¶ 15-860-A-10 Spondylodiscite infectieuse non tuberculeuse J.-J. Dubost, A. Tournadre, M. Soubrier, J.-M. Ristori La spondylodiscite est une infection du disque et des plateaux vertébraux adjacents qui résulte d’une dissémination hématogène ou de plus en plus souvent d’une inoculation directe par ponction ou chirurgie discale. Les germes en cause sont divers : staphylocoques (50 %), mais aussi bacilles à Gram négatif (30 %) et streptocoques. La porte d’entrée est souvent iatrogène et génito-urinaire. Elle s’observe à tout âge, mais surtout après 60 ans, et elle est favorisée par le diabète et l’immunosuppression. Elle se traduit par des rachialgies inflammatoires avec parfois des radiculalgies et un syndrome infectieux souvent atténué. Une augmentation de la vitesse de sédimentation et/ou de la protéine C-réactive a une grande valeur d’alerte. Quand les radiographies ne sont pas démonstratives, l’imagerie par résonance magnétique, très sensible et spécifique, s’impose en urgence. La ponction-biopsie discovertébrale est indispensable pour identifier le germe quand les hémocultures sont négatives. Sous antibiothérapie adaptée et immobilisation (alitement et/ou orthèse d’immobilisation), l’évolution est favorable. Déficit neurologique et déformation rachidienne résultent habituellement d’un retard diagnostique. © 2006 Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Spondylodiscite infectieuse ; Infection ostéoarticulaire ; Rachis ; IRM Plan ¶ Introduction 1 ¶ Fréquence. Facteurs favorisants 1 ¶ Physiopathologie 2 ¶ Bactériologie 2 ¶ Signes cliniques Syndrome rachidien Syndrome infectieux Expression des spondylodiscites Présence d’une autre localisation infectieuse Recherche d’une porte d’entrée 2 2 3 3 3 3 ¶ Imagerie Radiographies Imagerie par résonance magnétique Scanner Scintigraphie 3 3 4 4 4 ¶ Enquête bactériologique Hémocultures Ponction-biopsie discovertébrale Spondylodiscites sans germe 5 5 5 6 ¶ Diagnostic différentiel Rachialgies au premier plan Tableau de rachialgies fébriles IRM avec anomalies discovertébrales Éliminer une tuberculose est souvent difficile 6 6 6 7 8 ¶ Forme clinique Selon le germe Spondylodiscites de l’enfant Spondylodiscites par inoculation iatrogène 8 8 8 9 ¶ Traitement et évolution Antibiothérapie Immobilisation Chirurgie Pronostic 9 9 10 10 10 ■ Introduction Une spondylodiscite infectieuse (vertebral osteomyelitis) est une infection du disque intervertébral et des plateaux vertébraux adjacents par un micro-organisme vivant. Le plus souvent, l’infection est hématogène. Exceptionnellement, elle résulte d’une diffusion par contiguïté à partir d’un foyer de voisinage. De plus en plus souvent, la spondylodiscite est la conséquence d’une inoculation directe par ponction ou geste chirurgical. Ces spondylodiscites iatrogènes posent des problèmes diagnostiques spécifiques et les germes en cause sont particuliers. Elles sont étudiées à part. Dans les pays développés, la tuberculose est devenue rare. Elle est exclue de cette étude mais, les spondylodiscites non tuberculeuses ayant souvent une présentation subaiguë ou chronique, elle reste un diagnostic différentiel important. La brucellose, fréquente dans certains pays mais devenue exceptionnelle en France, est également étudiée à part. Quand les radiographies ne sont pas démonstratives, l’imagerie par résonance magnétique (IRM) est devenue incontournable. Elle est très sensible, mais elle fait émerger de nouveaux diagnostics différentiels. L’identification du germe par hémoculture et ponctionbiopsie discovertébrale est la clé du diagnostic et est un élément essentiel du succès thérapeutique. ■ Fréquence. Facteurs favorisants Les spondylodiscites non tuberculeuses hématogènes sont rares. En Europe, l’incidence est estimée entre deux et 12 par an Appareil locomoteur 1 15-860-A-10 ¶ Spondylodiscite infectieuse non tuberculeuse Tableau 1. Fréquence des germes à l’origine des spondylodiscites hématogènes et par inoculation directe à germe identifié (brucellose exclue). Spondylodiscite hématogène étrangère n = 389 Spondylodiscite hématogène française n = 179 Enquête de la SFR (1980) n = 238 Spondylodiscite par inoculation n = 119 Staphylococcus 56 40 50 81 aureus 78 - - 46 Streptocoque 19 22 13 4 Bacille Gram négatif 20 34 37 7 Colibacille 53 61 46 13 Pseudomonas 20 - 15 60 Résultats en %. ■ Bactériologie et par million d’habitants [1-3] ; elle est de cinq par an et par million dans une étude épidémiologique danoise [1] menée entre 1972 et 1982. Les services de rhumatologie français [4-7] (Poitiers, Angers, Reims, Clermont-Ferrand, Lille) observent de quatre à dix cas par an. Entre 1983 et 1990, 8,5 patients par an en moyenne ont été hospitalisés dans les différents services du CHU de Tours [8] . Dans l’enquête nationale de la Société française de rhumatologie (SFR) [9] menée en 1980, les spondylodiscites sont deux fois moins fréquentes que les arthrites septiques. Nous observons la même proportion (68/202) pour des patients hospitalisés entre 1992 et 2004 pour une infection hématogène bactériologiquement documentée hors prothèse. Les spondylodiscites s’observent à tout âge, mais principalement chez le sujet âgé. Environ 60 % des patients ont plus de 60 ans, et l’incidence est maximale entre 60 et 80 ans. Il existe une prédominance masculine (60 %). Un terrain débilité est présent dans le tiers à la moitié des cas chez l’adulte. Le diabète (environ 20 %) est un facteur de risque constamment retrouvé dans les études. Dans l’étude danoise [1], le risque relatif est de 5,7 pour le diabète insulinodépendant. Néoplasie (8 %), cirrhose, insuffisance rénale sont régulièrement notées. Dans l’étude danoise [1], l’alcoolisme n’apparaît pas comme un facteur de risque important. L’utilisation de drogues illicites par voie intraveineuse est fréquente dans certaines séries américaines (jusqu’à 25 %) [10]. La fréquence des bacilles à Gram négatif, et notamment de Pseudomonas, y est remarquable [11]. En Europe, la fréquence est bien moindre. Elle n’apparaît pas comme facteur de risque dans l’étude danoise [1] et, de plus, les spondylodiscites représentent moins de 8 % des infections ostéoarticulaires. L’infection par le virus de l’immunodéficience humaine n’apparaît pas comme un facteur de risque significatif. Dans les spondylodiscites hématogènes [2, 3, 7, 10, 12-16], la prédominance des staphylocoques est moins importante que dans les arthrites septiques (Tableau 1). Ils sont en cause dans environ la moitié des spondylodiscites à germes identifiés et même dans 40 % dans les séries récentes [12]. Staphylococcus aureus est fortement majoritaire. La fréquence des staphylocoques coagulase négatifs est diversement appréciée, de 8 à 30 % des staphylocoques selon les séries [10, 12, 13]. Ils posent régulièrement des problèmes d’imputabilité car il est difficile d’exclure une contamination, ce qui peut conduire à une surestimation ou, à l’inverse, une sous-estimation quand il est négligé à tort. La fréquence des staphylocoques méti-R est de 4 % pour Nolla et al. [12], 18 % pour Hadjipavlou et al. [10], mais cette dernière série compte plus de 30 % de staphylocoques coagulase négatifs. Les bacilles à Gram négatif, sans compter la brucellose, viennent en deuxième place. Ils représentent un tiers des spondylodiscites hématogènes à germe identifié et sont trois fois plus fréquents que dans les arthrites septiques. Près de la moitié sont des colibacilles, qui sont particulièrement fréquents chez le sujet âgé [17]. Pseudomonas est retrouvé dans 15 à 20 % des cas. Les autres germes (Proteus, Klebsiella, Serratia, salmonelle, entérobactérie, Haemophilus ...) sont très divers. Un streptocoque est isolé dans environ 20 % des spondylodiscites hématogènes à germe identifié. Les streptocoques dépourvus d’antigènes spécifiques de groupe, ou viridens, ou alphahémolytiques (sanguis, salivarius, constellatus, oralis, mitis ...) représentent la moitié des streptocoques. Un quart sont des streptocoques B et leur fréquence est en augmentation. Les streptocoques D (bovis) doivent faire rechercher un cancer du côlon. Les entérocoques, phylogénétiquement distincts, ne sont plus inclus dans les streptocoques. Les streptocoques A sont exceptionnels. Un pneumocoque est retrouvé occasionnellement (5 % des streptocoques). Dans l’enquête multicentrique de la SFR [9] en 1980, aucun germe n’a été identifié dans près de la moitié des spondylodiscites. La situation s’est améliorée et, dans les séries actuelles, la fréquence des spondylodiscites hématogènes non brucelliennes sans germe retrouvé est de 15 à 20 %. ■ Physiopathologie La spondylodiscite primitive est la conséquence d’une dissémination hématogène. Le disque n’étant pas vascularisé chez l’adulte, la spondylodiscite est d’abord une spondylite. L’infection naît du plateau vertébral où s’arborisent les artérioles nourricières. L’embole septique provoque thrombose et prolifération bactérienne typiquement dans la région sous-chondrale antérieure. L’infection s’étend ensuite au disque intervertébral puis à la vertèbre adjacente. Elle diffuse dans l’anneau fibreux, à la surface des vertèbres, sous les ligaments paravertébraux pour gagner l’espace épidural et les tissus mous. Chez le jeune enfant, les artérioles perforent les plateaux vertébraux et entrent dans le disque. À cet âge, l’infection peut donc être primitivement discale. Une vascularisation secondaire peut se développer lors de la dégénérescence discale et une dissémination hématogène directe du disque pourrait aussi survenir dans ces cas. Les veinules se collectent dans la veine basivertébrale qui émerge au centre de la partie postérieure du corps vertébral et se jette dans les plexus veineux extraduraux connectés avec le réseau antérieur et latéral. L’ensemble constitue le plexus de Batson. Comme il est largement dépourvu de valves, une dissémination rétrograde par voie veineuse a été évoquée pour expliquer la grande fréquence des spondylodiscites d’origine génito-urinaire. L’importance de ce mode de contamination reste cependant incertain. 2 ■ Signes cliniques La spondylodiscite se manifeste par un syndrome rachidien constant et un syndrome infectieux d’intensité très variable. Syndrome rachidien . Les spondylodiscites hématogènes affectent le rachis lombaire dans près des deux tiers des cas et tous les étages sont concernés. Plus du tiers concerne le rachis dorsal, surtout dans sa partie moyenne et basse, rarement au-dessus de D4-D5. Un peu moins de 10 % affecte le rachis cervical surtout inférieur, très rarement au-dessus de C3-C4. De 10 à 15 % des patients ont plusieurs localisations sur des disques adjacents ou à distance. Ces autres localisations sont souvent peu ou non symptomatiques, et découvertes à l’IRM. Les douleurs rachidiennes segmentaires sont constantes, sauf quand le patient n’est pas capable de les exprimer (coma, démence). Elles peuvent être mal interprétées quand l’irradiation (thoracique ou à l’épaule) est au premier plan. Elles Appareil locomoteur Spondylodiscite infectieuse non tuberculeuse ¶ 15-860-A-10 fréquence croissante des portes d’entrée iatrogènes, qui représentent de 15 à 20 % des spondylodiscites hématogènes dans les séries françaises et le tiers des cas dans la série de Carragee [13]. Un geste urinaire ou prostatique vient en première place : biopsie de prostate, résection transurétrale, cystoscopie, sonde urinaire ... La fréquence est très variable d’une série à l’autre : moins de 5 % dans les séries françaises, elle atteint 13 % dans l’étude épidémiologique danoise [1] et 33 % dans la série de Carragee [13]. Ces différences s’expliquent probablement par le recrutement et l’utilisation plus ou moins systématique d’une antibioprophylaxie. Les autres portes d’entrée iatrogènes sont très diverses : angiographie ; cathéter veineux ; chirurgie viscérale, cardiaque, vasculaire, orthopédique ; extraction dentaire ... Il faut rechercher avec soin dans les semaines et les mois précédents une intervention chirurgicale, instrumentale, endoscopique, la mise en place d’une voie veineuse, des soins dentaires. Parfois, une infection a été documentée, mais insuffisamment traitée, et la spondylodiscite décapitée par les antibiotiques prend une évolution torpide. peuvent être brutales, et mimer un torticolis ou un lumbago. Plus souvent, elles sont d’apparition progressive et insidieuse. Elles sont aggravées par l’activité, mal calmées par le repos, et ce caractère inflammatoire est noté dans plus de trois quarts des cas. Elles sont surtout tenaces, d’aggravation progressive et rebelles au traitement. L’examen peut retrouver une douleur à la pression d’une épineuse. Il montre surtout une importante raideur rachidienne. Des signes neurologiques sont présents dans environ un tiers des cas. Ils sont l’expression d’une radiculalgie crurale, sciatique, intercostale ou cervicobrachiale selon la localisation. Des signes de compression médullaire ou un syndrome de la queue-decheval sont présents dans environ 10 % des cas, avec une fréquence variable selon les séries en fonction du recrutement. Le plus souvent, c’est une fatigabilité des membres inférieurs, une instabilité avec des signes d’irritation pyramidale et des troubles sphinctériens. Deux à trois pour-cent des patients ont une paraplégie, davantage dans les séries chirurgicales [10, 13]. Syndrome infectieux Il est parfois au premier plan : fièvre élevée, frissons, malaises témoignent d’une septicémie. Plus souvent, il est atténué et la fièvre manque dans un tiers des cas. Il faut rechercher des accès fébriles dans les jours ou les semaines précédents, parfois avant l’apparition des rachialgies. L’hyperleucocytose manque plus de deux fois sur trois, mais le syndrome inflammatoire est habituellement important. La vitesse de sédimentation (VS) est à 80 mm à la première heure en moyenne. “ ■ Imagerie Lorsque les radiographies ne sont pas démonstratives, l’IRM, qui est devenue l’examen clé, s’impose en urgence. Radiographies . Point fort L’augmentation de la VS n’a aucune spécificité, mais c’est un signe d’alerte très important qui indique que la rachialgie n’est pas banale et qu’il faut poursuivre les investigations. Les signes apparaissent après un délai de 2 à 3 semaines, parfois plus, jusqu’à 2 mois. Au moment du diagnostic, les radiographies devraient être normales ou ne montrer que des lésions dégénérative. Ce n’est pourtant le cas que chez 10 à 15 % des patients, ce qui traduit l’importance du retard diagnostique. L’accès plus facile à l’IRM permet des progrès et, dans les séries récentes comme celles de Hopkinson et al. [2] (1996-1999), il n’y a que 30 % des patients qui ont des signes radiologiques évocateurs de spondylodiscite au bilan initial. Les radiographies doivent être d’excellente qualité et surtout récentes. “ La VS est cependant normale dans 5 à 10 % des cas et, pour Meys et al. [7], la protéine C-réactive (CRP) est inférieure à 20 mg/l dans plus de 15 % des cas. La procalcitonine serait un meilleur marqueur d’infection bactérienne, mais ses performances diagnostiques sont insuffisantes. Point fort La rapidité des modifications radiologiques est un argument essentiel pour l’infection et, même si les radiographies ne datent que de quelques jours, elles doivent être répétées. Expression