Document 1 – Le principe libéral de la main invisible : « À la vérité, [l’intention d’un producteur], en général, n'est pas en cela de servir l'intérêt public, et il ne sait même pas jusqu'à quel point il peut être utile à la société. En préférant le succès de l'industrie nationale à celui de l'industrie étrangère, il ne pense qu'à se donner personnellement une plus grande sûreté ; et en dirigeant cette industrie de manière à ce que son produit ait le plus de valeur possible, il ne pense qu'à son propre gain ; en cela, comme dans beaucoup d'autres cas, il est conduit par une main invisible à remplir une fin qui n'entre nullement dans ses intentions ; et ce n'est pas toujours ce qu'il y a de plus mal pour la société, que cette fin n'entre pour rien dans ses intentions. Tout en ne cherchant que son intérêt personnel, il travaille souvent d'une manière bien plus efficace pour l'intérêt de la société, que s'il avait réellement pour but d'y travailler. Je n'ai jamais vu que ceux qui aspiraient, dans leurs entreprises de commerce, à travailler pour le bien général, aient fait beaucoup de bonnes choses. Il est vrai que cette belle passion n'est pas très commune parmi les marchands, et qu'il ne faudrait pas de longs discours pour les en guérir ». Adam Smith, Recherche sur la nature et les causes de la richesse des nations, 1776 « La vénalité est une vertu cardinale. L’homme vénal sait faire taire ses instincts meurtriers et asociaux – sentiments de l’honneur, amour-propre, patriotisme, ambition politique, fanatisme religieux, racisme – pour ne laisser parler que sa propension à la coopération, son goût des échanges fructueux, son sens de la solidarité humaine. Il faut prendre à la lettre l’expression l’âge d’or, et je vois bien que l’humanité y parviendrait vite si elle n’était menée que par des hommes vénaux. […] Les gras marchands de Venise nous donnent l’exemple du bonheur fastueux que connaît un Etat mené par la seule loi du lucre, tandis que les loups de l’Inquisition espagnole nous montre de quelles infamies sont capables des hommes qui ont perdu le goût des biens matériels. Les Huns se seraient vite arrêtés dans leur déferlement s’ils avaient su profiter des richesses qu’ils avaient conquises. Alourdis par leurs acquisitions, ils se seraient établis pour mieux en jouir et les choses auraient repris leur cours naturel. Mais c’étaient des brutes désintéressées. Ils méprisaient l’or. Et ils se ruaient en avant, brûlant tout sur leur passage » M. Tournier, Vendredi ou les limbes du Pacifique, 1967 Question 1 : Expliquer : A partir des deux textes, expliquez le principe de la main invisible. La phrase soulignée est là pour vous aider. Document 2 – La vision keynésienne du rôle de l’Etat : « L'élargissement des fonctions de l'État […] semblerait à un publiciste du XIX ème siècle ou à un financier américain d'aujourd'hui une horrible infraction aux principes individualistes. Cet élargissement nous apparaît au contraire et comme le seul moyen d'éviter une complète destruction des institutions économiques actuelles et comme la condition d'un heureux exercice de l'initiative individuelle. « Car, lorsque la demande effective est insuffisante, non seulement le gaspillage de ressources cause dans le public un scandale intolérable, mais encore l'individu entreprenant qui cherche à mettre ces ressources en oeuvre a trop peu de chances de son côté. Le jeu qu'il joue contient plusieurs zéros et les joueurs dans leur ensemble sont obligés de perdre s'ils ont assez d'énergie et de confiance pour donner toutes les cartes. […] Si la demande effective était suffisante, il suffirait au contraire pour réussir d'une chance et d'une habileté moyennes ». J. M. Keynes, Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie, 1936 Question 1 : Quel exemple donne Keynes pour montrer qu’un système économique connaît parfois des déséquilibres ? Question 2 : Parmi les différents leviers des pouvoirs publics que vous avez vus en Première, lesquels permettent de lutter contre le déséquilibre économique d’une demande effective insuffisante et d’un trop faible investissement. Document 3 – Rôle économique du financement public des infrastructures : « L’investissement dans les réseaux d’infrastructure est susceptible d’encourager la croissance économique de long terme dans les pays de l’OCDE. De surcroît, il peut avoir un effet positif sur la croissance qui va au-delà de l’effet du stock du capital en raison […] de l’existence d’externalités de réseaux et des effets bénéfiques sur la concurrence. Ce document, qui fait partie d'un projet sur les liens entre l'infrastructure et la croissance et le rôle des politiques publiques, présente les résultats sur les liens avec la croissance d'une variété de méthodes économétriques. Des résultats fondés sur [plusieurs études statistiques] indiquent que l’investissement dans les infrastructures a un effet positif sur la croissance économique ». Egert et al., « Infrastructure et croissance : évidence empirique » , Document de travail de l’OCDE n°685, 2009 « Fernald (1999) a analysé l’impact de la construction publique de routes sur la croissance de la productivité aux Etats-Unis. […] Il estime que cet investissement public a permis d’augmenter chaque année en moyenne de 1,4 point de pourcentage la croissance de la productivité de 1953 à 1973, et de 0,4 point de pourcentage après 1973 ». De la Fuente, « Infrastructures et productivité : un résumé