La XVIIe Journée de l API C -Deuxième partie

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N F O R M A T I O N S
L a XV II e Journée
de l’ A P I C
Deuxième partie
Les perspectives thérapeutiques
dans l'insuffisance cardiaque
(A. Cohen-Solal, Paris)
ÉTUDE CHARM (Candesartan in heart failure assessment
Les résultats de l’étude CHARM-Alternative ont montré une
réduction significative de 23 % de la morbimortalité dans le
groupe traité par candésartan (figure 2), réduction comparable à
celle obtenue par les IEC lors d’études précédentes. C’est pourquoi l’étude CHARM ne répond pas à la question : les ARAII
font-ils mieux que les IEC dans l’insuffisance cardiaque ?
of reduction in mortality and morbidity)
L’étude CHARM a comparé le candésartan au placebo chez
7 601 patients (âge moyen 66 ans) répartis en trois groupes et en
stades III et IV de la NYHA (figure 1).
Figure 2. Résultats de l’étude CHARM-Alternative.
Figure 1. Schéma de l’étude CHARM.
Dans le bras Added, l’association candésartan + IEC réduit de
15 % les décès cardiovasculaires et les hospitalisations pour insuffisance cardiaque, et cela de façon significative (figure 3).
1. CHARM-Alternative sur 2 028 patients intolérants aux IEC,
avec une FE ≤ 40 %. Ce bras compare le candésartan à la dose de
32 mg/j au placebo.
2. CHARM-Added sur 2 548 patients déjà traités par un IEC, ayant
une FE ≤ 40 %.
3. CHARM-Preserved sur 3 025 patients avec fonction systolique
conservée.
Dans chaque programme, le critère d’évaluation primaire était un
critère composite associant décès d’origine cardiovasculaire ou
hospitalisation pour insuffisance cardiaque.
* La première partie de ce compte-rendu est parue dans le numéro 372
(février 2004).
La Lettre du Cardiologue - n° 373 - mars 2004
Figure 3. Résultats de l’étude CHARM-Added.
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N F O R M A T I O N S
Chez les patients avec fonction systolique préservée (CHARMPreserved), la réduction de la morbimortalité n’était pas significative (figure 4).
ÉTUDE EUROPA (EUropean Reduction Of cardiac events
with Perindopril in stable coronary Artery disease)
L’étude EUROPA est la plus grande étude rapportée jusqu’ici
pour la taille de l’échantillon étudié : 12 218 patients coronariens.
Elle a comparé un IEC (le perindopril) à dose maximale 8 mg/j,
en monoprise, à un placebo, chez des coronariens stables à bas
risque ou à risque modéré. Sur le critère principal, il y avait une
réduction de 20 % des décès, des infarctus non fatals et des arrêts
cardiaques en faveur du perindopril (figure 6), ainsi qu’une réduction de 39 % de nouveaux cas d’insuffisance cardiaque.
Figure 4. Résultats de l’étude CHARM-Preserved.
Enfin, l’analyse “poolée” des trois études (CHARM-Overall)
montre une réduction significative de la mortalité cardiovasculaire, avec une tendance à la diminution de la mortalité toute cause
proche de la significativité. Il a été constaté également une diminution de 22 % des nouveaux cas de diabète chez les patients
recevant le candésartan.
ÉTUDE COMET (Carvedilol or metoprolol european trial)
L’essai COMET avait pour but de comparer deux bêtabloquants
chez des insuffisants cardiaques : le carvédilol, qui, en plus de
l’activité bêta1 et bêta2-bloquante, a un effet alphabloquant, et le
métoprolol, bloqueur spécifique des récepteurs bêta1. L’étude
montrait une nette supériorité du carvédilol par rapport au métoprolol, avec une réduction de 17 % de la mortalité totale (figure 5)
et de 33 % de la mortalité par AVC. Mais ce bénéfice pourrait être
lié d’une part au fait que le métoprolol n’était pas utilisé à sa dose
maximale, d’autre part à l’effet alphabloquant du carvédilol.
Figure 5. Résultats de l’étude COMET.
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Figure 6. Résultats de l’étude EUROPA.
Ce travail démontre une réelle prévention secondaire sous 8 mg/j
de perindopril chez le coronarien stable, permettant d’éviter un
événement cardiovasculaire (décès, infarctus ou arrêt cardiaque)
pour 50 patients traités durant quatre ans.
