ESTIM Champagne-Ardenne. ENGELMANN M

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LES DÉLAIS DANS LES REGISTRES :
ESTIM Champagne-Ardenne*
Intervention du Dr Maurice ENGELMANN**
L
C O M M U N I C AT I O N
e Dr ENGELMANN commence son intervention en présentant la carte de la région Champagne-Ardenne
sur laquelle les deux seuls sites d’angioplastie sont
marqués en rouge : "À partir du moment où on travaille
avec une notion de délai il est évident que cette implantation
géographique va fortement influencer les résultats (figure 1)."
En ce qui concerne le délai apparition des symptômespremière prise en charge en fonction du type de prise en
charge initiale qui est faite dans 81% des cas par les SMUR,
le Dr ENGELMANN remarque que les résultats du registre
n’incluent pas les cardiologues : "soit les cardiologues ont
abandonné, ce qui n’est pas impossible, soit les médecins des
SMUR et les patients sont extrêmement bien renseignés. Plus
aucun malade ne semble aller directement en cardiologie.
Mais il reste quand même des médecins généralistes ou des
Fig 1 : La région Champagne-Ardenne.
Fig 2 : Délai symptômes-1ère prise en charge
en fonction du type de prise en charge initiale.
Fig 3 : Délai symptômes-reperfusion selon l’âge et le sexe.
patients pas très bien informés (19 %) qui s’adressent directement à un service d’urgence. Le délai s’en ressent immédiatement mais il ne s’agit probablement pas du même type
de patients puisque le délai médian des SMUR est de 1 h 30,
ce qui est globalement très court par rapport à celui des
urgences qui est de plus de 4 h (figure 2)."
La parité entre les sexes est différente en ChampagneArdenne de ce qui est observé en Aquitaine. "Il n’y a pas de
femmes jeunes en-dessous de 40 ans dans ce registre. Mais
comme l’année dernière on observe une inversion un peu
bizarre puisque les hommes jeunes sont mieux soignés que
les vieux messieurs et les femmes jeunes moins bien que les
dames âgées. Il est possible que les femmes jeunes consultent
moins vite mais il n’y a aucune donnée dans le registre permettant d’analyser cette particularité (figure 3)."
Lors de la prise en charge par le SMUR, la thrombolyse est
administrée très rapidement (globalement 1,7 h). "Par
contre si l’on s’intéresse aux délais de prise en charge aux
urgences, on constate que les délais des urgences pour la
thrombolyse ne sont pas si mauvais. S’ils ont un retard au
niveau de la prise en charge, ils administrent la thrombolyse
relativement vite (2,3 h). Mais bien entendu le délai pour la
coronarographie est bien plus long lorsque le patient part
d’un service d’urgences (figure 4)." Au sujet des délais pour
l’angioplastie, "il faut cependant reprendre la carte de la
région. Un SMUR mobile sera forcément plus rapide qu’un
malade arrivant aux urgences pour lequel il faudra trouver
un véhicule SMUR disponible pour son transfert ce qui cause
finalement un retard de 2 h."
S’il n’a pas encore analysé le temps d’organisation d’un
transfert secondaire, le Dr ENGELMANN pense néanmoins
* 4e Journée Nationale ESTIM. Lyon, 20 octobre 2006.
** SAMU 51, Centre Hospitalier Universitaire de Reims, 45 rue
Cognacq-Jay –F-51092 Reims cedex.
La Revue des SAMU - Médecine d’Urgence - 2007 - 125 à 127
Fig 4 : Délais symptômes-thrombolyse ou coronarographie
selon la prise en charge initiale.
Fig 7 : Décision d’une stratégie de désobstruction
par le SMUR en fonction du délai douleur-recanalisation.
Fig 5 : Prise en charge par un SMUR.
Médianes des délais en minutes.
Fig 8 : Type de recanalisation en fonction du délai
symptômes–1ère reperfusion.
Fig 6 : Décision d’une stratégie de désobstruction
par le SMUR en fonction du délai douleur-appel.
"qu’on ne doit pas être loin de ces 2 h entre le moment où la
décision de transférer un malade est prise et le moment de sa
réalisation. Quelle que soit la pathologie, il n’est pas exclu
que ce soit ce délai qui influence péjorativement les résultats."
