Assemblée Générale du 26 octobre 2006
Discours du Professeur Mongin 3/4
« ego », qui lui permet de s’affirmer à la fois semblable et différent des autres, capable d’agir en
disant « je » et « moi ».
Le médecin doit prendre en considération cette notion de personne : il traite une maladie, un
processus pathologique et en même temps il soigne un malade qu’il doit respecter même si ce
dernier est au comble de la déchéance.
Mais le médecin n’est pas consulté seulement par des malades : beaucoup de sujets sains, ou se
considérant comme tels, se présentent à lui à l’occasion d’incidents bénins, de légers malaises ou en
vue d’un bilan de santé systématique.
C’est pour le Médecin l’occasion de jouer un rôle de prévention : ne pas se contenter de rassurer le
patient mais en profiter pour corriger son mode de vie, ses habitudes alimentaires nocives, prôner
l’exercice physique, la marche, l’aider à se défaire d’habitudes désastreuses (tabac, alcool, drogues,
dopants). Il s’agit là d’une médecine clinique et humaniste, une médecine de la « santé » qui vise à
la sauvegarde de l’individu par une meilleure adaptation sociale.
La relation médecin-malade que nous avons décrite n’est pas un idéal abstrait mais bien une réalité
quotidienne. Cependant, elle n’est pas tout à fait un tête-à-tête intime et libre. Un tiers y est présent
en filigrane, c’est l’Assurance-maladie de la Sécurité Sociale qui assure le financement de cette
rencontre.
La Sécurité Sociale se montre discrète et peu gênante dans la mesure où elle laisse au médecin la
liberté de ses actes et qu’elle octroie au malade la quasi gratuité des soins.
Mais cette libéralité, pour ne pas dire ce laxisme, s’est fondée à l’origine sur un système de santé
peu coûteux. Depuis lors, les dépenses de santé n’ont cessé de croître en raison des possibilités de
soins de plus en plus efficaces et sophistiquées parallèlement à une longévité très accrue.
Quelles que soient les réformes de « l’assurance-maladie », son déficit peut s’infléchir mais ne
disparaîtra sans doute pas.
Si la santé n’a pas de prix pour l’assuré, elle en a un très élevé pour la collectivité. D’où la nécessité
d’une bonne gestion en évitant tout gaspillage et tout abus. Dans ce domaine, le rôle du médecin est
capital : il est l’ordonnateur des dépenses de la Sécurité Sociale.
Les erreurs de diagnostic, les retards de diagnostic, les traitements inappropriés, ou superflus, la
redondance des examens radiologiques ou biologiques, tout ceci est le fruit de l’incompétence, de la
négligence, et traduit un désintérêt à l’égard du bien public.
Il y a aussi le manque de disponibilité pour assurer un service de garde ou d’astreinte. Fuir les
obligations de l’urgence pour ne pas être dérangé et compter sur les services publics : pompiers,
SAMU, accueil à l’hôpital, pour qu’ils prennent en charge des malades qui relèveraient souvent de
la seule compétence du médecin.
Il y a aussi le désir de complaire à son patient en lui prescrivant des arrêts de travail injustifiés, des
séances de rééducation interminables, des massages de confort, en écrivant sous sa dictée des
ordonnances.
Le médecin doit s’obliger à la sobriété et à la rigueur dans toutes ses prescriptions. Notre système
de soins ne pourra pas survivre en l’absence de sens civique chez le médecin. Or, celui-ci n’est pas
très soucieux du bien public : :très indépendant par tradition, en raison de son exercice singulier, il
est naturellement enclin à l’individualisme. Les contraintes extérieures lui pèsent. Mais cette pente
est injustifiable dans un système de santé complexe et coûteux qui impose le travail par équipes, un
réseau d’informations et d’échanges, une perpétuelle collaboration entre médecins de disciplines
diverses.