ÉTUDE EPHESUS (Eplerenone post-acute myocardial
infarction heart failure efficacy and survival study)
Cette étude portait sur 6 642 patients avec dysfonction VG
(FE ≤ 40 %) et insuffisance cardiaque, comparant un antialdostérone, l’éplérénone (25 mg/j puis 50 mg/j) à un placebo. Cet antialdostérone entraîne moins de gynécomasties douloureuses que
l’aldactone. L’étude démontre une réduction significative de 15 %
de la mortalité globale (figure 7), et de 13 % de la mortalité car-
Figure 7. Résultats de l’étude EPHESUS.
La Lettre du Cardiologue - n° 373 - mars 2004
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diovasculaire ou des hospitalisations pour cause cardiovasculaire.
Elle montre également une réduction du risque de mort subite avec
l’éplérénone par rapport au placebo, réduction d’autant plus marquée que la fraction d’éjection est basse.
Rôle de l’anémie dans l’insuffisance cardiaque
Selon une étude rétrospective menée par Silverberg et al. (JACC
2000) sur 142 patients qui avaient un taux d’hémoglobine
< 12 g/dl, la prévalence de l’anémie était corrélée à la classe fonctionnelle NYHA. Plus le stade NYHA était élevé, plus l’hémoglobine était basse, et plus la mortalité était importante.
Dans cette étude, 32 patients en insuffisance cardiaque NYHA
classe III à IV avec une FE ≤ 40 % et une Hb = 10-11,5 g/dl étaient
répartis en deux groupes :
1. Les 16 patients du groupe A recevaient une dose initiale d’érythropoïétine, en injection sous-cutanée, de 4 000 U/semaine,
combinée à une dose intraveineuse de fer de 200 mg toutes les
deux semaines.
L’EPO était titrée pour maintenir un taux d’hémoglobine à
12,5 g/dl. L’injection du fer avait pour cible une ferritinémie à
400 µg/l, une saturation en fer à 40 % ou un taux d’hémoglobine
à 12,5 g/dl.
N F O R M A T I O N S
1. Un groupe de patients sous traitement médical optimal
(bêtabloquant, diurétique, IEC ou ARAII, spironolactone et/ou
digoxine).
2. Un groupe sous traitement médical optimal + resynchronisation ventriculaire.
3. Un groupe sous traitement médical optimal + resynchronisation ventriculaire + défibrillateur automatique implantable.
Cette étude a montré que la stimulation biventriculaire, associée
ou non à un défibrillateur, pouvait réduire de 20 % la mortalité
toute cause.
ÉTUDE LIDO
Cette étude a comparé deux inotropes, le levosimendan et la
dobutamine, dans la dysfonction ventriculaire gauche sévère
post-infarctus. Les résultats ont montré un net bénéfice en
terme de mortalité pour les patients sous levosimendan
(figure 9).
2. Les 16 patients du groupe B ne recevaient pas de traitement
pour l’anémie.
Le suivi était de 8,2 mois, durée au cours de laquelle ont été évalués différents paramètres : le taux d’hémoglobine, la fraction
d’éjection, la classe fonctionnelle, la mortalité, les jours d’hospitalisation et la dose de diurétique donnée. Les résultats étaient
en faveur du groupe traité par l’érythropoïétine (figure 8).
Figure 9. Résultats de l’étude LIDO.
CONCLUSION
Figure 8. Rôle de l’anémie dans l’insuffisance cardiaque.
ÉTUDE COMPANION (Comparison of medical therapy,
Comment gérer la polythérapie ? De nombreuses questions persistent :
✓ Dans la dysfonction systolique ventriculaire gauche, où l’on
associe IEC + bêtabloquant + diurétique : quelle est la place de
la digoxine ? Faut-il commencer par un ARAII puis continuer par
un antialdostérone, ou l’inverse ?
✓ Dans le post-infarctus avec insuffisance ventriculaire gauche :
quand faut-il introduire un bêtabloquant ? Lequel ? Faut-il associer systématiquement un IEC à un ARAII ?
