
    L'ACTUALITE LITTERAIRE 
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MAÏSSA BEY 
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Vient de paraître 
 
Maïssa Bey, Nouvelles d'Algérie, nouvelles. 
Paris : Grasset, 1998, 178p., 98 F.  
 
 
Maïssa Bey, l'auteur de Au commencement était la mer… 
(Algérie Littérature / Action n° 5), a publié chez Grasset au 
mois de mars 98 un recueil, Nouvelles d'Algérie, salué par la 
critique, et qui vient de recevoir le Prix "Nouvelles" de la 
Société des Gens de Lettres. C'est une des satisfactions de 
notre revue d'avoir pu lui permettre d'être remarquée par un 
grand éditeur et de rencontrer ainsi un large public. 
 
Dix nouvelles forment cet 
ensemble avec une courte préface où 
la romancière explique son projet, 
ouvre la voie vers des textes qui 
reconstruisent une réalité cruelle, 
tendre, intime, sauvage aussi. Dix 
nouvelles qui se succèdent sans 
titres, nous les découvrons en fin 
d'ouvrage; ce procédé supprime la 
lecture en pointillé que provoquent 
les recueils habituels en installant 
une fluidité des personnages, des 
situations et des récits. Il est sûr que 
les femmes sont au centre du recueil 
: nous entrons avec la petite fille qui 
court et qui sait sans vouloir le 
savoir qu'un cataclysme s'est abattu 
sur sa famille. Nous poursuivons 
avec Assia — il faut plusieurs pages 
pour apprendre son nom — qui est 
veuve et qui s'interroge sur la seule 
résistance qu'elle ait jamais opposée 
à son mari : refuser de sortir avec lui 
le jour où les tueurs l'attendaient. 
Nous continuons avec la tante et la 
soeur du jeune Sofiane, "dangereux 
terroriste" abattu pour les forces de 
l'ordre, garçon à la recherche de lui-
même et d'une certitude pour ceux 
de sa famille. On s'enfonce dans 
l'innommable, dans l'indicible avec 
la jeune fille atteinte au plus profond 
de son corps : "Sauter les verbes. A 
cloche-pied. S'affranchir du verbe. 
C'est qu'ils pèsent lourd ces mots à 
l'intérieur, je veux dire en moi. Tout 
un tas grouillant dans mon ventre. 
Emprisonnés. Ne peuvent plus 
sortir. Les mots des hommes sont 
sales. Ils sont dans leurs yeux. Goût 
âcre. Fiel de la haine au fond de 
leurs silences. De leurs regards." 
Nous partageons l'insupportable 
nausée de Hanya au repas entre amis 
où chacun ne parle que de ce qui se 
passe en continuant à manger. Nous 
savou-rons le langage à double sens 
de la marieuse se moquant de