SOMMAIRE Organisateurs : N. CARRERE (Toulouse) 1. Histoire

SOMMAIRE
Organisateurs :
N. CARRERE (Toulouse)
1. Histoire naturelle de la pancréatite chronique et traitements médicaux
P. LEVY (Clichy)
2. Place du radiologue dans la prise en charge de la pancréatite chronique
M.-P. VULLIERME (Clichy)
3. Traitement endoscopique de la pancréatite chronique et ses complications
L. BUSCAIL (Toulouse)
4. Traitement chirurgical: Dérivation chirurgicale du canal de Wirsung ou
résection ?
A. SAUVANET (Clichy)
5. Traitement chirurgical: Quand et comment opérer les pseudo-kystes
pancréatiques ?
E. LERMITE (Angers)
HISTOIRE NATURELLE DE LA PANCREATITE CHRONIQUE ET TRAITEMENTS
MEDICAUX
Philippe LEVY
Pôle des Maladies de l’Appareil Digestif, Service de Gastroentérologie et
Pancréatologie, Hôpital Beaujon, APHP, Clichy-la-Garenne, Université Paris-Diderot-Paris 7,
DHU Unity, France.
La pancréatite chronique (PC) est une affection dont l’évolution dure plusieurs dizaines
d’années. Ses manifestations sont plutôt aiguës au début de son histoire et relèvent de la
perte de fonction à la fin de celle-ci. La connaissance de l’histoire naturelle et de la
physiopathologie de ses manifestations est essentielle pour porter les bonnes indications. En
raison de la multiplicides traitements possibles à notre disposition (traitements médicaux
ou médicamenteux, endoscopiques, radiologiques, chirurgicaux (exérèse ou dérivation), ici
comme ailleurs, il est essentiel que toutes les décisions soient prises de façon
multidisciplinaire associant toutes les disciplines concernées.
I. Causes de la pancréatite chronique
La cause la plus fréquente (60-80%) en Occident est la consommation massive
(>100g/j) et prolongée (>10 ans) d’alcool. Le corollaire de cette assertion est qu’une
consommation aiguë ou récente même massive ne peut être considérée comme la cause
univoque d’une pancréatite. Le rôle du tabac comme cofacteur et comme facteur
d’aggravation de l’évolution est désormais bien démontré.
En phase aiguë, il est essentiel d’écarter formellement le diagnostic de pancréatite
aiguë biliaire qui peut récidiver si le problème biliaire n’est pas réglé.
Au-delà de 50 ans, l’obsession doit porter sur le diagnostic de pancréatite obstructive
en amont d’une tumeur maligne ou bénigne (en particulier une TIPMP).
Les autres causes sont génétiques (révélation avant 35 ans, pas toujours
d’antécédents familiaux en cas de mutation récessive), auto-immune (contexte et surtout
imagerie très particulière), métabolique (hypercalcémie > 3 mmol/l, hypertriglycéridémie > 10
mmol/L).
II. Principales manifestations et grands principes thérapeutiques
1. La douleur chronique
Elle touche 80 à 90 % des malades. Elle peut être majorée par la prise d’alcool, le
tabagisme et l’alimentation. Un amaigrissement important par évitement de l’alimentation est
possible. La physiopathologie de la douleur au cours de la PC est complexe et ne repose
pas simplement sur la pérennisation de phénomènes inflammatoires et encore moins sur
une hyperpression canalaire. Une sensibilisation neuronale au niveau périphérique puis
central peut être à l’origine de douleurs chroniques et favoriser une addiction aux antalgiques
de niveau 3. L’avis d’un médecin algologue est essentiel avant de décider de traitements
instrumentaux endoscopiques ou chirurgicaux dont l’efficacité est d’autant moindre que les
malades sont depuis longtemps sous antalgiques de niveau 3.
La théorie du burn-out (disparition de la douleur après quelques années d’évolution
quand le pancréas est détruit, calcifié et que l’insuffisance endocrine et exocrine est
présente) est remise en question. Néanmoins, la proportion de malades ayant des douleurs
diminue avec le temps et les douleurs chroniques sont rares au-delà de 20 ans d’évolution.
2. La pancréatite aiguë
Elle touche environ 50% des malades, généralement dans les 5 premières années
d’évolution de la maladie. Les poussées deviennent de moins en moins sévères avec le
temps d’évolution. Le traitement de la pancréatite aiguë survenant sur une PC n’est pas
différent. La prise en charge de l’alcoolisme, la prévention du syndrome de sevrage sont
essentiels.
3. Les pseudokystes
Ils surviennent chez environ 40% des malades. Ils peuvent être la conséquence soit
d’une poussée de pancréatite nécrosante (leur contenu est alors hétérogène, en partie
solide) soit d’une rupture canalaire (contenu liquidien, pur, eau de roche).
