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Session d’automne de l’Assemblée parlementaire de l’OSCE à Tirana (5 – 6 octobre 2012)
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SOMMAIRE
A. Exposés introductifs
B. Conférence: sur “L’OSCE: promouvoir la bonne gouvernance et l’intégration comme base de
stabilité et de sécurité”
1. La promotion et la protection des sociétés multiethniques et multiculturelles dans la région de
l’OSCE
2. Faire face à la crise économique et financière: austérité contre relance
3. Le rôle des médias dans la promotion de la bonne gouvernance
C. Réunion de la commission permanente de l'AP OSCE
Du 5 au 6 octobre 2012, l'Assemblée parlementaire de l'OSCE (ci-après AP OSCE) a organisé
à Tirana (Albanie) une Conférence sur “L’OSCE: promouvoir la bonne gouvernance et
l’intégration comme base de stabilité et de sécurité”
A. EXPOSÉS INTRODUCTIFS (5 octobre 2012)
M. Riccardo Migliori, président de l'Assemblée parlementaire de l'OSCE, souhaite la bienvenue
aux participants et remercie l'Albanie, pays d'accueil de la session, pour son hospitalité. Un an
après la session d'automne de Dubrovnic, la région de la Mer adriatique continue à jouer un
rôle important de promotion de la coopération au sein de l'OSCE. Depuis son adhésion à
l'OSCE en 1991, l'Albanie, où cohabitent pacifiquement plusieurs communautés
confessionnelles, a réalisé des progrès manifestes, notamment sur le plan de la
démocratisation, de la législation et des droits de l'homme.
Le président souligne également l'importance de ce type de réunions parlementaires: elles
permettent de bâtir des ponts entre les nations.
Mme Jozefina Topalli, présidente du Parlement albanais, rappelle combien l’Albanie a, en peu
de temps, évolué d’un des États les plus isolés et les plus pauvres vers un pays démocratique,
où de grandes valeurs comme le respect, la liberté universelle et les droits de l’homme ont
retrouvé leur place. Pour y parvenir, l’Albanie a dû surmonter de nombreux obstacles.
Beaucoup reste encore à faire, mais les Albanais sont résolus à continuer à suivre la voie
difficile de la démocratie et de la croissance économique, ainsi que celle vers l’Union
européenne.
M. Lamberto Zannier, secrétaire général de l’OSCE, fait remarquer que l’Albanie abrite l’une
des missions historiques de l’OSCE et souligne l’importance d’une bonne coopération en vue
d’éviter les conflits et de protéger les communautés multiethniques de la région.
À l’approche de Helsinki +40, il demande à l’Assemblée parlementaire d’accorder de l’attention
à la réforme de l’agenda de l’OSCE et à la préparation du conseil ministériel qui aura lieu à
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Dublin en décembre 2012. L’OSCE doit continuer à jouer son rôle au niveau international,
notamment dans le cadre de l’observation d’élections.
M. Sali Berisha, premier ministre albanais, manifeste également son estime pour le travail de
l’OSCE et de son assemblée parlementaire, en particulier lors des développements
démocratiques qu’a connus l’Albanie depuis la chute du régime totalitaire. Aujourd’hui, le pays
entretient aussi davantage de relations amicales avec les pays voisins.
B. CONFÉRENCE SUR “LE DÉVELOPPEMENT REGIONAL EN EUROPE DU SUD-EST”
(5 et 6 octobre 2012)
1. La promotion et la protection des sociétés multiethniques et multiculturelles dans la
région de l’OSCE
M. Artan Fuga, professeur en sciences de la communication à l’université de Tirana, met
l’accent sur la diversité religieuse et culturelle en Albanie. La Constitution albanaise s’est
inspirée du modèle libéral. Chaque communauté a droit au respect de sa culture ou religion et
le droit à la liberté d’expression ne peut être entravé.
L’ambassadeur Fletcher Burton, Chef de la Field Mission de l’OSCE en Bosnie Herzégovine,
fait remarquer que l’OSCE consacre 40 % de ses moyens à la région des Balkans. Cette région
accueille deux grandes missions de terrain, l’une au Kosovo et l’autre en Bosnie Herzégovine.
