Qu`attendent les patients de la consultation de suivi d`une

DOI : 10.1684/med.2014.1109
VIE PROFESSIONNELLE
Marion
Garoux-Drevet1
Régis Gonthier2
Josette Vallée1
1Université Jean
Monnet, service
universitaire
de médecine générale,
Saint-Étienne
2Hôpital Charité,
42055, Service
de Gérontologie
Clinique,
Saint-Étienne Cedex
Mots clés :
médecine générale ;
relations
médecins-malades
Recherche en soins primaires
Abstract: What are the expectations of the patients with a chronic disease from follow-up consultation
in general practice?
Context. The rate of drug prescriptions is important in France in ambulatory care, our country being in a leading
position of drug use in Europe. During the so-called “prescription renewal” for patients suffering from chronic
diseases consultations, the drug appears in the heart of the patient/GP relationship.
Objectives. To explore the patients’ expectations during the consultation and secondarily their representations
of drugs.Method: Qualitative Survey by semi-structured interviews with 15 patients, recorded, put to paper and
analyzed by theme.
Results. Patients imagined a very “ritualized” consultation, allowing the concomitant treatment of intercurrent
diseases, as well as preventive care. The GP was perceived as a partner and a treatment manager. A fear of
poly-medication and adverse drug effect were expressed. Overall, the patients seemed to comply with drug
prescriptions but agreed less to lifestyle advice.
Conclusion. Patients’ expectations are multiple here. Patients and GP seem to share some goals in the care
that could allow the reorganization of monitoring.
Key words: General practice; Physician-Patient Relations
Qu'attendent les patients
de la consultation de suivi
d'une pathologie chronique
en médecine générale ?
Certaines affections ou facteurs de risques chroniques
nécessitent des prescriptions médicamenteuses ré-
gulières. La consultation de « renouvellement d’ordon-
nance » se fait le plus souvent auprès du médecin gé-
néraliste (MG). Ainsi, en 2008, 8 millions d’assurés
sociaux français bénéficiaient d’une prise en charge
en Affection Longue Durée (ALD), nécessitant sou-
vent une polymédication durable [1]. Cependant, la
polypathologie n’explique pas tout. Une enquête Ipsos
réalisée en 2005 à la demande de la Caisse Nationale
de l’Assurance-Maladie plaçait la France au premier
rang de la consommation de médicaments en Europe
[2]. Y aurait-il un « modèle » français de forte prescrip-
tion médicamenteuse, principalement en médecine
ambulatoire [3] ? En médecine générale, l’étude Poly-
chrome a analysé les facteurs induisant la polypres-
cription : en dehors des pathologies caractérisées, les
pressions des patients, leurs refus de modifier l’ordon-
nance, leurs différentes représentations des médica-
ments et de leur maladie et les difficultés de gestion
des alternatives non médicamenteuses dans le sys-
tème de soins français [4].
Le médicament semble être aujourd’hui au cœur de
la relation thérapeutique ; les consultations aboutis-
sent presque toujours à la rédaction d’une ordon-
nance, aussi bien sous la pression des patients qu’à
l’initiative du médecin [5]. Le surinvestissement du
médicament et « le rituel de l’ordonnance » en se-
raient l’explication [2]. Pourtant, une enquête auprès
de patients a montré que ce qui était vécu par les
médecins comme une pression de leur part n’était, le
plus souvent, qu’un souhait d’échange autour de la
prescription [6], un souhait d’interaction dynamique
médecin-malade [7] pour créer un véritable partena-
riat.
Dans ce contexte, nous avons voulu explorer les at-
tentes des patients s’adressant à leur médecin géné-
raliste au motif premier du « renouvellement de
l’ordonnance » ; puis leurs représentations des médi-
caments dans le cadre de leur maladie chronique.
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Méthode
Nous avons réalisé une enquête qualitative du 1/07/2012 au
30/10/2012, auprès de patients de plus de 18 ans consultant
leur MG pour renouveler un traitement uni ou plurimédica-
menteux, prescrit de façon continue depuis au moins un an.
