CAS CLINIQUE
512 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXI - n° 10 - décembre 2012
des problèmes aux chirurgiens étant donné les séquelles morpho-
logiques et fonctionnelles inhérentes à l’exérèse carcinologique
et la difficulté d’obtenir une réparation satisfaisante.
La prise en charge d’une orbite énucléée lors de l’exérèse d’une
tumeur est complexe ; elle exige une approche globale du problème
et des techniques chirurgicales adaptées. Divers procédés de
chirurgie réparatrice et esthétique sont mis en œuvre, tels que
le remodelage orbitaire (greffes osseuses et meulage), la mise
en place d’un implant intraorbitaire ou les greffes muqueuses et
cutanées, mais la méthode de réparation préférée pour diminuer
l’aspect disgracieux de l’orbite creuse déshabitée est le comble-
ment par un lambeau du muscle temporal recouvert d’un lambeau
cutané frontal. Il est réalisé dans le même temps que l’exérèse
tumorale. C’est une technique simple, rapide, sûre, et peu coûteuse.
Dans les rares cas où le lambeau de muscle temporal est inuti-
lisable ou insuffisant, on peut avoir recours à des lambeaux de
fascia temporal ou à des lambeaux musculocutanés de grand
dorsal (4). Le bénéfice d’une reconstruction bipalpébrale, toujours
fort médiocre sur le plan esthétique, ne justifie pas les efforts qu’il
faudrait lui consacrer.
Le cas du nez est plus complexe, son amputation étant extrême-
ment difficile à vivre en société. Si la solution prothétique n’est pas
possible, la réparation du defect nasal peut éventuellement se faire
par une rhinopoïèse (5, 6). La rhinopoïèse idéale se conçoit plan par
plan. Pour les plans superficiels, la meilleure technique de réparation
est le lambeau frontal, qui peut être étendu au cuir chevelu adjacent
et ainsi permettre la reconstruction, dans le même temps, d’une
partie des joues ou de la lèvre supérieure. Il impose la conservation
d’au moins 1 pédicule supratrochléaire, mais, en l’absence de ces
pédicules, le lambeau de Converse, qui utilise le même capital frontal
sur un pédicule temporal, reste une bonne solution. L’armature n’est
pas absolument indispensable pour la pointe, mais son absence
au niveau du dorsum entraîne une ensellure. Elle peut faire appel
à diverses greffes (frontales ou iliaques) préalables, simultanées
ou secondaires. Le treillis de titane nous semble plus simple, mais
la durabilité des résultats n’est pas prouvée. Le doublage interne
est difficile. Il peut être assuré par un retournement de lambeaux
muqueux ou par une greffe préalable du lambeau frontal (5, 6).
Les maxillectomies sont souvent partielles, et toutes ne néces-
sitent pas une réparation, même en cas de conservation du
revêtement cutané. Toutefois, la perte de la totalité du volume
représente une disgrâce certaine. Techniquement, on peut
proposer un comblement ou une réparation des parois. Le comble-
ment est surtout indiqué lorsque la maxillectomie s’intègre dans
une exérèse plus large : branche montante de la mandibule, fosse
infratemporale, orbite et fosses nasales. On propose volontiers
le comblement de la cavité par un lambeau musculocutané
(souvent le grand dorsal) sur lequel on dessine une ou plusieurs
palettes indépendantes destinées à reconstruire la joue, le palais,
éventuellement la fosse nasale. Le résultat morphologique est
souvent médiocre (5, 6).
La radiothérapie peut être proposée d’emblée, mais présente un
risque de radionécrose et ne permet pas d’éradiquer totalement
la lésion, alors que la combinaison chimiothérapie + radiothérapie
peut être indiquée pour les tumeurs très évolutives, en préparation
d’une intervention ou pour les tumeurs non opérables (2).
Le pronostic des carcinomes épidermoïdes de la face reste condi-
tionné par l’âge du patient, la taille et la localisation de la lésion au
moment du diagnostic et la présence de métastases ganglionnaires
ou à distance. En règle générale, le carcinome spinocellulaire
cutané a un pronostic nettement meilleur que le carcinome épider-
moïde oropharyngé (7). Environ 5 % des patients développent
des métastases dans les ganglions locorégionaux (7), et seuls les
carcinomes spinocellulaires moyennement ou peu différenciés
ont un comportement agressif. Un suivi très rigoureux doit être
effectué.
Conclusion
Lorsqu’ils ont été négligés, les carcinomes épidermoïdes étendus
de la face qui envahissent l’orbite, son contenu et la pyramide
nasale posent un problème de prise en charge chirurgicale, car
l’exérèse de ces tumeurs et la réparation des larges mutilations qui
s’ensuivent entraînent des conséquences esthétiques et sociales
désastreuses, d’où l’intérêt d’un diagnostic précoce. ■
1. Prise en charge diagnostique et thérapeutique du carci-
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3. Martin L, Bonerandi JJ. Carcinome épidermoïde cutané
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4. Cuesta-Gil M, Concejo C, Acero J, Navarro-Vila C,
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5. Pellerin P, Patenôtre P. Chirurgie des pertes de subs-
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Références bibliographiques