✓ Dans l’insuffisance cardiaque à fonction VG préservée : fautil donner du candésartan à tous les patients ?
pacing and defibrillation in chronic heart failure)
Un total de 1 600 patients en insuffisance cardiaque modérée à
sévère QRS > 120 ms ont été randomisés en trois groupes :
La Lettre du Cardiologue - n° 373 - mars 2004
N. Laredj,
Institut de cardiologie, CHU Pitié-Salpêtrière, Paris
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Traitement chirurgical
de l’insuffisance cardiaque
(P. Leprince, I. Gandjbakhch, Paris)
INSUFFISANCE CARDIAQUE DIASTOLIQUE
La seule insuffisance cardiaque diastolique qui soit réellement
accessible à une chirurgie est la péricardite constrictive. Son
diagnostic peut être facile (mise en évidence de calcifications
péricardiques sur la simple radiographie du thorax) ou plus au
moins compliqué, nécessitant toute une série d’examens complémentaires (scanner thoracique, IRM...) qui peuvent retarder
l’intervention chirurgicale.
Le choc cardiogénique post-infarctus
Actuellement, chez des patients en phase aiguë d’infarctus du
myocarde compliqué de choc cardiogénique et qui ont besoin de
chirurgie de revascularisation en urgence (associée ou non à une
chirurgie d’insuffisance mitrale ou de réparation d’une CIV), on
a tendance à mettre en place systématiquement une ECMO en
attente de récupération.
Cette récupération peut durer 3 à 7 jours dans les meilleurs délais,
mais peut aller jusqu’à un mois et demi. En l’absence de récupération, on peut passer à une autre assistance en attente de transplantation cardiaque.
INSUFFISANCE CARDIAQUE CHRONIQUE
Il faut distinguer les insuffisances cardiaques de cause éventuellement traitable des atteintes primitives du myocarde.
INSUFFISANCE CARDIAQUE AIGUË
L’insuffisance cardiaque aiguë regroupe trois grandes étiologies :
la myocardite fulminante, les intoxications médicamenteuses et
le choc cardiogénique post-infarctus. Ces étiologies constituent
une excellente indication à l’assistance circulatoire, en attente
non pas d’une transplantation cardiaque, mais d’une récupération (une chirurgie cardiaque peut être envisagée dans un second
temps avec la pose de l’assistance).
Le meilleur exemple est celui des myocardites fulminantes
L’expérience réalisée dans le service de chirurgie cardiaque de
la Pitié-Salpêtrière portait sur 6 patients jeunes, d’âge moyen
31 ± 4 ans, avec, en l’espace de quelques jours, l’apparition d’un
choc cardiogénique. La troponine Ic était élevée, allant jusqu’à
96 µg/l pour certains patients, avec une coronarographie tout à
fait normale. Un des patients était intubé et ventilé ; deux patients
étaient déjà insuffisants rénaux et dialysés. Les 6 patients ont
bénéficié d’un Thoratec biventriculaire, qui est une assistance
pneumatique paracorporelle : les ventricules pneumatiques sont
placés à l’extérieur du corps avec des canules qui passent à travers la peau, reliant le ventricule gauche à l’aorte et le ventricule
droit à l’artère pulmonaire.
Sous assistance, ces patients ont récupéré une hémodynamique
relativement stable, avec malheureusement un décès sur défaillance
multiviscérale. Les patients ont été sevrés au bout de 24 ±13 jours.
Ils sont tous vivants après une période de suivi de 10 mois à 2 ans.
Les intoxications médicamenteuses
Selon un travail réalisé dans le service de réanimation de toxicologie à Lariboisière, des dysfonctions myocardiques brutales,
complètes mais transitoires (pendant 3 à 4 jours), ont été observées chez des patients sous médicaments stabilisants de membrane (type Nivaquine®). Ces patients ont été traités par ECMO
périphérique : il s’agit d’un circuit de circulation extracorporelle
comprenant une pompe centrifuge et un oxygénateur, facile à
mettre en place en réanimation, au lit du malade, permettant ainsi
aux patients de récupérer de l’épisode aigu de décompensation
cardiaque.
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Les cardiopathies ischémiques
On connaît tout l’intérêt de la revascularisation chez ces patients
à basse fraction d’éjection :
✓ limiter la symptomatologie angineuse ;
✓ limiter la symptomatologie de l’insuffisance cardiaque ;
✓ améliorer la survie de ces patients en diminuant l’incidence
des événements aigus et en réduisant la progression de l’insuffisance cardiaque.
