Économie
38 Nº 48 MARS 2016
Revue Lamy de la concurrence
Et Angela
MUÑOZ(*)
Économiste
Cabinet
Microeconomix
Par Ariane
CHARPIN
Économiste
Cabinet
Microeconomix
RLC 2931
Simulation des effets unilatéraux
d’une concentration horizontale
LAutorité de la concurrence a publié en
juillet 2013 une version révisée de ses
lignes directrices relatives au contrôle des
concentrations(1). En explicitant la possi-
bilité d’utiliser des modèles de simulation
pour estimer les effets d’une opération
de concentration sur les prix, en complé-
ment d’autres méthodes, elle poursuit la
tendance croissante au recours à l’analyse
économique et quantitative dans l’examen
des concentrations(2).
Cet article explique le principe de la mé-
thode utilisée par les économistes pour
simuler les hausses de prix d’une fusion ho-
rizontale. Il vise à fournir des clés permet-
tant, d’une part, de comprendre les étapes
successives de la simulation, d’autre part,
de porter un regard critique sur les mé-
thodes mises en œuvre.
Modélisation de la situation
avant la concentration
La simulation des hausses de prix pouvant
être anticipées suite à une concentration
horizontale repose en premier lieu sur la
(*) Les auteurs s’expriment à titre strictement per-
sonnel et n’engagent en rien la position du ca-
binet Microeconomix, ni a fortiori celle de ses
clients.
(1) Aut. conc., 10 juill. 2013, Lignes directrices révi-
sées relatives au contrôle des concentrations.
(2) La Commission européenne a régulièrement re-
cours aux modèles de simulation pour étudier les
effets unilatéraux des concentrations. On peut
notamment citer les cas Volvo/Scania (2000),
Lagardère/Natexis/VUP (2004) et Unilever/Sara
Lee Body Care (2010).
modélisation de la formation des prix sur le
marché étudié(3).
On parle ici de modélisation lorsque l’on
cherche à représenter la réalité écono-
mique ou une partie de celle-ci de manière
simplifiée sous forme d’équations mathé-
matiques. Il ne s’agit pas de formuler une
représentation complète et exacte de la
réalité mais d’intégrer dans le modèle les
facteurs-clés influençant le sujet d’intérêt.
La modélisation de la formation des prix
sur un marché consiste donc à décrire sous
forme d’équations mathématiques relati-
vement simples comment se forment les
prix sur ce marché, en prenant en compte
le maximum d’éléments impliqués dans
leur formation.
Au sein de la théorie économique, la forma-
tion des prix résulte de la conjonction des
choix des entreprises et des consomma-
teurs. On considère que chaque entreprise
a pour objectif de maximiser son profit. Des
prix plus élevés ont pour effet d’accroître le
profit en augmentant la marge sur chaque
unité vendue mais ont par ailleurs comme
conséquence de diminuer les ventes, les
consommateurs n’étant pas prêts à payer
un prix au-delà d’un certain seuil, surtout
lorsque les concurrents leur proposent des
alternatives attractives.
Voyons comment peut être alors modélisé
le comportement des consommateurs et
(3) Le marché étudié est le marché pertinent lorsque
celui-ci a été délimité. Lorsque ce n’est pas le cas,
il convient d’identifier les produits concurrents les
plus importants des produits des entreprises qui
souhaitent fusionner.
Économie
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des entreprises, afin d’obtenir un modèle de formation des
prix avant la concentration.
Étape 1 : le comportement des consommateurs
La première étape de la simulation d’une concentration
consiste à modéliser le comportement des consomma-
teurs. Il s’agit d’écrire la fonction de demande du marché
du bien concerné par le projet de concentration et d’esti-
mer ses paramètres.
La relation mathématique entre le prix d’un bien et la
quantité consommée de ce bien s’appelle la fonction
de demande. Elle découle directement des choix des
consommateurs. À chaque combinaison de prix possible
d’un groupe de biens correspond une quantité optimale
consommée.
Quand le prix relatif d’un bien varie, la quantité que les
consommateurs souhaitent en consommer change. Suite
à une hausse de prix d’un bien par rapport aux prix des
autres biens, certains consommateurs décident de ne plus
consommer le bien ou d’en consommer moins et de dé-
penser leur revenu en achetant d’autres biens. On peut
par exemple imaginer qu’à la suite d’une hausse du prix
relatif d’un soda, certains consommateurs se tournent
vers un autre soda, un jus de fruit ou d’autres boissons.
