Micro-économie : Introduction
Licence 1 Droit Economie
Saïd SOUAM
Professeur Université Paris Ouest Nanterre La Défense
February 9, 2013
1 Pourquoi l’économie ?
On pourrait e¤ectivement commencer ce chapitre introductif en se posant
cette question et une autre toute aussi importante : Quest-ce que l’économie ?
Si on se refère au 19ème siècle, une des ”meilleures”dé…nitions est celle
donnée par Alfred Marshall dans ses Principes de léconomie en 1890.
L’économie, c’est létude de lhumanité dans les a¤aires courantes
de la vie”.
Depuis cette époque, le savoir économique a beaucoup évolué. Cette
dé…nition reste toutefois encore d’actualité. Pourquoi donc sintéresse-t-on
encore aujourdhui à l’économie ?
La première raison que l’on pourrait invoquer cest que cela nous per-
met de mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons. De nombreuses
questions que vous vous posez ou que vous n’osez pas poser sont des questions
d’ordre économique.
Une deuxième raison est que l’étude de l’économie fera de vous un
citoyen plus avisé de la vie économique. En e¤et, tout au long de notre vie
nous sommes amenés à prendre des décisions stratégiques notamment d’ordre
économique. Ne ce serait que pour décider une fois que vous avez obtenu votre
Licence de continuer une ou deux années d’étude supplémentaires (faire un
Master) ou aller directement sur le marché du travail.
1
Une troisième raison possible est que l’étude de l’économie va proba-
blement vous faire mieux comprendre les enjeux des politiques économiques
des gouvernements et voir si on ne vous raconte pas des bobards...
On peut avancer que l’objet d’étude fondamental de léconomie est l’utilisation
des ressources rares.
Chaque jour, nous mangeons du pain, de la viande, des légumes, nous
buvons de l’eau, du lait, nous respirons de lair plus ou moins pollué. Nous
nous chau¤ons, nous portons des vêtements, nous utilisons des voitures et des
transports en commun, nous écoutons la radio et regardons la télévision...
Certains de ces produits ou services (lair) sont disponibles directement
et en quantités telles que leur utilisation ne pose a priori aucun problème.
Ce sont des biens dits libres.
Mais la plupart de ces services sont disponibles en quantités limitées,
ou bien sont obtenus à partir de biens disponibles en quantités limitées.
L’eau, par exemple, pour être consome doit être collectée, traitée puis
transportée jusquaux points d’utilisation.
Pour avoir plus de lait, il faut augmenter le nombre de vaches, mais ceci
suppose d’accroître la surface agricole consacrée à l’élevage.
En ce qui concerne les matières premières, elles sont vraisemblablement
disponibles en quantités illimitées (du moins à l’échelle de l’univers). Toute-
fois, les ressources connues sont épuisables ou limitées à court ou moyen
termes.
La plupart des biens mettent en oeuvre un processus complexe de pro-
duction et de distribution (penser par exemple au nombre d’opérations mises
en jeu pour contruire une voiture).
Quand un bien est disponible en quantité limitée, son emploi entraîne des
choix dans la mesure où tous les besoins ne peuvent être satisfaits. Cela im-
plique un choix de rationnement. D’où l’idée de partage (ou d’ectation)
des ressources.
Si on admet que le but ultime de l’activité économique est la satisfac-
tion des besoins individuels, ces choix impliquent des arbitrages entre par
exemple :
1. Consommation directe ou indirecte : le pétrole peut être utilisé
pour se chau¤er ou pour fabriquer l’électricité permettant de se chauf-
fer ; le lait peut être bu ou transformé en beurre ou en fromage.
2. Consommation imdiate ou future : le blé peut être consommé
ou servir de semence ; une usine peut fabriquer des voitures ou des
2
machines-outils permettant ensuite de fabriquer dautres voitures ; une
part des ressources humaines peut être a¤ectée à la Recherche & Développe-
ment (R&D) de nouveaux produits ou de nouvelles techniques de pro-
duction (on aboutit à ce quon appelle dans le langage technique des
innovations de produits ou de process). Un autre exemple primor-
dial consiste dans l’arbitrage entre consommation et épargne. Sachant
que demain je serai à la retraite et donc que mes revenus seront plus
faibles qu’aujourdhui, je suis incité à épargner aujourdhui pour pou-
voir maintenir mon niveau de vie demain. C’est l’idée selon laquelle les
consommateurs (ou ménages) préfèrent lisser leurs consommations (cf.
la théorie du cycle de vie de Franco Modigliani et celle du revenu
permanent de Milton Friedman).
3. Di¤érents types de consommation : choix entre les secteurs, tel ou tel
produit agricole peut être favorisé, produire plus peut engendrer des
problèmes de pollution ; une part des ressources humaines peut être
ectée à l’éducation des enfants, à la formation des jeunes ou encore
à la san.
4. Choix entre les individus : Qui consomme quoi ? Qui roule en voiture ?
Qui utilise les transports en commun ? Qui peut et qui doit travailler ?
Qui béné…cie de l’éducation, des hôpitaux ? De la pollution ?
