Octobre Rose 2014 Saint-Louis Réseau Sein
On a vu arriver en France des demandes de mastectomie bilatérale, ces dernières années. Les
patientes demandent qu’on leur enlève le sein malade et le sein controlatéral qui n’est pas
malade ! C’est une demande assez fréquente aux Etats-Unis qui émerge en France. Je ne
parle pas des femmes génétiquement mutées (mutations BRCA1 ou BRCA 2 qui représentent
5% des cancers du sein), mais d’une population tout venant. Des auteurs américains ont
publié, il y a quelques semaines, dans un très grand journal de médecine qui s’appelle le
JAMA, une grande étude à ce sujet qui a été reprise dans la grande presse.
Les articles des grands quotidiens du matin ou du soir ont frappé l’opinion publique en
France. En septembre dernier, cet article s’intéressait au nombre de patientes qui faisaient
pratiquer des mastectomies bilatérales, et se demandait si cela avait un avantage pour elles -
c'est-à-dire si elles mourraient moins de leur cancer ou si elles rechutaient moins de leur
cancer. Pour répondre à ces deux questions, on a utilisé des données qu’en recherche clinique
on appelle une étude observationnelle à partir de registres sur lesquels sont enregistrées
toutes les patientes. De tels registres existent en Californie, en Angleterre ou en Allemagne
mais pas assez chez nous. On a pu comparer conservation mammaire, mastectomies et
mastectomies bilatérales sur une population énorme de 189 734 patientes présentant un
cancer du sein unilatéral : 11 692 mastectomies bilatérales ont été réalisées, ce qui est très
important pour un cancer unilatéral. Ce taux qui était de 2% en 1998 est passé à 12.3% en
2011 soit un taux d’augmentation annuel de 14.3%
Chez les femmes de moins de 40 ans, ce taux est de 33%, donc 1/3 des femmes à qui on peut
conserver le sein qui ont moins de 40 ans dans cette population, ont opté pour une
mastectomie des deux côtés. L’âge est un critère est un critère de choix mais aussi le lieu
d’habitation, le métier et le niveau d’études. Et contrairement à ce que l’on aurait pu penser,
ce choix prédominait chez les femmes blanches non hispaniques, chez les femmes qui ont une
couverture sociale, un haut niveau socioculturel et qui étaient pour les plus nombreuses,
soignées dans les centres référents. Si les femmes choisissent cette chirurgie bilatérale c’est
que les médecins ne vont pas contre ce choix. Il s’agit donc d’une modification culturelle et
sociale dans le cancer du sein.
La survie de ces femmes ayant subi une mastectomie bilatérale a été aussi étudiée. La réponse
est nette : la mastectomie bilatérale ne protège de rien ! C'est-à-dire qu’il n’y a aucun
bénéfice en survie pour la mastectomie bilatérale quand on veut faire enlever le sein de l’autre
côté, qui n’est pas atteint. C’est un des grands sujets de débats et de polémiques actuellement
car la majeure partie des éditorialistes des grandes revues scientifiques n’arrivent pas à