Julien Seetharamdoo, stratège en chef des placements
Malgré quelques surprises,
2014 se déroule comme prévu
À la fin de l’année dernière, dans nos perspectives pour 2014,
nous étions généralement plus optimistes à l’égard des actifs
risqués qu’à l’égard des actifs considérés comme des «valeurs
refuges», compte tenu surtout de l’accélération attendue de la
croissance mondiale pendant l’année.
Nous avions alors affirmé que cette accélération serait menée
par les pays développés, plus particulièrement par les États-Unis
et la zone euro, où les risques d’événements extrêmes ont
diminué graduellement et où le freinage budgétaire – c’est-à-dire
l’augmentation des impôts et la baisse des dépenses publiques –
s’est atténué par rapport à 2013. Étant donné les signes de plus
en plus nombreux indiquant que la reprise pouvait se passer
de soutien, nous nous attendions à ce que la Réserve fédérale
américaine (Fed) continue à réduire ses achats d’actifs.
La Fed a en effet poursuivi dans cette voie, malgré la publication
de statistiques décevantes dans les premiers mois de 2014,
qui étaient sans doute attribuables à l’hiver rigoureux et aux
problèmes liés à l’ajustement saisonnier plutôt qu’à des facteurs
fondamentaux. Nous continuons de croire que la croissance
aux États-Unis sera plus forte cette année qu’en 2013 et qu’elle
pourrait même dépasser la prévision consensuelle de 2,8 %.
Dans la zone euro, la reprise économique se poursuit, mais
l’inflation demeure faible et est même en baisse, à cause
principalement de l’importante capacité excédentaire de
l’économie. Comme nous l’avions mentionné, la Banque centrale
européenne (BCE) pourrait assouplir sa politique monétaire, en
réduisant à nouveau les taux d’intérêt ou en instaurant son propre
programme d’achat d’actifs. Une telle intervention favoriserait
vraisemblablement les actifs risqués. En effet, les investisseurs
continuent d’exclure les risques d’événements extrêmes dans
la zone euro, l’écart de taux entre les obligations d’État des pays
périphériques et celles des pays centraux s’étant contracté ces
derniers mois.
Du côté des pays émergents, nous nous attendions à ce que la
croissance se stabilise dans l’ensemble, mais qu’elle demeure
inférieure à ce qu’elle était encore récemment. Nous avions
également souligné le rôle important des élections et la nécessité
de nouvelles réformes pour stimuler la croissance à moyen et à
long terme dans les marchés émergents.
Par ailleurs, nous avions indiqué que la croissance de l’économie
chinoise serait probablement inégale, pendant que les autorités
tenteraient de réduire la dépendance de l’économie à l’égard
du crédit comme source de croissance. Nous pensions que les
autorités chinoises parviendraient à stabiliser la croissance à un
taux moins élevé et à assurer un désendettement ordonné, en
raison de la faible inflation et de la latitude dont elles disposent
pour assouplir les politiques monétaire et budgétaire si cela
s’avérait nécessaire.
Voilà en gros ce qui s’est passé jusqu’ici cette année. Dans
l’ensemble, les marchés émergents ont été plus volatils que les
marchés développés; la Russie a annexé la Crimée, la croissance
chinoise a suscité des inquiétudes, et des problèmes locaux ont
affligé certains marchés émergents.
Cependant, les statistiques économiques, comme l’indice des
directeurs d’achats, sont encourageantes globalement dans
les marchés développés et se sont à tout le moins stabilisées
dans bon nombre de marchés émergents (sauf en Chine, où les
données n’ont cessé de décevoir depuis le début de l’année).
Il est encourageant de constater que, dans certains marchés
émergents, les décideurs ont fait preuve de souplesse et relevé
les taux d’intérêt afin de contrer la volatilité des prix des actifs et
le recul des devises.
Tôt ou tard, le niveau plus élevé des taux directeurs devrait
aider ces économies à renouer avec l’équilibre et à réduire
leur important déficit courant (pour plus de détails, voir l’article
de Hervé Lievore intitulé «Repli des marchés émergents :
l’importance de gérer les risques pour optimiser les rendements»
à la page 10).
Des élections se tiendront prochainement dans plusieurs pays
émergents, ce qui pourrait accroître la volatilité et l’incertitude
pendant l’année, mais elles permettent d’espérer que les
gouvernements nouvellement élus relanceront le processus
de réforme.
Point de vue sur les placements
Notre point de vue à long terme n’a pas vraiment changé à la
lumière des événements survenus au premier trimestre. Nous
continuons à privilégier les actifs risqués, tels que les actions des
Figure 1 : Les écarts de taux des obligations d’État dans la
zone euro continuent de se contracter, alors que les risques
d’événements extrêmes diminuent
6
4
2
0
8
10
12
14
16
18
01 02 03 04 05 06 07 08 09 10 11 12 13
Portugal Italie France Irlande
Espagne
Source : Gestion globale d’actifs HSBC, mars 2014.
