firmes, changement du rapport bénéfice/risques au nom d’un hypothétique
risque zéro, rupture brutale de chaînes d’approvisionnement, crédibilité faible
des justifications données, effondrement boursier et crise de confiance.
Tout cela pourrait avoir du côté de l’industrie pharmaceutique des conséquen-
ces dangereuses, en terme d’assèchement de la recherche et, du côté du patient,
une méfiance systématique vis-à-vis des prescriptions.
Quant aux prescripteurs, ils attendent depuis longtemps que se mette en place
l’évidence : la nécessité d’études indépendantes post-AMM. L’effıcacité d’un
produit définie avant l’AMM par des protocoles sur un patient virtuel n’est pas
son effıcience dans le contexte naturalistique : administration à des patients
complexes ou difficiles, présentant des comorbidités importantes, dans le cadre
d’associations médicamenteuses non prévisibles etc..
Devant ces exigences, des messages contradictoires nous arrivent : le
Fopim (Fonds de promotion de la formation médicale et médico-économique)
créé il y a quelque temps, est mort-né. Le journal Le Monde l’explique ainsi la
« mort du Fopim » : « exemple éclatant de la puissance de l’industrie
pharmaceutique et du manque de volonté politique ». Réponses du côté des
autorités : « la tâche du Fopim était herculéenne » ! Certes, mais quel aveu
d’impuissance !
La Haute Autorité de Santé, installée en décembre, aura pour première mission
d’évaluer les services attendus de tous les actes de santé, y compris les
médicaments. Si elle ne se donne pas les moyens de le faire sérieusement, on ne
voit pas comment elle pourrait transformer « la tâche herculéenne » en études
indépendantes et crédibles, susceptibles de faire revenir la confiance. Dans ce
cadre, quel sera l’avenir du groupement d’intérêt scientifique, construit à
l’initiative de la Direction générale de la santé, de l’assurance-maladie et de
l’Inserm et intitulé « Évaluation épidémiologique des produits de santé », avec
pour objectif de faciliter des mises en œuvre des études post-commercialisation
que tout le monde appelle ? Qui sera chargé des études ?
Nous sommes devant des enjeux à la fois médicaux et sociétaux considérables,
dans lequel nous devons inscrire notre expérience de clinicien et notre regard
critique. Une instance nous permet de le faire localement, déjà. Les Comedims
(Comité du médicament et des dispositifs médicaux stériles hospitaliers) nous
permettent déjà d’échanger nos expériences et de faire des comparaisons fruc-
tueuses entre conférences de consensus, guidelines
, recommandations d’AMM
et pratiques cliniques. Nous avons assisté ces dernières années au creusement
d’un fossé entre l’efficacité démontrée d’un médicament dans les protocoles de
recherche, les recommandations des AMM et l’efficience de ce même médica-
ment dans la situation clinique, forcément complexe. Il est temps d’interroger
ce fossé ; c’est ce que fait ce numéro de l’Information Psychiatrique.
Références
. Bulletin de l’Ordre des Médecins 2004 ; 8 : 4.
. Liberation 2005 : 3.
. Prescriptions Santé 2004 ; 1 ; 2 et 3.
. Le Monde 2004 ; 12 novembre ; supplément du 11 décembre ; 21 décembre.
. Prescrire 2004 ; 24 : 255.
TRÉMINE T. Le médicament dans la tourmente. L’Information psychiatrique 2005; 81 : 93-4
T. Trémine
L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 81, N° 2 - FE
´VRIER 200594
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