La sensibilité de la demande aux changements de prix,
c’est-à-dire l’ampleur de la baisse des ventes d’un bien
suite à une hausse de prix de ce bien, est mesurée par
l’élasticité-prix directe de la demande, qu’on calcule à par-
tir des paramètres de la fonction de demande. Quand la
demande est peu élastique, autrement dit lorsque que les
consommateurs sont peu sensibles à une hausse de prix,
une firme peut augmenter les prix sans craindre de perdre
trop de ventes. Au contraire, lorsque la demande est élas-
tique, une hausse de prix se traduit par une importante
chute des ventes.
La demande est élastique lorsque les consommateurs ont
la possibilité de se tourner vers des produits très similaires
suite à une hausse de prix. L’effet du changement du prix
d’un bien sur les ventes d’un autre bien est mesuré par
l’élasticité-prix croisée, qui se calcule également à partir
des paramètres de la fonction de demande. Quand l’élas-
ticité-prix croisée est positive et élevée, les produits sont
des substituts proches. Cela signifie que les consomma-
teurs remplacent l’un des biens par l’autre suite à une
hausse de prix relative.
Un des défis majeurs de la simulation des effets d’une
concentration réside précisément dans la modélisation de
la fonction de demande qui permet de calculer les élasti-
cités-prix directes et croisées.
Pour réaliser cet exercice, les économistes ont développé
différents modèles économétriques(4). Le choix de la forme
de la fonction de demande, c’est-à-dire la façon dont la
demande est écrite mathématiquement, doit corres-
pondre le mieux possible au comportement effectif des
consommateurs, en particulier au schéma de substitution
entre les biens. Il a un impact important sur les résultats
car les élasticités estimées, qui traduisent la sensibilité
des consommateurs aux prix, sont prises en compte par
les entreprises lors de la formation des prix. Il convient
donc parfois de tester plusieurs spécifications mathéma-
tiques d’une fonction de demande.
Le modèle doit également être choisi de telle sorte que les
données permettent d’estimer les paramètres, en particu-
lier les paramètres qui permettent de calculer les élastici-
tés-prix directes et croisées. Un modèle qui exige d’esti-
mer un nombre excessivement important de paramètres
n’est par exemple guère envisageable car son estimation
nécessiterait la formulation d’hypothèses très fortes et la
collecte d’une masse importante de données.
Étape 2 : la concurrence entre les entreprises
La deuxième étape de la simulation d’une concentration
consiste à modéliser les choix des entreprises et la façon
dont elles se font concurrence sur le marché.
Une entreprise qui souhaite maximiser son profit tient
compte de ses coûts de production, de la sensibilité des
consommateurs au prix et des décisions stratégiques
prises par les entreprises concurrentes. Les coûts de pro-
duction sont généralement relativement bien connus.
La sensibilité des consommateurs aux prix des biens du
marché est reflétée par les élasticités-prix estimées pré-
cédemment. Les décisions stratégiques des entreprises
concurrentes sont prises en compte grâce à un modèle de
concurrence(5).
Illustrons d’abord la nécessité de prendre en compte les
choix des entreprises concurrentes par un exemple simple.
Imaginons que deux entreprises A et B situées dans la
même zone géographique et ayant des capacités de pro-
duction illimitées produisent des biens identiques et que
le prix des biens est décidé une bonne fois pour toute. Si
l’entreprise A détermine son prix sans tenir compte des
(4) Les plus souvent utilisés en pratique sont le système de demande
presque idéal (AIDS) et les modèles de choix discret, notamment le
logit multinomial et le logit multinomial emboîté. Voir les articles :
Deaton, A. & J. Muellbauer (1980). An Almost Ideal Demand System,
The American Economic Review, Vol. 70, No 3, pp. 312-326.; Mc-
Fadden, D. (1981). Econometric Models of Probabilistic Choice, in
Structural analysis of Discrete Data and Econometric Applications,
MIT Press: Cambridge, MA, 198-272; Verboven, F. (1996). The nested
logit model and representative consumer theory, Economics Letters
50(1): 57-63.
