Épuisement professionnel : soigner les soignants

publicité
30 novembre 2016 • n°1275
Le journal de la
Épuisement professionnel :
soigner les soignants
Rencontre
Portrait
page 6
page 16
Anne-Marie Brocas,
présidente du HCAAM
Bruno Stach,
un spécialiste libéral
ISSN : 0399-385X
La santé enfin au cœur
du débat présidentiel !
D
epuis plusieurs semaines, la CSMF mobilise l’ensemble des prétendants à la fonction
présidentielle pour que la santé soit, pour la première fois sous la Ve République, au cœur du
débat présidentiel. Nous y sommes enfin !
Le mérite en revient à monsieur François Fillon qui a brisé le tabou du financement du panier
de soins solidaire, en évoquant à juste titre ce qui devra être remboursé (dans le futur) par
l’assurance maladie obligatoire et ce qui relèvera de l’assurance maladie complémentaire
(mutuelles, organismes de prévoyance et assurances privées). Néanmoins, cette question n'est
pas sans soulever des inquiétudes majeures chez les médecins libéraux, notamment sur leur
liberté de prescription.
Ce sujet est essentiel, car contrairement aux propos tenus par madame la ministre de la Santé, notre système de santé ne
sera pas à l’équilibre l’année prochaine et les déficits cumulés, depuis des années, ne pourront pas être perpétuellement
reportés et financés par les générations futures !
Il sera intéressant d’étudier les propositions des autres acteurs du débat présidentiel sur le panier de soins solidaire à
condition que ce débat ne se résume pas seulement à une approche comptable, mais considère aussi l’ensemble des
critères de l’équation, c’est-à-dire : qualité des soins + équilibre budgétaire = système égalitaire d’accès aux soins pour
tous les Français.
Et bien évidemment, autre question essentielle : quelle sera l’indépendance des médecins vis-à-vis de tous les financeurs
publics et privés ?
Le débat ne fait que commencer...
sommaire
4.
Verbatim
5. L'événement
6.
Rencontre
8. Dossier
Présidentielle : Fillon place la santé
au cœur du débat
6
Anne-Marie Brocas,
présidente du Haut Conseil pour l’Avenir
de l’Assurance Maladie
Épuisement professionnel : des soignants à soigner
8
14. Actu en bref
L'actualité de la médecine
16. Portrait
Dr Jean-Paul Ortiz,
Président de la CSMF
Bruno Stach, un spécialiste libéral
17. En direct des territoires
La santé en région
20. À la loupe
16
Applications mobiles et objets connectés :
les 101 bonnes pratiques de la HAS
22. À lire, à voir
Expositions, livres, loisirs
Le Médecin de France • Bimensuel
79, rue de Tocqueville 75017 Paris
Tél. 01 43 18 88 33 • Fax : 01 43 18 88 34
E-mail : [email protected] • Site : www.csmf.org
Les articles originaux du Médecin de France peuvent être reproduits
par tout organisme affilié à la CSMF sans autorisation spéciale,
à condition de faire figurer les mentions habituelles.
Édité par la SEPMF, SARL au capital de 32 000 € • Durée : 50 ans
à partir du 1er juin 1978 • Associés : CSMF et ACFM.
Gérant : Jean-Paul Ortiz • Directeur de la publication :
Jean-Paul Ortiz • Rédacteur en chef : Laurent Verzaux
Crédits photos : P. Chagnon - Cocktail Santé
sebastiangauert - Photographee.eu - Fotolia.com
Réalisation : Aliénor Consultants - Tél. 05 49 62 69 00
Impression : Megatop • Distribution : Info Routage
Abonnement : 40,00 € par an. Prix du numéro : 2 €
Commission paritaire : 1018 G 82702.
Abonnez-vous ! 40 € par an, 20 numéros.
✃
Dr ...............................................................................................................................
Adresse : ...................................................................................................................
Code postal : ............................ Ville : ....................................................................
o désire s’abonner à la revue Le Médecin de France pour un an. o désire une facture.
Chèque de 40 € à l’ordre de Médecin de France et à adresser à :
Le Médecin de France, Service abonnement • 79, rue de Tocqueville 75017 Paris
Le
Médecin de France
3
n°1275 • 30 novembre 2016
verbatim
« C’est l’emplâtre sur une jambe de bois.
Ce sont des mesures très incantatoires
dont on ne sait pas si elles seront tenues
avec les échéances électorales. »
Patrick Bourdillon, délégué CGT Santé, à propos des mesures annoncées
par Marisol Touraine sur la qualité de vie au travail dans les hôpitaux.
« Il y a unanimité pour dire que notre système
est excellent, mais à droite comme à gauche,
les Français sont inquiets sur sa pérennité ».
Gaël Slimane, président d’Odoxa,
à propos d’un sondage sur les Français et leur système de santé.
« Avec cet article, la CNAMTS prétend faire
des économies. Elle provoquera, surtout,
plus de délais pour les rendez-vous de scanner
ou d'IRM et aggravera encore le retard français
en imagerie en coupe, freinera le développement
de la prise en charge ambulatoire. »
Jean-Philippe Masson président de la FNMR
à propos de la réintégration de l’article 52 bis dans le PLFSS par les députés.
« Les réseaux de soins instituent une médecine
à deux vitesses, de qualité et innovante pour les uns,
low-cost pour les autres. La médecine des réseaux
de soins est inévitablement de moins bonne qualité
du fait de la baisse de la qualité des services
et des freins à l’innovation que représentent
les pratiques des réseaux de soins. »
Frédéric Bizard, économiste de la santé.
Le
Médecin de France
4
n°1275 • 30 novembre 2016
l'événement
Présidentielle : Fillon place
la santé au cœur du débat
Le candidat de la droite et du centre
a mis la santé sur le devant de la
scène, en évoquant son programme
fondé sur la séparation entre petit
risque et gros risque.
À
peine désigné candidat de la
droite et du centre, François
Fillon a fait l’objet de polémiques sur divers aspects de son
programme. Avec, pour la première
fois, un clivage prononcé sur le
thème de la santé, alors qu’en général la thématique est quasi-absente de la campagne électorale.
C’est l’ancien Premier ministre de
Nicolas Sarkozy qui avait imposé le
sujet lors de l’ultime débat télévisé
des primaires face à Alain Juppé.
De fait, sa proposition est nettement d’essence libérale. Il propose
en effet que l’assurance maladie se
concentre sur la « prise en charge des
soins graves et de longue durée », tandis que les soins courants seraient
couverts par les complémentaires
santé. Une position qui fait ressurgir deux vieilles idées : d’abord la
distinction entre gros risque et petit
risque et ensuite la définition d’un
« panier de soins », c’est-à-dire le
périmètre des prestations de santé
jugées suffisamment graves pour
être prises en charge par l’assurance
maladie. À cela s’ajoute également
un autre concept, celui d’une franchise applicable sur les premières
dépenses générées, remplaçant le
ticket modérateur et les franchises
actuelles. Face au tollé suscité par
ses premières déclarations, François Fillon avait également précisé
la portée d’une mesure plus sociale,
évoquant un « bouclier sanitaire »
permettant aux moins favorisés de
ne pas se voir appliquée la franchise.
Un programme à clarifier
Comme on peut l’imaginer, de
telles déclarations ont suscité de
nombreuses critiques, dans son
camp comme dans celui d’en face.
Par Twitter, Marisol Touraine avait
émis un calcul fallacieux, estimant à
3 200 € par personne le surcoût du
programme Fillon. Ses adversaires
se sont d’ailleurs fortement mobilisés toute la semaine sur le thème « il
veut privatiser la santé ». En réalité, si
on y regarde de plus près, il semble
que plusieurs concepts ont été développés ensemble sans réelle cohérence. C’est ce qu’observe l’économiste de la santé Claude Le Pen, qui
estime dans le Quotidien du Médecin
que le programme de François Fillon « mérite d’être clarifié ». Il émettait
notamment des doutes sur l’opportunité d’une franchise sur les soins
remboursés par l’assurance malaLe
Médecin de France
5
die, alors qu’elle est censée assurer
les soins lourds et graves. Quoi qu’il
en soit, avant même l’ultime vote des
primaires, la généticienne Dominique Stoppa-Lyonnet, porte-parole
santé de François Fillon, reconnaissait qu’il faut « remettre le travail sur
l’établi ».
