Thérapeutiques du syndrome d`apnée du sommeil Kamila Sedkaoui

Thérapeutiques du syndrome d’apnée du sommeil
Kamila Sedkaoui
Service de Pneumologie-Allergologie
Hôpital Larrey – CHU de Toulouse
Introduction
Le syndrome d’apnée du sommeil(SAS) est caractérisé par la survenue répétée d’une
obstruction plus ou moins complète des voies aériennes supérieures au cours du sommeil.
C’est une affection une très fréquente qui concerne 2% de femmes et 4% des hommes de 30 à
60 ans. Les conséquences neuro-cognitives et cardiovasculaires occasionnées par le SAS, font
de ce syndrome un réel problème de santé publique.
La prise en charge thérapeutique a été révolutionnée depuis le début des années 80 par la
pression positive continue(PPC) à la suite des travaux de Sullivan. Dans certaines
circonstances des difficultés de prise en charge rendent nécessaire une approche
pluridisciplinaire.
I- Les conséquences du SAS
L’occlusion répétée des voies aériennes au cours du sommeil est responsable d’une part
d’hypoxémie-hypercapnie avec hyperactivité du système sympathique et d’autre part d’une
fragmentation du sommeil avec micro éveils à l’origine d’une déstructuration de celui-ci et
donc de perturbations de la qualité du sommeil. Cette fragmentation du sommeil entraîne une
somnolence diurne excessive avec pour conséquence des altérations des fonctions cognitives
et de la qualité de vie. Elle s’associe à un risque augmenté d’accidents de travail, et de
circulation routière.
Sur le plan cardio- vasculaire, il existe un lien étroit entre le syndrome d’apnée du sommeil et
plusieurs grandes maladies cardiovasculaires. Le SAS est associé à une augmentation du
risque d’infarctus du myocarde, d’accidents vasculaires cérébraux et d’insuffisance cardiaque
congestive. Un lien de causalité entre le SAS et l’HTA est également bien établi. Environ
50% de patients souffrant d’un SAS sont hypertendus, et même des patients ayant un index
d’apnée-hypopnée bas (10-15/h) ont un risque relatif augmenté de développer une HTA par
rapport à la population générale.
2- Traitement du syndrome d’apnée obstructive du sommeil(SAOS)
La prise en charge du SAOS comporte un certain nombre de moyens :
- médicaux reposant essentiellement sur les mesures hygiéno-diététiques
- instrumentaux avec la ventilation en pression positive continue qui demeure le
traitement de choix en raison de son efficacité à supprimer les apnées et à corriger les
symptômes liés à cette maladie et dans certains cas des orthèses d’avancement
mandibulaires
- chirurgicaux ORL ou maxillo-faciale
2.1.Le traitement médical du SAOS
2.1.1. Les mesures hygiéno-diététiques
EIles se résument à l’éviction des facteurs de risques et à la lutte contre l’obésité.
*L’alcool réduit l’activité des muscles dilatateurs du pharynx, retarde les mécanismes
d’éveil et augmente la durée des évènements respiratoires hypopnéiques et apnéiques
* Les hypnotiques, sédatifs sont également à proscrire, car relaxent les muscles
dilatateurs des voies aériennes supérieures. Leur absorption le soir est associée à une plus
grande fréquence des apnées obstructives du sommeil.
* Le tabagisme est un facteur dont le rôle exact dans le développement du syndrome
d’apnée du sommeil reste à confirmer. Néanmoins, les fumeurs ont quatre à cinq fois plus de
risque d’avoir cette maladie par rapport à ceux qui n’ont jamais fumé.
*L’obésité est un facteur de risque essentiel du syndrome d’apnée du sommeil. On estime
que 60 à70 % des SAS sont obèses et les apnées chez ces patients surviennent souvent par des
phénomènes mécaniques(diminution de la surface pharyngée au niveau de l’oropharynx
vélaire lié à la présence de dépôts graisseux autour des parois postéro-latérales de
l’oropharynx vélaire). La perte de poids, si elle est importante, peut améliorer les symptômes
du SAOS et dans de très rare cas apporter une guérison de la maladie . L’obésité n’étant pas le
seul facteur causal de la maladie, la perte de poids doit être associée dans les formes sévères
aux traitements classiques en particulier à la pression positive continue.