(5) On utilise des modèles dits de concurrence imparfaite, dans lesquels
les entreprises tiennent compte des décisions de leurs concurrents
pour prendre leurs décisions stratégiques.
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Revue Lamy de la concurrence
choix de B et que le prix choisi est supérieur au prix choisi
par B, alors A ne vendra aucun bien et son profit sera nul,
tandis que B fournira tous les consommateurs. Ainsi, l’en-
treprise A est contrainte de tenir compte des choix de B
lorsqu’elle cherche à maximiser son profit. Cet exemple
très simple montre qu’une entreprise doit prendre en
compte les décisions de ses concurrents lorsqu’elle choi-
sit ses prix. La modélisation de la formation des prix d’une
entreprise doit donc refléter cet aspect.
En pratique, lorsqu’un petit nombre d’entreprises se fait
concurrence sur un marché en proposant des biens dif-
férenciés, on considère, d’une part, que les entreprises
choisissent leurs prix simultanément, d’autre part, que le
prix choisi par chaque entreprise maximise son profit en
fonction, entre autres, du prix optimal de ses rivaux(6). On
dit alors que les entreprises se font concurrence en prix.
D’autres modèles de concurrence permettent de modéli-
ser des situations où les biens produits par les entreprises
sont identiques ou lorsque les entreprises maximisent
leurs profits en choisissant la quantité à produire en fonc-
tion des quantités choisies par leurs concurrents(7).
L’important pour la formalisation du modèle de concur-
rence entre les entreprises du marché est d’identifier les
caractéristiques clés de la concurrence sur le marché afin
de les prendre en compte. Il faut pour cela effectuer une
analyse approfondie du marché et se demander quelle est
la variable stratégique (prix ou quantité), si les prix sont
fréquemment modifiés, si les investissements sont impor-
tants, etc.
Le modèle de concurrence permet d’obtenir l’expression
mathématique du prix qui maximise le profit de chaque
entreprise en fonction des choix des concurrents en
termes de prix et quantité, de la sensibilité aux prix des
consommateurs (les élasticités-prix estimées précédem-
ment) et des coûts de production.
Étape 3 : la vérification du modèle
Avant d’utiliser le modèle pour simuler la concentration, il
convient de vérifier qu’il reflète bien le comportement des
consommateurs et la concurrence entre les entreprises
avant la fusion. Pour cela, il faut vérifier que la relation
entre les facteurs-clés obtenue grâce au modèle permet
de retrouver les marges observées avant la fusion ou les
élasticités-prix estimées dans la première étape.
En pratique, on peut effectuer deux types de vérifications.
La première consiste à remplacer dans le modèle, d’une
(6) Voir par exemple le modèle de Bertrand dans une industrie de biens
différenciés dans l’article de Shaked, A. & J. Sutton (1982). Relaxing
Price Competition through Product Differentiation, Review of Econo-
mic Studies 49: 3-13.
(7) Voir Cournot, A. (1838). Recherches sur les principes mathéma-
tiques de la théorie des richesses. Hachette.
part, les prix et les quantités observés sur le marché,
d’autre part, les paramètres traduisant la sensibilité aux
prix des consommateurs et d’en déduire les marges(8) pré-
dites par le modèle avant la fusion. Une autre possibilité
consiste à remplacer dans le modèle les coûts marginaux(9)
(lorsqu’ils sont disponibles), les prix et les quantités et à
calculer les élasticités-prix correspondantes.
Si on ne retrouve pas les marges observées dans le pre-
mier cas ou les élasticités-prix estimées précédemment
dans le second cas, le modèle choisi est certainement
inadapté et il convient de modéliser la concurrence ou la
fonction de demande différemment. Si dans cette étape
de vérification on retrouve les marges observées ou les
élasticités estimées, le modèle peut être utilisé pour si-
muler la fusion.
Que change la concentration ?
Une concentration entre deux entreprises modifie le
nombre d’entreprises sur le marché et les coûts de pro-
duction de ces entreprises.