Des engagements pour la médecine
libérale
Qu’en pense-t-on du côté des médecins libéraux ? Pour Jean-Paul Ortiz, le candidat Fillon a le mérite de
placer la thématique santé au cœur
du débat électoral. « C’est une bonne
chose, car la santé vient systématiquement en tête des préoccupations des
Français, sans que la plupart des politiques en tiennent compte. » Mais le
président de la CSMF reste réservé
sur la distinction entre petit et gros
risque. Car tout médecin sait bien
qu’un symptôme bénin peut être le
signe d’une maladie grave, et donc
à prendre au sérieux. La confédération attendra donc d’en savoir plus
sur le programme Fillon avant de
se prononcer. Il est à noter cependant que dans l’interview accordée
au Médecin de France, François Fillon
prend plusieurs engagements forts,
comme la suppression du tiers
payant généralisé, l’adoption d’une
loi de santé rectificative et le soutien à l’entreprise libérale de santé.
n°1275 • 30 novembre 2016
R
« Pour une stratégie
sanitaire de l’innovation »
Ses trois idées fortes
• « Le secteur de la santé n’est pas en panne
d’innovation. Au contraire, nous vivons
actuellement une phase prometteuse, amenée à
bouleverser la prise en charge des patients. » À la
fois thérapeutique, technologique et numérique,
cette innovation se traduit notamment par de
fortes mutations en cours dans les modalités
d’organisation des soins.
• « Il faut construire un écosystème favorable au
développement des innovations, en promouvant
l’agilité des procédures d’accès au marché, la
performance dans l’évaluation et la garantie d’un
accès universel à ces nouvelles solutions. » Le
HCAAM propose plusieurs réformes, comme la
médicalisation de l’ONDAM, la systématisation
des études en vie réelle, et la tarification aux
séquences de soins.
• « Le HCAAM va mener des travaux en 2017 pour
mieux connaitre les soins de spécialité délivrés en
ambulatoire. » Une démarche jugée nécessaire,
alors que l’essentiel des efforts, ces dernières
années, ont porté sur les soins de premier recours.
Anne-Marie Brocas,
présidente du Haut
Conseil pour l’Avenir
de l’Assurance Maladie
Le
Médecin de France
6
n°1275 • 30 novembre 2016
Le Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie (HCAAM), instance de réflexion réunissant 67 membres issus
de toutes les composantes du système de santé, vient de rendre un avis sur l’innovation dans le domaine de la santé.
Il appelle à une stratégie ambiguë pour permettre l’intégration des innovations dans les pratiques professionnelles
et les usages de consommation des biens et services de santé.
encontre
Le HCAAM vient de rendre un avis
sur les nouvelles formes d’innovation dans le domaine de la santé.
Pour quelles raisons vous êtes-vous
intéressés à ce sujet ?
L’initiative a été lancée par la précédente
présidente du HCAAM. Et je dois dire
qu’elle était particulièrement opportune, au
vu de ce qui se déroule actuellement dans
le domaine de la santé. À rebours d’une
idée qui a pu être émise il y a quelques années, il n’y a pas de panne de l’innovation.
Sur le plan thérapeutique, l’arrivée de nouveaux traitements en oncologie et dans des
pathologies réputées incurables, comme
l’hépatite C, suscitent de grands espoirs
pour certains patients. L’innovation est également technologique. C’est le cas dans le
secteur du dispositif médical, où le progrès
est remarquablement dynamique. Enfin,
la révolution digitale offre de formidables
perspectives en matière de prise en charge
des patients. Outre la télémédecine, qui apporte des preuves de valeur au fil de chaque
expérimentation, l’e-santé se caractérise par
une très forte créativité, s’agissant des applications pour smart-phones comme des objets connectés, le plus souvent à la frontière
du bien-être et du soin. Mais, pour répondre
à l’évolution des besoins de santé, l’innovation organisationnelle est essentielle. C’est
à cette dimension que le HCAAM a souhaité s’attacher dans ses travaux récents. À
un horizon d’une dizaine d’années, il faut
imaginer une organisation sanitaire beaucoup plus transversale, articulant à tous les
niveaux les interventions des professionnels de ville et des établissements de santé, dans le cadre de nouveaux modèles de
coopération permettant de mieux répondre
dans les territoires aux besoins des patients
chroniques ou âgés. Une approche centrée
sur le patient doit émerger. À cet égard, les
technologies numériques démultiplient
le potentiel des nouvelles organisations,
en favorisant le partage de l’information,
l’échange, l’interprétation des données et la
participation des patients.
Justement, l’écosystème sanitaire
est-il de nature aujourd’hui à intégrer favorablement ces innovations
technologiques et organisationnelles pour une amélioration des
pratiques professionnelles ?
Des évolutions importantes sont engagées.
Mais, pour réussir une transformation profonde du système, il faut réussir à faire sau-
ter certains verrous. Tout d’abord, l’organisation fortement cloisonnée du pilotage et
de l’allocation des moyens est un obstacle
au changement. C’est ce qui conduit le
HCAAM à préconiser une gestion médicalisée de l’ONDAM pour sortir de la logique
d’enveloppes rigides par secteur et favoriser des réallocations de ressources suivant l’évolution souhaitée de l’offre. Une
adaptation des tarifications est également
nécessaire pour favoriser une plus grande
continuité des prises en charge en ville et
en établissement et le développement de
formes nouvelles d’offres portées par les
professionnels, mieux coordonnées voire
intégrées pour certains groupes de patients ou certains parcours. Pour conduire
le changement, il faut aussi être capable
d’anticiper et d’évaluer. Le HCAAM préconise la mise en place d’un système de veille
plus structuré et transparent, permettant
d’identifier en amont le potentiel des innovations et de diffuser ses analyses auprès
de l’ensemble des acteurs du système. Il
préconise le développement des études en
vie réelle, nécessaires, à la fois pour mieux
connaitre le profil de sécurité des innovations, mais également pour bien évaluer
leur valeur effective, « sur le terrain », en
termes d’amélioration des soins.
Les professionnels de santé sont-ils
suffisamment formés pour faire bon
usage de ces innovations ?
La dimension des ressources humaines est,
à notre sens, une priorité. Elle est au cœur
de tout système d’innovation. La réforme
des études médicales était centrale dans
la réforme Debré d’où est issu le modèle qui
structure encore fortement notre système
de santé, modèle qu’il s’agit aujourd’hui
de dépasser. C’est à présent l’évolution
de l’ensemble des professions médicales
et non médicales qu’il faut considérer, la
formation des uns et des autres, les compétences et les métiers nécessaires pour
répondre aux besoins et constituer les
équipes de santé de demain. La dimension
des nouvelles technologies doit bien sûr
être pleinement intégrée dans l’ensemble
des formations initiales et continues. Mais
fondamentalement aussi, celles-ci doivent
préparer les professionnels à un exercice
qui sera le plus souvent en ville, ambulatoire, collectif, fondé sur des approches pluridisciplinaires et pluri professionnelles. La
Le
Médecin de France
7
mobilité entre secteurs et formes d’exercice devrait être facilitée pour permettre
la construction de parcours professionnels
variés et souples et de projets positifs, dans
un système qui se transforme.
Vous appelez à la définition d’une
véritable stratégie pour l’innovation en santé. Dans quel but ?
