anticorps antiprotéine SAA et anti-chaînes légères d’im-
munoglobulines, pourrait permettre d’évoquer plus le dia-
gnostic d’amylose de la transthyrétine sous toutes ses
formes.
Il faut ajouter qu’une autre difficulté vient du fait qu’à
l’âge de l’amylose AL, autour de 60 ans, la fréquence dans
la population générale d’une immunoglobuline monoclo-
nale de signification indéterminée est de l’ordre de 5 %, et
que son association à une amylose ne signifie pas ipso
facto que l’amylose est de nature immunoglobulinique.
Tout élément qui ne cadre pas avec le diagnostic
d’amylose AL doit être relevé et un autre diagnostic évo-
qué.
En marge de l’amylose de la transthyrétine, qui est de
loin la plus fréquente des formes héréditaires d’amylose de
transmission autosomique dominante, il existe plusieurs
autres variétés dont l’une au moins peut comporter une
cardiopathie amyloïde : l’amylose liée à des mutations de
l’apolipoprotéine AI [12].
En présence d’une amylose cardiaque, lorsqu’il n’y a
pas d’arguments ni pour une amylose AL ni pour une
amylose de la transthyrétine génétiquement déterminée,
on peut évoquer le diagnostic d’amylose cardiaque sénile,
dont les dépôts sont formés de transthyrétine sauvage.
Pronostic
L’atteinte cardiaque est le facteur pronostique majeur
des amyloses. Dans l’amylose AL, en présence d’une in-
suffisance cardiaque, la survie moyenne est nettement
plus courte (4 mois) qu’en son absence (16 mois) [13]. En
l’absence d’insuffisance cardiaque, les données échogra-
phiques et Doppler peuvent contribuer au pronostic, dont
l’indice de Tei, qui combine les intervalles de temps
systolique et diastolique [14]. Mais les marqueurs pronos-
tiques les plus intéressants sont biochimiques. Ainsi la
combinaison des mesures du N-terminal pro-brain natriu-
retic peptide (NT-proBNP) et des troponines cardiaques
cTnT et cTnI, constitue le plus puissant index pronostique
chez les malades atteints d’amylose AL [15, 16].
Traitement de l’amylose cardiaque
Traitement de la maladie amyloïde
Il est naturellement sous-tendu par la nature de l’amy-
lose. Une question préliminaire mérite toutefois d’être
posée auparavant : celle des mécanismes de toxicité des
dépôts amyloïdes sur les organes et tissus. La vision clas-
sique d’une maladie de surcharge « étouffant » les organes
massivement infiltrés par les dépôts amyloïdes ne peut
plus être retenue aussi simplement. Certains faits suggè-
rent que la toxicité des dépôts n’est pas proportionnée à
leur étendue. On peut légitimement déduire de ces don-
nées simples qu’il existe une sensibilité cellulaire variable
d’un tissu à l’autre et/ou que la toxicité est indépendante
des dépôts et qu’elle s’exerce alors par un autre méca-
nisme. Cette question, qui est au centre du débat sur les
mécanismes de la maladie d’Alzheimer et des autres mala-
dies avec agrégats intracellulaires du système nerveux
central, n’est soulevée que depuis peu pour les amyloses
multisystémiques. Plusieurs résultats suggèrent qu’ici ce
sont des oligomères de fibrilles ou des protofibrilles qui
seraient les effecteurs de la toxicité neuronale et pas les
dépôts amyloïdes qui seraient alors d’innocents agrégats.
Quelques travaux ont été d’ores et déjà été conduits sur les
mécanismes de la toxicité cellulaire des protéines impli-
quées dans les amyloses multisystémiques. Ainsi, les chaî-
nes légères d’immunoglobuline entraînent in vitro une
toxicité sur les cellules myocardiques [17].
Amylose AL
L’amylose AL est une maladie du plasmocyte qui pro-
duit des chaînes légères d’immunoglobulines monoclona-
les dotées d’une capacité d’autoagrégation, ici sous forme
d’amylose. Le traitement actuel de l’amylose AL repose
sur la réduction voire la suppression du clone plasmocy-
taire pourvoyeur de chaînes légères monoclonales amylo-
gènes. Ce principe comporte l’avantage de s’appliquer
quel que soit le mécanisme exact de la toxicité des chaînes
légères. C’est pourquoi le traitement de l’amylose AL est
calqué sur le traitement du myélome, dont il suit la pro-
gression vers des modalités de plus en plus puissantes.
L’association melphalan-prednisone, traitement histori-
que du myélome multiple, est utilisée depuis longtemps
dans l’amylose AL. Plusieurs études ont montré que ce
traitement pouvait entraîner, dans 20 % des cas, une ré-
ponse associée à une régression des signes cliniques de
l’atteinte de plusieurs organes, principalement le rein mais
aussi le foie et le cœur. Cependant, les résultats globaux
restent modestes comme l’a montré en 1997 l’étude de la
Mayo Clinic qui a comparé 3 traitements chez 220 mala-
des : colchicine, melphalan (0,15 mg/kg/j) et prednisone
(0,8 mg/kg/j) pendant 7 jours toutes les 6 semaines, et
l’association des trois médicaments. Les durées médianes
de survie ont été respectivement de 8,5, 18 et 17 mois. Ce
travail a aussi montré que la colchicine n’a pas d’intérêt
dans l’amylose AL [18]. En outre l’utilisation du melpha-
lan comporte un risque leucémogène non négligeable.
Compte tenu de ces résultats médiocres, un traitement
plus agressif du clone plasmocytaire par de fortes doses de
melphalan intraveineux, suivi d’une autogreffe de cellules
souches hématopoïétiques, a été proposé ces dernières
années. L’expérience acquise par l’équipe de Boston sug-
gère l’intérêt de cette stratégie, en même temps que ses
limites, en particulier une sélection des malades les moins
graves. Dans ce travail, 701 malades atteints
d’amylose AL ont été évalués, seuls 394 (56 %) ont été
sélectionnés pour un traitement intensif (melphalan 100 à
200 mg/m
2
) suivi d’autogreffe. Pour les 312 malades qui
ont finalement pu être traités, la médiane de survie a été de
Amylose cardiaque
mt cardio, vol. 2, n° 2, mars-avril 2006
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