PORTRAIT D`UNE ÉCONOMIE EN RECUL RepèRes économiques

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Repères économiques
Février 2012
PORTRAIT D’UNE ÉCONOMIE EN RECUL
Notre bien-être matériel est fortement tributaire d’une croissance économique perpétuelle. Dès que se manifeste le moindre
signe de stagnation ou de recul, les rouages de l’économie se mettent à grincer. Les engrenages se démontent, les chaînes
se brisent et les fusibles sautent. Prenons la récession qui a touché les États-Unis en 2009. Même si, cette année-là, la
production économique par habitant s’est classée parmi les six meilleures jamais enregistrées aux États-Unis et qu’elle a
atteint un niveau supérieur à tous les résultats obtenus avant 2004, l’année a été purement et simplement désastreuse. Les
taux de chômage ont grimpé, les marchés financiers ont dégringolé et un climat de morosité s’est installé. Les choses ne se
sont pas encore complètement replacées.
À tort ou à raison, on accorde à la croissance économique une importance capitale : plus elle s’accentue, mieux c’est. Aussi,
comme nous l’expliquerons dans la présente analyse, le fait que la future croissance économique puisse être un peu moins
dynamique que par le passé est très lourd de conséquences, du fait que les rouages de l’économie ne recevront pas leur dose
habituelle de lubrifiant. Il en résulte de fâcheuses conséquences qui se concrétisent notamment par la stagnation des niveaux
de vie, une plus grande précarité des finances publiques et une éventuelle diminution des rendements des placements.
Les quatre principales sources de ralentissement de la croissance économique
1. Perte permanente de production à la suite
d’une crise
Au plus fort d’une crise financière, la production économique
chute brusquement. C’est exactement ce qui s’est passé en 2008
et en 2009. Mais le terrain perdu finit par être regagné. Certaines
pertes persistantes ne se résorbent cependant pas et l’économie
suit une trajectoire parallèle, à un palier inférieur (comme
l’illustre l’écart entre la ligne A et la ligne B sur la figure 1).
Figure 1 : Sombrer sous les vagues
PÉRIODE DE CRISE
PÉRIODE DE DÉSENDETTEMENT
LONG TERME
A
B
Énorme perte de
ÉCONOMIE
production
TEMPS
Source : RBC GMA
Baisse
permanente de
la production
Ralentissement
temporaire de la
croissance
Ralentissement C
permanent de la
croissance
D
RBC Gestion mondiale d’actifs
Deux raisons expliquent pourquoi la production ne réussit
habituellement pas à revenir à la tendance initiale : le capitalactions subit souvent une forte diminution au cours d’une
période d’investissement inadéquat et les frais d’entretien ainsi
que les crises financières peuvent provoquer un tort irréparable
au marché du travail.
Voici quelques raisons qui expliquent les malheurs du marché
du travail :
•
Toute période de chômage involontaire fait subir une perte
au travailleur et, par conséquent, à l’économie. Cette perte
est celle du revenu précédent, mais elle prend aussi la
forme d’une diminution moyenne de 6 % de la rétribution
du nouvel emploi par rapport au précédent, même si la
période de chômage a été courte.
•
Plus le chômage dure longtemps, plus s’accentue la perte
des compétences acquises et plus l’apprentissage des
techniques de pointe est reporté.
•
Les États-Unis sont aux prises avec une extrême
inadéquation des compétences. Les chômeurs ont,
dans une proportion excessive, une formation dans les
domaines de la construction et de la fabrication, des
secteurs peu susceptibles de connaître une
reprise complète.
•
La mobilité de la main-d’œuvre est singulièrement faible.
De nombreux propriétaires sont aux prises avec un
emprunt hypothécaire dont la valeur excède celle de leur
logement et arrivent difficilement à vendre leur propriété
pour déménager là où les marchés de l’emploi sont
plus vigoureux.
•
Même si la création d’emplois commence à afficher une
tendance plus normale, le roulement du personnel qui la
sous-tend reste faible. Le roulement, qui se caractérise
par des changements volontaires d’emploi, peut être très
avantageux pour l’économie, car il en résulte souvent une
meilleure harmonisation entre les compétences et les
emplois disponibles. En moyenne, chaque déplacement
volontaire de travailleurs d’une société à une autre
s’accompagne d’une hausse du salaire (et sans doute de la
productivité) de 9 %.