Cette approche stratégique apparait indispensable, afin de constituer le pendant de
la démarche mise en place depuis plusieurs
années dans le cadre de la politique industrielle, avec le Conseil stratégique des industries de santé (CSIS) et le Contrat de filière santé (CFS). Elle doit s’appuyer sur les
attentes des patients et des professionnels
et permettre la bonne coordination dans
la durée des différentes administrations
et caisses du secteur de la santé autour de
priorités bien identifiées vis-à-vis de l’innovation, faisant de l’accès égal de tous aux
meilleures prises en charge une priorité et
de l’efficience une exigence. Cette stratégie
doit fournir un cadre favorable aux innovateurs et aux initiatives de terrain. Aussi, les
professionnels de santé qui s’impliquent
dans des modèles innovants doivent-ils
être soutenus, l’accompagnement de leur
démarche nécessitant une attention particulière, de même que la capacité à généraliser les formules qui fonctionnent.
Au programme du HCAAM, vous
avez prévu en 2017 de travailler sur
les spécialités médicales. Quel est
votre diagnostic sur ce thème ?
Les travaux menés depuis une décennie,
de même que les décisions prises, se sont
beaucoup focalisés sur les soins de premier
recours. Il fallait le faire, en particulier pour
répondre à la problématique de l’accès aux
soins pour tous. Mais force est de constater
que la médecine spécialisée de second recours souffre d’un déficit d’analyse transversale. Il existe de nombreuses études sectorielles, mais elles se limitent au champ de
chaque spécialité. Or, à l’heure où le virage
ambulatoire devient un impératif d’organisation, nous devons disposer d’une vision
plus globale et prospective sur les soins de
spécialité, portant aussi bien sur les conditions de la spécialisation, la place des différents professionnels dans l’organisation
des prises en charge que sur les conditions
économiques de l’exercice.
n°1275 • 30 novembre 2016
D
ossier
À l’instar d’autres secteurs professionnels, la santé présente un taux élevé de
risque psycho-social, avec une forte
incidence sur l’état de santé des professionnels. Surmenage, pression des
« patients - consommateurs », insécurité, poids des charges et de la paperasserie... les facteurs de vulnérabilité
sont multiples. Et les solutions de soutien et de soins doivent être adaptées à
un public spécifique.
«S
yndrome d’épuisement professionnel : ensemble de réactions
consécutives à des situations de
stress professionnel chronique dans lesquelles la dimension de l’engagement est
prédominante. » Inscrite sur le site de
l’INRS, la définition de ce syndrome
appelé aussi « burn-out », appartient
à la catégorie plus large de ce que les
spécialistes appellent « le risque psycho-social ». Il se caractérise par trois
dimensions : l’épuisement émotionnel (sentiment d’être vidé de ses ressources émotionnelles), la dépersonnalisation ou le cynisme (insensibilité au
monde environnant, déshumanisation
de la relation à l’autre) et le sentiment
de non-accomplissement personnel au
travail (sentiment de ne pas parvenir
à répondre correctement aux attentes
de l'entourage, dépréciation de ses ré-
sultats, sentiment de gâchis…). L’INRS
place les professions du soin parmi les
plus exposées au risque de burn-out,
notamment parce qu’aux facteurs de
stress classique (surcharge de travail,
manque de reconnaissance, pression
de la demande…) s’ajoute le plus
souvent la charge émotionnelle liée à
l’état d’affaiblissement du malade. De
fait, depuis une vingtaine d’années, de
nombreuses études ont montré que les
professionnels de santé, et en particulier les médecins, vivent quotidiennement avec « l’épée de Damoclès » du
burn-out.
Un soignant sur deux concerné
Selon l’association MOTS, créée en
2010 et qui vient en aide aux professionnels, « l’épuisement professionnel menace
un médecin sur deux. » Les statistiques
tenues par l’Ordre des médecins sont
sans appel : la profession connait un
taux de suicide 2,5 fois plus élevé que
la moyenne nationale. Chaque année,
45 praticiens passent à l’acte. Autre
résultat quantitatif, l’association Soins
aux professionnels de santé (SPS) a
fait réaliser une enquête fin 2015 par
la société Stethos. Là encore, près de
50 % des personnes interrogées se disaient avoir été concernées par un tel
syndrome durant leur carrière. Et 14 %
d’entre elles indiquaient être touchées
par des pratiques addictives ( 7 %
Le
Médecin de France
8
liées à l’alcool, 8,5 % à des substances
de type psychotrope / anxiolytiques).
Enfin on peut citer également une
enquête récente de l’Ordre des médecins, qui montre que le problème
est transgénérationnel. Auprès d’une
population de 8000 étudiants et jeunes
médecins, le questionnaire illustre la
réalité du burn-out dès le début de
carrière, puisque 63 % évoquent « un
épuisement émotionnel », 43 % un sentiment de « perte d’accomplissement personnel », 25 % souffrent de « dépersonnalisation des relations avec le patient » et
14 % avouent « des pensées suicidaires ».
Par ailleurs, leur suivi médical apparait
notoirement insuffisant : 63 % n’ont
pas rencontré la médecine du travail
ou universitaire depuis deux ans, 68 %
n’ont pas consulté de médecin généraliste durant l’année précédente.
La pression
d’un environnement stressant
On le voit, le phénomène est préoccupant et lié notamment à une dégradation des conditions d’exercice. « Les
tensions démographiques pèsent lourd
dans la pénibilité du travail en médecine
de ville, estime Philippe Boutin, président de la Conférence nationale des
URPS. Quand la salle d’attente se remplit,
les patients sont de moins en moins compréhensifs. » Jean-Paul Ortiz, président
de la CSMF, évoque pour sa part les
n°1275 • 30 novembre 2016
surcharges imposées par les multiples
contraintes administratives et règlementaires. « Ces tâches répétitives réduisent le temps médical disponible et dévalorisent la fonction du médecin libéral. »
Les pressions exercées par les tutelles
peuvent également peser sur le moral
du praticien. Jean-Paul Ortiz se souvient de ce confrère au bord de la rupture, après avoir reçu une lettre recommandée de la CPAM sur son profil de
prescription, sans autre forme d’explication. « Il a fallu intervenir auprès de la
caisse pour qu’elle cesse sa procédure, car
le confrère ne supportait pas que sa probité soit mise en cause. » Quand le libéral
est « sur la corde raide », après plus de
50 heures de travail, certains événements désagréables peuvent prendre
des proportions déraisonnables et faire
basculer ceux devenus vulnérables.
Agir pour réduire les facteurs de risque
Que faire pour repérer, assister, soulager, voire soigner ces professionnels de
santé en grande difficulté ? C’était le
thème du 2e colloque organisé par SPS,
le 29 novembre dernier à Paris. Intitulé
« Soigner les professionnels de santé rendus vulnérables : optimiser le parcours de
soins », cette réunion visait à présenter
les solutions qui se développement un
peu partout, à l’initiative d’une pluralité d’acteurs. « Le premier colloque de
décembre 2015 avait pour objet de parler
d’un sujet qui reste tabou et caché, expliquait Didier Sicard, président d’honneur du Comité consultatif national
d’éthique, qui introduisait le colloque.
Aujourd’hui, la question de la vulnérabilité des professionnels de santé est mieux
connue et mieux partagée. Toutefois, cette
vulnérabilité doit être entendue comme les
souffrances acquises via l’environnement
et les conditions d’exercice, tout particulièrement les facteurs économiques, plutôt que
comme celles qui seraient liées à la fragilité
Épuisement professionnel
des soignants à soigner
des soignants eux-mêmes. Elles intègrent le
fait que les facteurs environnementaux et
les obligations professionnelles l’emportent
sur l’essence même du métier. » Autrement dit, la vulnérabilité n’est pas intrinsèquement attachée au statut de
professionnel de santé. En revanche, la
difficulté de l’environnement professionnel contribue à le fragiliser. Il est
donc vital d’agir pour réduire ces facteurs de risque.
