Sabrina Ferraro manipulatrice en radiothérapie référente douleur Institut Paoli-Calmettes Evaluation de la douleur dans un service de radiothérapie Un nouveau rôle pour le manipulateur? Une nouvelle pratique pour les manipulateurs Aujourd'hui 25% des traitements réalisés dans le service de radiothérapie de l’Institut Paoli-Calmettes sont à visée antalgique, or l’évaluation de la douleur n’est pas une pratique courante ni au scanner de simulation, ni aux postes de traitement … L’évaluation de la douleur est couramment faite lors de consultations médicales, infirmières. Elle ne l’était pas jusqu’à présent lors de l’exécution de gestes techniques par les manipulateurs. Pose de cathéter, réalisation de masque de contention… Les objectifs de ce travail Evaluer la douleur des patients par les manipulateurs au moment de la simulation. Déterminer des axes de soulagement en collaboration avec les radiothérapeutes. Enregistrer et suivre les données dans le dossier informatisé du patient. Matériels et méthodes Le recueil des données s’est déroulé pendant quatre semaines du 1er au 26 août 2016 sur une série consécutive de quatre-vingt-douze patients. Répartition des patients par pathologie : 30 25 20 15 10 5 0 Modalités d’évaluation Par le manipulateur en poste en simulation Par interrogatoire à chaque étape de prise en charge -« avant » : avant l’installation -« pendant » : dans la future position de traitement -« après » : lors du rhabillage A l’aide de l’échelle numérique de 0 à 10 Facteurs participants à la douleur des patients Inconfort du matériel (plan incliné rigide…) Immobilité Température de la salle Anxiété 3 temps d’évaluation Avant : Prise de conscience du soignant de la douleur vécue par le patient sans la caractériser. Pendant : Ajustement des contentions nécessaires au traitement (cale tête, mousse, appui bras) et adaptation de la manutention. Evaluation de la capacité du patient à maintenir la position identique sur la durée. Après : Évaluation de l’impact de l’examen sur le patient. L’examen a-t-il provoqué de la douleur? Les séances à venir seront–elles bien tolérées? Si le score était ≥4 mise en place d’une prise en charge spécifique Résultats Quatre-vingt-douze patients âgés de dix-sept à quatre-vingt-neuf ans (âge médian soixante sept ans) ont été concernés par cette évaluation. 51,1% des patients ont un score EVA = 0 à chaque étape d'évaluation 20,6% des patients ont un score 0 ≤ EVA≤ 3 aux 3 étapes d'évaluation 28,3% des patients ont un score EVA ≥ 4 à l'une des étapes Répartition des scores ≥4 chez les 92 patients selon les étapes 25 20 15 10 5 0 22,8% ont un score ≥ 4 avant 19,5% ont un score ≥ 4 l'examen pendant l'examen 17,4% ont un score ≥ 4 après l'examen Actions mises en place pour les 24 patients algiques 45 40 35 30 25 20 15 10 5 0 41,6% de contentions modifiées 20,8 % contentions modifiées + presrciption d'antalgiques 33,3 % aucune action supplémentaire 4,3% autre La modification de contentions a apporté un soulagement pour la moitié des patients concernés et une stabilisation du score pour les autres. Axes d’amélioration Modification des contentions : Adaptation du réglage des contentions aux capacités du patient (seins) Adaptation de la cale tête à la morphologie du patient Ajout d’une mousse Modification des contentions + prescription d’antalgiques : Le manipulateur informe le radiothérapeute des scores « avant » « pendant » « après » du patient. Prescription d’antalgiques pour les séances suivantes. Aucune action supplémentaire : Concerne à part égale : Des patients ayant un score « avant » et « après » inférieur à 4 et dont les contentions ne peuvent être modifiées. Des patients ayant déjà un traitement antalgique. Rôle de la prémédication Parmi les 24 patients algiques (≥4) , 16 patients avaient été évalués en amont par le corps médical de l’IPC et présentaient déjà des scores ≥ 4. Ils avaient reçus une prescription d’antalgiques. Répartition des patients algiques selon leur localisation 62% de localisations métastatiques 26% d’irradiations du sein 12% d’irradiations pelviennes. Les 6 patients atteignant les scores les plus élevés (au moins 1 score EVA ≥ 7) étaient venus en ambulatoire et n’avaient jamais été pris en charge pour la douleur à l’Institut. Remarques La simulation induit de la douleur chez 12% des patients interrogés . Chez ces patients le score « après » est identique au score « avant ». Les patients, pour lesquels la simulation n’induit pas de douleur (18.5%), voient leur score « après » devenir inférieur au score « avant ». Par ailleurs, parmi eux 7 patients avaient été évalués par le radiothérapeute en consultation d’annonce et présentaient des scores inférieurs à ceux obtenus le jour de la simulation (sans prémédication)… Les questionnements La douleur est-elle majorée par l’anxiété du patient? Quelles sont les limites des moyens actuels pour soulager la douleur des patients pendant la simulation et les séances de traitement ? Peut-on mettre en place d’autres moyens en radiothérapie pour soulager les patients dont la douleur résiste aux traitements antalgiques? Quels axes d’amélioration des pratiques pour un meilleur soulagement des patients? Former les manipulateurs à l’interrogatoire des patients douloureux. Former les manipulateurs à la communication (verbale et non verbale). Donner la possibilité de délivrer des antalgiques à action très rapide dans le service. Former les manipulateurs à l’hypnose pour la réalisation d’actes anxiogènes. Former les patients à l’auto-hypnose pour mieux vivre les séances de traitement (port du masque de contention chez les patients claustrophobes). Conclusion : Le soulagement de la douleur en radiothérapie est au cœur de la pluridisciplinarité de l’Institut. Le patient rencontre, à chaque étape de sa prise en charge, des intervenants qui contribuent à l’évaluation et le soulagement de sa douleur. Aujourd’hui, le rôle du manipulateur en radiothérapie prend toute sa place dans le vécu douloureux du patient. Même si c’est un rôle qu’il joue discrètement depuis toujours. L’évolution continue de la prise en charge des patients induit une évolution continue des pratiques des soignants. Ici le soulagement de la douleur du patient va de pair avec une évolution des compétences des manipulateurs.