des spondylodiscites Elle est donc très variable. La présentation est parfois bruyante et évocatrice, quand les rachialgies s’associent à des signes infectieux francs d’allure septicémique. Ailleurs, le tableau est subaigu ou chronique. On conçoit que le délai diagnostique soit variable, mais parfois important (40 jours en moyenne) : il est inférieur à 15 jours dans un tiers des cas, mais supérieur à 6 semaines dans un tiers des cas ; il peut atteindre de 3 à 6 mois et même plus. Le délai s’améliore avec la disponibilité de l’IRM et, dans une série récente [13], le diagnostic a été fait en moins de 1 semaine dans un quart des cas. . Présence d’une autre localisation infectieuse . La présence d’une autre localisation infectieuse, arthrite (particulièrement fréquente avec le streptocoque B), abcès cutané..., aide le diagnostic. Il faut rechercher attentivement une endocardite présente dans 2 à 5 % des spondylodiscites hématogènes. . Recherche d’une porte d’entrée Elle est indispensable. Sa découverte est un argument pour l’infection et elle fournit des indications sur le germe en cause. La porte d’entrée est le plus souvent urinaire (20 %) ; moins souvent, elle est présumée pulmonaire, oto-rhino-laryngologique (ORL), cutanée ou digestive. Il faut insister sur la Appareil locomoteur . Le premier signe qui attire l’attention est souvent le pincement discal. Il s’apprécie au mieux par comparaison aux disques sus- ou sous-jacents et par comparaison aux clichés antérieurs. Il est peu spécifique, sauf s’il s’est constitué rapidement en quelques jours ou semaines. Les remaniements des plateaux vertébraux sont beaucoup plus évocateurs. Une déminéralisation sous-chondrale donnant un aspect effacé et flou est en fait le premier signe. Il est le plus souvent antérieur sur un plateau (le plus souvent supérieur) puis les deux. Des érosions à bord flou gagnent l’ensemble des deux plateaux adjacents aux disques affaissés (Fig. 1). L’apparition d’un fuseau vertébral finit de caractériser l’aspect typique de spondylodiscite. Le fuseau est la conséquence d’un abcès ou d’un épaississement des parties molles. Il se voit surtout au rachis dorsal sur le cliché de face. L’image est plus fréquente dans la tuberculose, mais n’est en rien spécifique de ce germe. Le fuseau n’est pas non plus spécifique de l’origine infectieuse et peut se voir dans des atteintes tumorales, et nous l’avons même observé dans le syndrome SAPHO (synovite, acné, pustulose, hyperostose par ostéite). Au rachis cervical, l’épaississement des parties molles se voit en prévertébral sur le cliché de profil. Parfois, les lésions restent localisées à une partie seulement du disque ou à un coin de vertèbre sous forme d’une ostéolyse, et elles sont alors difficiles à différencier d’un processus tumoral. Dans les formes évoluées, l’ostéolyse vertébrale en miroir devient majeure, à 3 15-860-A-10 ¶ Spondylodiscite infectieuse non tuberculeuse Figure 1. Spondylodiscite C5-C6 à staphylocoque chez un homme de 55 ans. A. Radiographie initiale. Pincement discal et érosion du plateau. B. À 2 mois, signes de reconstruction avec ostéosclérose des plateaux et production ostéophytique antérieure. l’origine d’angulation en cyphose. Des signes de reconstruction, condensation, production osseuse paravertébrale ostéophytique d’importance variable peuvent apparaître après 8 semaines. . Imagerie par résonance magnétique [18-23] “ Point fort Scanner L’IRM est l’examen le plus performant pour le diagnostic de spondylodiscite. . Dès que le diagnostic est suspecté, si les radiographies ne sont pas démonstratives, l’IRM est indiquée en urgence. La sensibilité est excellente, supérieure à 95 % [18]. C’est dire qu’une IRM normale exclut le diagnostic, sauf à un stade débutant. La spécificité est aussi bonne, estimée à plus de 90 % [18]. Cependant, au début, l’interprétation des signes peut prêter à discussion. Au minimum, l’exploration doit comporter des séquences pondérées en T1, sans et avec injection de produit de contraste, et des séquences pondérées en T2. Des séquences en suppression de graisse sont souvent utiles. L’aspect typique de spondylodiscite associe anomalie des vertèbres, du disque et des parties molles (Fig. 2). Cependant, aucun signe pris isolément n’est totalement spécifique. L’œdème des vertèbres de part et d’autre du disque se manifeste par une plage étendue (plus des deux tiers des vertèbres dans les trois quarts des cas) en hyposignal T1 rehaussé par les produits de contraste et en hypersignal T2 (mieux individualisé sur les séquences en suppression de graisse). La ligne d’hyposignal des plateaux vertébraux est effacée, avec une perte de la limite disque-vertèbre. Au stade initial, une seule vertèbre peut être pathologique (la supérieure) et le foyer seulement vu sur des clichés en suppression de graisse. Les érosions et les destructions du plateau sont mieux vues en séquence T1 après injection. Ils sont évocateurs, mais absents au stade initial. Le disque est en hypersignal T2 typiquement aussi intense que le liquide céphalorachidien. Cet aspect caractéristique manque rarement, sauf au stade initial. La disparition de la fente nucléaire est aussi caractéristique, mais le signe est rarement évaluable au rachis cervical ou dorsal. En T1, le disque est en hypo- ou isosignal, et il est presque toujours rehaussé par le produit de contraste. Le pincement du disque est inconstant et dépend de l’ancienneté. Parfois, il peut même être élargi du fait de la présence d’un abcès dans le disque. L’inflammation des parties molles est caractéristique. Elle s’observe sur tout le pourtour du disque et en paraspinal, épidural, avec une extension latérale ou craniocaudale qui peut 4 être importante. Au début, elle peut se résumer à un décollement du ligament vertébral commun antérieur [20]. La séquence en suppression de graisse avec injection de produit de contraste est la technique de choix pour identifier et délimiter les abcès. L’IRM a aussi l’avantage de bien visualiser le canal rachidien et d’évaluer le risque de compression médullaire. Des localisations multiples d’âges différents ne sont pas exceptionnelles et ne doivent pas faire écarter le diagnostic d’infection. . Le scanner est beaucoup moins informatif que l’IRM et n’est plus indiqué pour le diagnostic d’une spondylodiscite. Quand il est normal ou ne montre que des manifestations dégénératives, il peut rassurer à tort et retarder le diagnostic [24]. Les coupes transverses sont mal adaptées à l’étude des plateaux vertébraux. Les appareils actuels permettent de multiples coupes minces, et une reconstruction dans le plan sagittal et frontal de bonne qualité. Le scanner est d’abord normal. L’hypodensité discale et l’effacement de la graisse paravertébrale avec un feutrage périvertébral sont précoces et évocateurs. En fait, l’hypodensité discale n’est ni spécifique ni précoce [20]. Il montre des érosions des plateaux, l’ostéolyse, les séquestres puis la condensation. Par rapport aux radiographies, il a l’avantage de bien montrer l’atteinte des parties molles avec une prise de contraste diffuse (granulome) ou périphérique (abcès). L’atteinte épidurale et ses conséquences neurologiques sont moins bien appréciées qu’avec l’IRM. Le scanner est surtout très utile pour guider ponction et biopsie avec beaucoup de précision et de sécurité. Scintigraphie La scintigraphie osseuse au diphosphonate marqué par le technétium était très utilisée avant que l’IRM ne soit disponible. La sensibilité est excellente, environ 95 %. L’hyperfixation est précoce ; elle apparaît de 24 à 48 heures après la douleur et de 1 à 3 semaines avant les