La décision clinique : les infections urinaires TCEM 2 Dr Marc BONY [email protected] 1 Infection urinaire Orientation diagnostique SIGNES FONCTIONNELS Lombalgie Troubles mictionnels Aigus, irritatifs 0° SEXE ETIOLOGIES > 38,5 Femme jeune Pyélonéphrite aiguë simple Femme âgée ou Homme Pyélonéphrite aiguë compliquée Obstacle sur infecté Abcès du rein < 38 Homme Urétrite > 38,5 Homme Prostatite aiguë < 38 Femme jeune Cystite aiguë 2 Les examens diagnostiques L’ECBU : toilette à la compresse, 2ème jet, grandes lèvres écartées, labo dans les 20 mn ou réfrigérateur à 4° Leucocyturie ≥ 104 /ml (10/mm3) (VVP 98% quand signes U.) Bactériurie 105 /ml (103/ml si E. Coli) (seuils Andem, variable selon auteurs) Bandelette multiréactive : Seuil leuco 104/ml, nitrites <0 si staph. Epidermidis, séjour vésical < 4 Heures VPN : 95 à 100% VPP 33% => absence d’infection si négatif+++ VS, CRP : S’élèvent si pyélonéphrite, en fait pas d’influence sur la décision thérapeutique Imagerie : ASP + Echo rapides sur pyélonéphrite Inutile sur cystite simple Pas d’autre examen en première intention Uretro cystographie rétrograde à distance si recherche reflux (enfant, pyélo à répétition) 3 La cystite aiguë simple EPIDEMIOLOGIE Dr Marc BONY – TCEM 2 - Infections urinaires p. 1 - 3 millions de consultations / an (5% des consultations féminines) 1 à 2% de l'activité du médecin généraliste qui la gère seul dans 90% des cas 1 femme sur 3 fait une ou plusieurs cystites, 50% récidivent Pic entre 20 et 30 ans 50 fois plus fréquente chez la femme que chez l'homme PHYSIOPATHOLOGIE - Colonisation rétrograde de la vessie à partir des germes du périnée - Favorisée par : La brièveté de l'urètre chez la femme Les rapports sexuels et contraception par spermicides ? Les anomalies congénitales de la muqueuse vésicale Les modifications hormonales (grossesse, ménopause, ...) - 30% des cystites sont des pyélonéphrites paucisymptomatiques… DIAGNOSTIC - Femme entre 15 et 65 ans, - pas de terrain particulier (grossesse, diabète, IR, immuno-dépression, patho uro), - Pas d’infection U dans les 3 derniers mois et moins de 4 par an - Troubles mictionnels aigus : Brûlures mictionnelles, pollakiurie, impériosité,, douleurs sus pubiennes, Pas de lombalgie Pas de fièvre LE DIAGNOSTIC REPOSE SUR L’INTERROGATOIRE Le diagnostic est fondé sur l'entretien et l'interrogatoire méthodique, à la recherche de l'association de 4 symptômes: dysurie avec pollakiurie, absence de pertes vaginales et de prurit vaginal. En présence des 4 symptômes (dysurie et pollakiurie et absence de pertes vaginales et absence de prurit vaginal), la probabilité de cystite aiguë est de 95%. En présence d'1 seul symptôme (dysurie, ou pollakiurie, ou absence de pertes vaginales, ou absence de prurit vaginal), la probabilité de cystite aiguë est de 50 %. En présence de 2 symptômes (par exemple: dysurie et absence de pertes vaginales mais sans pollakiurie et si la patiente signale un prurit vaginal), la probabilité de cystite aiguë est de 34 %. Conclusion pratique. L'interrogatoire est un élément diagnostique de grande importance. L'enregistrement des plaintes spontanées lors de l'entretien doit précéder un interrogatoire méthodique n'orientant pas les réponses. Un symptôme de plus ou de moins peut modifier largement la probabilité diagnostique.