Traitements procognitifs de la maladie d`Alzheimer

Les traitements pharmacologiques de la maladie d’Alzheimer
ayant démontré une effi cacité se limitent aux inhibiteurs de
l’acétylcholine-estérase (IACh-E : donépézil, rivastigmine, et
galantamine) et à la mémantine. Les premiers sont prescrits
aux stades initiaux (légers à modérés) et la mémantine aux
stades modérés à sévères. Mais quelle stratégie adopter
lorsque la maladie progresse chez un patient sous traitement
d’IACh-E: arrêter tout traitement ? Remplacer l’IACh-E par de
la mémantine ? Combiner IACh-E et mémantine ? Une seule
étude avait montré que l’addition de mémantine à un traite-
ment de donépézil chez les patients atteints d’une maladie
d’Alzheimer à un stade modéré entraînait des bénéfi ces cogni-
tifs et fonctionnels modestes mais cliniquement signifi catifs.
Malgré ces évidences limitées, une bithérapie associant mé-
mantine et inhibiteur de l’acétylcholinestérase est largement
prescrite dans certains pays, y compris parfois en Suisse.
Une étude randomisée contrôlée en double aveugle a inclus 295
patients britanniques vivant à domicile (âge moyen 77,5 ±8,4 ans,
65% de femmes) qui sou raient d’une maladie dAlzheimer de stade
modéré à sévère (score MMSE de 5 à 13, moyenne 9,1±2,6) et pre-
naient du donépézil à 10 mg/j depuis au moins 3 mois (87% depuis
12 mois ou plus). Ces patients ont été randomisés à l’un des 4 bras de
traitement : poursuite ou arrêt (remplacé par placebo après sevrage)
du donépézil et addition ou pas (placebo) de mémantine. Le ca-
cité des traitements a été mesurée sur les performances cognitives
et fonctionnelles, avec des critères pré-dé nis pour juger de la rele-
vance clinique des di érences observées.
Après un suivi d’une année, un déclin cognitif et fonctionnel
a été observé dans les 4 groupes de patients. Cependant, compa-
rés aux patients sous double placebo, les patients ayant poursuivi
le traitement de donépézil seul déclinaient signi cativement moins
du point de vue cognitif (di érence de 1,9 points, IC 95%1,3-2,5, au
MMSE standardisé), la di érence dépassant le seuil (1,4 points) pré-
dé ni comme cliniquement signi catif. Le déclin fonctionnel était
aussi ralenti (di érence de 3,0 points, IC 95% 1,8-4,3), mais avec
une di érence natteignant pas le seuil (3,5 points sur une échelle de
60 points) jugé comme cliniquement signi catif. Des e ets statisti-
quement signi catifs mais cliniquement non-relevant étaient aus-
Entre bonne et mauvaise nouvelles !
Traitements procognitifs
de la maladie dAlzheimer
si observés chez les patients sous mémantine seule au plan cognitif
(di érence 1,2 points, IC 95% 0,6-1,8) et fonctionnel (di érence
1,5 points, IC 95% 0,3-2,8). Le double traitement napportait pas
de béné ce signi catif par rapport au traitement de donépézil seul.
Malheureusement, aucun des traitements nin uençaient non plus
les mesures de qualité de vie du patient ou les symptômes psycho-
logiques des proches.
Commentaires
La bonne nouvelle est certainement que cette étude con rme que,
même après plusieurs années de traitement, un traitement pro-
cognitif (ici le donépézil) ralentit signi cativement la détériora-
tion cognitive et fonctionnelle (réduites de 32% et 23% par rapport
au groupe sous double placebo). La mauvaise nouvelle est certai-
nement que les répercussions de ces béné ces sur les plans fonc-
tionnels et de la qualité de vie des patients comme de leurs proches
restent trop limités. Nous avons dé nitivement besoin de meilleurs
traitements !
w Prof. Dr méd. Christophe Büla, Lausanne
Référence : Howard R et al. Donepezil and memantine for moderate-to-severe
Alzheimer’s disease. N Engl J Med 2012 ; 366 :893-903
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