Ces patients étaient indemnes de troubles cognitifs connus
et parlaient couramment le français. Ils ont été sélectionnés
par l’investigatrice, médecin généraliste remplaçante, dans
5 cabinets de médecine générale situés en milieu rural, semi-
rural et urbain, de la Loire et Haute-Loire (France), lors d’une
consultation au cabinet ou à domicile.
Un échantillonnage raisonné a été effectué en recherche de
variation maximale, selon les variables suivantes : âge, genre,
milieu de vie (rural, semi-rural, urbain), niveau socio-écono-
mique, prescription pour une ou plusieurs affections ou fac-
teurs de risques, ALD ou non, mono- ou plurimédication, an-
cienneté du traitement. Les entretiens ont été conduits au
domicile des patients, enregistrés par l’investigatrice sur dic-
taphone numérique avec leur autorisation et sous couvert
d’anonymat, puis intégralement retranscrits sous Word.
Une analyse manuelle de contenu a été réalisée par l’inves-
tigatrice et le dernier auteur.
Le guide d’entretien, élaboré à partir des données bibliogra-
phiques, comprenait une présentation de l’investigatrice, un
recueil des données sociales du patient et la vérification par
ce dernier de son traitement chronique ; puis les attentes du
patient concernant la consultation de « renouvellement de
l’ordonnance », le suivi des pathologies chroniques, sa per-
ception du rôle du médicament, son vécu des modifications
éventuelles de l’ordonnance, ses souhaits concernant des
traitements autres que médicamenteux. Le guide a été
ajusté après les trois premiers entretiens pour faciliter sa
compréhension.
Une déclaration à la CNIL a été effectuée le 15/06/2012.
Résultats
Quinze patients ont été interviewés : 7 femmes, 8 hommes
(tableau 1). La saturation théorique des données a été obte-
nue au treizième entretien, deux entretiens supplémentaires
ont été réalisés pour le confirmer. Chaque retranscription
d’entretien a été soumise au patient concerné pour recueillir
son avis. En moyenne, ces patients prenaient un traitement
chronique depuis 11 ans (2 à 30 ans). Ils étaient suivis par
leur MG traitant depuis 10 ans en moyenne (2 à 35 ans).
Une consultation ritualisée
Pour la plupart des patients, la consultation visant à renou-
veler leur traitement chronique est apparue très stéréotypée,
« traditionnelle » (entretien, examen clinique, prescription) et
ils s’y soumettaient sans appréhension. Ils pensaient que
l’entretien avec leur MG permettait de « faire le point et le
bilan » des événements survenus depuis la dernière
consultation. Ce moment, que certains jugeaient « bref »,
était aussi opportun pour discuter des résultats des examens
biologiques précédemment prescrits. La majorité jugeait sa-
tisfaisant le rythme de cette consultation, le plus souvent
trimestriel ou quadrimestriel (certains auraient souhaité un
intervalle plus long).
L’examen médical, jugé incontournable par la plupart, devait
être « complet » selon eux : auscultation cardiaque, pulmo-
naire, palpation abdominale, pesée, mesure de la pression
artérielle « primordiale », considérée parfois comme « seul
but » de la consultation, notamment pour les patients hyper-
tendus.
Dans la majorité des cas, l’obligation de prendre un véhicule
pour se rendre en consultation ne semblait pas poser pro-
blème, personnes âgées incluses ; mais la distance maxi-
male parcourue n’était que de 15 km pour ces patients.
Évoquer des problèmes de santé
au-delà du renouvellement d'ordonnance
La plupart des patients pensaient que cette consultation allait
au-delà de leur maladie chronique : problèmes rhumatologi-
ques, infectieux aigus, prévention, sur proposition du MG ou
du patient (vaccinations, frottis, conseils d’hygiène de vie :
alimentation, sommeil), parfois des solutions pour éviter des
traitements psychotropes... Il arrivait que le renouvellement
d’ordonnance soit anticipé par le MG alors que les patients
étaient venus pour une affection intercurrente le plus sou-
vent bénigne, généralement quand la date de consultation
dédiée au suivi chronique était proche. Les patients évo-
quaient aussi l’importance du dossier médical informatisé,
permettant de mieux assurer « leur suivi ».