Quels sont l’importance et l’intérêt de la recherche de viabilité myocardique ? Pour répondre à cette question, on a repris une série de
Dicarli et al. (JTCS décembre 1998) portant sur 91 patients d’âge
moyen 69 ans, avec un fraction d’éjection moyenne à 25 %
(50 patients sous traitement médical versus 41 patients chirurgicaux).
La revascularisation était plus bénéfique chez les patients avec la
fraction d’éjection la moins sévèrement altérée. Les résultats les
plus intéressants étaient obtenus avec le PET scan : quand il y
avait un mismatch, c’est-à-dire une viabilité myocardique, la
revascularisation avait toute sa place, et cela de façon significative. Dans l’analyse des sous-groupes, en fonction de la symptomatologie angineuse, on distingue les patients symptomatiques,
avec mismatch au PET scan (intérêt à revasculariser), et les
patients asymptomatiques sans viabilité (aucun intérêt à revasculariser).
Le point le plus fort concernait les patients avec symptomatologie angineuse mais pas de viabilité au PET scan. Les résultats
montraient que la revascularisation avait tout son intérêt.
Il faut toujours rechercher une viabilité myocardique dans les cardiopathies ischémiques à basse fraction d’éjection par l’écho dobutamine, la scintigraphie myocardique, ou encore le PET scan. Il
est actuellement possible d’effectuer cette revascularisation à cœur
battant, mais sous CEC d’assistance, et discuter éventuellement
une assistance post-CEC (type ECMO) en cas de difficulté postopératoire. Cette attitude semble constituer une bonne alternative
à la majoration du traitement médical, qui peut être délétère.
Les cardiopathies valvulaires
✓ Le rétrécissement valvulaire aortique avec mauvais VG
pose avant tout un problème d’évaluation : il faut vraiment vérifier que le RAC est bien serré avant de poser l’indication chirurLa Lettre du Cardiologue - n° 373 - mars 2004
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gicale. Les suites postopératoires sont généralement simples, du
fait de la levée de l’obstacle.
✓ L’insuffisance valvulaire aortique au stade d’insuffisance
cardiaque relève d’un traitement par transplantation cardiaque
lorsque la fonction VG est très altérée.
✓ Les insuffisances mitrales (IM) fonctionnelles : ce sont des
IM sur cardiomyopathies dilatées, avec valves et appareil sousvalvulaire sains, une dilatation importante du VG et donc de l’anneau mitral, et une fonction systolique basse. Une étude américaine sur une série d’annuloplasties mitrales a montré, malgré
une mortalité opératoire importante, des suites à distance relativement correctes.
Ce résultat a été confirmé dans une série allemande (Szalay et al.
EJCTS, avril 2003) sur 121 patients, avec IM ≥ 2, FE ≤ 30 %
(30 CMD et 91 cardiopathies ischémiques).
On note une amélioration du stade fonctionnel, de la fraction
d’éjection et des volumes ventriculaires après annuloplastie. Les
résultats sont beaucoup plus décevants lorsqu’il existe une faible
proportion de patients ischémiques dans la population étudiée.
Dans une autre série allemande (Gummert et al. EJCTS, juin
2003) portant sur 66 patients répondant aux mêmes critères avec
53 CMD et 13 ischémiques, la survie à 80 mois était relativement
basse, et les résultats chez les patients de plus de 60 ans étaient
médiocres.
Il faut donc opérer les IM fonctionnelles suffisamment sévères,
d’origine ischémique.
Les IM sur CMD sont encore d’indication chirurgicale discutable,
surtout à long terme.
Les cardiomyopathies avec atteinte primitive du muscle
cardiaque
Plusieurs interventions ont été proposées :
✓ La résection partielle du VG, technique décrite par Batista,
a donné des résultats décevants.
✓ La cardiomyoplastie a également été abandonnée, car elle n’a
pas fait la preuve de son efficacité.
✓ La contention passive du VG dilaté peut être utile grâce au
programme ACORN, qui consiste à mettre simplement un filet
autour du cœur, sous circulation extracorporelle.
