Pharmazie und Medizin · Pharmacie et médecine A l’approche des Fêtes 13 Alcool et médicaments sont-ils compatibles? M u r i e l S c hütz , J é r ô m e B e rg e r, O l iv ie r B ugnon A l’approche des fêtes de fin d’année, la question se pose fréquemment de savoir si certains médicaments peuvent interagir avec les boissons alcoolisées. Selon la teneur en éthanol de la boisson, des interactions sont possibles. Elles peuvent être de type pharmacocinétique ou pharmacodynamique [1]. Interactions pharmacocinétiques De manière générale, il est déconseillé d’avaler des médicaments avec une boisson alcoolisée, car il peut en résulter une modification de l’absorption et de la métabolisation du médicament et/ou de l’alcool. Concernant l’absorption, la consommation de boisson à forte teneur en éthanol entraîne un ralentissement de la vidange gastrique et une augmentation de la production d’acide gastrique. De ce fait, la résorption médicamenteuse est augmentée, notamment pour les principes actifs lipophiles. De plus, la consommation excessive d’alcool lèse les muqueuses gastrique et duodénale et augmente ainsi la perméabilité des membranes [2]. A l’inverse, certains médicaments comme le métoclopramide, le dompéridone ou l’érythromycine augmentent la motilité gastrique [1,3]. L’alcool est ainsi plus rapidement absorbé et ses effets augmentés [4]. Au niveau de la métabolisation, des interactions peuvent engendrer une modification de la cinétique du médicament et de l’alcool, ce dernier étant métabolisé en majeure partie dans le foie par divers enzymes, en premier lieu l’alcool déshydrogénase (qui oxyde l’alcool en aldéhyde, substance toxique transformée ensuite en acétate par l’aldéhyde déshydrogénase) [5]. Le disulfirame (Antabus®) est employé dans le sevrage alcoolique: il inhibe l’aldéhyde déshydrogénase et entraîne une accumulation d’aldéhyde, provoquant flushes et troubles de la régulation circulatoire [3]. D’autres substances médicamenteuses peuvent provoquer ce type de réaction, en fonction de la sensipharmaJournal 25 | 12.2010 bilité individuelle de chaque patient. Leur administration devrait être accompagnée de conseils concernant la consommation d’alcool (voir tableau 1). L’alcool est également substrat de certains cytochromes (CYP): CYP2E1 (lors de consommation chronique, l’alcool est métabolisé principalement par ce CYP plutôt que par l’alcool déshydrogénase [1]) et dans une moindre mesure CYP1A2 et CYP3A4. Cependant, aucun médicament ne peut provoquer d’effet cliniquement significatif sur la métabolisation de l’alcool par simple inhibition de CYP [5,6,9]. L’alcool s’avère être également inhibiteur du CYP2E1 lors de consommation occasionnelle et inducteur lors de consommation chronique [9,10]. Une interaction cliniquement significative n’est décrite que pour le paracétamol [9]. Une consommation chronique d’alcool engendre une accumulation du métabolite toxique NAPIQ (N-acétyl p-benzoquinine-imine) par inhibition du CYP2E1, ainsi qu’une déplétion en glutathion hépatique, nécessaire à la détoxification du NAPIQ [11]. L’accumulation de ce dernier provoquant une hépatotoxicité [10], il est ainsi recommandé aux consommateurs chroniques d’alcool de ne pas excéder la dose de 2 g/jour de paracétamol [11]. ­L’alcool a également ces mêmes activités ­inhibitrices et inductrices selon le type de consommation au niveau du cytochrome CYP2C9. Il peut donc influencer l’effet Tableau 1: Principaux médicaments à effet type Antabus® et ­r ecommandations à donner lors de leur administration Médicament Recommandation Ketoconazole [1,6,7] Réduire la consommation d’alcool [1] Metronidazole [6,7] Ne pas consommer d’alcool pendant la durée du traitement et le jour suivant [1] Sulfonylurées: gliben- Limiter la consommation d’alcool [1] clamide, gliclazide [7] Vérapamil [7,8] Prévenir le patient du risque potentiel [1] Tableau 2: Principaux médicaments subissant une majoration d’effets ­i ndésirables lors de consommation d’alcool et recommandations associées Médicament Effet indésirable majoré par la