Pathoge´nie des douleurs de la pancre´atite chronique

Pathoge´nie des douleurs
de la pancre´atite chronique
Bien que la douleur soit le
sympt^
ome le plus fr
equent de
la pancr
eatite chronique (PC), son
traitement reste empirique notam-
ment parce que ses m
ecanismes sont
multifactoriels et mal connus [1].Pr
es
de 90 % des patients sont doulou-
reux et ce sympt^
ome est la principale
cause d’hospitalisation. En outre, la
douleur peut notamment ^
etre source
d’invalidit
e, d’addiction aux opioı¨des,
d’alt
eration de la qualit
e de vie [2],de
malnutrition et de probl
emes socio-
economiques majeurs [1] Contraire-
ment
a d’autres douleurs chroniques,
le caract
ere intermittent (type A) ou
permanent (type B) de la douleur
semble impacter davantage sur la
qualit
e de vie que son intensit
e. Les
patients qui ont une douleur conti-
nue auraient une moins bonne
qualit
e de vie, plus d’invalidit
e, et
auraient davantage recours au
syst
eme de sant
e que ceux qui ont
HEPATO
y
GASTRO
et Oncologie digestive
Tir
es
a part : L. Bucchini
Pour citer cet article : Bucchini L, Rebours V, L
evy P. Pathog
enie des douleurs de la pancr
eatite
chronique. H
epato Gastro 2014 ; 21 : 288-302. doi : 10.1684/hpg.2014.1003
R
esum
e
Les m
ecanismes de la douleur de la pancr
eatite chronique (PC) sont encore mal
compris et l’origine de la douleur d’un patient donn
e est difficile
ad
eterminer.
Il en r
esulte que le traitement est souvent empirique et peu efficace.
Classiquement, la douleur est reli
ee
a des anomalies morphologiques, trouv
ees
a l’imagerie. Pourtant, sauf en pr
esence de complications, il n’existe pas de
corr
elation entre les modifications morphologiques et la s
ev
erit
e de la douleur. La
litt
erature montre que la douleur de PC est multifactorielle et implique des
facteurs p
eriph
eriques et centraux. En particulier, les modifications neuronales
semblent jouer un r^
ole important. Aussi, il semble important de changer de
paradigme pour am
eliorer la prise en charge de la douleur et opter pour une
vision plus neurobiologique que li
ee aux modifications anatomiques.
nMots cl
es : douleur, pression, isch
emie, chol
ecystokinine, inflammation, pancreatic neuritis,
sensibilisation centrale, contr^
oles descendants, douleur neuropathique
Abstract
The pain mechanisms of chronic pancreatic (CP) are poorly understood and in
most patients, the source of the pain remains unknown. Hence, the treatment is
often insufficient and empirical. Traditional theories on the pain in CP have
invoked obvious anatomical changes of the pancreas. However, except in cases
of complication, no significant correlation has been found between the degree
of morphological changes and the severity of pain. According to our current
knowledge, pain in CP involves a variety of factors, both central and peripheral. In
particular, neural remodelling and changes in the central nervous system seems
to play an important role in the pain in CP. Hence, we should change of paradigm
to improve the management of pain of CP and focus on neurobiological changes
rather than anatomic changes.
nKey words: pain, pressure, ischemia, cholecystokinin, inflammation, pancreatic neuritis,
central sensititization, descending control, neuropathic pain
Pathophysiology of pain
in chronic pancreatitis
Laurent Bucchini, Vinciane Rebours,
Philippe L
evy
H^
opital Beaujon,
100, boulevard du g
en
eral Leclerc,
92110 Clichy Cedex,
France
e-mail : <laurent.bucchini@wanadoo.
fr>
doi: 10.1684/hpg.2014.1003
288 HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 21 n84, avril 2014
ini-revueM
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une douleur intermittente [3]. Le type, la s
ev
erit
edela
douleur ainsi que la r
eponse
alath
erapeutique peuvent
varier dans le temps [4].