signes radiologiques ; dans des observations privilégiées, elle a même précédé les anomalies IRM. La fixation est intense et affecte deux vertèbres contiguës. Elle est évocatrice quand deux bandes limitées d’hyperfixation des plateaux sont séparées par l’hypofixation discale. La spécificité est médiocre en présence d’anomalie osseuse ou dégénérative préexistante, donc chez le sujet âgé, mais sa valeur localisatrice est grande. Pour pallier le manque de spécificité, d’autres traceurs sont proposés. Le citrate de gallium est le plus répandu. Les performances sont bonnes pour la détection d’une inflammation. Du fait d’une mauvaise résolution, elle est habituellement couplée à la scintigraphie osseuse. Les immunoglobulines marquées, ou les anticorps antigranuleux, ou la ciprofloxacine marquée, manquent de spécificité et la scintigraphie aux leucocytes marquée s’est montrée décevante dans l’exploration des spondylodiscites. L’administration de streptavidine, qui s’accumule dans les foyers inflammatoires et infectieux, suivie d’une Appareil locomoteur Spondylodiscite infectieuse non tuberculeuse ¶ 15-860-A-10 Figure 2. Spondylodiscite L3-L4 à colibacille chez une femme de 76 ans. A. Imagerie par résonance magnétique séquence T1 : hyposignal de l’ensemble du disque et des corps vertébraux L3 et L4. B. Après injection de gadolinium, réapparition du signal vertébral avec épaississement des parties molles antérieures et épidurite refoulant le fourreau dural. Pincement du disque. Érosion des plateaux avec destruction du plateau inférieur. C. En séquence T2 avec suppression de graisse, hypersignal des corps vertébraux du disque avec épaississement des parties molles antérieures. . scintigraphie à la biotine marquée à l’indium, qui a une forte affinité pour la streptavidine, a montré des performances diagnostiques supérieures à l’IRM dans des spondylodiscites dont les signes dataient de moins de 15 jours [25]. Ces résultats doivent être confirmés. La tomographie à émission de positons utilisant le 18 fluorodésoxyglucose (18 FDG) couplée au scanner (PET-Scan) qui détecte une augmentation du métabolisme énergétique est très performante pour la détection des foyers néoplasiques. L’examen l’est aussi pour la détection de foyers infectieux et notamment des spondylodiscites [26, 27] quand une tumeur a été exclue. Cela signifie aussi que la découverte d’un foyer rachidien chez un patient atteint d’une néoplasie ne traduit pas systématiquement une métastase, mais peut être dû à une spondylodiscite comme nous l’avons observé récemment. Pour le moment, l’indication des scintigraphies se limite aux insuffisances de l’IRM, parce qu’elle est négative ou ambiguë, parce que la symptomatologie est très récente ou bien parce qu’elle est contre-indiquée (pace-maker, patient agité...). La scintigraphie osseuse est très sensible et a une grande valeur localisatrice. Les autres techniques ont surtout pour but d’améliorer la spécificité. ■ Enquête bactériologique L’identification du germe est cruciale pour le succès thérapeutique. Rarement, la situation est urgente parce qu’il y a une septicémie menaçante, une autre localisation grave (endocardite, méningite ...) ou parce qu’il y a un risque neurologique du fait d’une épidurite ou d’un abcès. Dans la majorité des cas, et plus encore que dans les arthrites septiques, on dispose d’un délai de quelques heures ou de quelques jours pour faire les prélèvements bactériologiques, essentiellement hémocultures et ponction-biopsie discovertébrale. Hémocultures Elles doivent être systématiques et multiples, même en l’absence de fièvre. Il faut aussi les faire au décours de la Appareil locomoteur “ Point essentiel Les prélèvements bactériologiques doivent être faits avant toute antibiothérapie. ponction-biopsie vertébrale. Celles-ci peuvent être positives alors que le prélèvement vertébral ne l’est pas ou elles peuvent conforter la responsabilité d’un germe saprophyte isolé par la ponction-biopsie [28]. Dans les séries récentes de spondylodiscite hématogène, les hémocultures sont positives dans plus de la moitié des cas. Plusieurs hémocultures positives ou l’identification d’un germe clairement pathogène (Staphylococcus aureus, streptocoque) en présence d’une image caractéristique de spondylodiscite à la radiographie ou en IRM permet de se dispenser de la ponction-biopsie vertébrale. Il en est de même si on isole un germe pathogène dans un foyer fermé comme un épanchement articulaire. Ponction-biopsie discovertébrale Elle doit être systématique quand les hémocultures sont négatives. Tous les étages sont accessibles. La ponction est un geste simple qui peut être réalisé sous anesthésie locale et qui est bien toléré, même chez les patients à l’état général précaire. La biopsie discovertébrale à l’aiguille est un peu plus douloureuse et est souvent faite sous anesthésie locale et neuroleptanalgésie. Elle a l’avantage de permettre un examen histologique dont l’intérêt est cependant limité dans les spondylodiscites hématogènes. Pour Fouquet et al. [8], la présence d’un infiltrat inflammatoire a une sensibilité de 77 % et une spécificité de 87 % pour le diagnostic de spondylodiscite hématogène. Il pourrait être utile pour identifier des germes difficiles à cultiver ou pour les mycoses [29], et surtout pour affirmer le diagnostic de spondylodiscite infectieuse quand la bactériologie est 5 15-860-A-10 ¶ Spondylodiscite infectieuse non tuberculeuse négative. En fait, le principal intérêt est le diagnostic histologique rapide de la tuberculose. Le prélèvement peut se faire sous contrôle scopique ou avec un repérage par le scanner. Ce dernier permet de mieux guider le prélèvement sur les collections ou les zones vertébrales pathologiques. Il apporte aussi plus de sécurité, notamment aux étages dorsal et cervical. Des complications (hémorragie, pneumothorax, complications neurologiques) sont exceptionnelles. Le matériel discal ou d’abcès est aspiré, puis une seringue de sérum physiologique est injectée puis réaspirée. Le prélèvement est recueilli sur flacon stérile pour l’examen direct et la mise en culture. Une partie doit être ensemencée immédiatement dans des flacons d’hémoculture aérobie et anaérobie, ou dans des flacons d’hémoculture pédiatrique quand l’échantillon est faible [30]. Ce procédé a l’avantage de limiter l’effet des inhibiteurs physiologiques et des antibiotiques grâce à la dilution dans un milieu liquide et la captation par des résines. Certains systèmes contiennent des agents lytiques qui permettent de relarguer les bactéries phagocytées. Son intérêt est bien démontré dans les arthrites septiques, notamment pour les germes à croissance lente ou difficile, quand la charge bactérienne est faible ou si le patient a reçu des antibiotiques [31]. Dans les séries récentes de spondylodiscite hématogène, le prélèvement discovertébral à l’aiguille permet d’identifier le germe dans 50 à 60 % des cas en moyenne, avec des divergences qui tiennent en partie au recrutement et aux indications. L’amplification de matériel génomique bactérien (acide désoxyribonucléique universel ribosomal 16S) par polymerase chain reaction (PCR) suscite des espoirs pour améliorer ces performances. La technique ne nécessite qu’un très faible échantillon (50 µl peuvent suffire), elle est très sensible, elle est utilisable quand la charge bactérienne est faible ou quand le patient a reçu des antibiotiques même plusieurs jours ou semaines auparavant et elle permet l’identification d’agents infectieux difficiles à cultiver. Dans une étude récente [30] de 19 spondylodiscites à hémoculture négative et non préalablement traitées