( Revue Prescrire Août 2003 n°241) Dr Marc BONY – TCEM 2 - Infections urinaires p. 2 EXAMEN CLINIQUE Température, palper abdominal et lombaire, gynéco si signes ou bandelette <0 EXAMENS COMPLÉMENTAIRES Bandelette : présence de leucocytes et/ou de nitrites à la bandelette Une bandelette négative élimine le diagnostic L' ECBU n'est pas indiqué dans la cystite aiguë simple Aucune imagerie Aucun examen biologique LES GERMES E. Coli : 75 – 80 % Protéus Mirabillis : 8 – 10 % (attention lithiase si à répétition) Staph. Saprophyticus 3 – 7 % (pas de nitrites) Etat des résistances bactériennes -> Hollande W. Goettsch et al. JAC 2000 46 : 223-28 E. coli R à : Norfloxacine 5.8 % (1,3 en 1989) Amoxicilline 36 % (29,4 en 1989) Multirésistants 4 % (0,5 en 1989) Corrélation directe avec l’augmentation de l’utilisation des Fluoroquinilones -> France Bertrand et coll. MMI 2002 32 : 8-18 E. coli R à : Amoxicilline 36,7 % Amox-Clav 27,1 % Ceftazidime 2,5 % LE TRAITEMENT Traitement court (dose unique ou 3 jours) : - justifié quand cystite simple (non récidivante, < 4 jours…) - AB à élimination urinaire prolongée meilleure observance, moins de déséquilibre de flore, expliquer la persistance des symptômes 2 à 3 jours Quel antibiotique ? - Cotrimoxazole (bactrim°) 3 comprimés de Bactrim Fort en dose unique (87% d’éradication) Ou deux par jour 5 à 10 jours - Les fluoroquinolones : Norfloxacine (Noroxine°) 400 mg x2 pdt 3 jours :95 % d’éradication Dr Marc BONY – TCEM 2 - Infections urinaires p. 3 Pefloxacine (oflocet°) 92 à 97 % d’éradication en dose unique - La fosfomycine (Monuril°, Uridoz°) 1 sachet de 3 g en dose unique (éradication > 90%) 4 - Infections Récidivantes (< 3 mois) Documenter par un ECBU la réalité de l’infection bactérienne et le spectre antibiotique, traiter au moins une semaine. 5 - Infections Récurrentes (plus de 4/an) .Molécules recommandées pour la prophylaxie (/j ou 3 x / semaine) Cotrimoxazole 40 / 200 mg Norfloxacine 200 mg Céphalexine 250 mg .Doses et molécules idem pour une prophylaxie dose unique post coïtale . Le Cranberry= canneberge à gros fruits: En jus de fruit, comprimé ou concentré (dose?)Diminue l’adhérence des bactéries sur la muqueuse Environ une infection de moins pour 15 à 30 femmes sur 100 traitées pendant un an (modeste!) Interaction avec les AVK Rev. Prescrire 2006 - 26 6 – Pyélonéphrite aiguë simple CLINIQUE Fièvre, douleur lombaire, frissons. Signes urinaires inconstants. Nausées, vomissements fréquents Signes de gravité : Instabilité tensionnelle, choc, hypothermie, défense abdominale => Hôpital BILAN - ECBU indispensable : le traitement est instauré dès le prélèvement réalisé sans attendre les résultats - ASP, échographie dans les meilleurs délais : afin de repérer une obstruction ; - Pas d’autre examen en première intention TRAITEMENT - .Molécules préférentielles a priori : Dr Marc BONY – TCEM 2 - Infections urinaires p. 4 C3G P.O ou I.V Fluoroquinolone P.O ou I.V (recommandation forte, grade A) - Pas de bithérapie si pas de signe de gravité - 2 semaines maximum, 10 jours minimum - Réévaluation au bout de 2 à 3 jours : apyrexie, adaptation du traitement à l’antibiogramme, absence d’élément ou une obstruction à l’imagerie - Contrôle ECBU après traitement 7 – PNA chez l’homme: - Chez l’homme même prise en charge que chez la femme mais à considérer comme secondaire jusqu’au bilan urologique 8 - La prostatite aiguë: EPIDEMIOLOGIE Urgence médicale infectieuse Pathologie fréquente Homme de 30 à 70 ans PHYSIOPATHOLOGIE Deux voies principales de contamination Urinaire rétrograde E. Coli 90% des cas Favorisée par Stase Manoeuvres rétrogrades : Sondes Endoscopie Sexuelle (uréthrite - Maladie Sexuellement Transmissible) Chlamydia Gonocoque DIAGNOSTIC Troubles mictionnels aigus