‘‘ Le caracte`re, intermittent ou permanent,
de la douleur impacte davantage
sur la qualite´ de vie que son intensite´ ’’
Nous exposons ici les th
eories expliquant la douleur
de la PC avant d’envisager dans une seconde revue
a
paraı
ˆtre les moyens th
erapeutiques nouveaux qui en
d
ecoulent
‘‘ Les patients qui ont une douleur continue
ont une moins bonne qualite´ de vie que
ceux qui ont une douleur intermittente’’
The´orie «me´canistique »de la douleur
Auparavant, il
etait suppos
e que la douleur chronique de la
PC r
esultait principalement de l’hyperpression parenchy-
mateuse, secondaire
a l’obstruction canalaire par la fibrose
ou des calculs. Une
etude ancienne montrait chez l’homme
une forte corr
elation entre la pression et la douleur,
sugg
erant que l’hyperpression parenchymateuse serait
a l’origine de l’activation des nocicepteurs intra-
pancr
eatiques [5].
Les stimuli de ces nocicepteurs sont, notamment,
l’isch
emie, l’inflammation, la chaleur, la tryspine [4]. Par
contre, le lien entre l’hyperpression et la douleur reste
incertain [6]. Plusieurs hypoth
eses, non mutuellement
exclusives, ont
et
e
emises pour tenter d’expliciter cette
relation. Il a
et
e suppos
e que l’obstruction canalaire
pourrait entraı
ˆner la sortie d’enzymes pancr
eatiques par le
bord lat
ero-basal de la cellule acinaire, et non apicale [7].Il
en r
esulterait une extravasation d’enzymes pancr
eatiques
dans l’interstitium cellulaire qui induirait une inflammation
[8] et activerait les nocicepteurs.
Il a
egalement
et
epr
esum
e que l’activation des nocicep-
teurs passerait par la survenue d’une isch
emie du tissu
pancr
eatique qui entraı
ˆnerait la production de radicaux
libres.
D’autres hypoth
eses ont
et
e
emises, telle que la survenue
de l’
equivalent d’un « syndrome compartimental ». Ce
syndrome surviendrait en raison de la fibrose du paren-
chyme et de la capsule p
eripancr
eatique.
A l’image du
syndrome de loge musculaire, une acidose pourrait
survenir et activer les nocicepteurs. Cette hypoth
ese ne
repose que sur des mod
eles animaux et n’a jamais
et
e
reproduite chez l’homme [6].
‘‘ La douleur de la pancre´ atite chronique
ne saurait se re´sumer a` des proble`mes
d’hyperpression’’
Les limites d’une the´orie purement
«me´canistique »
Des
etudes plus r
ecentes ont mis en
evidence une
augmentation de la pression parenchymateuse chez les
sujets ayant une PC, par rapport
a celles de sujets t
emoins,
mais elles n’ont pas montr
e de relation entre la pression et
la douleur [7].
De plus, il n’existe pas de corr
elation entre les modifications
morphologiques (dilatations, obstacles, ou strictions cana-
laires) et la s
ev
erit
e de la douleur [9]. Les nouvelles
techniques d’imagerie (IRM de diffusion) ne permettent
pas davantage de corr
eler l’intensit
e de la douleur avec le
degr
e de fibrose ou d’atrophie de la glande [10]. Une
imagerie pancr
eatique quasi normale minimal
change ») ne permet donc pas de remettre en cause la
pr
esence et la s
ev
erit
e des douleurs chroniques ressenties
[7].
Ces constatations ont conduit
a chercher d’autres origines
a la douleur chronique que les modifications canalaires et
l’hyperpression. [2].
Par ailleurs, les r
esultats de ces derni
eres
etudes devraient
aussi amener le clinicien
a s’interroger sur la pertinence de
traitements principalement fond
es sur les seules anomalies
anatomiques [10]. Cette attitude pourrait conduire
a des
approches trop invasives [2].
‘‘ Hormis en cas de complications, il n’existe
pas de corre´lation entre les anomalies
morphologiques du pancre´as, retrouve´es
a` l’imagerie, et l’intensite´ de la douleur.
