DÉVELOPPEMENT 29 ENDOMORPHISMES SEMI

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DÉVELOPPEMENT 29
ENDOMORPHISMES SEMI-SIMPLES
Définition. — Soit E un K-espace vectoriel de dimension finie.
(i) On dit que f ∈ L(E) est semi-simple si pour tout sous-espace F de E stable par f , il existe un
supplémentaire S de F stable par f .
(ii) On dit que M ∈ Mn (K) est semi-simple si l’endomorphisme x 7→ M x est semi-simple.
Lemme. — Soit f ∈ L(E) est tel que µf soit irréductible alors f est semi-simple.
Démonstration. — Soit F un sous-espace strict de E stable par f et soit x1 ∈ E \ F alors le sous-espace
Ex1 = {P (f )(x1 ) ; P ∈ K[X]} est stable par f et Ix1 = {P ∈ K[X] ; P (f )(x1 ) = 0} est un idéal non
nul de K[X] (puisque µf (f )(x1 ) = 0) donc il existe π1 ∈ K[X] unitaire tel que Ix1 = π1 K[X]. De plus,
x1 6= 0 donc id ∈
/ Ix1 i.e. π1 n’est pas constant. Puisque µf est irréductible et divisible par π1 , on a en
fait µf = π1 d’où (d’après l’hypothèse) π1 irréductible.
Supposons qu’il existe y ∈ Ex1 ∩ F non nul, on écrit y = P (f )(x1 ) avec P ∈ K[X] ; alors π1 est
irréductible et ne divise pas P donc π1 et P sont premiers entre eux et il existe donc U, V ∈ K[X] tels
que U P + V π1 = 1 d’où
x1 = U (f ) ◦ P (f )(x1 ) + V (f ) ◦ π1 (f )(x1 ) = U (f ) ◦ P (f )(x1 ) = U (f )(y)
mais y ∈ F et F est stable par f donc U (f )(y) ∈ F ce qui est impossible par choix de x1 . On a donc
Ex1 ∩ F = {0} i.e. Ex1 et F sont en somme directe. Si F ⊕ Ex1 = E, c’est fini, sinon on considère
x2 ∈ E \ F ⊕ Ex1 . Puisque E est de dimension finie, on obtient une décomposition de la forme
E = F ⊕ E x1 ⊕ · · · ⊕ E xr
avec chaque Exi stable par f ; on pose donc S = Ex1 ⊕ · · · ⊕ Exr .
Proposition. — Si f ∈ L(E) alors on a équivalence entre
(i) f est semi-simple
(ii) µf est un produit de polynôme irréductibles unitaires deux à deux distincts.
Démonstration. — (i) ⇒ (ii) Si µf a un facteur carré i.e. si µf = M 2 N , alors F = ker M (f ) est stable
par f donc il existe un supplémentaire S de F stable par f . Soit x ∈ S alors M (f ) ◦ M N (f )(x) =
µf (f )(x) = 0 i.e. M N (f )(x) ∈ F et, d’autre part, S est stable par f donc M N (f )(x) ∈ S ; on a donc
M N (f )(x) ∈ F ∩ S = {0} i.e. M N (f ) s’annule sur S. Si x ∈ F alors M N (f )(x) = N (f )(M (f )(x)) = 0
i.e. M N (f ) s’annule sur F . Il s’ensuit que M N (f ) est nul alors que deg M N < deg µf ce qui contredit
la définition du polynôme minimal.
(ii) ⇒ (i) On décompose µf = P1 · · · Pr et on note Fi = ker Pi (f ). Soit F stable par f alors on a
E = F1 ⊕ · · · ⊕ Fr et F = (F ∩ F1 ) ⊕ · · · ⊕ (F ∩ Fr ). Chaque Fi est stable par f et on peut considérer
la restriction fi ∈ L(Fi ) de f à Fi . Pour tout i, on a Pi (fi ) = 0 avec Pi irréductible donc Pi = µfi et,
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Endomorphismes semi-simples
d’après le lemme, fi est semi-simple i.e. il existe Si stable par fi tel que Fi = (F ∩ Fi ) ⊕ Si . Il suffit
alors de poser S = S1 ⊕ · · · ⊕ Sr .
Corollaire. — Si K est algébriquement clos alors f ∈ L(E) est semi-simple si et seulement si f est
diagonalisable.
Démonstration. — Si K est algébriquement clos alors les polynômes irréductibles sur K sont ceux de
degré 1 donc µf est sans facteur carré si et seulement si µf est scindé à racines simples.
Proposition. — Soit M ∈ Mn (R).
(i) M est semi-simple si et seulement si M est diagonalisable dans Mn (C).
(ii) Si
de la forme
M ∈M
n (R) est semi-simple alors M est semblable dans Mn (R) à une matrice
D 0
α −β
avec D diagonale et B constituée de blocs de la forme
centrés sur sa
0 B
β α
diagonale principale.
Démonstration. — (i) Si M est semi-simple alors µM = P1 · · · Pr avec les Pi irréductibles unitaires deux
à deux non associés. Soit α ∈ C une racine de µM alors α est une racine de l’un des Pi , par exemple P1 ,
or P1 est irréductible sur R donc α est racine simple de P1 . Pour i > 1, on a Pi et P1 premiers entre eux
i.e. U Pi + V P1 = 1 avec U, V ∈ R[X] donc U Pi (α) = 1 i.e. α n’est pas racine des autres Pi donc µM est
à racines simples et il s’ensuit que M est diagonalisable sur C. Réciproquement, si M est diagonalisable
sur C alors µM ∈ R[X] est scindé à racines simples dans C donc µM est sans facteur carré dans C[X]
et a fortiori dans R[X].
