DRE MARIE-CLAUDE VOHL
Faculté des sciences de l’agriculture
et de l’alimentation
Rencontre annuelle IRSC - ULAVAL
DÉMÊLER LES FACTEURS GÉNÉTIQUES ET ÉPIGÉNÉTIQUES DE L’OBÉSITÉ
L’obésité et l’expression génétique en bref
L’obésité atteint des proportions épidémiques à l’échelle planétaire.
Cette maladie complexe est associée à un risque accru de diabète de
type 2 et de maladies cardiovasculaires, par le biais d’une constellation
de facteurs de risque qu’on appelle aussi syndrome métabolique.
Pourtant, un petit nombre d’individus obèses demeure relativement
en bonne santé métabolique, tandis que d’autres accusent un risque
élevé de diabète de type 2 et de maladies cardiovasculaires.
Les tissus adipeux ne sont que la partie visible de l’obésité. À l’inté-
rieur se cachent les complications métaboliques qui, elles-mêmes,
reflètent une modification de l’expression des gènes. Certains gènes
fonctionnent insuffisamment ou en excès. Parfois, ce sont des mu-
tations qui sont à l’origine du dysfonctionnement d’un gène. D’autres
fois, ce sont des modifications épigénétiques. Il s’agit souvent de
méthylations, des petites modifications chimiques à la surface de
la molécule d’ADN, un peu comme un accent sur la lettre « e » d’un
mot. Si l’accent change la prononciation du mot, la méthylation, elle,
modifie le niveau de fonctionnement du gène.
Compte tenu des importantes conséquences économiques et so-
ciales de l’obésité, il est urgent d’identifier les bases génétiques et
épigénétiques des complications métaboliques qui y sont associées.
Résumé du projet de recherche
Lors de deux projets précédents financés par les IRSC, nous
avions déjà étudié l’expression des gènes dans les tissus adipeux
et dressé une liste unique de gènes qui ne fonctionnaient pas
comme dans les tissus sains. Ces gènes sont donc de bons can-
didats pour expliquer les complications métaboliques observées
dans des tissus adipeux. En poussant plus loin l’investigation de
ces gènes, nous avons découvert que les mutations ne suffisent
pas à expliquer les différents niveaux de risque observés entre
les individus obèses. À ces mutations s’ajoutent donc fort pro-
bablement des facteurs épigénétiques.
Le but de ce nouveau projet financé par les IRSC (2010-2014)
consiste donc à étudier en détail les gènes exprimés dans les tissus
adipeux des individus obèses, afin d’associer les variations gé-
nétiques et épigénétiques
aux différents facteurs de
risque cardiovasculaires.
Pour cela, nous prélève-
rons des tissus adipeux
dans l’abdomen de sujets
obèses au moment d’une
chirurgie bariatrique. Nous comparerons alors l’expression des
gènes avec les mutations et les méthylations qu’ils comportent.
Nous tenterons alors d’élucider les déterminants génétiques
(mutations) et épigénétiques (nombre et emplacement des mé-
thylations sur l’ADN) associés aux complications métaboliques
de l’obésité.
Pour aller plus loin, nous tenterons de vérifier si les mutations
et les méthylations sont aussi associées aux facteurs de risque
de maladies cardiovasculaires chez les individus obèses. En
particulier, nous chercherons des associations avec les lipides
du plasma sanguin, la tension artérielle de même que les taux
de sucres et d’insuline.
Retombées
Ce projet de recherche revêt un très grand intérêt pour la santé
publique au Canada et partout dans le monde. L’obésité constitue
un fardeau important pour les systèmes de soins de santé et
l’augmentation fulgurante des coûts qui y sont associés justifie
l’exploration de nouvelles avenues de recherche destinées à mieux
comprendre les facteurs qui prédisposent certains individus à cette
maladie et à ses terribles complications. Une meilleure connais-
sance des variations génétiques et épigénétiques associées à
un risque accru de maladies cardiovasculaires chez les individus
obèses permettra d’optimiser les approches préventives. Les
importantes percées qui découleront de ce projet de recherche
contribueront à positionner le Canada comme un des principaux
leaders de la recherche en nutrigénomique dans le monde.
En permettant de mieux comprendre à la source les facteurs
moléculaires impliqués dans le développement des complications