pays du Nord (Pays-Bas, Angleterre, Allemagne etc.).
Personne ne peut fournir de chiffres précis sur cette émigration portugaise,
ni surtout de chiffres sur la personnalité de ces nouveaux émigrants même
si certains aimeraient n’y voir qu’une fuite des cerveaux représentés par ces
jeunes diplômés sans travail.
l’esPagne
La situation est encore plus préoccupante que celle du Portugal. Avec
un chômage de 25%, l’Espagne bat tous les records des pays membres de
l’OCDE. Un jeune sur deux est sans emploi et sans perspective d’avenir.
Après une croissance insolente au-delà de celle de la zone euro gonflée
par la bulle immobilière, l’Espagne a vu sa situation économique s’effondrer
en peu de temps. Cette concentration sur le secteur du bâtiment a rendu
la chute de l’Espagne encore plus lourde. Ce secteur gourmand en main-
d’œuvre représentait une part trop importante de l’économie qui n’a pu être
remplacée après la crise de 2008. Actuellement la bulle du crédit est en train
d’emporter les banques qui avaient arrosé les entreprises et les ménages
pour qu’ils puissent acheter les maisons construites en pagaille. La crise a
provoqué la faillite des entreprises et, le chômage et a poussé les ménages à
la ruine.
Pour la première fois depuis les vagues d’émigration de 60-70, le nombre
de personnes quittant l’Espagne est plus important que le nombre de ceux
qui y rentrent. On estime que pendant cette décennie un demi million de
personnes feront leurs valises et que 450 000 rejoindront le pays, ce calcul
ne tenant pas compte de ceux qui se déplacent dans l’espace Schengen. La
situation s’aggravant encore, cette perte de population pourrait être bien
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