16-Reperes-01-09:Mise en page 1 20/12/08 10:18 Page 223 Librairie font que les évolutions de l’une engagent décidément l’autre. qui invalide la prétendue rationalité de l’homo eoconomicus et oriente l’étude du comportement économique des individus, si l’on veut conserver ce vocabulaire, vers « les intérêts passionnés ». C’est dire si l’économie est irrationnelle et trouve ses explications hors d’elle. Dans Psychologie économique, il écrit : Son exposé est historique, il décrit la constitution du « régime aristocratique du goût », puis sa « conversion économique » et enfin, « l’industrialisation du plaisir esthétique ». C’est là, que les choses se gâtent et que la consommation aliène le consommateur, plus qu’elle ne satisfait ses attentes. D’où le recours à Tarde et à sa conception de la mode, ce tour de passe-passe qui accélère l’obsolescence des biens. L’auteur écrit justement que Le problème se résume, en somme, à ceci : serrer le plus près possible la genèse des inventions, et les lois de leurs imitations. Le progrès économique suppose deux choses : d’une part, un nombre croissant de désirs différents ; car, sans différence dans les désirs, point d’échange possible, et, à chaque nouveau désir différent qui apparaît, la vie de l’échange s’attise. D’autre part, un nombre croissant d’exemplaires semblables de chaque désir considéré à part ; car, sans cette similitude, point d’industrie possible, et, plus cette similitude s’étend ou se prolonge, plus la production s’élargit et s’affermit. la volatilité des goûts est une source psychique et immatérielle de plus-value économique. Et plus loin, il constate : La consommation trouve dans la destructibilité sa source principale de plusvalue. Le philosophe Olivier Assouly sort l’économie de son habituelle étude des conditions de production des marchandises, de leur circulation et de la répartition des richesses, générées par la consommation, pour élaborer un « capitalisme esthétique », dans lequel, Ce n’est pas l’accumulation qui sert de carburant à la machine économique, mais l’invention. Quant à l’instance économique, elle s’imbrique entièrement dans le social. On le voit, ces deux essais proposent de penser l’économie hors de son domaine spécifique, qui n’existe pas au demeurant, et donnent à l’appréciation de chacun, à l’esthétique, l’invention, la mode, l’imitation, et aux innombrables intersubjectivités qui s’entrelacent, etc., les rôles essentiels dans ce « fragment d’histoire » en cours. le marché n’est pas le lieu de production du goût, mais celui de la captation, de la formalisation et de l’exploitation des jouissances. À une économie quantitative, il substitue une économie des appréciations et ouvre ainsi une piste passionnante pour comprendre la mutation actuelle du capitalisme, prolongeant ainsi les travaux d’André Gorz sur l’immatériel… Le second est plus impertinent et polémique, les auteurs n’hésitent pas à brocarder la science économique dominante (à dire vrai, toujours en retard d’une crise…) et à en changer les bases. Pour Tarde, ce sont les idées (et les idées que les économistes se font de l’économie, aussi) qui guident les transformations des sociétés. Les auteurs notent que chez Tarde, « rien dans l’économie est objectif, tout est subjectif ou, plutôt, intersubjectif », ce Thierry Paquot 223