Nous nous risquons à estimer que, globalement, les États-Unis
essuient presque en permanence une perte d’environ 1 % à 2 %
de production économique en raison d’un sous-investissement
en capital social et d’un dysfonctionnement du marché du travail.
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2. Croissance temporairement léthargique
à cause du désendettement, aversion pour
le risque et fardeau budgétaire
Hélas, la faible croissance économique des dernières années se
poursuivra probablement pendant plusieurs années encore. La
figure 1 le montre : le passage de la ligne B à la ligne C représente
un autre glissement par rapport à la trajectoire de croissance
initiale. Trois principaux facteurs expliquent ce phénomène :
•
Les dettes excessives doivent être ramenées à des
niveaux soutenables compte tenu du revenu et des actifs.
Dans leurs efforts en vue d’atteindre cet objectif, les
ménages, tout comme les entreprises, dépensent moins et
épargnent davantage. Les banques réduisent leurs leviers
d’endettement. Les gouvernements prennent normalement
plus de temps à adopter un tel comportement – ils
s’efforcent habituellement de sauver d’abord les autres
secteurs de l’économie –, mais ils finissent par céder
aux pressions des marchés et par adopter leur propre
programme d’austérité. Ce processus est déjà amorcé. Le
ratio d’endettement des ménages américains a commencé
à diminuer et il baissera sans doute davantage. Les
banques continuent à réduire leur endettement aux ÉtatsUnis et elles font finalement des progrès en Europe.
•
Il y a une perte d’appétit pour le risque. Peu de ménages,
d’entreprises, de banques ou de gouvernements sont
disposés à prendre de grands risques ou à investir
massivement dans l’avenir. Cela s’avère d’autant plus
dans un contexte réglementaire extrêmement incertain.
La popularité des obligations d’État à très faible revenu
illustre ce phénomène.
•
Fardeau budgétaire. Les finances chancelantes des
gouvernements constituent un autre irritant qui entrave la
croissance économique à court terme. Plus directement,
les mesures d’austérité budgétaire ralentissent
mathématiquement l’économie.
Conclusion quant aux perspectives à court terme
La plupart des données permettent de conclure que la
croissance économique devrait, de fait, se poursuivre à un
rythme inférieur à la normale pendant plusieurs années en
raison des conséquences persistantes de la crise financière et
des graves difficultés budgétaires.
Nous ne prévoyons pas une autre récession (sauf dans la zone
euro). Cependant, les pays traversent très souvent, dans la
décennie qui suit une crise financière, une seconde phase de
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contraction habituellement attribuée à une autre cause, mais la
régularité de sa manifestation incite fortement à croire qu’elle
est vraiment liée à la crise initiale.
Cela étant dit, nous estimons que la croissance économique
des pays développés devrait être inférieure à la normale
d’environ 1 % par année pendant la présente période de
désendettement, ce qui correspond à une croissance réelle
annualisée d’environ 2 % aux États-Unis et au Canada.
3. Ralentissement permanent de la croissance
à cause de la disparition d’anciens
vents contraires
Nous avons expliqué qu’au cours des prochaines années,
la croissance économique sera sans doute plus lente que la
normale, pendant que se dissipent les conséquences de la crise
financière sur l’économie. Heureusement, cette détérioration
ne durera pas toujours. Toutefois, il se peut qu’apparaissent
d’autres entraves plus persistantes attribuables à deux facteurs
principaux : la disparition des anciens vents arrière et la levée de
nouveaux vents contraires. Le passage de la ligne C à la ligne D
sur la figure 1 illustre ce phénomène.
Depuis des temps lointains, la définition d’une croissance
économique « normale » est remarquablement aléatoire.
En réalité, il n’existe rien de tel qu’une croissance vraiment
normale. Les conditions changent constamment. Il nous faut,
malgré tout, un cadre de référence et, pour plusieurs, les années
1980 et 1990 restent le modèle de croissance « normale »,
marqué par une expansion de l’économie américaine à un taux
annualisé de 3,2 % par année.
Des vents arrière mal connus ont soufflé en bourrasque
dans les années 1980 et 1990
•
•
Ces décennies ont profité d’une source inépuisable de
produits financiers nouveaux et finalement éphémères
qui ont élargi l’accès au crédit de même que le fossé
entre emprunteur et prêteur. Bon nombre d’entre elles ont
maintenant été mises aux oubliettes et l’endettement s’est
résorbé. Ce vent arrière est devenu un vent contraire.
