La mort ou l’échec de la défense européenne dans les Balkans ?
GéostratéGiques n° 31 • 2
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de la crise. Il est alors d’une logique absolue que le Conseil de sécurité de l’ONU
ait confié à l’OTAN la tâche d’appliquer les résolutions qu’il avait votées, après que
l’ONU, en soi, eut fait preuve de son impéritie sur le terrain.
Dans le souci de faire accepter par la Russie l’élargissement de l’OTAN,
Washington accepta, par les accords signés à Paris le 27 mai 1997, que la Russie
soit, elle aussi, partie prenante au règlement balkanique. Ce faisant, le rôle de l’Eu-
rope institutionnelle s’amoindrissait d’autant. Les accords, sur une base principale,
organisaient une coopération entre l’OTAN et la Russie. L’absence de l’Europe
dans la crise balkanique ou ses velléités, traduites par des échecs, s’expliquent dans
une rigoureuse logique. L’Europe n’a rien fait parce qu’elle n’existait qu’à l’état de
schéma virtuel, sans aucun moyen. À sa charge, elle tergiversait, de plus, à se les
donner, ces moyens !
Autre raison, et non des moindres, à l’inexistence de toute prévention de la
série de guerres qui ont secoué les Balkans, s’ajoutait la méconnaissance globale du
problème par les Américains détenant la toute-puissance impériale dans la région.
Alors, les conflits armés se sont enchaînés. Quant aux Européens, ils n’avaient qu’à
contempler le désastre. Ils auraient pu en tirer une leçon, mais fallait-il encore qu’ils
le veuillent !
La question primordiale et vitale était de déterminer s’il s’agissait de la préven-
tion ou de la gestion d’une crise que la communauté internationale n’a pas su parer,
au risque d’une dégénérescence aboutissant à un conflit armé, dont on ne peut plus
prévoir l’ampleur et l’extension.
De prime abord, faut-il encore s’entendre sur ce que l’on entend par com-
munauté internationale et la définir. En effet, les 192 États représentés à l’ONU
ne constituent certainement pas la communauté internationale engagée dans les
Balkans. Se sont retrouvés impliqués dans les affaires balkaniques six États : États-
Unis, Grande-Bretagne, France, Italie, Allemagne et Russie. Quatre de ces États
sont membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU qui en compte un
cinquième, la Chine, géographiquement, politiquement et économiquement pas
toujours intéressée par les Balkans, encore que l’Histoire porte la trace d’une étroite
alliance sino-albanaise du temps de la guerre froide. L’Allemagne et l’Italie s’ins-
crivent dans un rapport de voisinage historique ancien et récent avec les Balkans,
et peuvent très légitimement revendiquer un rôle dans la région en s’appuyant sur
des moyens bien réels. Donc, la communauté internationale, apte à agir dans les
Balkans, compte moins d’une dizaine d’États, faute de l’Union européenne.