Les pseudokystes ont leur propre histoire naturelle pouvant régresser spontanément,
saigner, s’infecter, se rompre, comprimer un organe de voisinage.
Quand les conditions anatomiques s’y prêtent (contenu liquidien, proximité avec la
lumière digestive, pas d’interposition en particulier vasculaire), les pseudokystes constituent
la meilleure indication du traitement endoscopique par rapport au traitement chirurgical.
4. La compression de la voie biliaire principale
Elle survient dans un tiers des cas. Elle est la conséquence de l’hypertrophie ou de la
fibrose de la tête du pancréas et beaucoup plus rarement de la compression par un
pseudokyste. Elle se traduit par une cholestase parfois majeure, le plus souvent anictérique
(élévation isolée de la GGT et des phosphatases alcalines). La présence d’un prurit est
exceptionnelle.
Les traitements endoscopiques sont peu efficaces, surtout si la pancréatite est
calcifiée. Ils doivent être réservés aux situations d’urgence (angiocholite, rare) ou en cas de
contre-indication temporaire ou définitive à la chirurgie (hépatite alcoolique aiguë, cavernome
portal).
5. Compression duodénale
Elle peut être due soit à la fibrose céphalique (elle est alors associée à une
compression biliaire dans la plupart des cas) soit à une pancréatite de la jante ou à une
dystrophie kystique de la paroi duodénale.
Le traitement est habituellement chirurgical et repose soit sur la duodéno-
pancréatectomie céphalique, soit sur la dérivation gastro-jéjunale soit plus rarement sur
l’intervention de Frey.
6. Thrombose portale ou mésentérique
Elles sont la conséquence de l’inflammation et ne traduisent pas une thrombophilie.
Elles peuvent gêner voire contre indiquer un traitement endoscopique ou chirurgical. En
phase de constitution de la thrombose, un traitement anticoagulant à dose curative est
recommandé. Ce traitement n’est pas conseillé en phase constituée.
7. Epanchements des séreuses
Une pleurésie, une ascite ou plus exceptionnellement une péricardite pancréatique
peuvent compliquer une rupture canalaire.
Le traitement est la mise au repos digestif (nutrition entérale continue à faible débit),
les dérivés de la somatostatine, éventuellement un traitement endoscopique
(sphinctérotomie +/- prothèse), plus rarement la chirurgie.
Le syndrome de Weber Christian est dû à une fistule pancréatico-portale. Le traitement
est le même.
8. Dégénérescence
Le risque relatif est de l’ordre de 16 avec un risque absolu de l’ordre de 3-5% au cours
de la PC alcoolique. Ce chiffre atteint 60% à 60 ans dans le cas des pancréatites
héréditaires chez les fumeurs.
Le diagnostic doit être suspecté en cas de réapparition de douleurs après une période
d’accalmie prolongée, une perte de poids inexpliquée, la présence d’une masse hypodense
écartant les calcifications.
Chez les alcooliques, la rareté de l’évènement et la difficulté d’un diagnostic à un stade
utile rendent illusoire toute stratégie de dépistage qui n’est donc pas recommandé.
9. Insuffisances exocrine et endocrine
La destruction progressive du pancréas qui se traduit par l’augmentation de la
fréquence, du nombre et de la taille des calcifications aboutit presque inéluctablement à
l’apparition d’une insuffisance exocrine (IPE) et endocrine. La seconde se traduit par un
diabète rapidement insulino-requérant parfois difficile à équilibrer sur ce terrain. Tout
amaigrissement rapide doit le faire évoquer.
La stéatorrhée (selles pâteuses, très nauséabondes, claires, flottantes) est la
traduction clinique de l’IPE. L’IPE se confirme par le dosage de l’élastase fécale, beaucoup
plus aisé à réaliser que celui du débit fécal de graisses. Le traitement de l’IPE repose sur les
extraits pancréatiques à prendre en quantité suffisante, au milieu et à la fin de chaque repas
en adaptant grossièrement la posologie à la prise alimentaire. L’IPE est rarement la cause
d’une perte massive de poids mais peut provoquer une carence en vitamines liposolubles
qu’il faut dépister et corriger.
10. Mortalité
La PC alcoolique s’accompagne d’une surmortalité d’environ 35 %, 20 ans après le
début des symptômes. Les principales causes de mortalité sont les conséquences extra-
pancréatiques de l’alcoolo-tabagisme (cancer de l’œsophage, ORL, stomatologique,
cirrhose, accident vasculaire, etc.). Ces complications doivent être dépistées
systématiquement. Seuls 25% des malades avec une PC vont décéder directement des
conséquences de celle-ci.
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