Dans la série de Konertz et al. (Circulation 2001), portant sur
27 patients, essentiellement en stade III de la NYHA avec un VG
dilaté à plus de 60 mm, la mortalité hospitalière était nulle et deux
décès sont survenus après un suivi moyen à un an. Par ailleurs,
on note une amélioration de la classe fonctionnelle qui passe du
stade III au stade II de la NYHA, ainsi qu’une augmentation de
la fraction d’éjection.
✓ La resynchronisation électrique épicardique : le rôle de la
stimulation multisite et de la resynchronisation ventriculaire a été
démontré. La voie épicardique concernait initialement des
patients destinés à une chirurgie cardiaque, avec sternotomie, dont
les endocardites sur sondes. Les patients sont également adressés pour échec ou contre-indication au cathétérisme du sinus coronaire (échecs techniques ou abords veineux impossibles).
La voie épicardique présente comme avantages la facilité de la
technique (100 % de succès d’implantation, temps moyen d’implantation d’une sonde VG = 14 ± 2,2 mm, temps de ventilation
= 2 ± 1,5 heures) et des résultats satisfaisants (distance électrique
= 190 ± 40 ms, seuils à 0,61 ± 0,4).
La Lettre du Cardiologue - n° 373 - mars 2004
N F O R M A T I O N S
Les suites postopératoires sont simples dans 92 % des cas. Les
complications sont le plus souvent minimes (hématomes et passages en TAC/FA). Il existe cepenant un risque d’insuffisance cardiaque et de décès par fibrillation ventriculaire. La durée moyenne
de séjour est habituellement courte (3,4 ± 2 jours à la Salpêtrière).
✓ La transplantation cardiaque : la figure 10 représente la
courbe connue de suivi après transplantation cardiaque avec une
moyenne de survie de 70 % à 5 ans et de 50 % à 10 ans.
Figure 10. Survie après transplantation cardiaque.
Klaus-Wenke (Circulation 2003) a évalué chez 72 patients l’intérêt d’une statine (la simvastatine) immédiatement après transplantation, afin de prévenir la maladie coronaire du greffon, avec
un suivi de 8 ans. La moyenne de survie était très supérieure à
celle des autres patients randomisés, qui étaient mis sous statine
4 ans après la transplantation. Ce travail constitue un réel espoir
pour les patients transplantés.
✓ Assistance circulatoire
Actuellement, grâce à l’assistance circulatoire, les trois quarts
des patients survivent jusqu’à la transplantation.
La première expérience d’assistance circulatoire de longue durée
a été faite avec le Lion Heart, qui est une assistance ventriculaire
gauche électrique, totalement implantable, réservée aux patients
au stade IV de la NYHA avec contre-indication à la transplantation cardiaque (la contre-indication majeure étant l’âge avancé
des patients). Le Lion Heart ne peut remplacer la transplantation
cardiaque (les deux courbes de survie sont totalement différentes),
mais il offre une alternative à des patients qui étaient jusque-là
condamnés.
CONCLUSION
Dans l’insuffisance cardiaque chronique, il est essentiel d’évaluer les patients à la recherche d’une cause éventuellement
traitable. En l’absence de cause curable, la solution de référence
reste la transplantation cardiaque. Actuellement, de nouvelles
techniques sont à évaluer : la contention passive du VG, la
stimulation multisite, qu’elle soit endocardique ou épicardique,
l’assistance circulatoire définitive.
N. Laredj,
Institut de cardiologie, CHU Pitié-Salpêtrière, Paris
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Traitement optimal
de l’insuffisance cardiaque
Le Pr M.C. Aumont et le Dr J.M. Juliard ont animé l’atelier sur
le traitement optimal de l’insuffisance cardiaque. En voici les
points forts.
L’éducation de l’insuffisant cardiaque est aussi indispensable que
celle du diabétique, et prend autant de temps. Elle est au mieux
assurée par une infirmière formée à cette pathologie.
Pour le traitement par inhibiteur de l’enzyme de conversion ou
bêtabloquant, il faut choisir les molécules utilisées dans les études,
aux doses cibles préconisées, ou à la plus forte dose tolérée.
En cas d’intolérance aux IEC, le candésartan a montré son efficacité par rapport au placebo dans l’étude CHARM. Le critère
de jugement principal était composite : mortalité cardiovasculaire et hospitalisations pour insuffisance cardiaque. Il faut être
particulièrement attentif si l’intolérance était une hypotension,
une insuffisance rénale ou une hyperkaliémie.
