Quel rôle les institutions doivent-elles jouer dans le développement

Quel rôle les institutions doivent-elles jouer dans le
développement économique des pays ? (Ecricome 2008)
Présentation du sujet (Extrait du rapport du jury)
Le sujet est a priori assez classique, mais original. Sa difficulté tient à la délimitation du concept d'institution qui est très large et
déborde la seule notion d'Etat. Outre les institutions publiques nationales et internationales, les étudiants ont pu intégrer des
institutions économiques et sociales relevant du domaine privé. La question porte sur le rôle que doivent y jouer ces institutions
créées par la volonté politique, donc exogènes à l'économie : force d'impulsion, d'organisation et de structuration, rôle régulateur
? De manière coercitive, incitative ? Ce débat trouve un écho dans le champ théorique entre théoriciens de la croissance
endogène, exogène, entre les tenants de l'intervention publique ou du marché, dans le débat sur les différentes stratégies de
développement. Pour ce sujet, il ne s'agit pas de se demander si les institutions doivent jouer un rôle dans le développement -
c'est généralement le cas - mais de qualifier ce rôle.
Idée d'introduction
Accroche à partir d'un exemple historique: mouvement des enclosures en Grande-Bretagne ou mise en place du Code Civil par
Napoléon …
Définir brièvement (le terme institution doit être fini plus largement en 1e partie) les deux notions centrales du sujet et les
intégrer au débat théorique sur la croissance. Le développement s'accompagne nécessairement d'un changement des
techniques de production et d'une transformation des structures politiques, sociales et institutionnelles. C'est un processus
qualitatif qui crée plus d'interdépendance entre les secteurs économiques et les catégories sociales. La définition “classique”
de François Perroux pouvait être mobilisée : “combinaison des changements mentaux et sociaux d'une population qui la
rende apte à faire croître, cumulativement et durablement, son produit réel global”.
Le cadre spatio-temporel est large: depuis deux scles, pour les pays en développement et développés. Plusieurs
problématiques sont possibles: Y a-t-il une base institutionnelle à partir de laquelle peut se bâtir le développement ? Quel le
les institutions doivent-elles jouer aux différentes étapes du veloppement, de l'émergence à la maturité, pour en assurer la
pérennité? Lors des phases harmonieuses du développement, lors des phases de crise des modes de développement successifs?
I. Face aux limites des théories traditionnelles de la croissance et du développement,
l'approche institutionnelle propose un important renouvellement théorique.
A. Le contexte: les limites des approches traditionnelles.
Il s'agit ici de placer la question des institutions dans l'histoire de la pensée économique, notamment après 1945, période marquée
par un renouvellement des analyses de la croissance et du développement: moles Harrod-Domar, Solow,, Kaldor … En montrer
rapidement les limites (problème du résidu notamment). D'où la recherche d'approches plus variées, croisant les autres sciences
humaines. L'approche institutionnaliste permet justement une telle analyse pluri-disciplinaire, s'opposant au mainstream libéral
par de nombreux aspects (critique du gouvernement minimaliste et du mythe du marché omniscient). Apparue dès la fin du XIXe
siècle avec des auteurs comme Thorstein Veblen, l'école institutionnaliste connaît un important développement à partir des années
1970, avec des auteurs comme D. North (prix Nobel 1993)
B. Comment définir les institutions ?
Le mot institution, du latin instituo (établir, instituer) désigne une structure d'origine traditionnelle ou légale qui organise la société
ou l'Etat. C'est donc au départ une notion juridique: ensemble des lois qui régissent la cité.
On peut aussi, dans un second temps, mobiliser la sociologie: une institution désigne alors une structure sociale (ou un système de
relations sociales) dotée d'une certaine stabilité dans le temps. Sociologiquement, une institution est un ensemble de faits sociaux,
mais à condition que ces faits sociaux soient organisés, se transmettent et finalement qu'ils s'imposent. Durkheim a
particulièrement insisté sur ce dernier point. On peut prendre notamment en exemple le mariage.