Lorsque les murs voilant l’économie de l’Europe de l’Est et
celle de la Chine sont tombés au début des années 1990,
près de deux milliards de nouveaux consommateurs –
et une nouvelle main-d’œuvre à bon marché – ont
soudainement été poussés dans l’économie mondiale. Ce
vent arrière continue à souffler sur l’économie, mais avec
une force moindre, et il est peu probable que se produise
une autre libéralisation des échanges commerciaux de
cette ampleur dans un avenir prévisible.
•
Les prix des produits de base sont restés bas et, pour la
plupart, stables pendant toutes les années 1980 et 1990,
alors qu’ils ont par la suite grimpé. Le trio inflation, taux
d’intérêt et taux d’imposition a aussi beaucoup reculé
pendant cette période, ce qui a procuré à la croissance un
stimulant qui ne lui sera vraisemblablement pas administré
de nouveau de nos jours (quoique l’inflation et les taux
d’intérêt devraient rester bas et favoriser au moins un peu
la croissance).
4. Ralentissement permanent de la croissance
à cause de nouveaux vents contraires
Au moment où les anciens vents arrière ont cessé de souffler, de
nouveaux vents contraires se sont levés.
Facteurs démographiques – Le vent contraire le plus puissant,
et de loin, est la détérioration des paramètres démographiques.
Alors que la génération du baby-boom était à l’apogée de ses
pouvoirs économique et productif durant les années 1980 et
1990, cette génération arrivera à l’âge de la retraite et de la
vieillesse dans les prochaines décennies. À cet égard, le taux
d’augmentation de la population en âge de travailler – qui
contribue directement à la croissance économique – devrait
diminuer d’environ 0,6 % par année aux États-Unis, de 1,0 % au
Canada et dans des proportions comparables dans les autres
pays développés.
Éducation – Le taux d’augmentation de la scolarité pourrait
aussi être sur le point de ralentir. Dans les pays développés, les
taux d’obtention de diplômes d’études collégiales ont plafonné
il y a quelques décennies. Les taux d’obtention de diplômes
universitaires continuent à monter, mais ils sont peut-être en
voie de se stabiliser. Un ralentissement de la croissance de la
scolarisation pourrait affaiblir un facteur clé d’augmentation de
la productivité.
Technologie – Les changements technologiques représentent
sans doute le sujet le plus controversé de tous. Ils contribuent
largement à la croissance de la productivité, qui, elle, est un
préalable à l’expansion économique. En d’autres termes, les
avancées technologiques ne sont évidentes qu’en rétrospective.
Dans bien des domaines, tels que les communications,
l’information, l’informatique, la robotique, l’intelligence
artificielle, les nanotechnologies et la pharmacologie, il se
prépare de grandes découvertes. Toute tentative de prédire la
forme qu’elles prendront ou la vitesse de leur implantation ne
serait que pure folie.
Repères économiques | 3
RBC Gestion mondiale d’actifs
Sources : Haver Analytics, RBC GMA
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CONOMIQ
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+2 %
par année
TURE
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+3,25 %
par année
CROIS
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ÉCONOMIQU
CE
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AN
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Bien que, dans cette analyse, nous ayons mis l’accent sur les
facteurs de baisse de la croissance économique, nous devrions
éviter de succomber à la tentation de jeter un œil myope sur le
désastre et de croire que nous resterons toujours embourbés
dans les difficultés simplement parce que cela reflète une
réalité immédiate. Le monde a connu bien des épisodes de
difficultés économiques au moins aussi graves que
celui-ci – guerres mondiales, pandémies et Grande Crise – et
il finit toujours par s’en remettre.
Figure 2 : Perspectives de croissance moindre
ÉE
SS
PA
À la lumière de ces facteurs hétéroclites, nous estimons
pouvoir conclure que la disparition des anciens vents arrière
pourrait se traduire par une diminution de la croissance
économique de 0,5 % et que les nouveaux vents contraires
pourraient exercer une autre ponction de 0,75 %. Ensemble,
ces reculs représentent un ralentissement de la croissance
économique d’environ 1,25 %, de sorte qu’elle serait d’environ
2 % par année par rapport à une norme de 3,25 % pour la
période de 1980 à 1999. Ces estimations sont, certes, loin
d’être exactes, et il faut reconnaître que la précision des
prévisions diminue à mesure que l’horizon prévisionnel
s’allonge.
CRO
IS
S
Conclusion quant aux perspectives à long terme
RBC Gestion mondiale d’actifs
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