Clinicien plus • mars 2012 21
Info infectiologie
chaîne alimentaire avec contamination de
viandes fraîches, de poulet frais ou transfor-
mé, de charcuteries, de fromages au lait cru
(non pasteurisé) et même de légumes.
En fait, le tractus gastro-intestinal de
l’adulte est souvent colonisé par des
souches non pathogènes de Listeria (non
monocytogenes) et parfois même colonisé par
des souches pathogènes – monocytogenes (de
1 à 5 % des adultes dans certaines études).
La majorité des cas de listériose se mani-
festeront chez des individus avec une con-
dition médicale sous-jacente affectant typi-
quement l’immunité cellulaire, la bactérie
ayant les moyens à ce moment de ne plus
être qu’un simple colonisant. Toutefois, une
augmentation de cas de listériose se produit
depuis quelques années chez des hôtes dits
immunocompétents et reflète l’augmenta-
tion d’éclosions en lien avec des aliments
contaminés à la Listeria.
Votre patient est-il à risque de
développer une listériose?
Votre patient est à risque de listériose de
par son âge avancé (Encadré 1). Au ques-
tionnaire plus poussé, il nie avoir mangé
des charcuteries, des fromages au lait cru
ou des viandes non cuites. Il dit toutefois
boire de l’eau non filtrée d’un ruisseau
près de chez lui. Sa femme et ses enfants
ne sont pas malades.
Quelles sont les présentations
cliniques classiques de la
Listeria
?
La majorité des individus atteints et immuno-
compétents ne développeront qu’un simple
tableau de gastro-entérite environ 24 heures
après l’ingestion de l’aliment contaminé, et le
tout dure en moyenne deux jours. Chez
l’adulte surtout immunosupprimé, une sep-
ticémie peut se produire et pourra causer, par
la suite, une méningite ou même une ménin-
goencéphalite. La mortalité à ce moment est
de près de 50 %. Une atteinte classique est la
rhomboencéphalite à Listeria.
Que devez-vous éliminer chez
votre patient en connaissant ces
présentations?
Il faut garder en tête la possibilité d’infec-
tion focale secondairement à la septicémie.
Ainsi, du matériel prosthétique ou une
valve cardiaque pourraient être des foyers
de persistance de l’infection.
Encadré 1
Les facteurs de risques classiques de la listériose
1.Les extrêmes d’âge : près de 50 % des cas se produisent chez des patients de plus de 60 ans ou
chez des enfants de moins d’un mois;
2.Femme enceinte : il y a altération du système immunitaire durant la grossesse et elle est donc à
risque de développer une listériose. Le plus souvent, le tableau clinique ressemblera à l’Influenza.
Toutefois, dans le cas d’une bactériémie transitoire, il pourra y avoir subséquemment amnionite
ou placentite pouvant infecter par la suite le fœtus. Des avortements spontanés, des bébés
morts-nés et des accouchements prématurés sont bien décrits dans la littérature.
3.Nouveau-né : deux tableaux cliniques selon le moment où a eu lieu la transmission. « Early-
onset » (aussi appelé Granulomatose infanseptica) : atteinte disséminée du nouveau-né incluant les
organes vitaux et le système nerveux central ; « Late-onset » : se produit environ 14 jours après
la naissance et serait causé par la colonisation du vagin de la mère avec infection subséquente
lors du passage de l’enfant pendant l’accouchement.
seulement une augmentation de bactéries à la microscopie, et la culture d’urine, une
flore variée. Les globules blancs sont à 12 000 avec une numérotation différentielle
normale. La créatinine, les électrolytes et un bilan hépatique se révèlent tous normaux.
Une tomodensitométrie de la tête effectuée à l’urgence est sans particularité...
Un traitement empirique à base de ciprofloxacine débute donc dans le but de traiter
une possible infection urinaire (nycturie sans dysurie ni pollakiurie).
Au moment de rencontrer le patient, qui est maintenant afébrile depuis 24 heures avec
la prise de ciprofloxacine, vous apprenez du laboratoire que les quatre bouteilles
d’hémocultures sont toutes positives pour des bacilles gram positifs (BGP) courts. On
vous dit également avoir fait un état frais pour évaluer la mobilité de la bactérie sous le
microscope...celle-ci se déplace en culbutant littéralement sur elle-même! Cette
trouvaille vous rend très énervé… Vous demandez sur-le-champ des tests
supplémentaires au laboratoire pour confirmer votre suspicion.
Pourquoi êtes-vous si agité?
À quelle bactérie croyez-vous avoir affaire?
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