(ii) On raisonne par récurrence sur n, le cas n = 1 étant trivial. Si µM est scindé sur R alors, d’après
le première proposition et puisque M est semi-simple, µM est un produit de polynômes irréductibles
distincts donc est à racines simples et il s’ensuit que M est diagonalisable sur R. On peut donc supposer
que µM = [(X − α)2 + β 2 ]Q avec α ∈ R, β > 0 et Q ∈ R[X] et on pose E = ker[(M − α)2 + β 2 I]. Puisque
Q divise strictement µM , on a Q(M ) 6= 0 donc [(X − α)2 + β 2 ] n’est pas inversible et il s’ensuit que
E 6= {0}, on considère e1 ∈ E non nul. Si M e1 = λe1 alors
0 = [(M − α)2 + β 2 I](e1 ) = [(λ − α)2 + β 2 ]e1
ce qui est impossible puisque β > 0 donc e1 et M e1 sont indépendants et il en est donc de même de e1
et e2 = β1 [M e1 − αe1 ]. De plus, on a M e1 = αe1 + βe2 et
1
(M − αI)2 e1 + αe2 = −βe1 + αe2
β
α −β
donc F = Vect(e1 , e2 ) est stable par M et on a M|F =
. Puisque M est semi-simple, il existe
β α
un supplémentaire G de F stable par M et il suffit d’appliquer l’hypothèse de récurrence à la matrice
M|G .
M e2 = (M − αI)e2 + αIe2 =
Leçons concernées
11 Idéaux d’un anneau commutatif unitaire. Exemples et applications
14 Polynômes irréductibles à une indéterminée. Corps de rupture. Exemples et applications
23 Réduction d’un endomorphisme en dimension finie. Applications
24 Sous-espaces stables d’un endomorphisme d’un espace vectoriel de dimension finie. Applications
37 Endomorphismes diagonalisables
40 Polynômes d’endomorphismes. Applications
Sébastien Pellerin
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Compléments
Une lemme utile. —
Lemme. — Soit f ∈ L(E) et µf = P1α1 · · · Prαr . Si F est un sous-espace stable par f alors
F =
r
M
(F ∩ ker Piαi (f )).
i=1
Première démonstration. — Soit x = x1 + · · · + xr ∈ F où xi ∈ ker Piαi (f ) alors, pour tout P ∈ K[X],
on a P (f )(x) = P (f )(x1 ) + · · · + P (f )(xr ). Soit i ∈ {1, . . . , r}, on écrit µf = Piαi Qi avec Qi ∈ K[X] alors
Qi (f )(x) = Qi (f )(x1 ). Puisque ker Piαi (f ) et F ∩ ker Piαi (f ) sont stables par f , ils sont stables par Qi (f )
donc on peut considérer les restrictions g et h de Qi (f ) à ker Piαi (f ) et F ∩ ker Piαi (f ) respectivement.
Notons que
M
α
ker Qi (f ) ∩ ker Piαi (f ) =
ker Pj j (f ) ∩ ker Piαi (f ) = {0}
j6=i
i.e. g et h sont injectives d’où bijectives. Alors y = g(xi ) est dans ker Piαi (f ) or y = Qi (f )(x) donc y est
aussi dans F ; il s’ensuit que y est dans F ∩ker Piαi (f ) donc xi = h−1 (y) aussi i.e. xi ∈ F ∩ker Pλ (f ).
αi
Deuxième démonstration.
M— On pose Fi = ker Pi (f ), on a E = F1 ⊕· · ·⊕Fr et on note pi la projection
Fj , il s’agit d’un polynôme en f . Comme F est stable par f , F est aussi
sur Fi parallèlement à
j6=i
stable par chaque pi i.e. pi (F ) ⊂ F mais on a aussi pi (F ) ⊂ pi (E) ⊂ Fi , d’où pi (F ) ⊂ F ∩ Fi . Comme
p1 + · · · + pr = idE , il vient
F ⊂ p1 (F ) + · · · + pr (F ) = p1 (F ) ⊕ · · · ⊕ pr (F ) ⊂ (F ∩ F1 ) ⊕ · · · ⊕ (F ∩ Fr ).
Démonstration dans le cas diagonalisable. — Si f est diagonalisable alors on a E = Eλ1 ⊕ · · · ⊕ Eλr .
Soit x ∈ F , on écrit x = x1 + · · · + xr , où xi ∈ Eλi , alors P (f )(x) = P (λ1 )x1 + · · · + P (λr )xr pour
tout P ∈ K[X]. Soit 1 ≤ i ≤ r et Pi ∈ K[X] tel que Pi (λi ) = 1 et Pi (λj ) = 0 pour j 6= i, alors
xi = Pi (f )(x) ∈ F .
Le théorème de Maschke. —
Théorème. — Soit E un C-espace vectoriel de dimension finie n ≥ 1, G un sous-groupe fini de GL(E)
et F un sous-espace de E stable par tous les éléments de G. Alors F admet un supplémentaire stable
par tous les éléments de G.
Démonstration. — On pose
ϕ(x, y) =
X
hg(x), g(y)i
g∈G
ce qui définit un produit scalaire sur E invariant par G. Il suffit alors de prendre l’orthogonal S = F ⊥
de F pour le produit scalaire ϕ.
Références
M. Alessandri, Thèmes de géométrie. Groupes en situation géométrique, Dunod, 1999.
S. Francinou, H. Gianella et S. Nicolas, Oraux X-ENS, algèbre 1, Cassini, 2001.
X. Gourdon, Algèbre, Ellipses, 1994.
Sébastien Pellerin
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