Que ce soit pour la prescription, le suivi préventif, le recours
au spécialiste d’organe, la majorité des patients estimaient
former « une équipe » avec leur MG. Ils appréciaient de pou-
voir discuter, d’être rassurés par leur MG, de discuter du
compte rendu de la consultation effectuée par un médecin
correspondant auquel ils avaient été adressés.
Toutefois, une gêne a été signalée lorsqu’il s’agissait d’évo-
quer des problèmes gynécologiques ou proctologiques à un
MG de genre opposé. Certaines patientes ont déclaré se sen-
tir plus à l’aise et mieux comprises par un médecin femme,
pour évoquer les désagréments de la ménopause.
Vision et gestion du traitement
médicamenteux
Tous connaissaient bien les indications de leurs traitements
et les maladies pour lesquelles ils étaient traités, même si
l’ordonnance comprenait plusieurs médicaments.
La prise quotidienne du traitement était ressentie de façon
variable. Certains ont parlé « d’automatisme », d’« habi-
tude », de « rythme » à prendre, alors que d’autres y voyaient
un aspect « astreignant » et estimaient ne pas avoir le choix.
Les défauts d’observance ont été évoqués, favorisés par cer-
taines circonstances : repas hors du domicile, vacances.
Les médicaments prescrits pour les maladies chroniques
étaient qualifiés de « remèdes », « aides », « bouffées d’oxy-
gène », ou encore « béquilles ». Les patients ont jugé qu’ils
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Tableau 1. Caractéristiques des patients interviewés.
Patients Caractéristiques du suivi du patient
A 14,93 P1 F 78 SR Mariée Certificat d'étude 7 Non Non 2 6 Indapamide, levothyroxine,
paracétamol
A 8,4 P2 M 73 SR Marié Certificat d'étude 7 Oui Oui 2 20 Atorvastatine, ramipril, sitagliptine
+ metformine, gliclazide
A 13,47 P3 F 35 SR Mariée Bac + 2 ans 2 Non Non 10 7 Escitalopram
A 14,73 P4 M 47 SR Marié CAP 6 Non Non 10 7 Zofenopril, rosuvastatine, escitalopram
B 19,2 P5 F 65 R Mariée Bac Technique 7 Oui Oui 3 5 Metformine, losartan
+ hydrochlorothiazyde, rosuvastatine
B 12,12 P6 M 67 R Marié BTS 7 Oui Oui 7 5 Perindopril, paracétamol
B 13,57 P7 M 49 R Marié CAP 4 Non Oui 7 10 Omeprazole, alprazolam, venlafaxine
B 13 P8 F 51 R Mariée BEP 5 Non Oui 7 28 Levothyroxine, bisoprolol
+ hydrochlorothiazyde, ibuprofène,
paracétamol
C 23 P9 M 66 C Marié CAP 7 Oui Oui 3 12 Clopidogrel, acétylslicylate de lysine,
rilmétidine, ivabradine, insuline,
pravastatine, dialtiazem, bumétanide,
ibesartan
B 20,78 P10 M 71 R Marié CAP 7 Non Oui 4 4 Perindopril
C 19,78 P11 M 63 C Marié Brevet Pro 7 Oui Oui 8 Sup
30
Acebutolol, captopril, atorvastatine,
zopiclone, metformine, repaglinide,
insuline lente, insuline rapide
C 19,3 P12 F 63 C Mariée CAP 7 Non Oui 8 4 Paracétamol
D 38,63 P13 F 90 SR Veuve Certificat d'étude 7 Oui Oui 20 20 Candesartan + hydrochorothaizyde,
flécainide, ésomeprazole, lorazepam
C 9,75 P14 M 28 C Célibataire Bac + 2 ans 4 Oui Non 2 5 Escitalopram clotiazépam, salbutamol
E 17 P15 F 53 C Mariée Bac 8 Non Oui 35 2 Levothyroxine, bisoprol
Résidence : rurale (R), semi-rurale (SR), citadine (C).