Des institutions attentives
Les intervenants au colloque l’ont bien
compris, avec la participation de représentants d’institutions partenaires
des médecins. Le président de la CNAVPL, Pol Lavefve, a indiqué ainsi que
« le régime de gestion de la retraite de base
est conscient des difficultés des professionnels. Sa caisse reverse plus d’un million
d’euros par an à la CARMF pour le fonds
d’action sociale, dont la fonction est de venir en aide à des praticiens en difficulté. »
Le RSI a également identifié la portée
du risque psycho-social chez les travailleurs indépendants. « Nous essayons
de jouer un rôle de sentinelle, expliquait
Patricia Vernay de la Direction gestion
des risques et action sociale, en repérant
les personnes en fragilité. Nous pouvons
notamment nous appuyer sur les informations d’ordre économique dont nous
disposons pour anticiper des difficultés
personnelles. » La CNAM elle-même se
dit très attentive aux signaux de malêtre repérables pari les professionnels
de santé libéraux. « Il est très important
pour nous que les professionnels de santé
bénéficient de conditions de travail satisfaisantes, il en va de la qualité des soins,
estimait Philippe Ulman, directeur de
l’offre de soins. Et nous venons en aide à
toutes initiatives locales qui ont pour but de
soutenir et de prendre en charge les professionnels en difficulté. »
Composez le 0 805 23 23 36
De fait, de nombreux exposés ont montré que la dynamique de l’entraide et du
soutien aux professionnels vulnérables
est bien engagée. Les témoignages
d’associations comme l’ASSPC (Poitou-Charentes), l’AAPML (Association
d’Aide Professionnelle aux Médecins
Libéraux) ou MOTS (Organisation du
Travail et santé du Médecin) mettent
d’abord en exergue l’importance d’une
Le
Médecin de France
9
écoute attentive, via des lignes téléphoniques dédiées, assortis d’un suivi
au plus près des conditions d’exercice.
Certaines proposent par exemple une
aide à l’organisation du cabinet afin de
prévenir les excès de charge de travail.
D’autres forment des professionnels
de santé au soutien et à l’accompagnement de confrères vulnérables, car le
compagnonnage entre pairs fait partie
des solutions les plus efficaces. Enfin,
ce colloque a été l’occasion pour SPS
de présenter sa plate-forme nationale,
à partir d’un n° vert d’appel national.
En composant le 0 805 23 23 36, l’appelant est connecté à une plate-forme
d’écoute. Spécialement formés, les
écoutants sont en mesure d’identifier
les profils et les besoins, d’orienter
les personnes vers des services locaux
d’accompagnement. La plate-forme
s’appuie ainsi sur les dispositifs régionaux existants proposant plusieurs
types de service : aide aux formalités,
solutions de remplacements, solutions
de soins auprès de généralistes et de
spécialistes spécialement formés.
n°1275 • 30 novembre 2016
D
ossier Épuisementdesprofessionnel
soignants à soigner
Jean-Paul Ortiz, président de la
CSMF, vice-président du CNPS
Pour le président de la CSMF, la souffrance au travail des professionnels appelle à une mobilisation de tous. Outre
la prise en charge adaptée, il faut également favoriser le retour à l’activité.
Vous avez prononcé le discours
d’ouverture du colloque « Professionnels de santé vulnérables ».
En quoi ces professionnels sont-ils
particulièrement exposés ?
On le sait, le sujet n’est pas nouveau,
et il repose déjà sur de nombreuses
études, notamment menées par les
unions régionales de médecins. La
problématique de l’épuisement des
professionnels de santé et au-delà
de leur état de santé, fait écho à un
débat plus large sur la qualité de
vie au travail. Des cas dramatiques
de suicides, dans certaines grandes
entreprises, ont créé un émoi médiatique légitime, et forcé les pouvoirs
publics à prendre des décisions
sur ce qu’on appelle le risque psycho-social. Les chiffres le montrent,
les professionnels de santé libéraux
ne sont pas épargnés par ce type de
risque. Les facteurs de vulnérabilité
sont connus, et se cumulent souvent
au détriment de la santé des soignants : lourde charge de travail, horaires décalés, pression de patients
« impatients », paperasserie, tensions financières, judiciarisation de
la santé… Surtout, l’une des caractéristiques, en particulier chez les médecins, c’est la difficulté à en parler.
Un médecin qui se sent vulnérable,
fragile psychologiquement, ou est
atteint d’une pathologie, a du mal en
à en parler. Il a parfois honte, a peur
de l’opinion de ses patients et s’enferme dans son mal-être. Nous avons
tous en tête les cas dramatiques de
confrères, rencontrés à telle ou telle
occasion, et qui se suicident peu de
temps après sans que personne ne
se soit aperçu de sa détresse.
Que peut-on faire
pour leur venir en aide ?
La première nécessité, c’est de sensibiliser les pouvoirs publics, car ils
doivent à tout prix agir pour simplifier l’exercice des professionnels
libéraux, les soulager de cette chape
administrative qui pèse fortement
sur leur moral, comme le montrent
toutes les études. Deuxièmement, je
pense que nous devons imaginer un
code de bonne conduite entre professionnels et patients, afin que chacun ait des droits et des devoirs envers l’autre, en particulier le respect.
Il est essentiel de redéfinir les fondements d’une relation de qualité.
Enfin, en matière de prise en charge,
il est vital que les professionnels de
santé puissent être traités selon des
modalités et des circuits spécifiques,
Le
Médecin de France
10
de façon confidentielle. Il faut notamment éviter qu’ils puissent rencontrer leurs patients.
Comment bien préparer le retour à
l’activité après un épisode de soins ?
Le moment du retour, après un arrêt
de travail plus ou moins longtemps,
doit être soigneusement étudié et anticipé. Car un praticien qui retrouve
à son cabinet des lettres recommandées, des mises en demeure voire
des menaces de saisie, parce qu’il
n’a pas pu travailler et s’acquitter de
ses charges, risque immédiatement
de replonger. Il faut donc l’accompagner, prévenir les différents bailleurs
de sa situation et obtenir la suspension des versements de charges et
de cotisations. Il faut également encourager et favoriser les dispositifs
d’entraide entre confrères, tels qu’ils
peuvent déjà exister au sein de cabinets de groupe ou d’associations
locales. Lorsqu’un confrère souffre
d’épuisement professionnel ou de
longue maladie, tout le monde doit
se sentir concerné et lui venir en
aide. Car nous sommes tous potentiellement vulnérables à ce type de
situation.
n°1275 • 30 novembre 2016
D
ossier Épuisementdesprofessionnel
soignants à soigner
Des professionnels en
demande… mais désorientés
L’association SPS a fait réaliser par Stethos une enquête sur les attentes des professionnels de santé en cas de
souffrance psychologique. Si la demande est forte, peu savent où s’adresser.
A
près une enquête présentée en
novembre 2015, qui indiquait
que près de la moitié des professionnels interrogés estimaient avoir
été en situation de souffrance dans
leur carrière, la 2e édition réalisée en
octobre 2016 s’attache à évaluer leur
connaissance des dispositifs existants. Plus de 4000 professionnels
de santé ont répondu, dont 25 %
de kinés et 20 % de médecins, au
questionnaire diffusé par internet.
Les trois quart d’entre eux exercent
uniquement en libéral. Plus de 75 %
déclarent qu’ils chercheraient de
l’aide, en cas de souffrance psychologique (syndrome d’épuisement
professionnel, comportements addictif…). Les femmes (79 %) seraient plus enclines à le faire que
les hommes (69 %). Mais près de
la moitié indiquent qu’ils ne sauraient pas où s’adresser. Ceux qui le
savent, en revanche, solliciteraient
en premier lieu leur entourage familial (43 %), un confrère (38 %), un (e)
ami (e) (30 %), leur médecin traitant
(15 %). Concernant les associations
d’aide, le constat est clair : leur notoriété est très faible, puisque 95 %
n’en connaissent pas. Et 97 % ne
savent pas non plus quels sont les
n° d’écoute disponibles. Les méde-
cins sont (un peu) plus nombreux
à connaitre les recours possibles et
citent les associations AAPML, SPS,
MOTS et ASRA.