Recommandations consommation d’alcool AINS Hémorragies digestives et lésions des Intervalle de 8 à 10 heures entre (dont l’aspirine) [1] muqueuses gastro-intestinales la prise de ces médicaments et la Antidiabétiques Hypoglycémie, diminution des signes Informer le patient: contrôle de sa (surtout insuline et d’hypoglycémie et inhibition des glycémie selon sa consommation sulfonylurées) réactions de compensation (augmen- d’alcool [1,13,14] tation possible du risque de coma A noter qu’une consommation de 2 à hypoglycémique) 3 unités d’alcool* ne provoque pas consommation d’alcool d’hypoglycémie. Isoniazide [6] Méthotrexate [6] Nitroglycérine [1] Hépatoxicité Suivi du patient Effets vasodilatateurs (flush p.ex.) et Informer le patient: limiter sa hypotension (lors de consommation consommation d’alcool selon les excessive d’alcool) effets indésirables perçus *10 ml d’alcool pur: 1 unité ≈ 300 ml de bière ≈ 90 ml de vin Pharmazie und Medizin · Pharmacie et médecine 14 des anticoagulants oraux (p. ex. acénocoumarol ou phenprocoumone) et de la phénytoïne [12]. Références Abstract [1] Alcohol-related drug interactions, Detail-Document, Pharmacist’s Letter/Prescriber’s Letter 2008; 24 (1) Das Fest naht [2] De Luca A.: Medikamente und Narhungsmittel, pharma- Interactions pharmacodynamiques kritik 2001; 23 (6) [3] De Luca A. et al.: Arzneimittelinteraktionen mit Alkohol, L’une des interactions pharmacodynamiques les plus fréquentes avec l’alcool est le renforcement de l’effet dépresseur des médicaments agissant au niveau du système nerveux central. La consommation d’alcool même à dose réduite peut majorer l’effet sédatif de substances comme: antidépresseurs, antipsychotiques, sédatifs/anxiolytiques, neuroleptiques, somnifères, antiépileptiques ou opïodes [3]. La consommation même modérée d’alcool est ainsi déconseillée [1]. D’autres associations alcool-médicament pouvant entraîner une majoration du risque d’effets indésirables sont résumées dans le tableau 2. Finalement, l’alcool provoquant une élévation de la tension artérielle, il est connu qu’une consommation chronique peut diminuer l’effet des antihypertenseurs et provoquer une résistance au traitement [15]. En conclusion, lors de consommation ponctuelle standard d’alcool, il y a peu de risque d’interaction cliniquement significative, à l’exception de l’effet indésirable type Antabus®. En cas de consommation chronique, diverses interactions sont possibles dont la nature et l’intensité varient entre individu, la capacité de métabolisation de l’alcool variant d’un patient à l’autre. z Adresse de correspondance Dr Jérôme Berger, Prof. Olivier Bugnon Pharmacie de la Policlinique Médicale Universitaire Rue du Bugnon 44, 1011 Lausanne Tél. 021 314 48 48 Fax 021 314 48 40 pharmaJournal 25 | 12.2010 pharma-kritik 2001; 23 (3) [4] http://www.kompendium.ch: monographie «Primpéran®», «Motilium®», «Erythrocine®» consultées le 29.10.10 [5] Paton A.: Alcohol in the body, BMJ 2005; 330: 85–7 [6] Buclin T. et al.: Base de la thérapeutique médicamenteuse, édition 5, Documed 2005: 184 [7] http://www.uptodate.com: lexi-Interact™, monographie Alkohol und Arzneimittel – ist diese Kombination verträglich? «ethanol», consultée le 29.10.10 [8] http://www.thomsonhc.com: Drugdex?, monographies «ethanol», consultée le 29.10.10 [9] Pharmacologie et toxicologie cliniques, HUG: http://www.pharmacoclin.ch/_library/pdf/cytp450.pdf (29.10.10) [10] M. 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Ketoconazol, Metronidazol, Sulfonylharnstoffe, Verapamil), die Zunahme der Hepatotoxizität von Paracetamol bei chronischem Alkoholkonsum sowie die Wirkungsveränderung bestimmter oraler Blutgerinnungshemmer. In Bezug auf die Pharmakodynamik kann Alkohol unerwünschte Wirkungen bestimmter Arzneimittel verstärken, wie beispielsweise im Falle von Medikamenten, die auf das Zentralnervensystem wirken und als Nebenwirkung depressive Verstimmungen verursachen können. Ferner wurde beobachtet, dass chronischer Alkoholkonsum das Ansprechen auf blutdrucksenkende Arzneimittel herabsetzt. z