Professions : artisans, commerçants et chefs d'entreprise (2), professions Intermédiaires (4), employés (5), ouvriers (6), retraités (7), autres sans activité professionnelle (8).
Médecins
Durée de l'entretien (min)
Entretiens
Genre
Âge (ans)
Résidence
Statut marital
Niveau d'études
Profession
ALD
Spécialistes
Temps de suivi
par le MG (ans)
Temps de prise
des traitements (ans)
Ordonnance
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les soignaient mais qu’ils ne pouvaient pas les guérir ; pour
certains, ils permettaient d’éviter un décès prématuré ou des
complications. L’effet placebo a été cité par un patient traité
pour hypertension, diabète de type 2 et hypercholestérolé-
mie : le simple fait d’ingérer des comprimés pouvait lui don-
ner l’impression d’être soigné et il remettait en cause la réelle
efficacité de son traitement.
Plusieurs craintes sont apparues au cours des entretiens : la
surmédicalisation, l’accoutumance aux traitements et les ef-
fets indésirables. La crainte du passage à l’insuline a été citée
par certains patients présentant un diabète de type 2. Les
médicaments génériques ne semblaient pas faire l’unani-
mité, par peur d’une moindre efficacité ou moindre qualité.
La majorité des patients ont déclaré ne pas être inquiets des
modifications éventuelles de leur ordonnance chronique en
raison de la confiance éprouvée envers leur MG : c’était « son
travail » d’adapter le traitement aux résultats biologiques, aux
propositions faites par les spécialistes d’organe, mais aussi
en cas d’effets indésirables, d’inefficacité d’un traitement,
de passage aux médicaments génériques ou de réduction du
nombre de médicaments prescrits.
Certains patients ont évoqué la crainte d’effets indésirables
ou de perturbations engendrées par l’introduction de nou-
veaux traitements. À plusieurs reprises, ils ont déclaré avoir
arrêté des traitements de leur propre initiative de ce fait, mais
plus rarement pour le traitement chronique que pour un trai-
tement intercurrent.
Les autres options thérapeutiques
Concernant les alternatives hygiéno-diététiques pour le trai-
tement des maladies chroniques, elles étaient le plus sou-
vent connues des patients mais ont paru peu respectées et
peu appréciées. L’activité sportive a été citée, notamment la
marche, ainsi que le régime alimentaire auquel il a été jugé
difficile de s’astreindre.
Certains patients traités pour un syndrome dépressif ont évo-
qué la psychothérapie complémentaire aux médicaments.
D’autres estimaient que les séances de kinésithérapie, dans
le cadre de douleurs rhumatologiques ou de vertiges, ne leur
apportaient pas d’amélioration. D’autres encore ont précisé
aller chercher des solutions avec des thérapeutiques complé-
mentaires, alternatives ou traditionnelles, comme les
compléments alimentaires pour des troubles endocriniens,
la phytothérapie pour les douleurs arthrosiques. Des patients
semblaient avoir fréquemment eu recours à l’homéopathie
sans y trouver de réels bénéfices.
La non-reconnaissance des thérapeutiques alternatives par
le corps médical représentait une déception pour certains
patients.
Discussion
Notre étude a plusieurs limites
Ce sont les MG qui ont sollicité les patients et il est possible,
même involontairement, qu’ils aient choisi des patients parmi
les plus compliants et observants. Ceci peut expliquer leur
bonne connaissance des traitements prescrits. Par ailleurs,
aucun des patients rencontré n’était illettré ou ne présentait
de troubles cognitifs, facteurs rendant plus difficile la compré-
hension de l’ordonnance. L’existence d’un lien entre le MG
traitant et l’investigatrice a pu modifier l’expression des pa-
tients. Enfin, un biais d’interprétation des chercheurs lors de
l’analyse existe inévitablement.