Présentant la prise en charge par les SMUR "d’un patient
idéal" et se basant sur les médianes de tous les chiffres, le
Dr ENGELMANN constate qu’en Champagne-Ardenne, "les
patients appelant le SMUR le font en général très vite (45 min)
et le SMUR arrive dans la 1ère heure. C’est après que la situation se complique. On constate que l’urgentiste du SMUR
administre la thrombolyse au moment où l’ambulance
démarre. On met beaucoup trop de temps à prendre une
décision et à l’appliquer, pratiquement autant de temps qu’à
mettre en condition le patient, le mettre dans l’ambulance et à
repartir du domicile(figure 5)."
Le Dr ENGELMANN a ensuite des choses "pas du tout
agréables à dire" au sujet de l’analyse de la prise de décision
par les urgentistes du SMUR. "Pour globalement un tiers
des patients, le médecin ne prend pas de décision, se limite à
effectuer le transport et ne fait rien pour reperfuser le patient.
En fonction du délai douleur-appel on voit qu’avant la 2e
heure, on dénombre plus de 20 % des patients pour lesquels
aucune décision n’est prise. C’est curieusement entre la 2e et la
3e heure que l’on se met à prendre une décision. Au-delà de
6 h cette attitude peut encore s’expliquer (figure 6)."
En fonction du délai douleur-recanalisation, le raisonnement est un peu différent puisque la désobstruction précoce est obtenue grâce aux SMUR, soit en réalisant une
thrombolyse soit en organisant un transport vers une salle
d’angioplastie. "Les résultats ne sont pas trop mauvais et il
n’y a pas de grande différence entre 89 % et 100 % compte
tenu de notre petite région, le travail est satisfaisant jusqu’à
3 h. Au-delà, le nombre de décisions baisse et il faudra peutêtre qu’un jour on détermine jusqu’à quel moment on doit
décider (figure 7)."
En fonction du type de reperfusion, la région ChampagneArdenne est assez logiquement dans les données nationales
selon lesquelles c’est l’association fibrinolyse préhospitalière et angioplastie qui est la plus rapide. La fibrinolyse
intrahospitalière est tributaire de la géographie et est beaucoup plus lente pour la simple raison qu’il faut transporter
les patients ce qui nécessite beaucoup de temps (figure 8).
Par rapport au réseau, globalement 40 % des patients sont
reperfusés par les SMUR, 20 % par les services hospitaliers
et on trouve encore 40 % des patients qui ne bénéficient
d’aucune reperfusion. "Parmi ces 40 % d’oubliés de la reper-
La Revue des SAMU - Médecine d’Urgence - 2007 - 126
Fig 9 : Type de recanalisation selon le délai
symptômes-prise en charge.
fusion on compte même des patients de la 1ère heure. On
observe une amélioration fondamentale entre 1 h et 2 h. On
déplore donc encore beaucoup d’oubliés de la reperfusion
(figure 9)."
En conclusion, le Dr ENGELMANN considère qu’en Champagne-Ardenne "les patients bien informés sonnent à la
bonne porte et surtout précocement. Les recanalisations sont
donc assez précoces et le transport de ces patients – qui
sonnent à la bonne porte – est également assuré très vite. En
terme de délais, les transports "primaires" sont les plus efficaces. Par contre, les absences de décision de reperfusion des
SMUR restent beaucoup trop élevées."
Après ce résumé le Dr ENGELMANN fait quelques propositions dont la première consiste à informer non seulement
les patients coronariens ou les patients potentiels, "mais
aussi les urgentistes auprès desquels il faudra faire un gros
travail". De plus, il faudra améliorer le réseau "pour encore
accélérer les primaires même lointaines. Une réflexion a été
menée au niveau du SROSS 3 à ce sujet et elle a permis de
constater que cet objectif n’est pas d’une grande facilité. Il est
également indispensable d’augmenter la réactivité pour les
patients n’ayant pas sonné à la bonne porte et arrivant aux
services d’urgence. Deux heures d’organisation pour un
transfert c’est peut-être normal mais quand même très long
dans ce genre de situation et il faudra essayer de faire beaucoup mieux. Finalement, il faudra continuer d’essayer de
s’évaluer ce qui n’est pas d’une grande simplicité. On a vu
que les cardiologues ont lâché pied et que les urgentistes
commencent à le faire. Il faut espérer que l’on pourra tenir."
RS
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