Enfin, selon une approche économique, cette école donne une place essentielle dans l'explication du développement ou du sous-
développement aux coûts de transaction et aux droits de propriété, dans une perspective ouverte par les travaux de R. Coase
(The Nature of the Firm, 1937), voie poursuivie par Oliver Williamson (Prix Nobel 2009). La théorie des coûts de transaction
postule que les agents ne sont dotés que d'une rationalilimitée (concept que l'on doit à Herbert Simon). Le point de départ de la
théorie des coûts de transaction est de postuler que toute transaction économique engendre des coûts préalables à leur réalisation :
coûts liés à la recherche d'informations, aux défaillances du marché , etc. Ainsi, certaines transactions se déroulant sur le marché
peuvent engendrer des coûts de transaction très importants. Dès lors, les agents économiques peuvent être amenés à rechercher des
arrangements institutionnels alternatifs permettant de minimiser ces coûts.
Au total, selon North, l'organisation de l'économie est la clé de la croissance
Cette organisation repose sur la création de dispositifs institutionnels et de droits de propriété stimulant l'effort individuel en
ouvrant des opportunités à l'initiative individuelle.
Ces nouveaux comportements ont des effets de feed-back sur les institutions et incitent à la création d'institutions nouvelles
notion de path-dependence.
II. Les institutions influencent le développement à la fois au niveau national …
A. L'histoire économique met en lumière le rôle-clé des institutions dans le développement économique des pays.
On peut partir ici des travaux de Rostow (Les étapes de la croissance économique 1960): à partir de quelles transformations
institutionnelles le take off a-t-il pu se réaliser ? Il est évident que les institutions, garantissant le droit de propriété et
l'administrant, constituent un fondement sur lequel le capitalisme a pu se constituer. Le droit des contrats est indissociable
de l'économie de marché. Il était possible de mentionner des formes institutionnelles qui ont permis la révolution industrielle, par
exemple en France, l'abolition des corporations (1791) et la mise en oeuvre d'un code civil (code Napoléon 1804) : elles
constituent un cadre à partir duquel peuvent s'instaurer des relations marchandes durables. La mise en place d'institutions
“démocratiques” facilite le développement, comme le montre A. de Tocqueville (1840) à propos de l'Amérique. L'équilibre entre
les trois pouvoirs (exécutif, législatif, judiciaire) garantit l'émergence de règles favorables à un développement équitable.
Le bat est alors : les institutions sont-elles un préalable au veloppement (thèse des institutionnalistes) ? Ou en sont-elles le
produit ? Dans le premier cas leur rôle est structurant et donc indispensable au processus de développement. Dans le second cas, la
mise en oeuvre du développement est progressive et la transformation des institutions résulte de l'essor d'un secteur “moderne” par
rapport à un secteur “traditionnel”. Dans ce cas, leur le est celui de favoriser la transition d'un mode de développement à un
autre. Il peut y avoir conflit entre institutions “modernes” et “archaïques“, comme on peut le voir aujourd'hui dans les pays du
Tiers Monde.
B. Le développement économique dans les pays du Tiers-Monde: quel rôle pour les institutions ?
Il s'agit de se demander si les seuls mécanismes économiques permettent aux pays de se velopper. Le développement peut-il
s'opérer de lui-même par un processus d'accumulation autorégulé ? En cas de réponse positive, les institutions joueraient un rôle
passif ou préalable ou d'encadrement du développement. A l'extrême, elles seraient déterminées par le veloppement lui-même
qui mettrait à jour et renouvellerait les institutions qui lui seraient nécessaires. Deux options très différentes se retrouvent ici :
la perspective libérale du développement telle celle du consensus de Washington, des théories de la croissance endogène ou de
la torie de la convergence de Solow Le développement est alors conçu comme un phénomène naturel de rattrapage, dans
lequel les institutions n'auront qu'unle minime.
et d'autre part celle des tenants de l'intervention de l'Etat, à travers des institutions censées favoriser le développement.