Pour un n° vert gratuit géré localement
Concernant les attentes, 80 % souhaitent qu’un numéro vert gratuit,
dédié et garantissant l’anonymat,
soit géré par des associations professionnelles (nationale ou régionales),
avec une préférence pour l’échelon régional (46 %). Le psychologue
est désigné comme l’interlocuteur
d’écoute privilégié. Et l’écoute psychologique, assortie de l’orientation,
du suivi et de l’accompagnement est
plébiscité comme principal service.
Par ailleurs, près de 3 professionnels
sur 4 sont demandeurs de consultations physiques. Et plus de la moitié
privilégient l’orientation vers des
structures qui leur seraient dédiées.
La vulnérabilité des professionnels de santé est un problème à
prendre au sérieux : la majorité des
personnes sondées estiment en effet qu’elle peut affecter la qualité
des soins, au point de mettre la vie
du patient en danger. Un sentiment
encore plus marqué chez les médecins, qui sont 65 % à le penser. Qui,
donc, doit prendre le sujet à bras-leLe
Médecin de France
11
corps ? L’État est évoqué en premier
(57 %), suivi par les ordres professionnels (49 %), la CNAM ( 47 %), les
syndicats professionnels (31 %) et
les assurances privées (15 %).
L’arrêt de travail,
un « luxe économique »
S’ils arrivent en dernière position,
les assureurs ont visiblement un
rôle important à jouer : mieux faire
connaitre les dispositifs de protection
existants, notamment en matière de
prévoyance. 75 % des sondés disent
avoir un contrat de prévoyance, mais
la moitié seulement savent qu’ils sont
assurés pour le manque à gagner en
cas d’arrêt de travail. Interrogés sur
le nombre maximal de jours passés à
se soigner sans travailler, la moyenne
estimée est de 24 jours. Mieux informer et mieux protéger les professionnels de santé appelés à stopper leur
activité apparait comme un enjeu
essentiel pour toutes les parties prenantes : plus de deux tiers déclarent
qu’un arrêt de travail serait « un luxe
économique » qu’ils ne pourraient
se permettre en cas de souffrance.
Et ils ajoutent également qu’ils refuseraient de s’arrêter « parce qu’ils
ne veulent éviter que leur situation soit
connue ».
n°1275 • 30 novembre 2016
D
ossier Épuisementdesprofessionnel
soignants à soigner
« Soyons vigilants
avec les confrères »
Les URPS se sont beaucoup
investies sur le sujet du burnout. Comment expliquer
l’ampleur du problème ?
Philippe Boutin,
président de la CN-URPS
En effet, les premières études
datent d’une quinzaine d’années.
Région par région, elles ont montré qu’il existait un lien évident
entre épuisement professionnel et
tensions démographiques. Là où
l’offre de soins est difficile, l’arrêt
d’un confrère peut entrainer un
effet cascade en alourdissant la
charge de travail des autres praticiens. Ces travaux ont également
démontré qu’il ne faut pas se limiter à la dimension psychologique
du mal-être. Car lorsque les conditions d’exercice sont difficiles, c’est
la santé globale du praticien qui
est exposée, avec un risque d’addictions élevé et des pathologies
lourdes parfois associées, de type
cancers ou maladies cardio-vasculaires. C’est à partir de ces constats
que s’est construite l’idée d’une
réponse adaptée : le soin aux soignants. Des associations se sont
créées dans différentes régions,
avec pour principe de proposer
une ligne d’écoute téléphonique,
puis un contact approfondi avec
un confrère spécialement formé.
En Poitou-Charentes, l’association
ASSPC s’est constituée en 2013 et
elle est fortement sollicitée.
Faut-il selon vous créer des
filières spécialisées pour traiter
les professionnels de santé ?
Je n’irai pas jusqu’à imaginer des
cliniques spécialisées dédiées aux
professionnels de santé, comme
cela peut être le cas dans des pays
voisins. Mais il faut en revanche
un maillage intelligent du territoire, permettant une prise en
charge qui préserve la confidentialité du professionnel. Car c’est
une constante : un professionnel
de santé malade ou vulnérable a
toutes les difficultés du monde à
reconnaitre sa situation. Peut-être
peut-on concevoir des chambres
dédiées ou des espaces isolés
dans certains établissements, afin
de garantir l’anonymat des praticiens. En tous les cas, il me parait essentiel que chacun prenne
conscience du problème et soit vigilant avec ses confrères. Un coup
de fil, un peu de temps consacré
peuvent faire beaucoup pour aider un confrère vulnérable et lui
faire accepter un suivi adapté.
C’est la notion même d’entraide
professionnelle, qui est au cœur
de nos valeurs.
Jeunes médecins :
une santé préoccupante
En octobre dernier, l’Ordre des médecins publiait dans son magazine
les chiffres d’une étude menée par sa Commission Jeunes médecins sur
l’état de santé des jeunes médecins. L’institution la juge « préoccupante »,
au vu des résultats, récolté auprès de 8 000 étudiants et diplômés
récemment. 30 % des praticiens interrogés évaluent comme « mauvais ou
moyen » leur état de santé. Dans 72 % des cas, cette assertion est corrélée
avec la perception d’une charge de travail trop importante, égale ou
supérieure à 48 heures par semaine. Les déclarations sur les symptômes
d’épuisement sont éloquents : 63 % évoquent « un épuisement », 43 %
un sentiment de « perte d’accomplissement personnel », 25 % souffrent de
« dépersonnalisation des relations avec le patient » et 14 % avouent « des
pensées suicidaires ». Par ailleurs, leur suivi médical apparait notoirement
insuffisant : 63 % n’ont pas rencontré la médecine du travail ou
universitaire depuis deux ans, 68 % n’ont pas consulté de médecin
généraliste durant l’année précédente.
Le
Médecin de France
12
n°1275 • 30 novembre 2016
D
ossier Épuisementdesprofessionnel
soignants à soigner
Barcelone : la reconnaissance
du patient médecin
En Catalogne, une clinique dédiée aux professionnels de santé existe depuis une quinzaine d’années, Elle traite
depuis peu les phénomènes de burn-out chez les médecins.
U
nique en son genre en Europe,
la Clinique Galatea a vu le jour
à Barcelone au début des années
2000. Son objectif : prendre en charge
le professionnel de santé souffrant
d’addictions et de pathologies psychiatriques sévères. Placée sous
l'égide de la fondation du même
nom créée par l'Ordre des Médecins de Barcelone, elle s'intéresse
depuis peu aux pathologies non sévères avec une attention particulière
prêtée au phénomène de burn out.
En créant début 2016 une consultation qui lui est dédiée, elle prend
en compte le nombre croissant des
personnels de santé affectés par
cette réaction invalidante au stress
professionnel. Ce « service de soutien
émotionnel », qui propose au malade
un accompagnement psychologique
et des groupes de paroles, peut aussi
prendre en charge, si cela s’avère nécessaire, une médiation entre le praticien et les ressources humaines de
la structure où il exerce. Mais « ce qui
fait surtout la force de la proposition de
la clinique, précise Antoni Calvo, directeur Général de la Fondation, c'est
la connaissance exceptionnelle qu’elle a
des spécificités du patient médecin. Cela
permet aux équipes de s’adapter de façon extrêmement juste et précise à ses
problématiques ». À la Clinique Ga-
latea, on a notamment depuis longtemps identifié la difficulté du médecin à se reconnaitre malade. On
connait aussi par exemple la crainte
que sa situation ne soit rendue publique, car elle est en général perçue
comme un aveu de faiblesse, voire
d’incapacité professionnelle. C’est
pourquoi il est proposé au soignant
de prendre un nom d'emprunt lors
de son admission. À la clinique Galatea, le parti pris est donc clair : le
médecin n'est pas un patient comme
les autres. Lorsqu'il s'agit de traiter
une pathologie liée à l'environnement professionnel, cette prise en
compte est primordiale.