fébriles Syndrôme irritatif au premier plan :Brûlures Pollakiurie Impériosité Syndrôme obstructif plus rare : Dysurie (ne pas sonder) Température 39°-40°, septicémie Diagnostic sur : Des urines troubles La présence de leucocytes et/ou de nitrites à la bandelette Au toucher rectal (+++) Prostate douloureuse, augmentée de volume, oedématiée Le plus souvent normal dans les premières heures L'absence de lombalgie Dr Marc BONY – TCEM 2 - Infections urinaires p. 5 Une orchi-épididymite, une uréthrite associées (écoulement uréthral) EXAMENS COMPLEMENTAIRES : - ECBU - Prélèvement uréthral, si MST ou écoulement - VS, CRP élevés LE DIAGNOSTIC IMPOSE: ð D'éliminer (diagnostic différentiel) - Les autres causes de troubles mictionnels aigus - Lithiase vésicale (valeur de l'ASP) - Cystite aiguë bactérienne, rare chez l'homme, apyrétique - Les autres causes de septicémie (Valeur de la bandelette et de l'ECBU) ð D'en rechercher la cause (étiologie) - Germe urinaire : Echographie vésicale pré et post mictionnelle ou Urographie intra-veineuse avec clichés mictionnels : Recherche un résidu (+++), une sténose de l'urèthre, une hypertrophie prostatique, une vessie neurologique, ... - Germes MST => partenaire TRAITEMENT Sans attendre les résultats de l’ECBU Diffusion dans la prostate : - Bétalactamines : Bof ! - Cotrimozaxole : oui, mais inactivation (partielle ?) - Fluoroquinolones : oui - C3 : oui Traiter 3 semaines au moins Débuter par la voie parentérale jusqu’à apyrexie si signes de gravité SUIVI Troubles mictionnels Température ECBU, CRP 10 jours après l'arrêt du traitement Si uropathie au bilan étiologique, ou ECBU contrôle positif, avis urologique 9 - Le sujet âgé Bactériurie asymptomatique (y compris sur sonde) : pas de traitement Dr Marc BONY – TCEM 2 - Infections urinaires p. 6 Infection symptomatique : comme chez le sujet plus jeune mais : Tenir compte de la fonction rénale et TT associés, Traitements courts déconseillés 10 - La femme enceinte : La bactériurie est une témoin de l’infection, potentiellement grave (MAP) A rechercher systématiquement à la bandelette durant toute la grossesse Traiter en tenant compte des contre indications 11 Infection urinaire chez l’enfant Les signes sont en général très pauvres et ce d'autant qu'il est plus jeune. Il s'agira souvent d'une fièvre isolée sans cause apparente, d'un manque d'appétit, d'une cassure de la prise de poids voire d'un amaigrissement. Chez la fille avant 2 ans et chez le garçon toute infection urinaire doit faire rechercher une cause urologique (Echo, cysto rétrograde). Chez l’enfant de moins de 18 mois, elle est toujours à hospitaliser. Chez la fillette, après 2 ou 3 ans, on recherche avant tout une vulvo-vaginite : infection de la vulve et du vagin, (penser en cas de répétition oxyures, corps étranger, voire maltraitance sexuelle). En cas de récidive rechercher une cause urologique. Contrairement à l'adulte les causes les plus fréquentes sont les malformations urinaires et le reflux vésico-uretéral BIBLIOGRAPHIE ANAES. « cystites et pyélonéphrites aiguës simples de la femme de 15 à 65 ans » Recommandations et références médicales. 1995 (sur le site de l ‘ANAES) Bent S et coll. Does this woman have an acute uncomplicated urinary tract infection?” JAMA 2002; 287 2701 – 2710 Prescrire rédaction “Personnaliser le traitement des infections urinaires” Rev. Presc. 1991 ; 105 : 148 – 150 Dr Marc BONY – TCEM 2 - Infections urinaires p. 7 Dr Marc BONY – TCEM 2 - Infections urinaires p. 8 Dr Marc BONY – TCEM 2 - Infections urinaires p. 9