Éditorial Le couple infernal de l’obésité et des troubles mentaux Prs Alain Golay et François Pralong Articles publiés sous la direction de Alain Golay Médecin-chef Service d’enseignement thérapeutique pour maladies chroniques HUG, Genève François Pralong Médecin-chef Service d’endocrinologie, diabétologie et métabolisme CHUV, Lausanne les patients candidats à une chirurgie de La prévalence de l’obésité est telle que le l’obésité, présentent des problématiques cliterme d’« épidémie » a même été utilisé par niques complexes où les enjeux psycholol’OMS. Si la prévalence en Suisse est moindre giques et psychiatriques sont souvent priqu’aux Etats-Unis, elle a quand même doublé mordiaux. Y. Corminboeuf et coll. proposent en 20 ans (de 5 à 10 %). L’article de P. Fournier de prendre du temps pour les préparer à la et coll. qui applique les données démographi­ chirurgie. Malgré une impulsion d’« urgence » ques de la dernière enquête de santé suisse des patients, partagée parfois par les soiau canton de Vaud identifie clairement l’enjeu majeur que constitue l’auggnants, il est essentiel d’aménamentation prévisible du nombre ger un espace-temps leur peraménager un mettant de mettre en exergue les de personnes en surpoids et obèses espace-temps changements à venir pour leur pour les systèmes de santé. leur permettant nouvelle vie… et ce n’est pas une de mettre en C’est dans ce contexte que L. Loperte de temps ! On n’insistera exergue les catelli et coll. nous parlent du jamais assez sur la nécessité de changements à couple infernal de l’obésité et des prendre en charge ces patients venir pour leur troubles mentaux. Les auteurs dans toutes leurs dimensions, so­ nouvelle vie… nous démontrent que les person­ matiques et psychologiques, dans nes obèses souffrent davantage un cadre interdisciplinaire qui po­ de troubles mentaux que la population gé­ sitionne le patient au milieu d’un réseau de nérale. Est-ce le poids qui influence la santé compétences complémentaires et synergiques. mentale ou l’inverse ? Par exemple, la dé­ pression augmente de plus de 50 % le risque L’utilité des compétences complémentaires des d’obésité et l’obésité augmente aussi de plus équipes pluridisciplinaires se retrouve dans de 50 % le risque de dépression. le suivi des patients après l’intervention, ce qui est bien illustré par l’article de V. di Vetta Un trouble du comportement alimentaire et coll. qui revoit les principes de prévention ­actif demeure une des contre-indications de et de prise en charge des syndromes de dumping, fréquents après by-pass gastriques. Dans la chirurgie de l’obésité, alors que plus l’IMC cet article, les auteurs soulignent l’imporest élevé, plus ce genre de trouble est fréquent. Boulanouar et coll. mettent en avant tance d’une approche coordonnée entre la un concept d’addiction à la nourriture qui diététicienne, l’infirmière et le médecin pour émerge de plus en plus. Les auteurs montrent poser un diagnostic correct autant que pour qu’environ 30 % des patients obèses adressés proposer des approches thérapeutiques adéquates. pour une chirurgie de l’obésité ont une addiction à la nourriture. Préciser cette maladie Finalement, R.C. Martin-du-Pan et coll. prod’addiction à la nourriture permettrait de posent une hypothèse originale avec des pouvoir reconsidérer la prise en charge spécifique de ces patients obèses. ­peptides natriurétiques. Ceux-ci pourraient favoriser l’obésité quand les taux sont abaissés On le constate à la lumière de ces deux aret auraient même un rôle de biomarqueurs ticles, les patients obèses, et particulièrement de la survenue d’un diabète. www.revmed.ch 22 mars 2017 635