La Revue Exercer - Mars/Avril 2006 n°77 - 58
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Malgré la petite taille de notre population étudiée, la
répartition était équivalente pour les deux sexes. Le sexe
ratio (SR) de notre étude était plutôt favorable aux hommes
(SR = 1,18) contrairement aux chiffres du centre où les
femmes étaient légèrement plus nombreuses que les
hommes (SR = 0,87).
L’âge moyen des fumeurs de notre étude était de 38 ans et
demi contre 43 ans pour le centre. On peut donc avancer
que les généralistes voient les fumeurs 5 ans plus tôt que
les centres d’aide à l’arrêt. La comparaison de la période
moyenne avant la demande d’aide n’est pas possible car
l’étude de Clermont-Ferrand chiffrait non pas les années de
tabagisme mais une consommation cumulée exprimée en
paquet année.
Le tabagisme
L’histoire du tabagisme des fumeurs montrait que le
nombre moyen de tentatives d’arrêt était de 3,1 pour les
fumeurs consultant au centre de tabacologie contre
1,75 dans notre étude. L’évaluation de la dépendance nico-
tinique variait selon le lieu de sevrage : 61% des consultants
en centre avaient un niveau de dépendance élevé (score de
Fagerström supérieur ou égal à 7), alors que les patients
consultant dans le cabinet de médecine générale se
répartissaient de manière équivalente dans les trois niveaux
de dépendance, faible, moyen ou fort.
Quelques hypothèses peuvent être avancées pour éclairer
ces différences :
• Les patients consultant en centre sont des fumeurs en plus
grande difficulté.
• Ils peuvent avoir été en échec plusieurs fois avec des
traitements prescrits par leur médecin traitant ou leur
pharmacien.
• La spécialisation des centres de sevrage tabagique attire
sans doute des patients se sentant si "prisonnier" de la
cigarette qu’ils recherchent directement une aide spéciali-
sée en pensant que leur médecin traitant ne pourra pas les
aider correctement.
• Les médecins généralistes voient les patients plus tôt dans
leur trajectoire de fumeur et ainsi ces derniers s’adressent
d’abord à leur médecin traitant avant de consulter un
centre d’aide au sevrage. Cette hypothèse est renforcée
par les 5 années de différence entre les âges moyens des
consultants dans les 2 études.
Il faut développer le savoir faire des médecins généralistes pour
que les demandes d’aide des patients soient bien reçues. Les
généralistes peuvent agir tôt dans la trajectoire des fumeurs et
être ainsi très efficaces (8, 9). Les patients consultent en
centre lorsqu’ils ont essuyé plusieurs échecs, soit seuls, soit
avec leur médecin. Une coordination des soins et une continui-
té du suivi renforceraient les actions de chaque professionnel.
Anxiété et dépression
La comparaison des chiffres de fumeurs présentant une
anxiété ou une dépression montre également quelques
disparités. Dans notre étude, une notion dépressive était
relevée dans 33,3% des cas, le chiffre du centre était de
26,5%, soit peu de différence. Par contre, la population du
centre se révélait beaucoup moins anxieuse que celle de
notre étude. En effet, l’enquête de Clermont-Ferrand
retrouvait des troubles anxieux chez seulement 36,8% des
patients, alors que notre travail en notait 58,3%.
Plusieurs hypothèses peuvent être formulées : il peut
exister un problème dans la définition de l’anxiété. Dans le
centre, l’outil de diagnostic des terrains anxieux était le test
HAD présent dans le dossier INPES et rempli par la
personne elle-même, alors que le médecin généraliste
utilisait plusieurs façons de poser le diagnostic d’anxiété :
le test Emile Roux, le HAD (qui complète le dossier patient
partagé du réseau ADDICA depuis peu) ou les critères
cliniques du DRC. La connaissance rapprochée de ses
patients lui permet également de percevoir différemment
leur mal-être. Enfin, les patients du médecin peuvent
consulter plus facilement au cabinet de proximité car ils
savent que leurs angoisses seront prises en compte.
Les traitements
Les chiffres de prescription de substituts nicotiniques étaient
superposables dans les deux études. Environ 92%
des patients bénéficiaient d’une prescription de substituts
nicotiniques dans les deux populations. Par contre, la
prescription d’antidépresseur était plus large dans le centre
de sevrage tabagique (45%) que dans notre étude (25%).
Alors que le diagnostic d’état dépressif et d’anxiété est plus
souvent relevé dans la patientèle du généraliste, les
traitements antidépresseurs sont moins utilisés. Les
explications sont plurielles :
• Le traitement par antidépresseur est moins automatique
chez le généraliste
• La différenciation humeur dépressive et dépression par le
DRC limite la prescription des antidépresseurs.
• L’entité dépression mesurée par le test HAD en centre de
sevrage conduit à une prescription plus automatique d’un
antidépresseur alors que le diagnostic pour un même
patient peut être plus nuancé par le généraliste.
• Le généraliste traite les dépressions avec des consultations
rapprochées et un accompagnement au plus près de ses
patients, que ne peuvent pas réaliser les centres de
sevrage.
• Le généraliste sous-traite les états anxio-dépressifs.
• Les patients consultant en moyenne 5 ans plus tard dans
les centres avec des tentatives d’arrêt plus nombreuses et