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Résumé : Modélisation clinique et biochimique de l’insuffisance intestinale chronique
chez l’homme. La concentration plasmatique veineuse post-absorptive de citrulline,
marqueur de la masse entérocytaire absorptive.
L’insuffisance intestinale chronique résulte le plus souvent d’une malabsorption nécessitant
une nutrition parentérale pour maintenir l'équilibre nutritionnel. Sa cause habituelle est le
syndrome de grêle court (SGC). Dans ce dernier (n=124) nous avons déterminé par analyse
actuarielle multidimensionnelle les facteurs de dépendance à la nutrition parentérale et de
survie. Nous avons ainsi discriminé l’insuffisance intestinale transitoire et permanente par les
césures de longueur de grêle selon le type anatomique et de période adaptative post-résection
(2 ans). Notre objectif a ensuite été de déterminer, dans l'insuffisance intestinale, un marqueur
biologique de la masse entérocytaire absorptive. Après avoir optimisé chez l’homme sain
l’administration digestive des traceurs isotopiques du métabolisme protéique (leucine,
glutamine) en démontrant que seule la perfusion duodénale, par rapport à la perfusion
gastrique, permettait d’obtenir des résultats reproductibles pour l'état stationnaire et
l’extraction splanchnique, nous avons fait l’hypothèse que la citrullinémie, acide aminé non
protéique produit du métabolisme entérocytaire de la glutamine, pouvait être un marqueur
candidat. En préalable, dans le SGC, nous avons validé une méthode radiologique pour
évaluer anatomiquement la masse intestinale et modélisé la masse intestinale fonctionnelle
grâce aux bilans d’absorption. Nous avons montré que l’hyperphagie était l’un des facteurs
majeurs qui caractérisait ces patients (présente chez 82%) et qu’elle participait à l’expression
de l’adaptation intestinale. Nous avons alors, dans le SGC (n=57), pu démontrer que la
citrullinémie est un marqueur de la masse entérocytaire du fait : a) de son abaissement par
rapport aux contrôles, b) de sa corrélation positive (r=0.83, P<0.0001) avec la longueur de
grêle, c) de sa liaison avec les coefficients d’absorption, d) de son pouvoir discriminant pour
le type et la sévérité de l'insuffisance intestinale. Nous avons confirmé notre hypothèse en
montrant dans un 2
ème
type d’insuffisance intestinale potentielle, le syndrome d’atrophie
villositaire (n=52 dont 42 maladies cœliaques), que la citrullinémie indiquait l’intensité et
l’étendue des lésions sur l’intestin grêle. Par contre dans la pseudo-obstruction intestinale
chronique (n=6), la citrullinémie est (sauf en cas de lésions histologiques intestinales)
subnormale. Nous avons vérifié que la dénutrition pure (marasme par anorexie mentale
restrictive, n=57) n’influençait pas la citrullinémie. L’évolution et la normalisation de la
citrullinémie après transplantation intestinale pour insuffisance intestinale permanente nous a
confirmé que, in vivo chez l’homme, la citrullinémie est bien d’origine grêlique. Ainsi la
citrullinémie veineuse post-absorptive peut être utilisée comme marqueur de la masse
entérocytaire absorptive.
Discipline : Physiologie et Physiopathologie de la Nutrition Humaine
Mots-clés : citrulline, insuffisance intestinale, nutrition parentérale, syndrome de grêle court,
atrophie villositaire, absorption intestinale, transit baryté du grêle, traceurs isotopiques,
transplantation intestinale.