par antibiotique, l’amplification génique a permis l’identification du germe dans tous les cas alors qu’elle n’était positive par méthode microbiologique que dans 74 % des cas. La technique nécessite des précautions d’asepsie draconiennes aux cours des prélèvements et pendant toute la procédure pour éviter les faux positifs. Dans les arthrites septiques, l’utilisation systématique s’est montrée décevante dans une série [32] et des études supplémentaires sont nécessaires avant de recommander son utilisation systématique. • • • • • ■ Diagnostic différentiel Le diagnostic différentiel se pose différemment selon les situations. L’IRM est souvent au cœur de la discussion, que ce soit pour son indication ou son interprétation. Rachialgies au premier plan Les spondylodiscites sont rares et elles représentent moins de 0,01 % des consultations pour lombalgies en médecine générale [24]. Il faut donc rechercher des signes d’alerte (red flags) pour dépister les patients susceptibles d’avoir une maladie grave [24, 33]. L’existence de lombalgies rebelles, d’aggravation progressive, surtout nocturnes ou non calmées par le repos, ou de dorsalgies, ou de signes d’altération de l’état général doivent conduire à des investigations, surtout chez un patient de plus de 50 ans, ou sous corticoïde, ou toxicomane. Des signes infectieux récents ou une fièvre ont une bonne valeur d’orientation pour une spondylodiscite. La fièvre multiplie le risque par 26, mais son absence ne le diminue que de moitié [24]. Une hyperleucocytose et un syndrome inflammatoire (VS, CRP) ont une grande valeur d’alerte. Des radiographies normales ou ne montrant qu’une pathologie dégénérative banale ne doivent pas rassurer et l’IRM s’impose (Fig. 3). Tableau de rachialgies fébriles Une spondylodiscite est immédiatement évoquée, mais d’autres maladies infectieuses ou non sont possibles, surtout quand l’IRM est normale. Endocardite L’adage selon lequel toute lombalgie fébrile doit faire rechercher une endocardite reste pertinent. Les rachialgies traduisent une spondylodiscite qui est présente dans 15 % des endocardites dans une étude récente [34]. Beaucoup plus souvent, les lombalgies restent inexpliquées mais sont souvent attribuées à des emboles bactériens vertébraux rapidement guéris par le traitement de l’endocardite. Spondylodiscites sans germe Quand les hémocultures et la ponction-biopsie discovertébrale sont négatives, on ne sait pas s’il s’agit d’une spondylodiscite infectieuse décapitée par une antibiothérapie ou à germe difficile à cultiver, ou bien si l’atteinte discovertébrale n’est pas infectieuse. La conduite à tenir est difficile. Il faut : • rediscuter les diagnostics différentiels : spondylodiscite tuberculeuse ; spondylodiscite inflammatoire ; discarthrose érosive ... ; • envisager de refaire la ponction-biopsie discovertébrale ; dans l’expérience de Friedman et al. [15], une deuxième ponctionbiopsie fait passer le taux de succès de 50 à 80 % ; • discuter une biopsie chirurgicale ; elle est parfois réalisée par certains centres ; elle serait plus performante en cas de mycose [29] ; la majorité des équipes, notamment françaises, ne la font plus en première intention car elle est considérée comme plus traumatisante et pas plus performante que la ponction-biopsie à l’aiguille ; pour beaucoup, elle ne se discute qu’en cas d’échec d’une antibiothérapie empirique ; • envisager une antibiothérapie empirique. En l’absence de germe identifié, le choix des antibiotiques est fonction d’un diagnostic bactériologique probabiliste fondé sur : • la recherche de tous les documents bactériologiques concernant le patient dans les semaines et les mois précédents ; il n’est pas exceptionnel de découvrir des hémocultures positives lors d’une hospitalisation précédente dans un autre 6 service ; on doit aussi tenir compte d’examens cytobactériologiques des urines ou d’autres prélèvements, même si l’imputabilité est plus hypothétique ; la fréquence théorique des germes à l’origine de spondylodiscite, qui est encore plus diverse que pour les arthrites septiques, avec une grande fréquence des bacilles à Gram négatif (Tableau 1) ; le lieu où le patient a contracté l’infection : domicile, hôpital ou service de réanimation, et l’on peut s’attendre à des germes multirésistants ; la porte d’entrée : urinaire (bacille à Gram négatif), cathéter (staphylocoque), pulmonaire, ORL (streptocoque), cutanée (staphylocoque) ; le terrain : toxicomane (Staphylococcus aureus, Pseudomonas) ; les signes associés : endocardite, cutanés, pulmonaires. Épidurite infectieuse primitive . . Elle constitue une grande urgence médicochirurgicale. Elle est 50 fois moins fréquente que les spondylodiscites [10] . Elle concerne tous les étages et Staphylococcus aureus est en cause dans les trois quarts des cas. Typiquement, la symptomatologie débute par des rachialgies rapidement très intenses avec syndrome infectieux, fièvre, syndrome inflammatoire et hyperleucocytose. Des radiculalgies apparaissent en 2 à 3 jours, puis un déficit moteur avec troubles sphinctériens, et en quelques jours ou quelques heures survient une paralysie complète et définitive [35]. Dès que le diagnostic est soupçonné, l’IRM avec injection de produit de contraste s’impose immédiatement. Elle montre les collections épidurales, précise l’extension craniocaudale et le retentissement sur les structures neurologiques. Infection vertébrale et paravertébrale sans discite L’arthrite septique des articulaires postérieurs est aussi très rare (de un à quatre pour 100 spondylodiscites). Elle donne un tableau indiscernable des spondylodiscites. Le diagnostic est fait Appareil locomoteur Spondylodiscite infectieuse non tuberculeuse ¶ 15-860-A-10 Éliminer l'urgence - Choc toxi-infectieux - Autre localisation (endocardite, méningite) - Déficit neurologique Syndrome rachidien + syndrome infectieux (fièvre et/ou ➚ de la CRP) Penser - Épidurite infectieuse - Endocardite Figure 3. Arbre décisionnel. CRP : protéine C-réactive ; IRM : imagerie par résonance magnétique ; PBDV : ponctionbiopsie du disque vertébral ; BK : bacille de Koch. Radiographie (-) ou (±) IRM (+) (-) (+) Hémocultures Diagnostic différentiel (-) (+) Ponction-biopsie vertébrale (PBDV) (+) (-) - Diagnostic différentiel - Nouvelle PBDV - Biopsie chirurgicale (BK) ? Antibiotiques (-) Antibiothérapie d'épreuve par l’IRM, qui montre la fréquence des abcès épiduraux et extrarachidiens [36]. La spondylite peut être la manifestation initiale d’une spondylodiscite. Plus rarement, elle reste isolée et elle est alors souvent confondue avec un processus tumoral. Dans les méningites, en théorie la raideur de la nuque n’est qu’en flexion alors qu’elle est multidirectionnelle dans l’atteinte rachidienne cervicale. Le syndrome méningé peut aussi se résumer à des rachialgies avec un enraidissement rachidien, mais habituellement diffus. Les pyomyosites du psoas sont rarement isolées et primitives. aiguës fébriles. La calcification en avant du corps de C2 ou C1 est souvent mieux vue au scanner que sur les radiographies. Spondylarthrite à début tardif . Pathologie aortique (rupture d’anévrisme, dissection) ou rétropéritonéale Pathologies microcristallines axiales La chondrocalcinose est une cause rare de rachialgies aiguës fébriles. L’âge avancé, les antécédents d’arthrite aiguë, les liserés de chondrocalcinose sur les articulations périphériques (poignets, genoux, symphyse pubienne) et l’existence d’opacités nuageuses floues à la périphérie du disque évoquent le diagnostic. Si la réponse aux anti-inflammatoires non stéroïdiens ou à la colchicine n’est pas spectaculaire, la poursuite des