Lorsque l’insuffisance cardiaque reste symptomatique malgré un
traitement diurétique, IEC, bêtabloquant bien conduit, un traitement complémentaire par candésartan se discute (efficace dans
l’étude CHARM), au même titre que la spironolactone (efficace
dans l’insuffisance cardiaque sévère, étude RALES).
M.C. Aumont,
service de cardiologie, hôpital Bichat, Paris
Paramètres échographiques
de la diastole
en insuffisance cardiaque
(M. Peltier, P. Cristofini)
1. L’analyse porte systématiquement sur :
✓ l’aspect du flux mitral (doppler pulsé en quatre cavités au point
de coaptation des feuillets mitraux),
✓ celui du flux veineux pulmonaire (doppler pulsé en cinq cavités à l’abouchement de la veine pulmonaire),
✓ la vitesse de remplissage protodiastolique (Vp en doppler couleur TM en déplaçant la ligne de base vers le haut),
✓ la vitesse de l’onde Ea (en doppler tissulaire à l’anneau mitral).
On distingue un flux mitral normal d’un flux pseudo-normal par
la manœuvre de Valsalva (E/A > 1 devient E/A < 1 pendant le
Valsalva, en cas de flux pseudo-normal, donc de suspicion de
pressions de remplissage élevées).
2. Sont en faveur d’un trouble de relaxation :
✓ une Vmax de l’onde Ea (doppler tissulaire) : < 8 cm/s,
✓ une Vp (TM couleur) < 45 cm/s.
3. Sont en faveur de pressions de remplissage VG élevées :
✓ la non-diminution de l’onde A mitrale lors de la manœuvre de
Valsalva,
10
✓ une augmentation en durée (supérieure à celle de A mitrale) et
amplitude (> 35 cm/s) de l’onde a pulmonaire,
✓ un rapport S/D < 1 sur le flux veineux pulmonaire.
4. Les paramètres combinés sont plus fiables pour évaluer les
pressions de remplissage, car ils s’affranchissent théoriquement
de la précharge (E /Vp > 2, E/Ea > 10) et sont en faveur de pressions élevées.
5. Ainsi, on peut distinguer :
✓ une anomalie de la relaxation avec pressions normales
(stade 1) : E/A < 1, S/D > 1, Ea < 8 cm/s ;
✓ une anomalie de la relaxation avec augmentation des pressions
(stade 2) : E/A > 1, Valsalva +, S/D < 1, E / Vp > 2, E/Ea > 10 ;
✓ une anomalie de compliance (stade 3) : E/A > 2, S/D < 1,
a pulm > 35 cm/s, a pulm > A mit (sec), E / Vp > 2, E/Ea > 10.
M. Peltier, service de cardiologie, hôpital Sud, Amiens
Troubles du rythme
dans l’insuffisance cardiaque
(R. Frank)
Le Dr R. Frank (hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris) a animé l’atelier
sur les troubles du rythme dans l’insuffisance cardiaque. Il a rappelé que l’arythmie la plus fréquente dans l’insuffisance cardiaque
était la fibrillation auriculaire (FA) : celle-ci augmente la symptomatologie, de même que la mortalité. Le maintien d’un rythme
sinusal est souhaitable, même au prix de chocs électriques itératifs, car la systole auriculaire joue un rôle d’autant plus important qu’il existe une dysfonction ventriculaire gauche. L’amiodarone est le seul traitement préventif antiarythmique autorisé.
Lorsque la FA est chronique, le ralentissement de la fréquence
ventriculaire repose sur les digitaliques, les bêtabloquants, certains anticalciques comme le diltiazem ou le vérapamil, et l’amiodarone. Le traitement par antivitamine K doit être largement
prescrit. L’ablation par radiofréquence de la jonction auriculoventriculaire précédée de l’implantation d’un stimulateur cardiaque s’impose si la fréquence ventriculaire n’est pas contrôlée
par les médicaments.
Réadaptation cardiaque
(Ph. Meurin, M.C. Iliou)
La tolérance à l’effort est un des facteurs pronostiques importants
dans l’insuffisance cardiaque. Or, les capacités d’effort ne sont
corrélées ni à la fraction d’éjection ventriculaire gauche ni à la
pression pulmonaire dans l’insuffisance cardiaque. Parmi les facteurs qui limitent la tolérance à l’effort, on retrouve le cœur, le
muscle et le poumon.