(diversité multiculturelle). La mission de terrain en Bosnie Herzégovine est devenue un élément
de base de l’architecture civile du pays. L’organisation s’adresse tant au monde de la justice
qu’au monde de l’école et au monde politique. En matière de justice, la mission de terrain veille
à l’équité des procès et à l’égalité en droit. En matière d’enseignement, la mission de terrain
accorde une grande valeur à la tolérance et à la responsabilité dans une société multiethnique.
Dans ses relations avec le parlement de Bosnie Herzégovine, la mission de terrain se
préoccupe tout particulièrement de l’égalité des sexes, des libertés constitutionnelles et de
l’intégration européenne.
L’ambassadeur Fletcher Burton estime que les trois activités sont cruciales pour la promotion
et la protection des sociétés multiethniques et multiculturelles au sein de la région OSCE : la
promotion (to promote) et la protection (to protect) de la société multiethnique, et la prévention
des conflits (to prevent). Trois projets pilote relatifs à la prévention des conflits en Bosnie
Herzégovine (à Srebrenica, Brcko et Mostar) sont axés sur la prévention des conflits.
Le Haut Commissaire pour les minorités nationales remplit un rôle important et peut mettre en
garde précisément là où les tensions peuvent déboucher sur un conflit (early warning system).
L’ambassadeur Fletcher Burton remarque également qu’il y a un siècle, le prix Nobel de la paix
a été décerné à Elihu Root. Le nom de Root est lié à la Convention de La Haye, à la Carnegie
Foundation et aux principes de l’arbitrage international et du droit international. Dans un certain
sens, Root a été un précurseur des initiatives de paix internationales dans les Balkans. Les
efforts internationaux réalisés dans les Balkans au lendemain des conflits ont abouti aux
accords de Dayton en 1995, à l’Accord d’Ohrid de 2001 (qui a mis fin aux conflits entre les
Albanais ethniques et l’armée gouvernementale macédonienne) et au plan d’Athisaari pour le
Kosovo de 2007. Ces accords internationaux mettent l’accent sur les sociétés multiethniques et
multiculturelles ainsi que sur la nécessité de mettre en place des institutions, des droits, des
procédures et une représentation garantie qui protègent cette société multiethnique et
multiculturelle. L’OSCE joue un rôle central dans ces accords, de la même manière que dans la
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construction d’une architecture civile dans la région des Balkans et au niveau de la prévention
des conflits.
M. Adil Akhmetov, Représentant de la Présidence de l'OSCE pour la lutte contre l'intolérance et
la discrimination envers les musulmans, estime que le dialogue interculturel est une chose
fragile. L’intervenant estime que la liberté d’expression ne peut pas justifier le récent petit film
YouTube Innocence of Muslims” qui ridiculise le prophète Mahomet, ni les caricatures danoises
de Mahomet. L’intervenant estime que les États membres de l'OSCE devraient condamner ces
attaques envers l’Islam. Le dialogue interculturel se base sur la protection des droits de
l’homme, ainsi que sur la compréhension mutuelle et la tolérance. Les musulmans constituent
une communauté importante, tant au niveau mondial que dans la communauté immigrée des
pays occidentaux. L’intervenant constate que les discours haineux envers les musulmans sont
en augmentation, que la discrimination est encore grande en matière d’emploi, de logement et
de soins de santé, et que des musulmans subissent parfois des agressions. L’OSCE a
recommandé aux États de signaler ces crimes haineux et ces cas de discrimination. Jusqu’à
présent, un seul pays a communiqué ces informations au Bureau des Institutions
démocratiques et des droits de l'Homme (BIDDH).
Le rabbin Andrew Bake, représentant de la Présidence de l'OSCE pour la lutte contre
l'antisémitisme, souligne les impulsions données par l’assemblée parlementaire de l’OSCE afin
que la lutte contre l'antisémitisme soit mise à l’ordre du jour. Les recommandations formulées
par cette assemblée en 2002 à Berlin ont abouti à ce qu’une mission spéciale soit confiée au
BIDDH à l’égard du suivi de ce problème. Ce problème étant aujourd’hui reconnu, les crimes
antisémites sont poursuivis. Malgré ces progrès, certains défis attendent encore d’être relevés.