Cette deuxième option appelle donc une question essentielle: les institutions propres au capitalisme occidental et se traduisant par
une “consommation de masse”, étape ultime du développement selon Rostow, sont-elles “universelles” ou d'autres formes
institutionnelles sont-elles possibles? Si tel est le cas, alors, le le des institutions est de faciliter l'instauration d'un tel modèle de
développement.
Selon A. Sen, (Commodities and capabilities, 1987) le développement résulte de l'implication croissante des hommes dans le
processus productif. Les institutions doivent alors permettre l'essor des capabilités de ceux-ci. Certaines institutions peuvent
jouer ce rôle : ainsi en est-il du microcrédit. L'expérience de la Grameen bankcréée à l'initiative de Muhammad Yusuf au
Bangladesh pouvait illustrer ce point. La banque en prêtant principalement de petites sommes aux femmes pauvres, les solvabilise
et autorise une insertion marchande qui leur permet de sortir du cercle vicieux de la pauvreté.
Ainsi, selon Williamson, il convient de sélectionner les institutions les plus adéquates pour faciliter le développement de
l'économie, sur la base de la minimisation des coûts de transactions. Ainsi certaines formes institutionnelles ne conviendront plus,
car elles ne seront plus à même de favoriser le veloppement des entreprises : les modes de développement libéraux, extravertis
les institutions ont joué un le structurant (exemple de la Grande-Bretagne) ou bien les modes de veloppement où les
institutions ont joun rôle très interventionniste (développement autocentré par exemple). L'exemple du Botswana peut être
mobilisé.
III. … et au niveau international.
A. Le rôle-clé des institutions dans l'émergence d'un nouvel ordre économique après 1945.
Après la seconde guerre mondiale, se sont constitués des institutions dont l'objectif était explicitement le développement. Il
s'agissait de répondre aux problèmes posés par le véritable effondrement institutionnel des années 1930.
Accords de Bretton Woods
La Banque internationale pour la reconstruction et de développement (B.I.R.D.) ou Banque mondiale, a été fondée le 1er juillet
1944 pour fournir une assistance financière à long terme et une aide au développement des pays à revenu interdiaire et des
pays pauvres. L'aide a été à la fois financière, pour le veloppement des infrastructures, mais a concerné de plus en plus
l'éducation et la santé.
Accords du GATT en 1947.
Bien développer ces points sans trop entrer dans les détails.
B. Aujourd'hui, on assiste à une remise en cause de cette architecture institutionnelle et à un retour des
mécanismes de marché.
A la fin des années 1980, un débat sur le le de l'institution s'est instauré à l'initiative de J. Stiglitz selon lequel, l'institution
privilégiait beaucoup trop “l'économie de marché” comme le montre le Consensus de Washington. On assiste à un "détricotage"
des institutions-phares de l'après-guerre (fin des changes fixes, passage aux changes flottants par exemple), qui se traduisent par
un déclin des institutions et un retour au marché et à la concurrence. D'autres institutions doivent alors prendre le relais: ainsi en
est-il des ONG luttant contre les problèmes de faim ou de pauvreté, ou de celles qui tentent d'améliorer la situation sanitaire
(Médecins sans frontières) ou l'éducation. Se pose la question de l'articulation de l'action de ces institutions relativement
aux institutions et aux pouvoirs locaux. Fréquemment émerge la question de la corruption : l'action de ces institutions
internationales étant détournée du développement par des intérêts privés s'abritant parfois derrière des institutions nationales. Se
pose alors le problème du contrôle mocratique et de la gouvernance des institutions. Les transformations institutionnelles sont
nécessaires au développement, mais leurs modalités diffèrent selon les sociétés et selon les niveaux de développement.
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