Les rendements passés ne sont pas une indication des résultats futurs.
Figure 2 : La croissance s’accélère dans la zone euro, mais
l’inflation est en baisse en raison de l’importante capacité de
production inutilisée
-2
-4
-6
-8
0
2
6
4
95 97 99 01 03 05 07 09 11 13
PIB de la zone euro
Inflation dans la zone euro
Source : Gestion globale d’actifs HSBC, mars 2014.
Les rendements passés ne sont pas une indication des résultats futurs.
Figure 3 : Indice des directeurs d’achats généralement au-dessus de 50 et souvent en voie d’amélioration (sauf en Chine)
> 50 et en hausse > 50 et en baisse ou
> 50 et inchangé < 50 et en baisse Données non disponibles au
moment de la publication
< 50 et en hausse ou
< 50 et inchangé
Indice global des directeurs d’achats Nouvelles commandes Emploi
Nov. 13 Déc. 13 Janv. 14 Févr. 14 Nov. 12 Déc. 12 Janv. 13 Févr. 13 Nov. 12 Déc. 12 Janv. 13 Févr. 13
Monde 53,6 53,0 53,0 53,3 54,8 54,4 54,4 54,6 50,8 51,3 51,0 51,3
É.-U. 57,3 56,5 51,3 53,2 63,4 64,4 51,2 54,5 55,4 55,8 52,3 52,3
R.-U. 58,4 57,2 56,7 56,9 64,6 60,4 61,7 60,7 54,5 54,3 54,1 55,4
Allemagne 52,7 54,3 56,5 54,8 54,5 56,6 59,7 57,1 48,0 50,8 51,7 50,0
France 48,4 47,0 49,3 49,7 46,8 45,6 48,7 49,2 48,6 46,8 49,4 48,5
Zone euro 51,6 52,7 54,0 53,2 52,3 54,1 55,7 54,5 48,8 49,9 51,0 50,6
Japon 55,1 55,2 56,6 55,5 58,4 57,2 59,2 56,2 50,9 52,8 52,7 53,7
Australie 47,7 47,6 46,7 48,6 48,8 47,8 48,8 50,0 50,1 47,0 48,3 47,4
Brésil 49,7 50,5 50,8 50,4 49,3 50,7 52,4 50,9 49,2 49,7 49,5 50,2
Chine (HSBC) 50,8 50,5 49,5 48,5 51,7 51,6 50,1 48,6 48,9 48,7 47,3 47,2
Inde 51,3 50,7 51,4 52,5 51,9 51,3 52,4 54,9 50,5 50,8 51,0 50,2
Afrique du Sud 52,4 49,9 49,9 51,7 51,6 51,8 50,2 53,4 50,8 45,8 50,7 48,2
Corée du Sud 50,4 50,8 50,9 48,8 50,1 50,7 51,3 49,9 51,5 50,8 51,2 50,6
Russie 49,4 48,8 48,8 48,5 50,6 49,8 49,6 48,6 45,8 47,3
Taïwan 53,4 55,2 55,5 54,7 55,2 58,2 58,1 57,8 52,3 51,6 51,5 50,9
Turquie 55,0 53,5 52,7 53,4 57,1 54,7 53,9 55,1 53,7 53,2 53,1 53,3
Mexique (HSBC) 51,9 52,6 54,0 52,0 53,4 54,3 56,6 50,8 50,5 50,2
Les chiffres supérieurs à 50 indiquent que la croissance s’accélère et ceux inférieurs à 50 indiquent que la croissance ralentit.
Source : Données de Markit sur l’indice des directeurs d’achats, mars 2014. Les données américaines renvoient à l’indice ISM (Institute for Supply Management) de
l’activité manufacturière.
marchés développés et émergents, les obligations de sociétés et les
obligations de marchés émergents libellées en monnaies nationales
et en monnaies fortes, plutôt que les obligations d’État considérées
comme des «valeurs refuges», tout en reconnaissant la nécessité
d’être sélectifs, surtout à l’égard des actifs des marchés émergents.
À notre avis, les marchés émergents demeureront instables, mais
les prix des actifs seront intéressants pour les investisseurs à
moyen et à long terme. L’article de Joe Little intitulé «Avis d’expert :
répartition de l’actif», à la page 22, traite de ce sujet en détail.
Risques relatifs à notre scénario et à notre
point de vue
La bulle du crédit en Chine et les tensions géopolitiques dans
diverses régions constituent les deux principaux risques pour notre
scénario. Comme en 2012 et en 2013, le premier trimestre de
l’année a été marqué par des statistiques économiques décevantes
en Chine, la production industrielle et la confiance des entreprises
chinoises ayant diminué. De manière générale, nous pensons que
les décideurs chinois parviendront à gérer le désendettement et
l’atterrissage en douceur de l’économie de manière assez ordonnée
(voir l’article de Renee Chen, «Boom du crédit et désendettement en
Chine», à la page 14), mais les risques sont énormes, sans compter
67HSBC T2 2014