*Le traitement postural ou positionnel
L’effet bénéfique du sommeil en décubitus latérale est bien connu des épouses qui
amènent leur mari en consultation pour un problème de ronflement. Le traitement postural
peut donc dans un certain nombre de cas apporter un bénéfice notable. Plusieurs techniques,
parfois folkloriques, ont été testées. On peut citer, la mise en place au niveau du dos de la
veste de pyjama des balles de tennis, l’installation en début de nuit d’oreillers obligeant le
sujet à rester en décubitus latéral, l’utilisation de systèmes d’alarmes qui réveille le sujet
chaque fois qu’il passe en décubitus dorsal. Ce pendant l’efficacité à long terme de ces
thérapeutiques qui nécessitent l’adhésion et la compliance du patient reste à démontrer.
2.1.2.Traitement par Pression Positive Continue(PPC)
La pression positive continue constitue à l’heure actuelle le traitement de référence du
syndrome d’apnée obstructive du sommeil en raison de son efficacité à corriger les apnées et à
supprimer leurs conséquences. Elle agit comme une véritable attelle pneumatique maintenant
ouverte les voies aériennes supérieures grâce à l’application d’une pression positive continue
neutralisant le collapsibilité inspiratoire du pharynx. Elle comporte un compresseur(turbine)
qui génère un débit d’air continu de 20 à 60 l/mn en général dont on peut faire varier la
pression ; celle-ci est délivrée par le biais d’un masque nasal ou plus rarement bucco-facial.
La PPC pour un niveau de pression variable de 5 à 15 cm d’eau, fait disparaître les apnées et
les hypopnées obstructives mais aussi le ronflement. L’obtention de ces effets bénéfiques
nécessite la détermination du niveau de pression positive efficace pour chaque malade.
L’efficacité de la pression positive continue est quasi- immédiate. Elle permet une
amélioration de l’architecture du sommeil, une régression des micro-éveils et la disparition
des évènements respiratoires nocturnes généralement dès les premières nuits ce qui constitue
un atout majeur pour l’observance thérapeutique. A long terme, elle entraîne une amélioration
de la vigilance et des capacités cognitives, de la qualité de vie, une diminution de la pression
artérielle. Les effets secondaires sont généralement mineurs. Ils se résument outre les
problèmes de tolérance cutanée du masque nasal, à une gène à l’endormissement, à des
irritations oculaires, à des sensations de sécheresse nasale et buccale, parfois à une rhinite
chronique dominée par une obstruction nasale ou la rhinorrhée. La PPC est, en principe, un
traitement indéfini et doit être utilisé toutes les nuits au minimum 5-6 heures par nuit.
Les critères de mise en place de la PPC sont variables selon les pays. En France où le
diagnostic du SAS est retenu sur la base d’un index d’apnée-hypopnée supérieur à 10 par
heure de sommeil, les critères de prise en charge par la sécurité sociale sont les suivants :
une somnolence diurne ; et au moins trois symptômes suivants : ronflement, céphalées
matinales, vigilance réduite, trouble de la libido, HTA, nycturie, associés :
soit à un IAH supérieur ou égal à 30/h à l’analyse polygraphique ;
soit si cet indice est inférieur à 30, à au moins 10 micro éveils par heure de sommeil en
rapport avec une augmentation de l’effort respiratoire documenté par l’analyse
polygraphique ».