SPS : une association tranversale
Créé en 2015, l’association SPS veut donner plus de visibilité à la problématique de l’épuisement
professionnel et notamment mieux faire connaitre les solutions disponibles aux personnes en
fragilité. C’est pourquoi elle vient d’ouvrir sa plate-forme, avec un n° national unique. Elle a pour
origine le rassemblement d’un groupe d’experts souhaitant partager et défendre la santé des
professionnels de santé vulnérables. Son objectif est de susciter une véritable prise de conscience
et de proposer des actions concrètes. Elle soutient l’organisation des deux premiers colloques
nationaux qui ont rassemblé des personnalités du monde de la santé souhaitant partager leurs
expériences et les actions engagées en faveur de la protection des soignants vulnérables. SPS
souhaite mobiliser des experts proactifs dans la protection des soignants et contribuer à la
création d’un véritable parcours de soins dédié pour les soignants.
Le
Médecin de France
13
n°1275 • 30 novembre 2016
actu en bref
Convention :
la CSMF participe
à la négociation
des avenants
C’est une règle de la vie conventionnelle : même s’il n’est pas
signataire, un syndicat médical
représentatif peut participer à la
négociation des avenants. C’est
pourquoi la CSMF s’est rendue
le 30 novembre au siège de l’assurance maladie pour discuter
des avenants qui doivent être
théoriquement négociés avant
la fin de l’année. Au menu : la
Rémunération sur Objectifs de
Santé Publique (ROSP) pour la
santé de l’enfant, avec des indicateurs portant sur l’asthme, la
vaccination, l’antibiorésistance,
l’obésité et le dépistage des
troubles sensoriels (ou troubles
de l’apprentissage). À propos de
l’obésité infantile, la CNAMTS
s’arrête sur le seul indicateur
de la mesure de l’IMC une fois
par an. Or, comme le note Les
Généralistes - CSMF, « pour la
HAS, l’élément principal de repérage, c’est l’âge du rebond d’adiposité. Plus il est précoce, et plus
le risque d’obésité à l’âge adulte
est élevé. » Le syndicat déplore
donc « qu’encore une fois, c’est
la caisse qui décide contre l’avis
des experts. » Autre décision qui
suscite la colère de la CSMF : la
négociation de la ROSP des endocrinologues, prévue depuis
fin 2014, sera encore repoussée
au 26 janvier 2017. Or, à la signature de l’accord conventionnel,
l’assurance maladie s’était engagée à boucler le dossier avant
la fin de l’année. « Comment réta-
Le
blir la confiance, alors que ce texte,
à peine signé, est déjà démenti ? »,
s’interroge le syndicat.
Complémentaires :
la facture est salée !
Voilà encore un dossier dont la
ministre de la Santé se targue,
alors que les résultats ne sont
pas au rendez-vous. C’est le
cas avec la généralisation de la
complémentaire santé à tous
les salariés, et le plafonnement
des garanties proposées dans
le cadre des contrats responsables. Marisol Touraine affirme en effet que cette décision permettrait de réduire les
reste-à-charge… alors qu’une
étude d’un cabinet de courtage
démontrerait le contraire. Menée par Mercer, auprès d’1,3
million de salariés affiliés par
le biais de ses 2000 entreprises
clientes, l’enquête montre un
bond de 102 % du reste-àcharge à l’hôpital, de 130 % pour
les consultations de spécialistes
et de 19 % chez les généralistes.
« La ministre de la Santé prend
une nouvelle fois le problème à
l’envers, note la CSMF dans un
communiqué. Les compléments
d’honoraires sont indispensables
au maintien de certaines spécialités
médicales en ville et sont le résultat du désengagement croissant de
l’assurance maladie. Pour diminuer
le reste-à-charge, il faut augmenter
les tarifs conventionnels des actes
médicaux pris en charge par la Sécurité Sociale, qui sont parmi les
plus bas d’Europe. En voulant favoriser l’accès aux soins, la politique
dogmatique de Marisol Touraine
augmente les inégalités sociales
face aux remboursements. »
Concertation vaccinale : vers l’obligation temporaire ?
Lancée il y a dix mois, la
concertation vaccinale touche
à sa fin. La commission Fischer
a rendu ses préconisations, à
l’issue de débats menés avec
Médecin de France
14
n°1275 • 30 novembre 2016
des représentants des patients
et des professionnels. Le rapport préconise de maintenir et
même d’élargir le champ de la
vaccination obligatoire… Mais
pour une durée temporaire. Le
comité s’inquiète en effet des
réserves croissantes de l’opinion vis-à-vis de la vaccination,
et de la diminution du taux de
couverture. Actuellement 3 des
11 vaccins inscrits au calendrier vaccinal sont obligatoires.
Selon le Pr Fischer, « trop d’indices montrent que sans l’obligation, beaucoup de gens seraient
prêts à arrêter de se faire vacciner
et / ou de faire vacciner leurs enfants. » L’obligation serait donc
maintenue tant qu’une majorité ne serait pas suffisamment
« disciplinée ». Mais les plus
réfractaires seraient autorisés
à s’affranchir de l’obligation,
à condition de signer un document annexé au carnet de
santé, une forme de décharge
où ils accepteraient toutes
les conséquences, y compris
l’impossibilité d’intégrer une
crèche. D’autres propositions
sont destinées à faciliter le parcours vaccinal : gratuité totale
des vaccins, retour de la vaccination à l’école, extension de
l’acte de vaccination à d’autres
professionnels de santé (pharmaciens, infirmières…). Sur
ce dernier, point, la CSMF a
exprimé ses réserves dans un
communiqué. « L’extension de
l’acte de vaccination à d’autres
professions pose un problème majeur de collecte d’informations,
en l’absence de dossier médical
personnel opérationnel, et reflète
le désengagement complet du
système de santé sur les thèmes
de prévention, estime le syndicat.
Au lieu de structurer la prévention
autour du médecin traitant, avec
des véritables consultations de
prévention à différents âges clés,
on préfère éparpiller les acteurs,
ce qui revient à ne pas donner une
vraie orientation et une place importante, à part entière, à la prévention dans le système de santé. »
actu en bref
Le numerus clausus en hausse : une
mauvaise solution
Après le rejet de la proposition
de loi Vigier, qui voulait mettre
fin à la liberté d’installation,
Marisol Touraine a cru bien
faire, en annonçant une hausse
de 11 % du numerus clausus,
soit 478 places supplémentaires dans 22 facultés. Mais
c’est encore une mauvaise idée.
Comme le fait remarquer la
CSMF, 19 % seulement des étudiants en moyenne atteignent
la 2e année d’études. Et le
contournement du numerus
clausus est devenu très facile,
via des formations à l’étranger.
Le vrai problème est ailleurs :
pourquoi la médecine libérale
attire si peu ? Alors que La
France n’a jamais compté autant de médecins, l’installation
en libéral a lieu en moyenne à
38 ans. La CSMF regrette un
effet d’annonce médiatique et
appelle l’ensemble des acteurs
à une réflexion globale sur le
principe de numerus clausus
et sur la formation initiale des
médecins.
UNAPL : une pétition
contre le nouveau
rôle des AGA
À l’occasion de son congrès
national, l’UNAPL s’est à nouveau insurgé, le 2 décembre,
contre « l’examen périodique
de sincérité » auquel les Associations de Gestion Agréée devront se livrer tous les trois ans
pour les professionnels sans
comptable et tous les six ans
pour les professionnels avec
comptable. Car ce sont de nouvelles contraintes administratives qui pèseront sur le quotidien des adhérents, tandis que
la vocation des prévention dévolue aux AGA sera abandonnée. L’UNAPL a donc mis en
ligne une pétition, que peuvent
signer tous les professionnels
libéraux (harcelementfiscal.fr),
afin que le gouvernement supprime cette mesure.