En ce sens, l’économie est une science sociale puisqu’elle étudie le com-
portement d’agents dits économiques (consommateurs, entreprises, ban-
ques, administrations, etc...) ainsi que leurs organisations. Ces agents
économiques poursuivent des objectifs qui leur sont propres et sont soumis à
des contraintes légales, morales, techniques ou encore pécuniaires. Souvent
ces objectifs rentrent en con‡it les uns avec les autres. Se pose alors un prob-
lème essentiel en économie : Peut-on résoudre ces con‡its ? Si oui, doit-on
le faire de manière autoritaire (en faisant intervenir par exemple l’Etat) ou
existe-t-il dautres manières plus e¢ caces pour le faire ?
Beaucoup dautres questions sont possibles et permettent de donner une
première idée de ce quest l’économie et ce à quoi elle s’intéresse.
1. Comment les individus choisissent-ils les biens et les services qu’ils con-
somment et les moyens de production qu’ils utilisent ? En quoi ces choix
sont-ils tributaires des nouvelles découvertes et des nouvelles technolo-
gies ?
3
2. Quels sont les déterminants du revenu des consommateurs ? Pourquoi
certains sont mieux rémunérés que dautres alors que ceux-ci travaillent
autant sinon davantage ?
3. Quels sont les déterminants du chômage ? Pourquoi ces e¤ets ne sont-ils
pas les mêmes selon la catégorie socio-professionnelle auquel on appar-
tient ?
4. Pourquoi observe-t-on des hausses ou des baisses de prix ? In‡ation c.
désin‡ation.
5. Pourquoi les impôts et les dépenses publiques ? Et quels sont leurs
ets sur la vie de tous les jours ?
6. Quels sont les facteurs qui déterminent la structure et le volume des
échanges entre pays ? Quels sont les e¤ets des tarifs douaniers sur le
commerce international ?
7. A quoi peut-on attribuer les di¤érences de niveau de vie entre les na-
tions ?
Ce sont là des questions fondamentales qui résument l’essentiel des préoc-
cupations de la science économique. Elles sont fondamentales pour au moins
une double raison : d’abord par leurs énormes répercussions sur les condi-
tions de vie de l’humanité toute entière, ensuite par leur complexité et par
les d cultés rencontrées pour apporter des réponses simples et universelles.
Ce qu’il faut savoir dès à présent c’est que ces questions suscitent un vif
débat entre les économistes et qu’il n’y a pas a priori une pensée unique
(c’est même loin d’être le cas, voir par exemple le problème du cmage).
Mais il y a parfois des consensus politiques sur le sujet.
Ce qui est important pour vous, au moins dans un premier temps, c’est
de faire abstraction de vos sentiments et d’aborder l’analyse de ces problèmes
avec la rigueur et l’objectivité dun scienti…que.
Un des objectifs principaux de ce cours est de vous faire comprendre
comment raisonne un économiste et comment il essaie de résoudre les prob-
lèmes qui se posent à lui. Revenons maintenant à ce quil y a de commun
à toutes ces questions et quest-ce qui fait d’elles des questions proprement
économiques.
4
2 La rareté
A la base, un problème économique découle du fait simple mais ô combien
pertinent qui est qu’il nous est a priori impossible de satisfaire tous nos
désirs et nos besoins. L’économiste dé…nira en général la rareté comme
une situation où les besoins et les désirs dépassent les ressources dont on
dispose pour les satisfaire. Si vous n’avez que 100 euros et que vous désirez
acheter un lecteur MP4 qui coûte 85 euros et un livre qui coûte 45 euros,
vous êtes confrons à la rareté. Vous devez, en tant qu’étudiants, arbitrer
entre aller faire la fête ou du sport le week end ou travailler pour combler le
retard accumulé dans le cours. Vous êtes dans ce cas confrons à la rareté
du temps (il n’y a que 24 heures par jour et il faut aussi dormir pour se
reposer...).
En fait, nos besoins et nos désirs ne font pas que dépasser les ressources
existantes : ils peuvent être beaucoup plus grands et mêmes être illimités face
à des ressources limitées ou …nies (au moins à moyen terme). Nous souhaitons
en e¤et tous vivre plus longtemps et en bonne santé, dans l’aisance, jouir du
confort et de la sécurité. Personne n’arrive réellement à satisfaire tous ses
besoins en même temps. Il subsiste toujours quelque part une insatisfaction
en chacun d’entre nous.
2.1 L’activité économique
L’activité économique est essentiellement engendrée par la confrontation en-
tre les besoins illimités des consommateurs (ou autres agents économiques)
et les ressources limitées dont nous disposons en général. On peut dire que
l’activité économique représente l’ensemble des actions que nous entre-
prenons pour contrer la rareté. En ce sens, on peut dire que l’économie
étudie la façon d’utiliser au mieux nos ressources limitées pour satisfaire
(et répondre) à nos besoins illimités. Ainsi dé…nie, l’économie a un champ
d’investigation qui est très large et qui englobe en tout cas toutes les ques-
tions que nous nous sommes posées auparavant. Ce quil faut retenir c’est
que s’il n’y avait pas de problème de rareté des biens (i.e. si on vivait dans un
univers de science …ction où tout serait abondant) les problèmes économiques
n’existeraient pas. Vous ferez alors autre chose qu’étudier l’économie.
5
1 / 17 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !