K I NÉS I T HÉRAP I E , et médecine du sport Coordonné par Jean-Claude Chanussot Traitement des ruptures du tendon d’Achille (1ère partie) Jean-Claude CHANUSSOT*, R.-G. DANOWSKI✞** * CDSMK ** Rhumatologue Centre médico-chirurgical des Jockeys, Chantilly (60) – une asynergie musculaire des muscles du membre inférieur à l’origine d’une traction brutale incontrôlée. Pathologie Le diagnostic de rupture du tendon d’Achille repose sur l’interrogatoire et l’examen clinique. T RAU MATO LO G I E Les ruptures du tendon d’Achille concernent plus les hommes (80 %) que les femmes (20 %). L’âge moyen de survenue des ruptures du tendon d’Achille se situe aux alentours de 45 ans. Les circonstances de la rupture sont des accidents sportifs dans 60 % des cas. Interrogatoire – Douleur d’apparition brutale au cours d’un effort particulier ; – claquement audible ressenti comme une agression extérieure : coup de pied, coup de raquette, jet de pierre ou de balle ; – difficultés à marcher avec diminution de la propulsion. Traitement des ruptures du tendon d’Achille Ces dernières années, le traitement des ruptures du tendon d’Achille a beaucoup évolué, et plusieurs alternatives thérapeutiques sont à présent possibles : – le traitement orthopédique ; – le traitement chirurgical ; Introduction Examen clinique Le tendon d’Achille fait partie intégrante de l’unité fonctionnelle suro-achilléo-calcanéoplantaire (SACP). Il mesure 12 à 15 cm et la torsion anti-horaire de ses fibres lui confère une résistance ultime à la traction d’environ 6 000 à 7 000 N. – Palpation : dépression douloureuse sur le corps du tendon ; Le tendon d’Achille transmet la tension développée par le triceps sural à l’aponévrose plantaire. Cette tension, pour un homme de 80 kg, peut être estimée à : – 1 600 N (2 fois le poids du corps) pendant une course lente ; – 3 200 N (4 fois le poids du corps) lors d’un saut avec appel sur un pied. Malgré cette résistance à la traction conséquente, le tendon d’Achille peut se rompre lors de démarrages rapides, d’impulsions ou de sauts. Cette rupture peut être liée à deux facteurs concomitants : – une dégénérescence du tendon d’Achille qui est mal vascularisé à sa partie moyenne ; – signe de Brunet-Guedj : disparition de l’équin de gravité en procubitus ; – signe de Thompson : absence de flexion plantaire à la pression latéro-latérale du mollet. Le bilan d’imagerie comporte une radiographie standard utile pour éliminer une pathologie associée. Sur ce cliché, le signe de rupture le plus fidèle est la modification du triangle graisseux de Kager (triangle formé par la face antérieure du tendon d’Achille, la face postérieure du tibia et le bord supérieur. du calcanéum). L’échographie n’est pas un examen fiable car elle peut conclure à une rupture partielle alors qu’il s’agit d’une rupture complète. L’IRM affirme le diagnostic mais il s’agit d’un examen coûteux qui n’est pas vraiment nécessaire quand la clinique est aussi parlante. – la ténorraphie percutanée. Le traitement orthopédique est le traitement le plus ancien qui consiste en l’immobilisation par une résine ou un plâtre pour une durée totale de 10 à 12 semaines : – durant une première période de 4 à 6 semaines, le pied est immobilisé en équin de gravité, l’appui est interdit, la déambulation est réalisée à l’aide de deux cannes antibrachiales ; – entre 6 et 12 semaines, une deuxième botte en résine ou en plâtre est réalisée pour encore 4 à 6 semaines, le pied étant positionné avec diminution de l’équin, et l’appui progressif autorisé ; o – à l’ablation totale de toute immobilisation, après environ 12 semaines, le port d’une talonnette est nécessaire pendant 4 semaines, avec diminution progressive de sa hauteur. Il est demandé au sujet de ne pas marcher sur la pointe des pieds avant 5 à 6 mois ; – l’entraînement avec la recherche du topniveau ne sera pas acquis avant la fin du 8e mois. KS n° 437 octobre 2003 57 K I NÉS I T HÉRAP I E , et médecine du sport T RAU MATO LO G I E Remarques concernant le traitement orthopédique : – la tendance actuelle est de placer le pied durant la première période en équin de gravité, et durant la seconde période de réduire progressivement cet équin tous les 10 jours ; – le traitement orthopédique évite le risque inhérent à toute anesthésie générale, mais expose aux risques de rupture itérative. La rupture survient en règle générale à l’ablation totale de l’immobilisation lorsque le sujet devient plus sûr de lui et qu’il essaie de marcher seul sur la pointe des pieds ; – la critique majeure est en fait que le traitement orthopédique ne permet pas la récupération avec certitude de la longueur du tendon. Un allongement séquellaire du tendon d’Achille induit une perte de force et par voie de conséquence une diminution des performances au cours de la course ou des sauts. Le traitement orthopédique a l’avantage d’être simple dans sa mise en œuvre mais il est pénible dans sa durée et paye un lourd tribut aux rupture itératives. Les kinésithérapeutes doivent se méfier car celles-ci surviennent pratiquement toujours dans les deux premiers mois qui suivent l’ablation du plâtre. n° 437 octobre 2003 58 KS Le traitement chirurgical comporte plusieurs techniques, dont la plus employée est la suture simple. Dans d’autres cas, en fonction du type de rupture, de son ancienneté, etc. d’autres gestes complémentaires peuvent être réalisés (laçage avec le plantaire grêle, plastie avec l’aponévrose du triceps, etc.). Le recours à ces techniques opératoires plus sophistiquées demeure néanmoins exceptionnel. Toutes les méthodes chirurgicales ont pour avantage de visualiser la lésion et d’essayer de retrouver l’isométrie du tendon. Le traitement chirurgical permet une restitutio ad integrum du tendon mais expose à de nombreuses complications qui peuvent faire douter de son intérêt par rapport au traitement orthopédique. La rééducation est certe plus précoce mais elle peut être entravée par des problèmes cutanés, une algoneurodystrophie ou un sepcis. La suture simple est réalisée avec une incision interne. Le rôle de la suture consiste a mettre en contact les extrémités rompues pour assurer une cicatrisation optimale. Cette suture n’a pratiquement aucune soli- dité mécanique intrinsèque et ne permet donc pas la fonction. Après la suture, la réfection de la gaine péritendineuse est un temps opératoire important pour favoriser la cicatrisation ultérieure. Une attelle plâtrée en équin permettant de surveiller la cicatrice est réalisée pour 48 heures. Elle est suivie par une botte plâtrée en équin pour 3 semaines, puis d’une botte plâtrée à 90° les 3 semaines suivantes. L’appui progressif est autorisé à la 6esemaine à l’ablation de toute contention. La marche sur la pointe du pied est autorisée au 3e mois, le footing au 4e mois et le top niveau n’est retrouvé en règle générale qu’au 6e mois. Les suites peuvent être marquées par des modifications locales du tendon, à type d’hypertrophie, avec parfois d’autres complications associées (cutanées, infectieuses, etc.). Le traitement chirurgical est indiqué pour les ruptures vues tardivement, les ruptures itératives et les ruptures fraîches du sujet jeune et sportif. Suite dans notre prochain numéro Indexation Internet : Sport – Tendon