La fusion de deux entreprises A et B aboutit à la création
d’une nouvelle entreprise unique. Cela équivaut à une si-
tuation dans laquelle A et B maximiseraient leurs profits
comme une seule entité et ne seraient plus en concur-
rence. On dit en termes économiques qu’elles maximi-
seraient leurs profits joints, alors qu’avant la fusion elles
maximisaient leurs profits séparément. A et B opérant sur
le même marché, une hausse du prix de A provoque une
baisse des ventes de A et une hausse des ventes de B et
vice versa. En maximisant ses profits joints, la nouvelle
entité prend en compte l’effet positif d’une hausse de
prix d’un produit sur les ventes de l’autre produit, ce qui
lui permet d’augmenter ses prix. Les entreprises du mar-
ché qui ne participent pas à la fusion altèrent également
leurs choix puisqu’elles prennent leurs décisions en tenant
compte des choix des concurrents.
En outre, une concentration crée généralement des sy-
nergies qui peuvent faire baisser les coûts de production
des parties à la concentration et, par conséquent, les prix
de vente. Par exemple, deux entreprises spécialisées dans
la vente au détail pourraient réduire leur coût unitaire en
mettant en commun leurs réseaux de distribution. Ces
baisses de coûts sont appelées gains d’efficacité.
Les prix optimaux qui découlent du processus de formation
des prix décrit dans la partie précédente sont modifiés par
la concentration qui duit le nombre d’entreprises sur le
(8) La marge correspond à la marge sur coûts marginaux donnée par la
formule suivante : m = (prix coût marginal) / prix. En pratique, elle
est rarement disponible et est approximée par la marge sur coûts
variables moyens.
(9) Le coût marginal est le coût de production additionnel induit par la
dernière unité produite.
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marché, ce qui pousse les prix à la hausse, et les coûts de
production des entreprises ayant fusionnées, ce qui pousse
les prix à la baisse. La simulation de la situation aps la
concentration permet de déterminer l’effet qui domine.
Simulation de la situation
post concentration
Pour déterminer la hausse de prix potentielle, on intègre
les modifications introduites par la fusion dans le modèle
développé pour décrire le processus de formation des
prix avant la fusion. Plus précisément, on effectue deux
modifications au modèle. Premièrement, les entreprises
qui fusionnent ne forment plus qu’une seule entité. Deu-
xièmement, les coûts de production de l’entité fusionnée
intègrent les gains d’efficacité.
Grâce à ces modifications, le modèle ne prédit plus les
prix avant la fusion mais les prix post fusion. La comparai-
son des prix avant la fusion et des prix après la fusion per-
met de déduire la hausse de prix qui peut être attendue du
projet de concentration.
Les gains d’efficacité étant difficiles à anticiper, on peut
également ne modifier que le nombre de concurrents
dans le modèle et rechercher les gains d’efficacité qui se-
raient nécessaires pour que la fusion ne provoque pas de
hausse de prix.
Figure 1 - Schéma de synthèse de la méthodologie
Le recours aux modèles de simulation présente l’avan-
tage d’étudier les effets unilatéraux de manière beaucoup
plus précise que les autres méthodes quantitatives plus
simples(10). Le résultat d’une simulation de concentration
(10) On peut citer par exemple l’indice de concentration (Herfindal-Hir-
schman (IHH)) ou les indices de pression à la hausse sur les prix
(UPP, GUPPI et IPR).
exprime en effet directement la hausse de prix pouvant
être anticipée(11). Il répond en cela directement à la ques-
tion centrale d’une autorité de concurrence à laquelle est
notifié un projet de fusion.
Lorsque tous les éléments nécessaires à une simulation
des effets unilatéraux sont disponibles et que le cas né-
cessite une analyse approfondie, l’utilisation de cette mé-
thode doit donc être favorisée.
Porter un regard critique
sur une simulation
Nous abordons d’abord le problème de la disponibilité des
données, avant de nous intéresser aux hypothèses poten-
tiellement les plus restrictives des modèles de simulation
à proprement parler.
De quelles données dispose-t-on ?
La simulation des fusions repose sur une quantité de don-
nées importante. Leur disponibilité oriente souvent les
choix méthodologiques effectués par les économistes.
Prenons un exemple. Dans l’idéal, l’estimation de la de-
mande requiert un panel des ventes et des prix au niveau
produit sur une période assez longue et pour toutes les
entreprises du marché, avec, pour chaque produit, des
informations sur ses caractéristiques (marque, forme,
taille, dose, etc.). Lorsque l’on ne dispose pas des carac-
téristiques des produits, on peut quand même estimer la
demande mais avec moins de précision. Dans un cas en-
core plus extrême, lorsque les données ne permettent pas
du tout d’estimer la demande, les élasticités peuvent être
prises dans des études marketing et intégrées ainsi direc-
tement dans le modèle de concurrence conformément à
la forme de la fonction de demande choisie au préalable.