explorations (IRM) s’impose. Le syndrome de la dent couronnée peut se manifester par une cervicalgie aiguë fébrile. C’est une localisation de la chondrocalcinose ou plus rarement de calcifications à hydroxyapatites au voisinage de l’odontoïde. Les calcifications sont visibles sur les clichés bouche ouverte et surtout au scanner. Les calcifications à apatites peuvent siéger n’importe où. La calcification du muscle long du cou donne aussi des cervicalgies Appareil locomoteur Chez le sujet âgé, la spondylarthrite peut se révéler par des rachialgies inflammatoires, surtout cervicales ou dorsales, avec altération de l’état général, fièvre et syndrome inflammatoire important. Une arthrite, une enthésopathie associées, des antécédents personnels et surtout familiaux, et la présence de HLA B27 sont les meilleurs arguments diagnostiques. Elle peut prêter à confusion. Une spondylodiscite par contiguïté peut survenir à partir d’un anévrisme mycotique aortique [37]. IRM avec anomalies discovertébrales Discopathies dégénératives . Certaines peuvent donner un œdème des plateaux vertébraux en hyposignal T1 hypersignal T2 avec prise de contraste (Modic type I). Typiquement, les anomalies sont bien limitées et restreintes à la région sub-chondrale. Un hyposignal T1 cerné par un mince hypersignal T1 est plus caractéristique. Lorsque le disque est en hypersignal T2, il est d’intensité modérée et linéaire dans les discopathies dégénératives, alors qu’il est intense, central et 7 15-860-A-10 ¶ Spondylodiscite infectieuse non tuberculeuse vaccination par le BCG, la notion de contage, les séquelles pulmonaires radiologiques, une intradermoréaction à la tuberculine très positive. En fait, tous ces arguments ne sont que présomptifs et, en l’absence de preuves d’une tuberculose évolutive dans un autre site, la ponction-biopsie discovertébrale s’impose pour étude bactériologique et histologique. en motte dans les infections. La prise de contraste est discrète et linéaire dans les discopathies, et circonférentielle ou diffuse dans l’infection. L’absence d’inflammation des parties molles paravertébrales en IRM et la présence d’un vide discal sont deux éléments distinctifs de grande valeur. Un vide discal fréquent dans les discopathies dégénératives, la discarthrose érosive [38] ou les arthropathies nerveuses [39] éliminent une spondylodiscite infectieuse. On le recherche sur les clichés de profil si nécessaire en hyperextension, voire par le scanner. À l’IRM, il donne un signal de type liquidien qui ne doit pas tromper. La stabilité des radiographies et de l’IRM est un autre caractère distinctif essentiel. La discopathie destructrice rapide est définie par la survenue d’un pincement discal supérieur à 50 % en moins de 2 ans, mais il peut s’installer beaucoup plus rapidement. Parfois, l’origine infectieuse ne peut pas être écartée et la ponctionbiopsie est nécessaire. ■ Forme clinique Selon le germe Brucellose [19, 42, 43] En France, elle est devenue rare depuis la pasteurisation du lait et l’abattage du bétail contaminé. En dehors du pourtour méditerranéen et de la Corse, la plupart ont été contractées à l’étranger : Espagne (48 % des cas de spondylodiscite dans le Sud), Portugal, Italie, Grèce, Turquie, Iran, Algérie, Arabie, etc. Elle se caractérise par un début progressif, une localisation prédominant au rachis lombaire (80 %), une fièvre élevée, des sueurs, la fréquence d’autres localisations ostéoarticulaires (rachis, sacro-iliaque, hanche, genou), parfois une splénomégalie ou une hépatomégalie, un syndrome inflammatoire modéré et l’absence d’hyperleucocytose. Les radiographies sont d’abord normales, puis montrent typiquement une érosion de l’angle antérosupérieur de la vertèbre, suivie par le pincement discal et les érosions des plateaux. L’apparition simultanée de signes de reconstruction (ostéosclérose et ostéophyte) est évocatrice, comme la présence d’images gazeuses entre disque et plateau vertébral supérieur, et la conservation de la morphologie vertébrale. L’IRM peut montrer des abcès paravertébraux et épiduraux (20 %), mais ils sont moins fréquents et moins importants que dans la tuberculose. Professions exposées et notions de contage ont valeur d’orientation. Le diagnostic est souvent fait par les sérologies. La réaction d’agglutination de Wright croise avec Yersinia, ce qui complique l’interprétation. L’immunofluorescence indirecte et surtout les techniques enzyme-linked immunosorbent assay sont plus sensibles et spécifiques. L’isolement de Brucella par hémocultures ou sur un prélèvement de liquide ou de tissu est plus formel mais reste difficile. L’ensemencement systématique des prélèvements sur flacon d’hémoculture et l’utilisation de PCR devraient améliorer la rentabilité. Hernies intraspongieuses (nodule de Schmorl) Elles peuvent rarement être rehaussées par le produit de contraste et s’accompagner d’un œdème du plateau vertébral [40]. L’aspect ne doit pas être confondu avec une spondylodiscite. Elles peuvent surtout gêner l’interprétation des images d’une authentique spondylodiscite associée. Spondylodiscite rhumatismale . L’aspect des spondylodiscites de la spondylarthrite ankylosante, et plus encore du SAPHO où l’atteinte des parties molles est fréquente et parfois importante, peut être indiscernable d’une spondylodiscite infectieuse. Seule une image d’abcès est caractéristique d’infection. Le diagnostic se fonde essentiellement sur le contexte de survenue et les signes associés qui sont systématiquement recherchés. Dans la spondylarthrite ankylosante évoluée, des fractures de fatigue transversales transdiscales, sources d’instabilité, peuvent donner une importante destruction discovertébrale très évocatrice d’infection. Dans ce contexte, il faut orienter le radiologue pour qu’il mette en évidence la fracture de l’arc postérieur. Spondylarthropathies destructrices des hémodialysés Elles prédominent au rachis cervical (C5-C6) et sont souvent multiples. L’amylose peut être à l’origine de coulées dans les parties molles pré- et paravertébrales, ou de masse à la jonction craniocervicale. L’hyposignal habituel en séquence T2 les différencie des infections. Mais parfois l’aspect IRM est indiscernable des spondylodiscites infectieuses [41] et une ponctionbiopsie peut être nécessaire, d’autant plus que l’hémodialyse est un facteur de risque d’infection. Tumeurs Les tumeurs respectent le disque et c’est leur grande caractéristique. De rares cas de lymphomes, maladie de Hodgkin ou chordome peuvent prêter à discussion. Les métastases discales sont exceptionnelles. Les tophus, exceptionnels au rachis, sont en hyposignal T1 et T2. Éliminer une tuberculose est souvent difficile En France, la fréquence a beaucoup diminué. Elle représente de 20 à 25 % des spondylodiscites spontanées hospitalisées dans les services de rhumatologie entre 1980 et 1990, et elle n’a été incriminée que dans huit des 100 spondylodiscites hospitalisées dans le service de rhumatologie de Clermont-Ferrand depuis 1992. Elle se distingue par un début insidieux et une évolution torpide, une fièvre absente ou discrète, une géode intrasomatique volumineuse, des signes de reconstruction discrets et tardifs, un abcès volumineux parfois calcifié sur le scanner, bien délimité par la prise de contraste en périphérie sur l’IRM, qui peut aussi montrer l’extension de l’inflammation aux vertèbres adjacentes par voie sous-ligamentaire antérieure et postérieure [21]. On prend en compte le terrain (immigrants, sujets âgés, immunodéprimés), les antécédents de tuberculose, l’absence de 8 Mycoses . Les champignons représentent de 1 à 2 % des spondylodiscites