Des changements minimes, a` l’imagerie,
ne permettent pas de remettre en cause l’intensite´
de la douleur ressentie’’
L’abandon partiel de la the´orique
me´canistique
Les th
eories actuelles de la pathog
enie de la douleur
chronique s’appuient davantage sur une vision « neuro-
biologique » qui n’est pas incompatible avec l’ancienne
conception « m
ecanistique » [2]. Au contraire, une
meilleure compr
ehension de la pathog
enie de la douleur
pourrait faire le lien entre la « neuropathie pancr
eatique »
(voir plus loin) et les th
eories purement m
ecaniques.
Toutefois, les donn
ees neurobiologiques disponibles
pr
esentent plusieurs limitations. De nombreux travaux
289
HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 21 n84, avril 2014
Douleurs et pancr
eatite chronique
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sont issus de la pancr
eatite aigu
e (PA) et ont
et
e extrapol
es
a la PC. En outre, les
etudes chez l’animal s’appuient
fr
equemment sur des mesures indirectes de la nociception,
telles que l’hyperalg
esie pari
etale (douleur r
ef
er
ee) ou
des changements non sp
ecifiques du comportement de
l’animal [2].
‘‘ Nos connaissances sur la physiopathologie
de la douleur de la pancre´ atite chronique
sont issues de travaux dont certains sont difficiles
a` extrapoler en clinique humaine’’
Rappel sur la transmission
de l’information douloureuse
Pour mieux comprendre les th
eories actuelles, il est
n
ecessaire de faire un rapide rappel sur l’innervation
nociceptive du pancr
eas. Un stimulus nociceptif intra-
pancr
eatique va stimuler un r
ecepteur
a la douleur, ou
nocicepteur. Le plus
etudi
e, et le plus important, est le
transient receptor potential vanilloid 1 (TRPV1). Un autre
nocicepteur, le protease-activated receptor-2 (PAR-2), a
egalement un r^
ole important.
Apr
es int
egration et transduction du stimulus douloureux
par le nocicepteur, il se produit une d
epolarisation si
l’intensit
e du stimulus est suffisante. Le signal est ensuite
v
ehicul
e dans les fibres peu, ou pas, my
elinis
ees (fibres-C et
fibres A-delta) du premier neurone (dit de premier ordre)
qui v
ehicule la nociception jusqu’au plexus cœliaque sans
qu’il y ait de synapse
a ce niveau.
Puis, le signal nociceptif gagne le corps cellulaire de ce
premier neurone qui est dans le ganglion spinal situ
e entre
T5 et T9. Ensuite, ce premier neurone fait synapse au
niveau de la corne dorsale m
edullaire [7].
Les neurom
ediateurs impliqu
es dans la transmission
synaptique sont notamment, le glutamate, la substance
P (SP), la calcitonin gene-related peptide (CGRP) et le brain
derived neurotrophic factor (BDNF). Leurs principaux
r
ecepteurs sont respectivement, le N-methyl-D-aspartate
(NMDA), le NK-1, la calcitonin receptor-like receptor
(CRLR), le tropomyosin receptor kinase B (TrkB). Ces
r
ecepteurs sont exprim
es au niveau post-synaptique sur les
neurones m
edullaires (dit de second ordre) comme le
montre la figure 1. Nous verrons plus loin les implications
th
erapeutiques de ces connaissances sur ces neu-
rom
ediateurs et leurs r
ecepteurs.
Tr
es sch
ematiquement, le neurone de second ordre se
projette, via les voies spinothalamiques, sur le thalamus.
A ce niveau, un troisi
eme neurone se projette en
particulier sur le cortex somato-sensoriel et le syst
eme
limbique, produisant respectivement, la sensation physique
de douleur et la r
eponse
emotionnelle (la souffrance)
[4].