actualisé », UFAE & IAE Working Paper, 2010 Question 1 : Dans quelle mesure les investissements publics dans l’infrastructure permettent-ils la croissance ? Document 4 – Rôle économique du financement public de la formation : Ministère de l’Education Nationale, L’état de l’Ecole, 2010 Question 1 : Quelle part des dépenses d’éducation est réalisée par les ménages français en 2009 ? Sans l’Etat, serait-il possible aux ménages français de financer l’intégralité des dépenses d’éducation et de développer ainsi le capital humain ? Document 5 – Le multiplicateur d’investissement : Soit une économie dans laquelle les pouvoirs publics investissent pour 100 euros de plus. Cet investissement se traduit en revenus, qui vont être dépensés par les ménages, dont la propension marginale à consommer est de 0,8 (c'est-à-dire que 80% du revenu supplémentaire est consacré à la consommation, et 20% à l’épargne). On a donc les évolutions suivantes (sans prise en compte de l’effet accélérateur qui augmente en théorie encore plus l’effet multiplicateur) : Etape ΔI ( ΔY) ΔY (ΔC+ ΔE) ΔC (ΔI période suivante) ΔE 100 80 20 1 100 d’I public 80 d’I privé 80 2 51,2 3 4 40,96 5 Question 1 : Remplissez l’ensemble du tableau. N’oubliez pas l’effet de la propension marginale à consommer. Question 2 : Calculez la somme totale d’augmentation du PIB sur ces 5 périodes et comparez-la à la dépense initiale. Peut-on dire qu’il y a bien eu une multiplication de l’investissement suite à cet investissement public initial ? Document 6 – La politique monétaire : « Pour stimuler l’investissement privé, la Banque Centrale peut, selon Keynes, agir sur le taux d’intérêt en offrant davantage de monnaie. [En effet], la politique monétaire doit accompagner la politique budgétaire car l’augmentation de la demande de monnaie due à la reprise risque d’élever le taux d’intérêt [des banques commerciales] et de réduire les investissements. [Une augmentation de la demande de monnaie en raison de difficultés financières – et non de reprise – peut également conduire à une augmentation du taux d’intérêt des banques commerciales si la Banque Centrale n’intervient pas] ». I. Waquet, Cahiers Français n°279, 1997 Question 1 : Pour quelles raisons la Banque Centrale peut-elle injecter de la monnaie (augmenter l’offre de monnaie) dans l’économie ? Quel est à chaque fois son objectif ? Document 7 - « L’inflation est partout et toujours un phénomène monétaire » (F. Hayek) : En 1995, G. McCandless et W. Weber ont mesuré pour 110 pays la croissance de la masse monétaire (axe des abscisses) et la croissance des prix (axe des ordonnées) sur la période allant de 1960 à 1990. On obtient alors la relation suivante. Sur le long terme (1960-1990), on constate que l’augmentation des prix correspond à l’augmentation de la masse monétaire injectée dans l’économie par la Banque Centrale. Source : G. McCandless & W. Weber, « Some Monetary Facts », Federal Reserve Bank of Minneapolis Quarterly Review, 1995 Document 9 – Les conséquences de l’émigration algérienne sur les communautés paysannes en Algérie « En dépit de l’acharnement que la communauté paysanne mettait à contrôler l’émigration de ses membres, elle ne pouvait en maîtriser toujours les conséquences, ni se garder éternellement contre ses effets désintégrateurs. Lors même que l’esprit paysan sur lequel reposait l’émigration n’aurait pas subi d’autres ‘‘agressions’’, à commencer par toutes celles qui résultaient du contact avec la société coloniale, et surtout de la généralisation des échanges monétaires, l’émigration aurait suffi à en provoquer la disparition. « En effet, inséparable de l’attachement à la terre et à la communauté paysanne et, par suite, inapte à surmonter une séparation prolongée, cette attitude à l’égard du monde et à l’égard des autres, qui est constitutive du paysan traditionnel, ne pouvait résister longtemps au déracinement. De plus, parce que l’émigration était source principale sinon exclusive des revenus monétaires qui circulaient en milieu rural, elle a contribué à diffuser plus largement l’esprit de calcul corrélatif à l’usage de la monnaie et, par toutes ses autres incidences économiques et sociales, à transformer la vie paysanne dont elle a modifié tout le style en modifiant notamment les dispositions à l’égard de l’économie. « Ajoutant ainsi ses effets propres à ceux des autres bouleversements, dont ceux-là mêmes qui avaient été à son origine et que, par un choc en retour, elle tend à renforcer, l’émigration a fini par avoir raison de l’esprit paysan qui animait et soutenait les premiers émigrés ». A. Sayad, « Les trois âges de l’émigration », La double absence, 1999 Question 1 : Décrire : Quelles sont les deux premières ‘‘agressions’’ qu’a subi l’esprit paysan algérien ? Question 2 : Décrire : Quelle a été la solution adoptée collectivement par les villages pour s’adapter à ce nouveau monde ? Question 3 : Analyser : Quel a été l’effet de l’émigration sur l’économie rurale algérienne ? Pourquoi ? Document 8 – Institutions et développement : Source : Acemoglu, Johnson & Robinson, « Les origines coloniales des différences de développement : une analyse empirique », American Economic Review, 2001. Le graphique met en relation le PIB/hab (mesuré en logarithme) en 1995 et le risque de ne pas être exproprié de 1985 à 1995 pour différents pays. Question 1 : Analyser : Quelle relation voyez-vous entre ces deux phénomènes ? Pourquoi à votre avis ?