« La prise en charge est assurée pendant une période de cinq mois, puis par période d’un
an, sur la base d’un forfait hebdomadaire. Le renouvellement et le maintien de la prise en
charge sont subordonnés à la constatation : d’une observance de trois heures minimales de
traitement chaque nuit , sur une période de 24 heures, et de l’efficacité clinique du
traitement. »
2.2. Les orthèses d’avancement mandibulaires
Elles constituent une alternative thérapeutique à la PPC en cours d’évaluation. L’orthèse
d’avancement mandibulaire est la seule qui a fait l’objet de publications intéressantes ces
dernières années. Par rapport au traitement de référence, l’orthèse d’avancement
mandibulaire est moins efficace en terme de réduction de l’index d’apnée-hypopnée mais
il n’y a pas de différence significative en ce qui concerne les effets secondaires ou la
compliance. Les effets secondaires, hypersialhorhée, douleur temporo-mandibulaire,
inconfort dentaire, bruxisme, ne sont pas négligeables et nécessitent une surveillance
stomatologique régulière. Les indications de ce type de traitement reste encore difficile à
définir. En pratique il peut être proposé aux patients ne tolérant pas ou refusant la CPAP et
aux patients présentant un ronflement simple ou porteur de SAOS peu sévère à modéré.
2.3.Traitement chirurgical du SAOS
Le traitement chirurgical du syndrome d’apnée du sommeil représente théoriquement le
traitement idéal dans la mesure où il permettrait soit de corriger radicalement le
dysfonctionnement anatomique du pharynx, soit de court-circuiter l’obstacle pharyngé
(trachéotomie). Différents sites obstructifs peuvent être intéressés depuis les fosses nasales
jusqu’au larynx. La chirurgie nasale (correction d’une déviation septale, turbinectomie,
resection de polype, turbinoplastie au laser ou par radiofréquence etc…) peut être
envisagée comme un traitement curatif dans certains cas de SAOS modéré ou comme
traitement d’appoint permettant de rétablir la perméabilité nasale en cas d’intolérance à la
pression positive continue du fait de l’obstruction nasale . Au niveau oro-pharyngé ,
De toute ces techniques l’uvulo-palato-pharyngoplastie, la plus répandue, est la seule qui
ait fait l’objet de très larges publications au cours de ces dernières années. Elle consiste à
réaliser une réduction volumétrique du voile du palais en y associant une exérèse des
amygdales lorsqu’elles sont encore présentes. Le taux de succès(réduction de l’IAH de
50% et IAH inférieur à 20 après l’intervention) varie de 52% quand l’obstacle se situe en
arrière du voile, à 5% lorsque le collapsus survient en arrière de la langue ou à des
niveaux multiples. Une polysomnographie 3 à 4 mois après le traitement chirurgical est
indiquée puisque dans certains cas, le ronflement peut disparaître mais les troubles
respiratoires nocturnes persister et donner lieu à des apnées silencieuses. Cette
intervention n’est pas dénuée de risques. Des complications non négligeables (douleurs
post opératoires, hémorragie, sténose du nasopharynx, changement de voix) peuvent
survenir.
La radiofréquence est une technique chirurgicale plus récente. Le principe consiste à chauffer
les tissus (à 80° environ ), en préservant la muqueuse. On compte sur la rétraction cicatricielle
pour obtenir une réduction du volume tissulaire et une rigidification des parois des voies
aériennes supérieures limitant le collapsus du pharynx. C’est une technique peu coûteuse , qui
peut être réalisée en ambulatoire et sous anesthésie locale. Plusieurs séances sont parfois
nécessaire afin d’obtenir le résultat escompté. Selon les recommandations de l’HAS
concernant les indications du traitement le chirurgical, quelque soit l’ intervention envisagé,
la décision ne doit être prise qu’après :
- une démonstration de l’altération de la vigilance par un outil validé( échelle
d’Epworth par exemple) ;
- un enregistrement au cours du sommeil(au minimun enregistrement du flux aérien
naso-buccal, des efforts ventilatoires et de la saturation, associés obligatoirement à un
enregistrement du sommeil lui-même ; EEG en cas d’IAH<30) ;
- une proposition de traitement par PPC lorsque l’IAH est supérieur à 30 ;
- un bilan morphologique comprenant un examen ORL avec naso-pharyngoscopie et
une céphalométrie ;
- une confrontation multidisciplinaire, médico-chirurgicale et si possible avec un
psychologue ;
- une information du patient.
Conclusion
Le traitement par pression positive demeure à l’heure actuelle le traitement de référence
du syndrome d’apnée obstructive du sommeil. Des alternatives existent mais elles doivent
faire l’objet de décision pluridisciplinaire.
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