Le
Audioprothèses :
un marché à un
milliard d’euros
Selon une étude de l’assurance maladie, en 2015, plus de
630 000 audioprothèses ont été
vendues à près de 360 000 patients. Un marché en hausse de
6,6 %, qui représente environ
un milliard d’euros, mais dont
seulement 134 millions d’euros sont pris en charge par le
régime de base. Le coût moyen
est de l’ordre de 1 500 euros,
avec une durée de vie supérieure à cinq ans en moyenne.
La distribution et l’équipement
des patients se fait par le réseau
des audioprothésistes, qui sont
environ 3800 sur l’ensemble du
territoire, auxquels s’ajoutent
certains centres d’optique (9 %
du marché).
Médecin de France
15
n°1275 • 30 novembre 2016
portrait
Bruno Stach : un spécialiste libéral
Dans le cadre de ses multiples Un adepte de la formation continue
responsabilités syndicales, Bruno Bruno Stach s’est découvert une
Stach défend la vision d’une mé- passion pour l’enseignement et la
médicale continue. Il redecine de spécialité mieux intégrée formation
joint rapidement l’Association des
dans un parcours de soins mieux Pneumologues de la Région Nord
coordonné. Selon lui, les spécia- (APRN), dont il prend la présidence
listes libéraux sont aussi des pro- quelques années plus tard. Dans ce
contexte, il participe tous les six mois
fessionnels de santé de proximité aux réunions de l’unique syndicat
incontournables.
qui représente les 1 300 pneumolo-
B
runo Stach s’est installé à Valenciennes, en 1993, dans un
cabinet libéral. Mais il a toujours gardé un pied à l’hôpital, où
il continue d’ailleurs de travailler
à mi-temps, au sein d’une clinique
privée à but non lucratif. « Cette particularité tient surtout à la spécificité de
la discipline. La pneumologie ne peut
pas se concevoir sans une mixité des
modes d’exercice entre la ville et l’hôpital, qu’il s’agisse d’établissements de
soins publics ou privés », précise-t-il.
Associé de longue date dans un
cabinet de groupe qui a compté
jusqu’à 23 spécialistes, il exerce
aujourd’hui dans une plus petite
structure, avec l’aide d’un confrère.
« La loi sur les zones franches a eu raison de notre belle aventure », regrettet-il encore.
gues libéraux répertoriés en France,
à savoir le Syndicat de l’Appareil
Respiratoire (SAR), avant d’hériter de la présidence de la structure.
Une fonction qu’il continue d’assumer. « Notre syndicat a de tout temps
adhéré à l’Uméspé, la branche spécialiste de la CSMF, qui a toujours su porter avec engagement et discernement la
voix de la profession », tient-il à souligner. Membre du bureau national
de l’Uméspé, Bruno Stach est également membre du groupe CSMF
Nord. Il est par ailleurs secrétaire
adjoint de la Fédération Française
de Pneumologie.
les conventions excluent de plus en plus
la médecine d’expert libérale, déploret-il. Les spécialistes libéraux ont toute
leur place dans les parcours de soins,
aux côtés des acteurs du premier et du
troisième recours que sont les médecins
traitants et les établissements de santé.
Nous sommes aussi des professionnels
de santé de proximité. »
Bruno Stach estime notamment que
la prise en charge des pathologies
chroniques doit être repensée, avec
le concours des spécialistes libéraux : « Notre action pourrait s’avérer
très utile pour des patients non contrôlés. Nous pourrions apporter tout notre
savoir-faire. À nous de bâtir des cabinets
de groupe pluri-spécialités pour mieux
" transversaliser " et mieux coordonner
la prise en charge de ces malades. »
Un professionnel de proximité
Sans pour autant céder à la résignation, loin s’en faut, sa vision de
l’exercice libéral est teintée de pessimisme. « Les lois, les réglementations et
Le
Médecin de France
16
n°1275 • 30 novembre 2016
en direct des territoires
La santé en région
De la journée « santé morte » organisée à Bourgogne Franche-Comté : les médecins
Châtellerault, aux rencontres dijonnaises entre libéraux parlent aux étudiants
étudiants en médecine et praticiens libéraux, en L’URPS-ML de Bourgogne Franche-Comté
passant par les DOM et la motion sur le virus Zika, s’engage pour restaurer l’attractivité de
l’exercice libéral en milieu rural, semi-urbain et
petit tour d’horizon de l’actualité des régions.
urbain. Elle souhaite également se rapprocher
des jeunes générations. Dans cette perspective,
Journée « santé morte » :
a notamment organisée une rencontre
un soutien inconditionnel de toute la profession elle
thématique le 23 novembre dernier, à la Villa
L
a sécurité des médecins libéraux est
clairement menacée. La multiplication des
violences dont ils sont régulièrement victimes
depuis plusieurs mois illustre cette triste vérité.
En réaction à l’agression d’une consœur à
Châtellerault le 29 octobre dernier, l’URPS-ML
de la Nouvelle-Aquitaine a exhorté les pouvoirs
publics à prendre les mesures qui s’imposent.
« Les médecins libéraux sont, dans le domaine de la
santé, les professionnels les plus exposés à des actes
violents car ils sont en lien direct avec une population
fragile, précaire et parfois en perte de repères »,
écrivait-elle dans un communiqué. Elle rappelait
par ailleurs que la suppression éventuelle de
la liberté d’installation devra impérativement
s’accompagner des dispositifs suffisants pour
assurer la sécurité des praticiens, y compris dans
les zones de non-droit où la violence sociétale
est la plus présente. Au-delà de cette prise de
position tranchée, l’URPS-ML a appelé tous
les médecins libéraux de la région à participer
à la Journée « santé morte » le 22 novembre
dernier. Un appel notamment relayé et suivi
par le syndicat des généralistes de la Vienne.
« Fermeture des cabinets médicaux, affichage dans
les salles d’attente, discussions avec les patients : cette
journée a pour objectif de dénoncer les incivilités et la
multiplication des violences verbales et physiques à
l’encontre des professionnels de santé », expliquait
MG 86, dans un communiqué.
Le
Messner de Dijon. L’objectif ? Présenter la
richesse du métier et de ses différents modes
d’exercice, souvent méconnus. Pas moins de
120 étudiants de 4e, 5e et 6e année ont répondu
favorablement à l’invitation. Ils ont pu échanger
librement avec une douzaine de médecins
libéraux, généralistes et spécialistes confondus.
Face au succès de cette opération, une nouvelle
soirée sera organisée le 5 janvier 2017, avec les
étudiants en médecine de Besançon.
Zika : les médecins libéraux exigent
reconnaissance et financements
Le 21 novembre dernier, une motion sur le
Zika a été votée à l’unanimité par la conférence
nationale des URPS-ML, présidé par le Dr
Philippe Boutin. « Le suivi des femmes enceintes et
des bébés dont la mère a contracté le virus pendant la
grossesse nécessite une vigilance et un surveillance
particulière des médecins libéraux », souligne le
texte. La CN URPS-ML demande donc que
leur expertise soit reconnue et valorisée, tant
au niveau pratique que scientifique. L’instance
réclame également des moyens supplémentaires
pour la formation, la prise en charge et le suivi
spécifique de cette arbovirose qui impacte
lourdement la population des DOM. Elle attend
désormais des mesures concrètes de la part du
ministère de la Santé.
Médecin de France
17
n°1275 • 30 novembre 2016
à la loupe
Applications mobiles
et objets connectés : les 101
bonnes pratiques de la HAS
La HAS vient de publier 101 bonnes pratiques
pour accompagner le développement et
l’évaluation des applications et des objets
connectés de santé. Si le contenu ne concerne
pas directement les médecins libéraux, un
document d’information spécifique sera
prochainement publié à leur attention.
