CHIRURGIE DE L’OBÉSITÉ
J-P. Marmuse, P. Mognol
Service de Chirurgie Générale A, Hôpital Bichat-Claude Bernard, 46 rue Henri Huchard,
75018 Paris.
INTRODUCTION
L’obésité se définit comme un excès de masse grasse délétère pour la santé et en pra-
tique on se réfère à l’indice de masse corporelle (IMC = poids en Kg/taille en m2) pour
en évaluer le degré. Elle est dite morbide quand l’IMC est égale ou supérieur à 40 kg/m2
parce qu’ il existe à ce stade une très nette augmentation du risque de mortalité soit du
fait de l’obésité elle-même soit du fait des comorbidités notamment cardiovasculaires,
pulmonaires, et métaboliques.
Son traitement a pour objectif d’induire une perte de poids importante et stable à long
terme, mais les résultats obtenus par les approches conventionnelles sont le plus souvent
décevants avec plus de 95 % d’échec en cas d’obésité morbide.
Ces échecs expliquent le développement de la chirurgie de l’obésité et de nombreu-
ses interventions ont été successivement proposées. Elles agissent soit en limitant les
apports alimentaires, soit en provoquant une malabsorption, soit en associant les deux
mécanismes. Les principales interventions qui sont actuellement pratiquées sont la pose
d’anneau gastrique, la gastroplastie verticale bandée, la dérivation gastro-jéjunale (By
Pass gastrique) et la dérivation bilio-pancréatique.
Aujourd’hui ces interventions peuvent se faire par cœlioscopie avec tous les avan-
tages de ce type de procédure, notamment la diminution des complications pariétales.
Cependant le choix de l’une de ces techniques suppose d’en connaître les avantages, les
risques et les inconvénients.
1. DIFFÉRENTES INTERVENTIONS CHIRURGICALES
1.1. GASTROPLASTIE VERTICALE BANDÉE (FIGURES 1 ET 2 )
Son principe est la division de l’estomac en 2 parties de façon à créer une poche
proximale de petite taille reliée au reste de l’estomac par un orifice de faible diamètre.
La partition est effectuée par agrafage vertical à l’aplomb de l’angle de Hiss de
façon à confectionner une petite poche tubulaire . L’orifice de drainage est calibré par
l’adjonction d’un bandage circulaire externe prothétique et inextensible pour prévenir
sa distension.
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L amaigrissement induit est lié à 2 paramètres : Le premier est la capacité restreinte
de la poche gastrique proximale d’ou une sensation précoce de satiété. Le second est le
calibre réduit de son orifice de drainage, qui en retarde l’évacuation et prolonge ainsi la
durée de la période de satiété.
A 2 ans la perte pondérale est de 50 % à 60 % de l’excès de poids initial mais ces
chiffres sont des moyennes qui reflètent des résultats individuels en pratique très dis-
parates. En effet le taux de succès (perte de plus de 50 % de l’excès de poids) est de
70 % en cas d’obésité morbide (BMI < 50) mais il n’est que de 30 % chez les patients
super-obèses (BMI > 50). Enfin à long terme un regain de poids est le plus souvent
observé parce que nombre de patients préviennent les vomissements par le choix d’une
nourriture de consistance semi-liquide plutôt que de manger lentement en mâchant mieux
leurs aliments.
Figure 1 : Gastroplatie verticale bandée
Figure 2 : Gastroplastie verticale bandée (Intervention de Mac Lean).
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L’avantage de cette procédure est sa relative simplicité d’où une faible morbidité
(2 à 4 %) qui est due à la survenue de fistules ou d’hémorragies au niveau de la ligne
d’agrafes et une mortalité minime de moins de 0,3 % liée aux embolies pulmonaires.
En revanche elle impose une modification radicale du comportement alimentaire et les
vomissements sont fréquents. La fréquence des vomissements peut induire des carences
vitaminiques en particulier en thiamine (vitamine B1) avec un risque non négligeable de
complications neurologiques.
A long terme les complications sont essentiellement mécaniques et dans la grande
majorité des cas elles requièrent une réintervention. Elles sont représentées par la sténose
classiquement indilatable du chenal d’évacuation, l'érosion intra-luminale du collier de
calibration et surtout la fistule gastro-gastrique par reperméation de la ligne d’agrafes
quant la partition est réalisée par agrafage sans section.
1.2. GASTROPLASTIE PAR ANNEAU GASTRIQUE AJUSTABLE (FIGURE 3)
Cette intervention consiste à entourer la partie supérieure de l’estomac avec un anneau
prothétique de manière à délimiter une poche gastrique proximale d’un volume de 15 mL
reliée au reste de l’estomac par un orifice calibré.
Le diamètre de l’anneau qui régule l’évacuation de la poche gastrique proximale
peut être modifié par ponctions ou injections de liquide dans la chambre sous-cutanée à
laquelle il est reliée par un cathéter.
Son efficacité est comparable à celle des gastroplasties verticales bandées et elle a les
même inconvénients. A long terme un regain de poids semble également s’observer.
En revanche l’orifice de drainage de la poche gastrique proximale peut être ajusté
si besoin, d’où une meilleure tolérance et de très rares vomissements en l’absence de
complications.
A distance, la dilatation de la poche gastrique proximale est la principale complication
(5 à 20 %). Révélée par des vomissements, un reflux , une oesophagite ou une intolérance
alimentaire, elle peut revêtir une forme aigavec risque de nécrose gastrique notamment
en cas de douleurs et dans ce cas une reprise en urgence est impérative quand la dilata-
tion persiste après desserrage de l’anneau. En effet dans la grande majorité des cas, la
dilatation régresse, voire disparaît complètement après desserrage mais la récidive est
Figure 3 : Gastroplastie par anneau gastrique.
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quasi-constante et à terme une réintervention est le plus souvent nécessaire. Hormis une
malfaçon technique, les causes de cette complication sont soit un serrage excessif, soit
surtout des excès alimentaires répétés avec vomissements, d’où l’importance du suivi
et des conseils nutritionnels.
L’érosion gastrique par l’anneau est une complication plus rare qui peut aboutir à
la migration de l’anneau dans la cavité gastrique. Les autres complications spécifiques
sont celles qui sont observées au niveau du site d’injection dont la plus grave est son
infection. Les autres sont les luxations du site empêchant les ajustements, les ruptures
du tube de connexion et enfin les ulcérations à la peau du site d’injection.
1.3. DÉRIVATION GASTRO-JÉJUNALE (BY-PASS GASTRIQUE) ( FIGURE 4)
Cette intervention combine une réduction de la capacité gastrique et une malabsorption
modérée. Elle consiste à diviser l’estomac de façon à délimiter une poche gastrique proxi-
male ; celle-ci étant complètement séparée du reste de l’estomac. D‘une capacité restreinte
(10 à 20 mL) cette poche, arrivent les aliments, est reliée au jéjunum proximal par
l’intermédiaire d’une anastomose gastro-jéjunale sur anse en Y.
Comparée aux gastroplasties, cette intervention induit une perte de poids plus rapide
et plus importante qui s’explique par trois mécanismes : une satiété très précoce liée
au passage très rapide des aliments dans l’intestin, une malabsorption dont le degré est
fonction de la longueur du jéjunum court-circuité et, enfin un dumping syndrome (malaise
avec tachycardie) qui entraîne une réaction aversive envers les aliments sucrés.
A 2 ans la perte pondérale est de plus de 70 % de l’excès de poids initial et le taux
de succès de l’intervention (perte > 50 % excès de poids) est de 90 % en cas d’obésité
morbide (BMI < 50) et de plus de 50 % pour les patients super-obèses (BMI > 50).
Cette intervention guéri le diabète de type II, chez les obèses diabétiques, dans plus
de 80 % des cas et ce même quand le diabète est insulino-requérant.
Un autre avantage important est le confort alimentaire. Les patients peuvent manger
de tout mais en petites quantités comme après une gastrectomie totale et le transit intes-
Figure 4 : By-pass gastrique.
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tinal demeure strictement normal. D’autre part il n’y a ni vomissements, ni oesophagite
par reflux.
Le dumping syndrome est le seul inconvénient fonctionnel de cette technique mais il
est inconstant et, dans la grande majorité des cas, il s’amende avec les années.
En revanche cette intervention est techniquement difficile, notamment par cœlioscopie,
et le risque péri-opératoire est plus élevé. Il s’agit en effet d’une procédure qui requière
2 anastomoses dont l’une techniquement délicate à la partie haute de l’estomac, difficile
d’accès chez l’obèse, d’où un taux de fistules anastomotiques qui est de 2 à 4 % et un
risque de mortalité de l’ordre de 0,5 %.
Un autre inconvénient notable est le risque de carences nutritionnelles notamment
en fer, en calcium, en folate et en vitamine B12 mais celles-ci peuvent être évitées par
la prise régulière de suppléments en vitamines et en oligo-éléments.
Les autres complications secondaires sont les ulcères ou les sténoses de l’anastomose
gastro-jéjunale et les occlusions du grêle notamment par hernies internes. L incidence
des ulcères anastomotiques est de l’ordre de 3 % et dans la grande majorité des cas ils
répondent favorablement à un traitement médical. Les sténoses sont plus fréquentes
(5 à 7 %) mais elles guérissent complètement après dilation endoscopique. Comme toutes
les interventions concernant le tube digestif, le by-pass gastrique expose à un risque d’oc-
clusion intestinale (2 à 4 % ) par bride ou hernie interne à distance de l’intervention.
1.4. DIVERSION BILIO-PANCRÉATIQUES (FIGURES 5 ET 6 )
Il en existe deux types : avec gastrectomie distale (Scopinaro) (Figure 5) ou avec
gastrectomie pariétale (duodenal switch) (Figure 6).
Le résultat de ce montage, quelle que soit la technique utilisée, est une malabsorption
qui concerne surtout les graisses celles-ci n’étant digérées qu’en présence de sels biliaires.
La malabsorption protéique est moindre, mais elle doit être prévenue par des apports
suffisants, d’où l’importance de laisser un moignon gastrique assez grand.
Figue 5 : Diversion bilio-pancréatique avec gastrectomie distale (Intervention de Sco-
pinaro).
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