2B1 CONCEPTION, FABRICATION ET CARACTERISATION D’UN PHOTOTRANSISTOR BIPOLAIRE Á HÉTÉROJONCTION SiGe/Si POUR LES APPLICATIONS OPTIQUES-MICROONDES J.L. Polleux1, C. Rumelhard1, A.L. Billabert1, E. Sönmez2, H. Schumacher2 1 ESYCOM, Laboratoire Systèmes de Communications Cité Descartes, BP 99, 9316 Noisy-le-grand Cedex, France, [email protected] 2 Université d’Ulm, Dept. of Electron Devices & Circuits, Allemagne I – Introduction L’objet de cet article est de présenter les premiers résultats obtenus sur des phototransistors bipolaires à hétérojonction SiGe/Si réalisés en technologie bipolaire à couche unique de SiGe. Ce phototransistor vise à être exploité pour les communications optiques-microondes courtes distances. La technologie mise en œuvre est adaptée d’une technologie bipolaire commerciale. Pour cette raison, seule une couche unique de SiGe est utilisée, au lieu des structures à multipuits quantiques présentées par [1] et [2]. Le potentiel d’une telle structure est d’abord démontrée théoriquement à l’aide de simulations numériques comportementales fondées sur la modélisation bidimensionnelle dérive-diffusion [3]. Les lois, préalablement extraites, régissant l’évolution des paramètres physiques du Silicium-Germanium en fonction de sa composition sont rappelées. La courbe d’absorption optique du matériau en fonction de sa composition et de la longueur d’onde d’incidence permet notamment d’édicter les principales voies d’application du SiGe en détection optique. Un prototype de phototransistor SiGe est enfin proposé et caractérisé expérimentalement. La mise en place d’un banc de mesure spécifique pour la longueur d’onde de 940nm est menée à cet effet. Elle est présentée par ailleurs [4], [5]. Les résultats sont alors comparés à la théorie. Les perspectives en sont enfin tirées, à la fois en terme de recherche et d’application. II – Modélisation des couches SiGe contraintes sur Silicium Le Silicium-Germanium massif est connu et étudié depuis les années 1960, ce n’est qu’au milieu des années 1980 que les techniques de dépôts de films minces ont permis la réalisation de couches SiGe contraintes sur Si. L’effet de la contrainte a été depuis largement démontré sur la réduction de la largeur de bande interdite. Cependant, aucun modèle complet pour la simulation dérive-diffusion n’a été développé jusqu’à lors. Afin de pallier ce manque, les lois de variations connues ont été regroupées, confrontées et analysées afin d’en fournir une synthèse. Le traitement des données existantes sur les densités effectives d’états conduit notamment à la mise en place d’un nouveau modèle traitant à la fois des variations en fonction de la composition en Germanium et de la dépendance en fonction de la température [3]. Le modèle issu de [6] fournit l’expression de l’influence du Germanium et de la température. Celle-ci s’exprime sur la densité effective d’état pour la bande de valence par la relation suivante : N c )SiGe −0, 69 ⋅ x 2 1 ≈ + ⋅ exp (1) 3 3 N c )Si k ⋅T Le modèle proposé pour le produit des densités effectives d’états est plus complexe. Des développements analytiques couplés à des ajustements de courbes à 300K, permettent la mise en place d’un modèle simplifié. Le calcul numérique autour du modèle de [6] fournit alors les coefficients suivants de ce nouveau modèle où x est la fraction de Germanium dans l’alliage contraint : N c ⋅ N v )SiGe ≈ 0, 306 + 0, 319 ⋅ exp ( −34,1 ⋅ x ) + 0, 375 ⋅ exp ( −8 ⋅ x ) (2) N c ⋅ N v )Si La mise en place d’un tel modèle présente l’avantage de posséder un nombre de paramètres réduit, facilitant potentiellement l’extraction par la mesure. Il présente également une formule plus compacte, adaptée à la simulation numérique des composants. Enfin, un modèle de coefficient d’absorption optique est construit qui prend en compte l’influence de la composition de l’alliage, de la température et de la longueur d’onde optique incidente [3], [7] : ( 13émes Journées Nationales Microondes, 21-22-23 mai 2003 – LILLE ) 2B1 αabsorption avec : 2 2 hν − E − E ( hν − Eg + E phonon ) g ( phonon ) = A⋅ + 1 − exp ( − E phonon kT ) exp ( E phonon kT ) − 1 (3) A ( x ) ≈ 3200 ⋅ ( 1 − 1.161 ⋅ x + 9.581 ⋅ x 2 ) (4) E phonon ( x ) ≈ 0.050 ⋅ ( 1 + 0.026 ⋅ x − 1.066 ⋅ x 2 ) (5) Ephonon représente l’énergie moyenne d’un phonon, A est un coefficient de pondération. Les équations modélisant la réduction de largeur de bande interdite pourront être trouvées dans [3]. Ce modèle est ainsi établi autour d’une modélisation à un