La communauté juive s’inquiète de l’antisémitisme répandu sur les blogs et dans les médias
électroniques, des sondages d’opinions révélateurs d’antisémitisme, des menaces envers la
sécurité physique de la communauté juive et de la montée des partis extrémistes qui tiennent
un discours antisémite (en Grèce, en Hongrie et en Autriche). Parfois, les gouvernements ne
soutiennent guère la lutte contre l’antisémitisme. Dans certains cas, l’administration ne parvient
pas à identifier la menace, voire affiche une certaine indifférence. L’intervenant estime que des
sentiments antisémites masqués ressortent d’un jugement récemment prononcé par le tribunal
de Cologne selon lequel des blessures physiques irrémédiables seraient infligées aux jeunes
garçons circoncis pour des raisons religieuses et indiquant que la liberté de religion ne peut pas
justifier de tels actes. L’antisémitisme est un phénomène transfrontalier qui se manifeste
souvent dans les endroits où vivent peu de juifs. Dans ce cas, l’antisémitisme découle plutôt de
la politique d’Israël à l’égard de la Palestine. Le rabbin Andrew Bake demande une réponse
vigoureuse à l’antisémitisme par les voies de la législation, de l’éducation et de l’exécution
effective de l’arsenal législatif, cette approche étant nécessaire pour protéger les sociétés
multiethniques et multiculturelles.
2. Faire face à la crise économique et financière: austérité contre relance
Le président du panel, M. Wolfgang Grossruck, vice-président de l’AP de l’OSCE, rappelle,
dans son introduction, le rapport de la commission de l’Économie de l’AP de l’OSCE, qui
dénonçait l’impact des agences de notation, ainsi que la Déclaration de Monaco qui avait
adopté une série de recommandations portant, notamment, sur l’économie. Il a ainsi é
souligné que les États devaient revenir à des budgets en équilibre de manière acceptable et
supportable. Qui plus est, il faut que les efforts déployés pour relancer l’économie soient
répartis entre les différents acteurs de la société. Enfin, il est essentiel que l’on diminue la
fréquence des transactions financières par l’instauration de la taxe Tobin.
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Exposé de M. Zef Preci, Directeur exécutif, Centre albanais pour la recherche économique
Pour surmonter la crise financière, l’Albanie a pris une série de mesures depuis 2008 et a tiré
des enseignements des expériences vécues par d’autres pays (de petite taille). Ainsi, on peut
distinguer quatre sources de revenus :
1. Le financement par des versements depuis l’étranger. Ceux-ci ont effectivement
fortement baissé à la suite de la crise ;
2. Les investissements dans les secteurs du bâtiment (logement, etc.), de l’industrie et de
la construction routière ;
3. Le développement du secteur touristique, qui a permis de créer des emplois ;
4. Les programmes financiers aux niveaux européen et international.
L’Albanie possède également des richesses naturelles. Pour le secteur agricole, qui représente
une part importante de l’économie albanaise, les problèmes se sont multipliés ces derniers
temps, ce qui a fait baisser la croissance économique de 2,1 à 0,7%.
Avant 2008, l’économie albanaise a connu une série de changements qui ont permis de réduire
la pauvreté, la mortalité et les inégalités entre hommes et femmes. Grâce aux investissements
dans l’infrastructure, on a non seulement amélioré l’approvisionnement en eau mais aussi rendu
l’administration plus accessible aux citoyens. L’ensemble du système a ainsi gagné en
transparence et on peut mieux lutter contre la corruption.
Pour limiter la corruption, il est essentiel de maintenir la croissance économique, ce qui semble
difficile lors des périodes de crise, où il est sans cesse question de réduire les dépenses.
L’Albanie s’efforce malgré tout de maintenir son déficit budgétaire annuel sous les 6 % du PIB.
En 2012, l’Albanie a connu elle aussi un ralentissement économique. Si les banques ont bien
résisté, il devient cependant de plus en plus difficile de faire des affaires. La crise a mis le lek
albanais sous forte pression ; les effets des différentes dévaluations sont surtout sensibles pour
les personnes qui empruntent de l’argent. Enfin, le nombre d’investissements dans le secteur
public a sensiblement diminué.
