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MAYO c. PROMETHEUS
Franck TETAZ – Avril 2012
La décision MAYO c.
PROMETHEUS se situe dans
la lignée de BILSKI c. KAPOS
en ce sens qu’elle vient
préciser son interprétation
de l’exclusion de la brevetabilité pour les « lois
naturelles » dans un contexte de contentieux
générés par des brevets susceptibles d’affecter
les intérêts de la société U.S. en matière de
santé publique (affaire Myriad Genetics
notamment).
Le brevet en question cherche à protéger une
méthode pour optimiser le traitement d’un
patient atteint d’une affection immunitaire du
système gastro-intestinal comprenant les
étapes de :
a) Administrer un médicament procurant
de la 6-thioguanidine à une personne
atteinte de l’affection gastro-intestinale, et
b) Déterminer le niveau de 6-
thioguanidine chez ce patient
dans laquelle :
o un niveau de 6-thioguanidine inférieur
à un premier seuil signifie le besoin
d’augmenter la dose de médicament
pour une nouvelle administration et
o un niveau de 6-thioguanidine supérieur
à un second seuil signifie le besoin de
diminuer la dose de médicament pour
une nouvelle administration.
La Cour Suprême considère que :
• la relation seuil de 6-thioguanidine/dose de
médicament est une loi naturelle, la
revendication venant informer les praticiens
de l’existence de la loi naturelle et, au
mieux, les informant de l’intérêt à suivre
cette loi pour traiter leurs patients
• l’acte d’administrer le médicament (étape
a) consiste simplement à identifier la
population concernée par le traitement,
population préexistante puisque le
traitement de l’affection par le médicament
était déjà connu, et
• l’acte de déterminer le niveau de 6-
thioguanidine (étape b) informe le praticien
de faire cette mesure quelle que soit la
méthode employée.
En d’autres termes, la Cour Suprême résume
l’invention en l’information d’une audience
particulière sur l’existence d’une loi naturelle,
toutes les autres étapes étant des étapes de
routine bien connues et conventionnelles qui
combinées n’apportent pas d’éléments
significativement différents de la somme de
ces étapes prises séparément.
Lorsque l’invention réside dans la mise en
évidence d’un phénomène naturel, le simple
fait d’intégrer l’application de ce phénomène
naturel à une méthode usuelle de diagnostic
consistant à prélever un échantillon et faire
l’analyse nécessaire pour confronter son
résultat à la règle établie pour le phénomène
naturel ne devrait pas suffire à identifier une
invention utile au sens de l’article 101 de la loi
US sur les brevets.
Cette décision vient créer
de nouvelles difficultés
pour la protection aux Etats
Unis de méthodes de
diagnostic ou de diagnostic
compagnon basées sur des
observations de phénomènes naturels simples
associés à une pathologie particulière comme
l’existence d’une mutation génétique ou la
présence d’un biomarqueur.
Elle vient rappeler que le système des brevets
a d’abord été conçu pour accompagner les
activités industrielles, favorisant la libre
circulation des idées et des théories
scientifiques.
Elle affectera d’autant plus les organismes de
recherche académique qui sont souvent à
l’origine de la mise en évidence de telles
observations de phénomènes naturels mais
participent rarement à leur développement
industriel.
Elle affecte autant les brevets déjà délivrés
que les demandes déposées en cours d’examen
pour lesquels des modifications des
revendications peuvent être envisagées. Pour
les demandes qui ne sont pas encore déposées,
un travail spécifique de description de
méthodes plus concrètes de mise en œuvre de
l’invention devra être réalisé pour trouver le
support d’une revendication acceptable.