P
rès de 50 000 applications de santé sont
actuellement disponibles, et leur nombre ne
cesse de croître jour après jour. Pour favoriser
le développement de dispositifs sûrs, fiables et de
qualité, la HAS vient de publier un référentiel de
bonnes pratiques, élaboré avec l’appui de la CNIL
et de l’ANSSI. « Cette publication fait suite à une saisine
de la délégation stratégique des systèmes d'information
en santé du ministère de la Santé, elle-même sollicitée
par le Conseil stratégique des industries de santé. La
France n’avait pas encore prédéfini de cadre pour
l’évaluation de ces technologies. Elle dispose désormais
d’une base technique et scientifique solide, même si ce
guide n’a aucune vertu opposable en l'état. », estime
Jean-François Thébaut, membre du collège de la
HAS, président de la commission des parcours de
soins et des pratiques et ex président de la CEESP.
Privilégier la filière française
Qu’en est-il de la cible ? « Ce guide s’adresse
principalement aux promoteurs de solutions et aux
évaluateurs du public comme du privé, assure JeanFrançois Thébaut. Il peut paraître trop complexe
pour les médecins libéraux, mais il contribuera
au moins à satisfaire leur curiosité sur un sujet
Le
parfois controversé. » Dans les prochains mois,
les praticiens et les usagers de santé devraient
néanmoins bénéficier d’un document spécifique
d’information les concernant directement.
S’il n’existe pas encore de doctrine fixe pour
l’évaluation de ces technologies, l’idée consiste
à privilégier l’essor d’une filière française. « La
francophonie pourrait même être un échelon plus
pertinent », suggère t-il. Selon l’organisation
mondiale de la francophonie, cela pourrait
représenter un échantillon de 700 millions de
personnes d’ici à 2050.
Un niveau d’exigence adapté selon les cibles
Dans le contenu, ce référentiel de bonnes pratiques
délimite certains prérequis comme l’ergonomie de
la solution, sa facilité d’utilisation, sa performance
technique, mais aussi sa garantie de confidentialité
et de sécurité des données personnelles. Il s’articule
autour de trois axes : fiabilité médicale, cybersécurité, respect des droits individuels. « Les 101
critères explicités seront fonction de l’usage qui sera fait
de ces applications ou objets connectés », souligne JeanFrançois Thébaut. Techniquement, l’exigence de
qualité de sécurité dépendra de deux paramètres :
la finalité de l’application (information générale,
prévention primaire, secondaire ou tertiaire,
recueil ou analyse de données destiné au suivi de
la santé du patient) et le public ciblé (grand public,
personnes malades, professionnels de santé).
Le dispositif devra alors répondre à un niveau
d’exigence (faible, modéré ou élevé) en fonction
du risque lié à son usage et chaque bonne pratique
sera obligatoire, recommandée ou conseillée.
Médecin de France
20
n°1275 • 30 novembre 2016
à lire, à voir
La différence invisible. La Villa Savoye
Pourquoi ne pas profiter des
Mademoiselle
week-ends d’hiver ou des vacances de Noël pour aller visiter
Caroline
la Villa Savoye ? Commandée
et Julie Dachez
par Pierre et Eugénie Savoye
Marguerite est vive, intelligente et jolie. Elle travaille
dans une grande entreprise et
vit avec Florian, son amoureux.
Mais Marguerite reproduit
tous les jours les mêmes rituels
obsessionnels, les bruits et les
odeurs l’agressent au-delà du
supportable et elle se heurte
en permanence à des codes sociaux qui la laissent perplexe.
Marguerite est épuisée par les
efforts qu’elle déploie pour
s’intégrer à un monde qui lui
échappe et lui renvoie sans
cesse sa différence. Marguerite est autiste, atteinte du syndrome d’Asperger.
La différence invisible est un roman graphique fort et émouvant qui permet de dépasser
les préjugés réducteurs associés à un syndrome aujourd’hui encore très méconnu.
Magnifiquement servi par les
dessins et les couleurs de Mademoiselle Caroline et adapté
de la propre histoire de Julie
Dachez, il met en scène le cheminement d’une jeune femme
qui découvre et apprivoise sa
singularité. Le livret ludique
et pratique qui clôture l’album
propose quelques clés de compréhension aidant le lecteur
d’aller à la rencontre de ces individus hors norme.
Une lecture indispensable à
tous ceux, professionnels, familles, amis, collègues, qui
sont amenés à côtoyer des personnes autistes.
La différence invisible,
Mademoiselle Caroline,
Julie Dachez. Édition Delcourt,
collection Mirage
Le
au Corbusier et à son cousin
Pierre Jeanneret, elle domine
la vallée de la Seine, à Poissy,
à une trentaine de kilomètres
de Paris. En faisant appel à ces
architectes d’avant-garde pour
construire leur maison de campagne, le couple Savoye fait le
choix de s’éloigner radicalement des codes bourgeois dans
lesquels il évolue pourtant à
Paris. Dans cette construction
à la géométrie radicale, aux volumes perchés et à la blancheur
étincelante, tout célèbre une
époque nouvelle, moderne.
Les trois garages sont en avantplan de la villa pour accueillir
les automobiles, car elles font
désormais partie du quotidien. Les escaliers d’honneur
ont disparu au profit d’un plan
incliné adapté à la démarche
athlétique des corps enfin libérés des étoffes contraignantes.
La salle de bain parentale ouverte sur la chambre à coucher
raconte une intimité nouvelle,
sensuelle et ludique.
Pour poursuivre la découverte
de l’œuvre du Corbusier, la façon dont il a pensé et traduit
l’évolution spectaculaire d’une
société en pleine mutation, on
pourra aller visiter La Maison
la Roche située à Paris dans le
XVIe arrondissement ou aller
admirer la fondation Suisse et
le Pavillon du Brésil à la Cité
Universitaire de Paris, dans le
XIVe.
Villa Savoye,
82, rue de Villiers, 78300 Poissy.
Du 1er septembre au 30 avril de 10 h
à 17 h, sauf le lundi. De mai à août,
de 10 h à 18 h, sauf le lundi.
Coffrets DVD
Rien de mieux qu’une série
à consommer douillettement
lové dans son canapé en ces
temps de froid polaire et entre
quelques agapes festives.
Pour les fans de série mafieuse,
l’intégrale de Boardwalk em-
Médecin de France
22
n°1275 • 30 novembre 2016
pire. Créée par l’auteur des
Sopranos, Terence Winter, elle
nous plonge au cœur de l’Atlantic City de la prohibition et
retrace l’ascension et la chute
d’un trafiquant d’alcool. Son
style, sa représentation des
personnages historique et l’interprétation de Steve Buscemi
lui ont permis de remporter
vingt Emmy awards et le Golden Globe de la meilleure série
télévisée.
Intégrale Boardwalk Empire.
5 saisons, coffret 23 DVD
HBO - Warner.
À partager en famille, les aventures de nos deux familles préférées, les Boulay et les Lepic
pour réviser avant la diffusion
de la prochaine et dernière saison de Fais pas ci, Fais pas ça.
Que l’on se sente Boulay - bio
/ psycho / écolo - ou davantage
Lepic, tradi / rallye / patrie, on
se reconnaitra forcement dans
le quotidien rocambolesque de
ces familles attachantes . Rien
de plus normal à cette identification, puisque Guillaume Renouil, le producteur de la série,
avoue s’inspirer régulièrement
de sa propre famille, prenant
consciencieusement des notes
sur un petit carnet qui ne le
quitte jamais.
Intégrale Fais pas ci, Fais pas ça,
8 saisons, Coffret 21 DVD
France Télévision Distribution
Et parce qu’on ne s’en lassera
jamais, parce que les tenues de
Carrie Bradshaw ne se sont pas
démodées alors que la dernière
saison de la série remonte à
2008, parce que ces 4 newyorkaises ont fini par devenir
aussi des bonnes copines, ne
pas hésiter à se replonger dans
les 6 saisons de la série culte de
HBO.
Intégrale Sex and the city,
6 saisons, coffret 19 DVD
Paramount
Téléchargement