Dans le premier cas, les élasticités sont estimées de ma-
nière relativement fine ; dans le second, la précision est
moindre, et dans le dernier cas, on ne sait pas si on peut
faire confiance aux valeurs des élasticités-prix.
Par conséquent, lorsque l’on cherche à porter un regard
critique sur une simulation de fusion, il convient d’abord
de se demander ce qui aurait été réalisable compte tenu
des données disponibles et s’interroger sur l’influence des
données utilisées sur la précision de l’estimation.
Le modèle choisi est-il adapau cas d’espèce?
Un modèle économique est de manière inhérente réduc-
teur car il est fait pour simplifier la réalité. Il ne sert donc
pas à en refléter toutes les nuances. Lors d’une simula-
(11) Par exemple, les indices de pression à la hausse des prix (UPP,
GUPPI) ne quantifient pas la hausse de prix mais indiquent simple-
ment la pression à la hausse exercée par la concentration.
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tion, il convient de vérifier que le modèle choisi ne laisse
pas de côté un aspect du problème qui devrait être pris
en compte. En pratique, pour s’assurer qu’un modèle est
adapté au cas étudié, il faut vérifier que ce qui n’est pas
dans le modèle ne se réalisera pas.
Les modèles de simulation existants ne sont pas en me-
sure de prendre en compte les effets dynamiques de la
concurrence, c’est-à-dire la modification de la stratégie
des entreprises du marché qui peut intervenir plusieurs
périodes après la concentration en réaction à celle-ci. Ces
effets sont par exemple le repositionnement des produits,
le lancement d’une campagne de communication, la sor-
tie du marché ou le développement d’un nouveau produit.
On peut par exemple imaginer que suite à une concen-
tration un concurrent lance un nouveau produit innovant
et empêche ainsi l’entreprise ayant fusionné d’augmenter
ses prix.
Les modèles de concurrence existants ne reflètent pas
non plus les rapports entre les producteurs et les distri-
buteurs, en particulier le pouvoir dont peut disposer la
grande distribution. Il s’agit pourtant d’un élément impor-
tant susceptible de contrebalancer les effets unilatéraux
d’une fusion entre fournisseurs.
Ces dimensions ne sont pas prises en compte dans les mo-
dèles de simulation donc on ne peut pas simuler leurs ef-
fets sur les prix post concentration. Pourtant, ces facteurs
peuvent avoir un impact non négligeable sur les prix dans
certaines industries.
Ainsi, il convient de systématiquement se demander si
des événements non pris en compte dans le modèle sont
susceptibles de survenir après la concentration. L’horizon
temporel associé à leur occurrence est important car l’Au-
torité de la concurrence s’intéresse aux effets des concen-
trations à court-terme (typiquement 3 à 5 ans). Le mo-
dèle n’est donc pas adapté si les effets dynamiques sont
susceptibles de se produire dans le court-terme.
Il convient ainsi impérativement de se demander si on
peut raisonnablement penser que le modèle de concur-
rence ne changera pas à court terme après la concentra-
tion. La méthodologie de mise en œuvre d’une simulation
de l’effet d’une concentration sur les prix est basée sur
cette hypothèse. Autrement dit, on utilise le même mo-
dèle pour simuler les prix avant et après la fusion. Or, on
peut imaginer que la nature de la concurrence entre les
entreprises soit modifiée suite à une concentration, par
exemple avec l’émergence d’un équilibre de collusion ta-
cite entre les entreprises. Dans ce cas, le prix post concen-
tration prédit par le modèle choisi sera faux.
En pratique le modèle de concurrence change rarement à
court terme et reste donc valide pour simuler la situation
post fusion.
Conclusion
La simulation des effets d’une opération de concentration
à partir d’un modèle constitue certainement l’exercice le
plus abouti et susceptible d’apprécier au mieux l’ampleur
des effets unilatéraux d’une fusion horizontale. Il s’agit
néanmoins d’un exercice coûteux, en termes de données
à collecter et en termes d’écriture du modèle le plus com-
patible avec les caractéristiques économiques du marché
concerné.
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