Il est
a noter que les aff
erences nociceptives du pancr
eas se
projettent
egalement sur des neurones, dits convergents,
qui rec¸oivent
egalement des aff
erences sensitives pro-
venant de zones somatiques pr
ecises. Il s’agit du principe
de convergence viscero-somatique. En particulier, les
aff
erences sensitives du dermatome Th10 se projettent
sur les m^
emes « neurones m
edullaires convergents » que
les aff
erences nociceptives pancr
eatiques. Ce ph
enom
ene
de convergence explique le ph
enom
ene de douleur
visc
erale projet
ee (ou r
ef
er
ee). En raison de la convergence
sur des neurones m
edullaires communs, la douleur
visc
erale est perc¸ue par le cortex comme si elle provenait
de la zone pari
etale. Nous verrons plus loin que cette
convergence viscero-somatique a
et
e utilis
ee pour explorer
l’excitabilit
e des neurones centraux (neurones de second et
de troisi
eme ordre)
La figure 2 illustre ce ph
enom
ene.
Par ailleurs, il existe au niveau m
edullaire une superposi-
tion des projections sensitives de visc
eres voisins.
Sur la figure 2, des neurones convergents m
edullaires
rec¸oivent,
a la fois, des aff
erences provenant du
pancr
eas et de l’œsophage. On parle de convergence
visc
ero-visc
erale entre ces deux visc
eres voisins [12]. Nous
verrons plus loin une application de cette notion.
Il existe
egalement une projection des neurones de premier
ordre sur les neurones du syst
eme sympathique [13].
‘‘ Le phe´nome`ne de douleur re´fe´re´e
(projete´e) est lie´a` la convergence
sur des neurones me´dullaires identiques
(«neurones convergents »), d’affe´rences
nociceptives provenant a` la fois, d’un visce`re
donne´ et d’un territoire somatique pre´cis’’
Roˆle de la chole´cystokinine (CCK)
dans la douleur
L’hyperpression pourrait r
esulter d’obstacles canalaires
mais aussi d’une
el
evation de la CCK qui est fr
equente en
cas de PC. La s
ecr
etion de CCK est stimul
ee par le « CCK-
releasing peptide », qui est une prot
eine intraluminale,
d
egrad
ee par la s
erine prot
ease. En cas de PC, la baisse
d’activit
e de la prot
ease induit une moindre d
egradation de
la CCK-releasing peptide, ce qui va augmenter le taux de
CCK. Il pourrait en r
esulter une hyperstimulation du
pancr
eas par la CCK, conduisant
a une
el
evation des
pressions tissulaires [14].
290 HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
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La douleur induite par la CCK pourrait aussi ^
etre secondaire
a son « action centrale ». En effet, la CCK poss
ede
un r
ecepteur dans le syst
eme nerveux central, situ
eau
niveau de l’area postrema (plus connu sous le nom de
centre de vomissement). En raison de l’absence de barri
ere
h
emato-enc
ephalique, la CCK peut se lier facilement
a son
r
ecepteur et exercer une action pro-nociceptive pouvant
majorer la perception douloureuse [7]
L’hypoth
etique action antalgique des enzymes pancr
eati-
ques, en dehors de toute insuffisance pancr
eatique
exocrine, passerait par une d
egradation plus importante
de la CCK-releasing peptide, diminuant ainsi la production
de CCK.
En raison de ce m
ecanisme suppos
e, seules les enzymes
pancr
eatiques non gastro-prot
eg
ees pourraient poss
eder
une action antalgique car elles peuvent agir au niveau du
duod
enum sur la CCK-releasing peptide et abaisser le
taux de CCK. Acontrario, les enzymes pancr
eatiques
gastro-prot
eg
ees peuvent agir seulement au niveau
du j
ejunum, voire de l’il
eon et ne peuvent avoir une
action sur la CCK-releasing peptide. Les seuls essais
randomis
es contr^
ol
es, et de qualit
e, ayant montr
e
une action antalgique, utilisaient des enzymes non
gastro-prot
eg
ees [14]. Toutefois, l’effet antalgique des
enzymes pancr
eatiques, m^
eme non gastro-prot
eg
ees,
reste hypoth
etique.