L'examen clinique, moment clé
de la consultation de suivi de pathologie
chronique
L’examen du corps, devoir professionnel, est une étape pri-
mordiale pour le patient [8]. La mesure de la pression arté-
rielle y tient une place très attendue alors qu’elle a moins
de valeur aux yeux des médecins, qui désormais devraient
prendre leur décision de traitement après des mesures ité-
ratives ou auto-mesures répétées par le patient dans son
lieu de vie [9].
Des motifs de consultation multiples
Loin du renouvellement pur et simple de l’ordonnance, cette
consultation permet aux patients de faire le point avec leur
MG sur la ou les pathologies chroniques en cours, leurs trai-
tements médicamenteux et non médicamenteux, leur suivi
biologique et d’autres sujets concernant leur santé : préven-
tion, conseil, pathologie aiguë bénigne. Dans une étude lyon-
naise, 71 % des patients qui consultaient pour « renouvelle-
ment » avaient des plaintes multiples [10]. Dans l’étude
Polychrome, le nombre moyen de recours associés dans une
séance de médecine générale était de 1,6 à 1,9 et augmen-
tait avec l’âge [11]. Les MG estimaient manquer de temps
et être parasités par des plaintes multiples. Malgré la
complexité et la densité de ces consultations, ils tentaient
d’assurer une prise en charge optimale ; soit en s’accordant
des plages de temps plus longues, soit en proposant une
consultation supplémentaire si le nombre des plaintes du pa-
tient était trop important [10].
Des modifications de traitement bien
acceptées
Les patients rencontrés craignaient plutôt la polymédication,
les effets indésirables des médicaments et l’accoutumance,
notamment aux psychotropes, ce qui rejoint les préoccupa-
tions des médecins et des agences de santé, notamment
pour les patients âgés [12, 13]. Dès 1980, en Grande-Breta-
gne, des indicateurs de « bonne prescription » ont été étu-
diés : indication, choix, administration, information et suivi
d’un traitement médicamenteux [14]. Certains auteurs ont
proposé une démarche de « dé-prescription » chaque fois
qu’elle est possible [15]. Cependant à bien des égards, si la
consultation de suivi de pathologie chronique est parasitée
par nombre d’autres éléments même justifiés, on comprend,
comme l’a montré l’étude Polychrome que cette démarche
qualité puisse être difficile pour le MG. Il est aussi à noter
que les patients de notre étude traités pour plusieurs fac-
teurs de risque cardiovasculaire n’ont pas évoqué une
possible minoration du nombre de médicaments, alors qu’ils
considéraient majoritairement le respect des mesures
hygiéno-diététiques comme une contrainte.
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Là est bien le sens de l’éducation thérapeutique du patient
(ETP) qu’il faut aider à comprendre le ou les changements
qu’on lui propose, dans la limite du raisonnable et du faisable,
pour aller avec lui vers une démarche de dé-prescription
quand elle est possible.
Une inobservance très anecdotique
dans notre étude
Elle concernerait en réalité 50 % des patients chroniques
[16]. Dans une étude chez les patients hypertendus traités,
les causes d’inobservance étaient l’absence de symptômes,
le fait d’être astreint à un traitement au long cours, et la non-
perception du risque [17]. Les premières tentatives d’ETP,
fondées sur les seules informations sur la maladie et son
traitement, ne garantissaient pas l’observance : l’éducation
du patient à sa maladie est plutôt un processus interactif lui
permettant d’acquérir des compétences pour vivre de façon
optimale avec sa maladie et ainsi être plus compliant, ce qui
éviterait peut-être une multiplication des prescriptions de la
part des MG [16].
