La Lettre du Cardiologue - n° 373 - mars 2004
8
Traitement chirurgical
de l’insuffisance cardiaque
(P. Leprince, I. Gandjbakhch, Paris)
INSUFFISANCE CARDIAQUE DIASTOLIQUE
La seule insuffisance cardiaque diastolique qui soit réellement
accessible à une chirurgie est la péricardite constrictive. Son
diagnostic peut être facile (mise en évidence de calcifications
péricardiques sur la simple radiographie du thorax) ou plus au
moins compliqué, nécessitant toute une série d’examens com-
plémentaires (scanner thoracique, IRM...) qui peuvent retarder
l’intervention chirurgicale.
INSUFFISANCE CARDIAQUE AIGUË
L’insuffisance cardiaque aiguë regroupe trois grandes étiologies :
la myocardite fulminante, les intoxications médicamenteuses et
le choc cardiogénique post-infarctus. Ces étiologies constituent
une excellente indication à l’assistance circulatoire, en attente
non pas d’une transplantation cardiaque, mais d’une récupéra-
tion (une chirurgie cardiaque peut être envisagée dans un second
temps avec la pose de l’assistance).
Le meilleur exemple est celui des myocardites fulminantes
L’expérience réalisée dans le service de chirurgie cardiaque de
la Pitié-Salpêtrière portait sur 6 patients jeunes, d’âge moyen
31 ± 4 ans, avec, en l’espace de quelques jours, l’apparition d’un
choc cardiogénique. La troponine Ic était élevée, allant jusqu’à
96 µg/l pour certains patients, avec une coronarographie tout à
fait normale. Un des patients était intubé et ventilé ; deux patients
étaient déjà insuffisants rénaux et dialysés. Les 6 patients ont
bénéficié d’un Thoratec biventriculaire, qui est une assistance
pneumatique paracorporelle : les ventricules pneumatiques sont
placés à l’extérieur du corps avec des canules qui passent à tra-
vers la peau, reliant le ventricule gauche à l’aorte et le ventricule
droit à l’artère pulmonaire.
Sous assistance, ces patients ont récupéré une hémodynamique
relativement stable, avec malheureusement un décès sur défaillance
multiviscérale. Les patients ont été sevrés au bout de 24 ±13 jours.
Ils sont tous vivants après une période de suivi de 10 mois à 2 ans.
Les intoxications médicamenteuses
Selon un travail réalisé dans le service de réanimation de toxico-
logie à Lariboisière, des dysfonctions myocardiques brutales,
complètes mais transitoires (pendant 3 à 4 jours), ont été obser-
vées chez des patients sous médicaments stabilisants de mem-
brane (type Nivaquine®). Ces patients ont été traités par ECMO
périphérique : il s’agit d’un circuit de circulation extracorporelle
comprenant une pompe centrifuge et un oxygénateur, facile à
mettre en place en réanimation, au lit du malade, permettant ainsi
aux patients de récupérer de l’épisode aigu de décompensation
cardiaque.
Le choc cardiogénique post-infarctus
Actuellement, chez des patients en phase aiguë d’infarctus du
myocarde compliqué de choc cardiogénique et qui ont besoin de
chirurgie de revascularisation en urgence (associée ou non à une
chirurgie d’insuffisance mitrale ou de réparation d’une CIV), on
a tendance à mettre en place systématiquement une ECMO en
attente de récupération.
Cette récupération peut durer 3 à 7 jours dans les meilleurs délais,
mais peut aller jusqu’à un mois et demi. En l’absence de récu-
pération, on peut passer à une autre assistance en attente de trans-
plantation cardiaque.
INSUFFISANCE CARDIAQUE CHRONIQUE
Il faut distinguer les insuffisances cardiaques de cause éventuel-
lement traitable des atteintes primitives du myocarde.
Les cardiopathies ischémiques
On connaît tout l’intérêt de la revascularisation chez ces patients
à basse fraction d’éjection :
✓limiter la symptomatologie angineuse ;
✓limiter la symptomatologie de l’insuffisance cardiaque ;
✓améliorer la survie de ces patients en diminuant l’incidence
des événements aigus et en réduisant la progression de l’insuffi-
sance cardiaque.
Quels sont l’importance et l’intérêt de la recherche de viabilité myo-
cardique ? Pour répondre à cette question, on a repris une série de
Dicarli et al. (JTCS décembre 1998) portant sur 91 patients d’âge
moyen 69 ans, avec un fraction d’éjection moyenne à 25 %
(50 patients sous traitement médical versus 41 patients chirurgicaux).
La revascularisation était plus bénéfique chez les patients avec la
fraction d’éjection la moins sévèrement altérée. Les résultats les
plus intéressants étaient obtenus avec le PET scan : quand il y
avait un mismatch, c’est-à-dire une viabilité myocardique, la
revascularisation avait toute sa place, et cela de façon significa-
tive. Dans l’analyse des sous-groupes, en fonction de la sympto-
matologie angineuse, on distingue les patients symptomatiques,
avec mismatch au PET scan (intérêt à revasculariser), et les
patients asymptomatiques sans viabilité (aucun intérêt à revas-
culariser).
Le point le plus fort concernait les patients avec symptomato-
logie angineuse mais pas de viabilité au PET scan. Les résultats
montraient que la revascularisation avait tout son intérêt.
Il faut toujours rechercher une viabilité myocardique dans les car-
diopathies ischémiques à basse fraction d’éjection par l’écho dobu-
tamine, la scintigraphie myocardique, ou encore le PET scan. Il
est actuellement possible d’effectuer cette revascularisation à cœur
battant, mais sous CEC d’assistance, et discuter éventuellement
une assistance post-CEC (type ECMO) en cas de difficulté post-
opératoire. Cette attitude semble constituer une bonne alternative
à la majoration du traitement médical, qui peut être délétère.
Les cardiopathies valvulaires
✓Le rétrécissement valvulaire aortique avec mauvais VG
pose avant tout un problème d’évaluation : il faut vraiment véri-
fier que le RAC est bien serré avant de poser l’indication chirur-
INFORMATIONS