La Lettre du Cardiologue - n° 373 - mars 2004
I
Le cœur de l’insuffisant cardiaque se caractérise par une réserve
chronotrope basse, une élévation de la fréquence au repos (catécholamines) et une élévation insuffisante du débit à l’effort. L’entraînement physique permet d’augmenter le débit cardiaque à l’effort (surtout par amélioration de la réserve chronotrope et baisse
de la post-charge) et d’améliorer le profil neuro-hormonal avec
diminution des taux plasmatiques de rénine, noradrénaline et
endothéline, se traduisant par une amélioration de la variabilité
sinusale.
Le facteur musculaire est également limitant : les muscles des
patients insuffisants cardiaques sont modifiés, voire atrophiés,
comme conséquence de la diminution du débit musculaire d’effort et d’une modification de la qualité des muscles : mitochondries moins nombreuses, plus petites, pauvres en enzymes oxydatives (métabolisme anaérobie+++) et capillaires moins
nombreux. Le reconditionnement permet d’augmenter la masse
musculaire, d’améliorer la qualité du muscle en enzymes oxydatives et d’améliorer le débit sanguin local.
Enfin, l’insuffisance cardiaque se caractérise par des modifications respiratoires, par atteinte musculaire (diaphragme et
muscles accessoires), avec un syndrome restrictif (épanchement
pleural et alvéolaire, cardiomégalie), une augmentation de l’espace mort avec des zones mal perfusées, bien ventilées, une hyperréactivité bronchique et des altérations des chémorécepteurs carotidiens. En revanche, un entraînement spécifique des muscles
respiratoires permet une diminution de la sensation de dyspnée,
une augmentation de la VO2 et du test de marche six minutes.
La surveillance de l’entraînement physique peut se faire sur la
fréquence cardiaque au seuil “anaérobie” ou sur les critères de
dyspnée et fatigue en utilisant l’échelle de Borg. La détermination de la fréquence d’entraînement en endurance peut se faire
après une épreuve d’effort conventionnelle en utilisant la formule
de Karvonen, mais celle-ci ne prend pas en compte le niveau d’entraînement, les variations de réponses chronotropes des insuffi-
La Lettre du Cardiologue - n° 373 - mars 2004
N F O R M A T I O N S
sants cardiaques et les modifications liées au traitement bêtabloquant. L’estimation de la fréquence cardiaque au seuil lors d’une
épreuve d’effort avec analyse des gaz expirés est plus précise.
Différents protocoles d’entraînement peuvent être utilisés. Généralement, une phase d’échauffement musculo-tendineux et cardiaque précède l’entraînement proprement dit. L’entraînement
idéal se fait sur bicyclette ergométrique ou sur tapis ; ces techniques ont l’avantage d’être reproductibles et de permettre une
surveillance. L’entraînement en endurance rectangulaire durant
20 à 30 minutes est le plus couramment utilisé dans les études
qui ont démontré une amélioration fonctionnelle et une réduction
de la morbi-mortalité. Des protocoles en “intervalles” peuvent
également être proposés, mais ils nécessitent une adaptation technique particulière. Les autres activités physiques sont à considérer en fonction du stade de l’insuffisance cardiaque et des performances du sujet. La pratique du cyclisme n’est acceptée que
pour les patients en classe fonctionnelle I et II. Pour conseiller
les patients sur d’autres activités, il convient de savoir que, par
exemple, la marche à 3 km/h correspond à une dépense supérieure à 8 ml/kg/mn, alors que le jogging correspond à une
dépense supérieure à 20 ml/kg/mn.
La natation, même lente (25 m/mn), est généralement déconseillée, car elle augmente le retour veineux et élève la pression
capillaire du fait de l’immersion et correspond à un effort équivalent de 100 à 150 watts.
CONCLUSION
Le mode d’action de l’entraînement physique associe des effets
périphériques et centraux par une augmentation de la réserve chronotrope, une augmentation du volume d’éjection systolique et du
débit d’effort, et par une diminution des résistances périphériques
corrélée à la vasodilatation endothélium-dépendante.
Ph. Meurin, Villeneuve-Saint-Denis
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