Les patients de notre échantillon ont montré l’intérêt qu’ils
portaient aux conseils donnés par leur MG. Eu égard au
temps nécessaire à l’ETP, des programmes de recherche
ont montré que cette démarche était possible et positive
dans les cabinets de médecine générale grâce à une col-
laboration pluridisciplinaire (infirmières formées à l’ETP et
MG : programme ASALEE) [18], programme SOPHIA de
l’Assurance-Maladie, réseaux ville/hôpital dans le domaine
du diabète. Toutefois, toutes ces initiatives devront être
évaluées et coordonnées afin que le patient ne s’y perde
pas.
Le rôle d'interface occupé par le MG
Les patients de l’étude l’ont souligné pour leur suivi et la
gestion de leur traitement, mais n’ont pas abordé les consul-
tations ou ordonnances effectuées par d’autres médecins à
l’insu de leur médecin traitant, comme s’ils s’adressaient uni-
quement à leur MG « déclaré ». S’agit-il du nouvel effet de
la mise en place du choix du médecin traitant avec ses
contraintes financières pour le patient, d’un sujet tabou ou
d’un défaut de notre guide d’entretien ?
Il pourrait être intéressant d’étudier cet aspect de la prise en
charge, d’autant que les patients de notre échantillon ont
abordé sans tabou les traitements alternatifs ou complémen-
taires en leur conférant la capacité de résoudre des problè-
mes insolubles pour « la » médecine. Le contrat établi entre
patient et médecin traitant a en partie été mis en place par
les organismes de sécurité sociale en raison d’une surcon-
sommation de soins par les usagers. La consommation de
soins à l’échelle individuelle par les patients chroniques pour-
rait aussi être étudiée dans ce cadre.
Des patients «acteurs »de leur maladie ?
Connaissant bien leurs traitements et leurs indications, les
patients pourraient devenir « patients experts » tout en sou-
haitant former une équipe avec leur MG [19]. Cette évolution
voulue par les usagers du système de soins en partenariat
avec les médecins, reflète les modifications récentes de la
relation médecin-malade inscrite dans différentes lois, dont
la loi Kouchner du 4 mars 2002 qui a permis l’accès à l’infor-
mation pour le patient.
Une des pistes possible est encore l’ETP, qui va dans le sens
d’une prise en charge centrée sur le patient pour permettre
d’atteindre certains objectifs. La réflexion doit être poursuivie
pour permettre la mise en place de modes optimisés de suivi
des pathologies chroniques en médecine générale, décen-
trée du médicament.
Quels sont les fondements du «rituel »
observé de la consultation de suivi ?
Notre étude ne l’a pas exploré. Il pourrait trouver sa source
chez les MG eux-mêmes : par habitude, du fait de leur appren-
tissage, par reproduction d’un modèle ? Face à une même
pathologie bénigne, les comportements des MG et patients
Français sont très différents de ceux des Hollandais [20]. Il
pourrait être intéressant d’explorer le suivi des patients chro-
niques dans différentes sociétés et systèmes de soins euro-
péens où le médicament n’a pas la place qu’il a en France.
Ce qui était connu
La multiplicité des objectifs attribués par ces patients à leur MG : prise en charge concomitante de maladies bénignes
intercurrentes, prévention et l'échange autour du suivi des pathologies chroniques, éducation thérapeutique comprise.
Leur vision du MG «expert »pour les modifications thérapeutiques rendues nécessaires par l'évolution de leurs
maladies chroniques, mais aussi leurs craintes d'une polymédication.
Ce que cette étude apporte
Une mise en lumière de l'aspect «ritualisé »de cette consultation du point de vue du patient.
La vision d'un «partenariat »effectif entre le patient et son MG.
Le possible rôle de frein de l'expression «renouvellement d'ordonnance »à la réflexion du patient et du médecin
pour la gestion des pathologies chroniques.
Les zones d'incertitude
La cause de la «ritualisation »de cette consultation.
La comparaison avec d'autres contextes de soins, européens notamment.
Le rôle que pourrait jouer l'ETP pour optimiser le suivi des pathologies chroniques (contenus évolutifs de la consul-
tation, planification des rencontres patients chroniques/MG en fonction des problèmes à traiter...).
238 MÉDECINE mai 2014
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