phonon appuyée sur des résultats expérimentaux présentés par [8]. Ces mesures sont les seules, à notre connaissance, à présenter à ce jour des résultats aussi complets pour les couches SiGe contraintes. Néanmoins la littérature présente d’autres mesures plus partielles, ne permettant cependant pas d’extraction de modèle, qui montrent des valeurs parfois nettement différentes, dans certains cas, plus fortes jusqu’à un facteur 10, dans d’autres cas, plus faibles. Ainsi, l’extraction du modèle de coefficient d’absorption optique ne peut constituer, sur ces faits, qu’une base de départ pour la discussion. Celle-ci pourra être entamée ci-après à partir de la comparaison entre résultats expérimentaux et simulation. III – Description de la structure du phototransistor D’après les courbes d’absorption optique du SiGe contraint, il apparaît deux zones d’applications distinctes en fonction de la composition de l’alliage : - les applications courtes distances dont les longueurs d’onde optiques sont comprises entre 0,8µm et 1µm ; - les applications longues distances pour lesquelles les longueurs d’onde de travail sont de 1,3µm et 1,55µm. Dans ce dernier cas, les fractions de Germanium doivent être élevées et imposent l’utilisation de structures multi-couches. Dans le premier cas, elles peuvent être faibles, ceci donnant l’espoir de pouvoir intégrer cette fonction de détection avec des technologies industrielles. Le prototype réalisé s’appuie sur une technologie purement bipolaire décrite par ailleurs [9]. Le profil de Germanium est un profil abrupt présentant une fraction de Ge de l’ordre de 20 à 25%. La base dopée P++ s’étale sur la majeure partie de cette couche, laissant cependant des couches tampons de quelques nanomètres sur chacune des zones de charge d’espaces. Une telle quantité de Germanium permet dès lors de lever le compromis entre faible épaisseur de film SiGe et résistance de base. Ceci est profitable au design du phototransistor afin de faciliter le couplage avec la fibre optique. Le PTH peut en effet être de plus grande dimension latérale tout en maintenant des performances fréquentielles élevées : l’éclairement est ainsi réalisé verticalement au travers de l’émetteur par une fenêtre optique. Deux tailles de fenêtre optique ont été réalisées, avec 10 par 10 µm, ou 5 par 5 µm. La structure générique utilisée pour la simulation est décrite dans [3]. Figure 1 : photographie d’un PTH SiGe présentant une fenêtre optique de 5x5µm². IV – Résultats et mesures IV-1. Caractéristiques électriques Le HPT, réalisé par l’université d’Ulm, est d’abord caractérisé électriquement avec le concours de l’IEF. La valeur maximale mesurée de fT, pour la structure 10x10µm², est de 18,9GHz pour Vce=1,5V et 20,4GHz pour Vce=2,5V, contre 30GHz pour la structure HBT. Le courant de base est respectivement de 100µA(Vbe=0,84V)et 140µA(Vbe=0,85V) pour ces deux valeurs optimales, avec des gains en courant respectifs de 156 et 145. La comparaison avec la simulation est tout à fait satisfaisante. Certaines variations dans la structure sont cependant répercutées dans les différentes courbes. Cela est notamment le cas des courbes de fT en fonction du courant de base. Les valeurs maximales sont identiques, mais il est nécessaire de faire circuler un courant Ib plus important afin de 13émes Journées Nationales Microondes, 21-22-23 mai 2003 – LILLE 2B1 réduire les termes capacitifs. Enfin, il est possible d’observer pour certains phototransistors, des valeurs de gain en courant plus fortes en mesure qu’en simulation. Ce phénomène est expliqué par les approximations de dopages faites par la simulation, ainsi que par des effets de simulation 2D ne prenant pas en compte la symétrie circulaire du contact d’émetteur. Cet effet est réduit dans le cas du motif 10x10µm² (facteur 1.5) et plus accentué dans le cas du motif 5x5µm² (facteur 3). L’effet du Roll-off est également plus prononcée dans la structure réelle indiquant des zones de SiGe tampon dans la jonction base-collecteur plus étroites que pour la simulation. L’ajustement de la structure simulée permet en tout état de cause de rendre compte de ces distinctions. IV-2. Caractéristiques opto-microondes La caractérisation optique-microonde a nécessité la mise en place d’un banc de mesure spécifique à la longueur d’onde de 940nm, exploitant une technique de battement optique. Des lasers à cavités étendues sont utilisés. Des mesures comparatives entre différents bancs ont également été réalisées