Le gouvernement albanais a fait appel à différents instruments afin de maîtriser la crise. C’est
ainsi par exemple qu’il était important de continuer à investir dans l’infrastructure.
La crise financière a également eu un impact sur l’intégration européenne de l’Albanie, un pays
qui a énormément évolué au cours des 20 dernières années. Bien qu’il subsiste un certain
nombre de défis pour la société et d’obstacles à une croissance économique rapide, les
réformes législatives et la politique menée indiquent que la société albanaise est capable
d’atteindre un certain niveau prédéterminé ; la situation économique et le taux de change sont
stables, et l’inflation, acceptable.
L’expérience de ces dernières années a fait comprendre à l’Albanie qu’elle devait stimuler la
demande intérieure et extérieure et mettre en œuvre une consolidation fiscale. Elle doit
également continuer à investir dans le capital humain et poursuivre les réformes structurelles.
Par ailleurs, l’économie albanaise doit relever un certain nombre de défis : élargir le secteur
privé, développer davantage les services et élargir ses débouchés sur le marché européen.
M. Preci termine son exposé en indiquant que l’Albanie doit poursuivre et intensifier ses
réformes économiques, plus précisément en améliorant le climat commercial. La politique doit
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être également plus axée sur la demande locale. L’Albanie doit enfin intensifier ses efforts en
matière de bonne gouvernance et de collaboration avec les pays voisins.
Exposé de M. Matthias Kollatz, ancien vice-président de la Banque européenne
d’investissement
Dans le cadre de la gestion de la crise financière dans l’Union européenne, il est principalement
question d’économies et de croissance, deux priorités qui semblent contradictoires. Malgré les
plans d’économie, il faut retenir un message fondamental de cette crise, à savoir qu’il faudra
plus longtemps que prévu pour en sortir.
Au sein de l’Union européenne, on s’est essentiellement focalisé sur des économies générales
en matière d’investissements. Tout comme l’oiseau a besoin de deux ailes pour voler, la crise
financière ne pourra être surmontée si on néglige la croissance. Celle-ci ne pourra être financée
qu’avec les fonds de la Banque centrale européenne, qui doit investir dans les projets durables,
dans les PME, etc.
En outre, les taux d’intérêt doivent être réduits et les prêts non concurrentiels, délaissés par les
banques. Enfin, la reprogrammation des budgets pourrait contribuer à la croissance, à la faveur
de projets économiquement réalisables.
M. Kollatz souligne également que les project bonds peuvent assurément être un outil de lutte
contre la crise, dès lors qu’ils peuvent peut-être offrir de meilleurs investissements.
Par ailleurs, grâce au Sommet européen de juin 2012, le capital de la Banque européenne
d’investissement a été augmenté, ce qui peut notamment avoir des répercussions en matière
d’emploi. C’est ainsi que 1,2 million d’emplois pourraient être créés d’ici 2014.
La vigilance s’impose malgré tout : « The crisis is not over ! ». Fin 2012, on constatera encore
un recul de l’économie au sein de l’Union européenne, ce qui représente une année de
récession supplémentaire. L’Union européenne ne dispose pas de réponses suffisantes en la
matière pour surmonter la crise.
Par conséquent, il est essentiel de consolider les budgets tout en veillant à assurer la
croissance. Il faut aussi s’occuper du secteur financier. Les pays « forts » peuvent jouer un rôle
constructif à cet égard. Différents facteurs peuvent aider à surmonter la crise, tels que
l’élaboration d’un programme de croissance durable, l’institution d’une autorité bancaire
européenne, l’instauration de la taxe sur les transactions financières et l’augmentation de la
productivité.
Échange de vues
Au cours des débats, la Grèce se voit accorder un peu plus de temps pour exposer sa situation.
M. Voridis fait observer qu’au début de la crise financière, les marchés financiers n’étaient pas
disposés à prêter à la Grèce. Comment, dans ces conditions, le pays devait-il financer son
budget national ? La Grèce a finalement reçu des fonds par le biais du Mécanisme européen de
stabilité (MES) et la European Financial Stability Facility (EFSF).
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