spontanées. Elles sont surtout dues à Candida albicans, mais aussi et de plus en plus souvent à C. tropicalis, C. glabrata, C. parapsilopsis... Les observations de spondylodiscite à Aspergillus se multiplient [44]. Les spondylodiscites à champignons n’ont pas de particularité sémiologique, mais en IRM l’hypersignal T2 et la prise de contraste peuvent être minimes ou absents chez des patients très immunodéprimés [19] . L’hypersignal T2 du disque est inconstant. Le diagnostic est suspecté principalement sur les facteurs de risque d’infection fongique : antibiothérapie prolongée, cathéter, alimentation parentérale, chirurgie abdominale compliquée, chez un patient immunodéprimé (chimiothérapie, corticoïde, néoplasie, greffé, toxicomane, sida, diabète, cirrhose), d’autant plus que les recherches bactériologiques sont négatives ou qu’il y a des antécédents de candidose ou d’aspergillose pulmonaire. La recherche d’antigènes couplée à la sérologie peut fournir des indications, mais l’isolement par ponction-biopsie discovertébrale est indispensable avec une mise en culture sur des milieux spécifiques. Spondylodiscites de l’enfant Elles sont l’objet de controverses [45, 46] . Il est fréquent d’opposer la discite du jeune enfant à la spondylodiscite du plus grand. La recherche bactériologique est souvent négative, si bien que, en l’absence de contexte tuberculeux, certaines équipes ne font la ponction discale qu’en cas d’échec de l’antibiothérapie. Appareil locomoteur Spondylodiscite infectieuse non tuberculeuse ¶ 15-860-A-10 De plus, l’évolution est fréquemment favorable, parfois même en l’absence d’antibiotique, si bien que certaines équipes doutent de l’origine infectieuse au profit d’une cause inflammatoire, voire traumatique. Des séries récentes montrent une fréquence insoupçonnée de Kingella kingae (27 %) qui vient en deuxième place après Staphylococcus aureus [46]. Comme dans les arthrites septiques, il pourrait être la première cause chez l’enfant de moins de 2 ans [47]. Kingella kingae pousse mal sur les milieux usuels, mais il peut être isolé en ensemençant directement le prélèvement sur flacon d’hémoculture. Finalement, beaucoup d’équipes, notamment françaises, considèrent que les spondylodiscites de l’enfant sont des spondylodiscites infectieuses [45] et qu’elles doivent être prises en charge et traitées comme les autres. Le diagnostic de spondylodiscite est souvent difficile chez le petit enfant, car les signes ne sont pas spécifiques et sont parfois trompeurs : enfant irritable qui refuse de s’asseoir, de marcher ou qui boite. Dans la deuxième enfance, les douleurs abdominales sont parfois au premier plan. En période néonatale, la spondylodiscite peut s’associer à une septicémie avec localisation multiple. L’IRM est une aide précieuse et elle a supplanté la scintigraphie. Chez l’enfant, les principaux diagnostics différentiels sont la maladie de Scheuerman, le SAPHO et le granulome éosinophilique. Spondylodiscites par inoculation iatrogène Dans une enquête réalisée auprès des services de rhumatologie français en 1980 [48], elles représentaient 15 % des spondylodiscites et la fréquence était jugée surestimée. Pourtant, la proportion ne fait que croître. Dans une enquête faite en 1997 auprès de 12 services de rhumatologie français [49], elles représentent 25 % des spondylodiscites, et même 41 % dans une étude faite auprès des différents services de médecine et de chirurgie à Tours [8]. Il y a cependant d’importantes divergences selon les séries, qui tiennent au recrutement et aussi aux critères diagnostiques retenus. Une intervention chirurgicale est en cause huit fois sur dix : essentiellement curetage discal où le risque varie de 0,2 à 3 % [50] mais est probablement inférieur à 1 % avec l’antibioprophylaxie, plus rarement laminectomie ou autre intervention. La fixation utérine au promontoire est une cause souvent ignorée, notamment par les gynécologues. La ponction discale est la conséquence d’un geste diagnostique, discographie (0,1 %), ponction lombaire, aortographie, ou d’un geste thérapeutique, nucléotomie, rachianesthésie, chimionucléolyse, infiltration épidurale. On retrouve la prédominance masculine (60 %), mais les sujets sont plus jeunes (50 ans en moyenne) que dans les spondylodiscites spontanées. Comme attendu, la prédominance du rachis lombaire (plus de 90 %) est écrasante et L4-L5 est un peu plus souvent concerné que L5-S1. L’infection peut être précoce et bruyante, avec un syndrome infectieux franc et suppuration par la cicatrice. Elles sont souvent dues à Staphylococcus aureus. Le rhumatologue est davantage concerné par les formes insidieuses et torpides, beaucoup plus fréquentes. Après une période d’amélioration de 1 à 4 semaines suite à la procédure thérapeutique, surviennent des rachialgies d’aggravation progressive, nocturnes et rebelles, avec parfois radiculalgies dans le même territoire, ou plus diffuses et bilatérales [50]. Le délai d’apparition des signes est plus rapide après ponction du disque. Les douleurs sont souvent mises sur le compte de la pathologie initiale et le retard diagnostique souvent important, dépassant 2 mois chez la moitié des patients. La fièvre est présente dans moins de la moitié des cas et souvent limitée à une fébricule intermittente. L’hyperleucocytose est inhabituelle. Passés les premiers jours postopératoires, la découverte d’un syndrome inflammatoire, l’augmentation de la VS et surtout de la CRP, de cinétique plus rapide, ont une grande valeur d’alerte. L’augmentation est souvent discrète et peut manquer. Les radiographies ne sont pas informatives, d’autant plus qu’après dissectomie ou chimionucléolyse le disque se pince normalement dans les mois qui suivent le geste sans toutefois altérer la visibilité des plateaux. L’IRM est l’examen de choix, même si l’infection peut être difficile à différencier des modifications postprocédurales Appareil locomoteur normales. L’absence d’œdème des plateaux (Modic type I) ou de prise de contraste du disque excluent quasiment l’infection alors qu’une prise de contraste des tissus mous autour du disque et en paravertébral suggère fortement l’infection [51]. Dans les cas difficiles, l’intérêt du PET-scan [26] ou d’autres techniques scintigraphiques [25] reste à évaluer. Les hémocultures sont rarement positives et la ponctionbiopsie discovertébrale s’impose, permettant l’étude bactériologique et anatomopathologique. Un staphylocoque représente 80 % des germes identifiés, mais, contrairement aux spondylodiscites hématogènes, plus d’une fois sur deux c’est un staphylocoque coagulase négatif. Dans une série, [3] 43 % des staphylocoques sont méti-R. Les anaérobies sont en cause dans 7 % des cas, mais la fréquence pourrait être sous-estimée et elle atteint près de 20 % des cas dans une série. [3] Dans ce contexte, des germes réputés peu pathogènes comme Propionibacterium acnes ou des staphylocoques coagulase négatifs ne doivent pas être considérés comme des souillures. Les bacilles à Gram négatif sont moins fréquents que dans les spondylodiscites hématogènes et sont dominés par Pseudomonas. Les streptocoques (moins de 5 %) sont exceptionnels. Aucun germe n’est identifié dans 30 à 40 % des cas et parfois beaucoup plus. Dans une série danoise [52], sur 111 spondylodiscites postopératoires une biopsie n’a été faite que deux fois identifiant Staphylococcus aureus. Ces spondylodiscites sans germe posent un problème nosologique : infection avec une charge bactérienne faible ou à germe peu virulent difficile à cultiver, ou bien spondylodiscite aseptique secondaire à l’agression chirurgicale des plateaux vertébraux ou chimique