Relais
Transduction du signal
Ganglion spinal
Ca2+
Ca2+
Na+
A
B
H+
Ca2+
PKC
TrkB
BDNF
Glutamate
Src
NMDA
NK1
CRLR
CGRP
Médiateurs de l'inflammation
5-HT BK ATP NGF
TrkA
P2X3
EP
PKC PLC
PKA Chaleur
TRPV1
TTXr
Activation d'un nocicepteur
du pancréas
Pancréas
Moelle épinière
B1/B2
PGE2
SP
Corne dorsale médullaire
Partie présynaptique
du neurone
de premier ordre
Figure 1.
A partir du pancr
eas, le signal nociceptif est v
ehicul
e jusque dans le ganglion spinal qui contient le corps du premier neurone, dit « de
premier ordre ». Ce neurone va rejoindre la corne dorsale de la moelle
epini
ere o
u se trouve la premi
ere synapse avec le second neurone, dit « de
second ordre ». Au niveau de la synapse, les neurom
ediateurs impliqu
es sont notamment, le glutamate, la substance P (SP), la calcitonin gene-
related peptide (CGRP) et le brain derived neurotrophic factor (BDNF). Leurs principaux r
ecepteurs sont respectivement, le N-methyl-D-aspartate
(NMDA), le NK-1, la calcitonin receptor-like receptor (CRLR), le tropomyosin receptor kinase B (TrkB). Ces r
ecepteurs sont exprim
es au niveau post-
synaptique sur les neurones m
edullaires (de second ordre). Le couple glutamate/NMDA joue un r^
ole essentiel dans la sensibilisation centrale.
Permission obtained for panel a from Nature Publishing Group#Marchand, F. et al.Nat Rev Neurosci 2005 ; 6 : 521-32.
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HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
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Douleurs et pancr
eatite chronique
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L’action antalgique de l’octr
eotide passerait
egalement par
la diminution des taux de CCK mais les r
esultats des essais
sont contradictoires et cette mol
ecule reste peu utilis
ee [7].
Plusieurs
etudes montrent une action de la CCK dans la
douleur. Chez le rat, des antagonistes des r
ecepteurs de la
CCK diminuent la douleur de la pancr
eatite aig
ue (PA).
Chez l’homme, un antagoniste (loxiglumide) a
egalement
montr
e une efficacit
e dose-d
ependante dans les
acc
es douloureux de PC et dans la PA, lors d’un essai
multicentrique randomis
e contr^
ol
e[7].
‘‘ L’action antalgique, hypothe´tique,
des enzymes pancre´atiques sous forme
non gastro-prote´ge´es, en dehors de toute insuffi-
sance pancre´atique, passerait par l’abaissement
de la chole´cystokinine’’
L’inflammation chronique au cours
des pancre´atites chroniques
Physiopathologie de l’inflammation chronique
Au sein de la cellule acinaire, les enzymes pancr
eatiques
sont sous forme de pro-enzymes (zymog
ene), inactives.
Une fois secr
et
e, le trypsinog
ene (une zymog
ene) est
transform
e dans le duod
enum en trypsine active par
l’ent
erokinase duod
enale. Ce m
ecanisme d’activation
extra-pancr
eatique prot
ege la glande du risque « d’auto-
digestion ».
Le concept, qui pr
evaut actuellement, postule que cette
« autodigestion », ou activation pr
ematur
ee du trypsi-
nog
ene intra-acinaire, constituerait la premi
ere
etape de la
pancr
eatite aigu
e (PA) et de l’inflammation (figure 3). Cette
activation pr
ematur
ee du trypsinog
ene a
et
e mise en
evidence par de multiples
etudes mais il n’a jamais
et
e
prouv
e qu’il s’agissait d’un m
ecanisme causal de la
pancr
eatite.