sur des phototransistors InP/InGaAs [5]. Les puissances issues du phototransistor SiGe/Si chargé sur chacun de ces accès par 50Ohms et issues de la photodiode de référence sont présentées sur la Figure 2. La photodiode de référence permet de contrôler le niveau de variation RF de la puissance optique injectée. La Figure 3 présente la courbe du gain en puissance opto-microonde du phototransistor alors obtenue. La zone de bruit présente en fin de courbe est liée à un problème d’acquisition du banc de mesure qui devrait être aisément résolu. Les conditions de polarisation sont choisies à Vce=1,5V et Ib=60µA sous un flux optique contrôlé d’environ 1mW. Sous ces conditions de polarisation, le PTH SiGe 10x10µm² présente une valeur de fT électrique mesurée de 17,9GHz, et une valeur simulée de 18,2GHz. -30 10 5 -35 Gain opto-microonde (dB) puissance électrique de sortie (dBm) HPT -40 -45 -50 0 -5 -10 -15 -20 référence -25 -55 980nm 0 10 fréquence (GHz) -30 8 10 9 940nm 10 fréquence (Hz) 800nm 850nm 900nm 10 10 Figure 2 : puissance de sortie du HPT 10x10 et de la photodiode de référence Figure 3 : gain opto-microonde mesuré à 940nm et simulations pour la structure 10x10µm². Le gain en puissance opto-microonde s’exprime comme le rapport entre la puissance hyperfréquence de sortie du photodétecteur et la puissance de sortie de la photodiode normalisée. Ce gain permet l’analyse des puissances au sein du dispositif et est directement relié en dB à la responsivité sur 50Ohms du phototransistor. La notion de « fréquence limite de fonctionnement à –40dB » est apportée pour les applications courtes distances, contre –20dB pour les applications longues distances [3]. Une valeur d’environ 20GHz est ainsi estimée par la mesure à 940nm. La comparaison à la simulation montre un désaccord notable sur le niveau du gain opto-microonde. Celui-ci équivaut à un rapport entre les courants détectés de 3,5. Une partie de cet écart peut être absorbée par les différences entre structures simulées et structures réelles, notamment remarquées sur le gain en courant. La présence de réflexions sur le support de la puce peut également être responsable de l’augmentation de la détection du PTH SiGe mesuré. La valeur du coefficient d’absorption peut également être remise en cause, mais ceci restant dans une plage de valeurs acceptable d’après les différentes mesures contradictoires recensées dans la littérature. Des investigations complémentaires pourront notamment exploiter des mesures de spectroscopie. VI – Conclusions et perspectives Les premiers résultats concernant un phototransistor bipolaire à hétérojonction SiGe/Si en technologie simple couche contrainte ont été présentés. Un gain en puissance optique-microonde de 3,46dB à 940nm est démontré aux fréquences basses, soit une sensibilité dc de 1,49A/W, comparable aux 1,47A/W obtenus par [2] à 800nm. Une fréquence limite de fonctionnement du PTH, tenant compte d’un bilan de puissance indicatif pour les communications optiques courtes distances, est estimée par la mesure à 20GHz à –40dB. La bande passante opto-électrique à –3dB est de 0,5GHz. Un modèle complet pour la simulation hydrodynamique des couches SiGe contraintes précédemment mis en place est exploité. Un bon accord est trouvé entre simulations et mesures en ce qui concerne les caractéristiques électriques. 13émes Journées Nationales Microondes, 21-22-23 mai 2003 – LILLE 2B1 Les simulations opto-microondes ont été exploitées pour démontrer la faisabilité du phototransistor [3]. La confrontation à la mesure présente cependant des écarts dont l’origine reste à étudier. Ces résultats préliminaires ouvrent ainsi la voie tant sur des développements fondamentaux que sur des développements applicatifs avec un nouveau composant, dont les performances et les possibilités d’intégration dans une technologie industrielle devront permettre de répondre à des besoins multiples des applications de communications courtes distances : - interconnexions optiques ; - transmission de signal RF et microondes ; - déport de capteurs ; - systèmes de distribution de signal d’horloge… Références [1] Y. Zhu, Q. Yang, Q. Wang, “Resonant Cavity SiGe/Si MQW Heterojunction Phototransistor Grown on the SIMOX Substrate for 1.3µm Operation”, IEEE Electronic Components and Technology Conference, pp.11991204, 1997. [2] Z. Pei, C.S. Liang, L.S. Lai, Y.T. Tseng, Y.M. Hsu, P.S. Chen, S.C. Lu, C.M. Liu, M.-J. Tsai and C.W. 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