après injection intradiscale. Ces spondylodiscites aseptiques évoluent favorablement avec le repos et le temps. On peut différencier statistiquement formes septiques et formes aseptiques sur les paramètres biologiques de l’inflammation et l’anatomie pathologique [53]. L’incertitude prévaut souvent et l’antibiothérapie est largement prescrite, même si l’on connaît des observations évocatrices d’infection qui ont évolué favorablement sans antibiotique [54]. ■ Traitement et évolution Le traitement des spondylodiscites est mal codifié faute d’études comparatives contrôlées, difficiles à monter du fait de la rareté de la maladie. Il repose sur les antibiotiques. Antibiothérapie Elle doit être adaptée au germe et ne débute donc qu’après l’enquête bactériologique. Elle doit être adaptée au site de l’infection. La diffusion osseuse est excellente pour les quinolones, la rifampicine et l’acide fucidique qui ont une bonne biodisponibilité orale autorisant un traitement d’emblée per os. La diffusion est aussi bonne pour la fosfomycine, mais qui n’est utilisable que par voie intraveineuse. Pour ne pas sélectionner de mutants résistants, ces quatre antibiotiques ne doivent être prescrits qu’en association, surtout quand la charge bactérienne est élevée. La diffusion est moyenne pour les b-lactamines mais peut être améliorée par l’augmentation des doses, ce qui justifie une voie parentérale initiale. Elle est aussi moyenne pour les glycopeptides (vancomycine, teicoplanine) et la posologie optimale doit être fixée par dosage sérique [55]. La diffusion des aminosides est faible. Ils sont surtout utiles à la phase initiale (3 à 5 jours) dans les septicémies à staphylocoques ou à streptocoques, car leur bactéricidie très rapide et la synergie avec les b-lactamines permettent une réduction rapide de l’inoculum bactérien. La posologie des antibiotiques est celle d’une infection grave de type bactériémie. Une bithérapie est nécessaire pour les staphylocoques, les entérocoques, Pseudomonas et les entérobactéries pour limiter l’émergence de mutants résistants. Les streptocoques peuvent être traités par l’amoxicilline seule (d’abord par voie intraveineuse). Pour les staphylocoques méti-S, la pénicilline M (d’abord en perfusion) et les quinolones (per os) sont très utilisées. La rifampicine (per os) a beaucoup d’atouts, mais on hésite à la diffuser dans la crainte d’émergence de résistance dans la population. Vancomycine et teicoplanine doivent être réservés 9 15-860-A-10 ¶ Spondylodiscite infectieuse non tuberculeuse . . . aux staphylocoques méti-R et aux entérocoques multirésistants, ou aux allergies sévères et prouvées aux b-lactamines. Le linezolide, utilisable per os, serait intéressant en relais [56], mais la toxicité, les nombreuses interférences et le coût limitent les prescriptions. Les bacilles à Gram négatif sont traités selon l’antibiogramme, habituellement par une céphalosporine de troisième génération et une quinolone. En l’absence de germe, le choix est difficile. Dans une étude [57] , l’évolution a été constamment favorable avec l’association d’une quinolone à une b-lactamine (pénicilline M ou céphalosporine de troisième génération) ou à la fosfomycine. L’efficacité initiale se juge sur l’amélioration des douleurs (souvent rapide en 1 semaine), des frissons, de la fièvre, de la CRP. La durée optimale du traitement n’est pas connue. Elle est en moyenne de 3 mois. L’efficacité des nouveaux antibiotiques permet d’envisager des traitements plus brefs lorsque le germe est sensible, l’infection récente, peu étendue et sans destruction importante. Quand les conditions ne sont pas favorables, la fréquence des rechutes (5 % environ) incite à la prudence. De même, la durée du traitement intraveineux, qui est en moyenne de 1 mois dans les services de rhumatologie français, pourrait être raccourcie. Lorsque les conditions sont favorables et l’observance bonne, un traitement intraveineux par b-lactamines de 15 jours [58] suivi d’un relais oral semble suffisant, surtout si on associe un antibiotique ayant une bonne diffusion osseuse comme les quinolones (d’emblée per os). Les germes résistants, staphylocoques méti-R et Pseudomonas, nécessitent des antibiothérapies parentérales prolongées, le plus souvent facilitées par des chambres implantables. Les critères d’arrêt sont mal codifiés, mais on exige habituellement [49] la disparition des douleurs inflammatoires, l’apyrexie, la normalisation de la CRP et au minimum la stabilisation des images discovertébrales sur les radiographies standards. L’ostéolyse peut continuer à progresser dans les 2 à 6 semaines après le début de l’antibiothérapie, puis les plateaux se condensent et des productions osseuses paravertébrales apparaissent. L’évolution vers l’ankylose partielle ou totale est devenue très inconstante. L’IRM permet de suivre la régression des abcès, de l’épidurite et de l’inflammation des parties molles [59] . En revanche, l’œdème des plateaux et l’inflammation du disque persistent de nombreux mois et n’ont pas d’intérêt pour le suivi. Immobilisation L’alitement est souvent indispensable initialement du fait de l’intensité des douleurs. Dès qu’elles ont régressé, le lever progressif est autorisé sous couvert de corset ou de minerve en résine ou en propyléthylène moulé pour prévenir les déformations. Chirurgie Elle est rarement nécessaire dans un recrutement rhumatologique. Radiculalgies et compression médullaire non déficitaire régressent habituellement avec les antibiotiques et des abcès menaçants peuvent être ponctionnés sous scanner. Un déficit neurologique peut nécessiter une laminectomie par voie postérieure, mais elle risque d’aggraver l’instabilité. Les grandes déformations en cyphose par destruction corporéale nécessitent un curetage avec corporectomie, classiquement suivi d’autogreffe. La reconstitution antérieure par des cages en titane avec ou sans ostéosynthèse postérieure permet un lever plus précoce et réduit la morbidité, apparemment sans affecter la guérison bactérienne [60]. Des techniques de chirurgie par thoracoscopie pourraient encore simplifier les suites opératoires [61]. . ■ Références [1] [2] [3] [4] [5] [6] [7] [8] [9] [10] [11] [12] [13] [14] [15] [16] [17] [18] [19] [20] [21] [22] [23] Pronostic [24] La mortalité des spondylodiscites hématogènes est d’environ 10 %, mais elle est davantage due à la comorbidité qu’à l’infection. Elle est faible dans les services de rhumatologie français (de 1 à 3 %). Les deux tiers des patients retrouvent leur activité antérieure dans les 6 mois [6]. À plus long terme, un tiers des patients conservent des séquelles, [37] surtout douloureuses, sauf en cas de déficit neurologique important initial. [25] 10 [26] Krogsgaard M, Wagn P, Bengtsson J. Epidemiology of acute vertebral osteomyelitis in Denmark. 137 cases in Denmark 1978-1982, compared to cases reported to the National Patient Register 1991-1993. Acta Orthop Scand 1998;69:513-7. Hopkinson N, Stevenson J, Benjamin S. 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Ristori, Professeur, chef de service. Unité d’immunologie clinique, service de rhumatologie, CHU Gabriel-Montpied, BP 69, 63003 Clermont-Ferrand cedex 01, France. Toute référence à cet article doit porter la mention : Dubost J.-J., Tournadre A., Soubrier M., Ristori J.-M. Spondylodiscite infectieuse non tuberculeuse. EMC (Elsevier SAS, Paris), Appareil locomoteur, 15-860-A-10, 2006. Disponibles sur www.emc-consulte.com Arbres décisionnels Appareil locomoteur Iconographies supplémentaires Vidéos / Animations Documents légaux Information au patient Informations supplémentaires Autoévaluations 11