Par analogie avec la PA, l’activation intrapancr
eatique
du trypsinog
ene a
egalement
et
e consid
er
ee comme
le m
ecanisme causal, initial, de la PC et de l’inflammation
chronique de la glande. Cependant, de r
ecents
travaux chez des souris, g
en
etiquement d
epourvues
de la possibilit
edactiverpr
ematur
ement le trypsi-
nog
ene, sugg
erent que la r
eponse inflammatoire, en
particulier l’activation de la voie du nuclear factor
kappa b (NF-kb), pourrait ^
etre d
eclench
ee par diff
erents
stimuli (alcool, tabac, auto-immunit
e...), ind
ependa-
mment de l’activation intra-acinaire du trypsinog
ene
(figure 4).
La permanence de l’exposition au stimulus conduirait
ala
chronicisation de l’inflammation et
a l’obtention d’une PC.
Il d
ecoule de cette hypoth
ese que l’arr^
et du stimulus causal
(tabac, alcool, hyperpression canalaire, exposition
ala
bile, etc.) pourrait entraı
ˆner une r
eversion des l
esions
pancr
eatiques, au moins aux stades pr
ecoces, comme cela
a
et
e montr
e chez le rat expos
e
a l’alcool.
Cependant, l’exposition
a un stimulus ne peut suffire
a
induire une inflammation chronique du pancr
eas. La
survenue d’une PC implique
egalement de complexes
inter-relations entre des facteurs environnementaux et
g
en
etiques.
La persistance de l’activation de la voie du NF-Kb a
egalement
et
e retrouv
ee chez l’homme. Au-del
a d’une
VAS
VAS
0.1 Hz
0.3 Hz
Figure 2. Convergence visc
ero-somatique et convergence visc
ero-
visc
erale. Douleur r
ef
er
ee (projet
ee) : les fibres en gris fonc
e sont les
aff
erences sensitives provenant de la zone somatique r
ef
er
ee,
correspondant
a la paroi abdominale haute. Ces fibres se projettent
sur les m^
emes « neurones convergents » m
edullaires que les fibres
aff
erentes, en noir, provenant du pancr
eas. Les influx nociceptifs du
pancr
eas seront interpr
et
es par le cortex comme s’ils provenaient de la
zone somatique. Hyperalg
esie visc
ero-visc
erale et somato-visc
erale :
en cas de sensibilisation centrale spinale, secondaire
a une pancr
eatite
chronique, il existe une hyperexcitabilit
e des neurones qui sont situ
es,
sur le sch
ema, dans la zone
etoil
ee blanche m
edullaire. Cette zone
correspond
a la projection des influx nociceptifs pancr
eatique. (NB :
Comme il est pr
ecis
e dans le texte, cette hyperexcitabilit
e peut se
g
en
eraliser aux diff
erents niveaux m
edullaires en cas de sensibilisation
des neurones, dits « de troisi
eme ordre », supra-spinaux, conduisant
a
une sensibilisation centrale supra-spinale ou corticale). Dans cette
illustration, les aff
erences d’autres organes, comme l’œsophage, ont
des terminaisons communes avec les aff
erences du pancr
eas sur des
« neurones convergents » m
edullaires, situ
es, sur l’illustration, au
niveau de la zone
etoil
ee blanche. On peut supposer que la
sensibilisation centrale d’origine pancr
eatique se refl
etera dans les
r
eponses aux stimulations œsophagiennes. De m^
eme, sur le sch
ema,
l’hyperexcitabilit
e neuronale, li
ee
a la sensibilisation centrale induite
par la pancr
eatite chronique, se traduit par une augmentation de la
surface de la zone somatique r
ef
er
ee dont les aff
erences sont colori
ees
en blanc et gris clair sur la zone abdominale haute. En bas
a gauche, le
ph
enom
ene de sommation temporelle (« wind-up » chez l’animal) est
illustr
e par la r
ep
etition de stimulations d’intensit
e identiques qui induit
une int
egration corticale de la douleur avec une augmentation de la
douleur, repr
esent
ee, en noir, par les r
esultats de la mesure de l’
echelle
visuelle analogique (VAS). Source : Drewes AM, Krarup AL, Detlefsen
S, et al. Pain in chronic pancreatitis: the role of neuropathic pain
mechanisms. Gut 2008 ; 57 : 1616-27.
292 HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
vol. 21 n84, avril 2014
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