Philosophie du soin : les enjeux psychiques de la relation de soin : Une approche psychanalytique Simone Korff-Sausse Fiche 3 : Ce texte a pour ambition de proposer une vision analytique de la relation de soin ou comment penser le soin pris entre l’objectivation scientifique de la maladie (savoir et savoir-faire) qui s’inscrit dans une généralité et la logique existentielle du malade qui s’inscrit dans sa singularité. Premier constat : La relation de soin est une relation de réciprocité instaurée dans une situation de dépendance qui entraine une asymétrie fondamentale. Alors que tout être humain tend à priori à une forme d’autonomie, la maladie a tendance à entraver cette autonomie, du fait de la régression vers plus de dépendance qu’elle entraine le plus souvent. Cette relation de dépendance peut évoluer vers une organisation médecin mlade perverse. Entre une action qui fait du bien et celle qui fait du mal la différence est parfois floue et mince (exemple bienfaisance et maltraitance des personnes fragiles dans le cadre du soin dans les institutions). La question est donc posée de l’éthique du bien et du mal dans la relation de soins. Que se cache-t-il réellement derrière le recours aux bonnes intentions proclamées des soignants ? Un mélange de - 1 compassion ? rejet ? mépris ? pitié ? pouvoir ? (cf l’ambivalence entre les obligations/incantations de bonne intentions liées à la fonction de soignant et le ressenti profond de ces mêmes soignants dans certaines situations de soin) La relation de soin mobilise aussi des mouvements agressifs de part et d’autre dont voici quelques exemples - Le corps malade inflige à l’autre un choc émotionnel qui peut être ressenti comme une forme de violence entrainant une blessure narcissique du soignant : le corps handicapé secoué de tremblements et de mouvements incontrôlés, un enfant qui crie et qui bave, ou qui simplement saute partout sans que les parents interviennent, un patient en fin de vie, décharné dégageant une odeur insoutenable .... Cela provoque quoi chez Vous ? mettre en quelques lignes Par ailleurs la dépendance secondaire à la maladie est source de bénéfice, souvent inavouables de part et d’autre. Pour le malade ce peut être les bénéfices secondaires mais pour le soignant ? Les liens de dépendance mutuelle sont investis qu’on le veuille ou non de valeur de plaisir et de déplaisir. - La passivité et la fragilité d’un malade peut éveiller chez l’autre des tendances sadiques. En effet sa faiblesse et sa vulnérabilité peuvent être une sorte de provocation, une incitation à l’agression Il est bien connu que les lieux de soins sont exposés aux dérives institutionnelles de cette nature et aux pratiques sadiques…. Le savoir conduit au pouvoir et le pouvoir conduit à l’élimination de l’autre pas forcement ni obligatoirement physique… mais plus volontiers psychique. (Repenser aux termes fréquemment utilisés pour définir certains malades qui ne nous font pas plaisir ce sont de l’avis de certains des « cortiqués ( ceux qui nous font plaisir ou décortiqués ( les autres)») 2 Il est donc important de prendre conscience de cette dimension agressive, parfois sadique qui est une composante permanente de la relation de soin. Un partage est-il possible ? Si l’on considère la relation de soin comme une relation de dépendance asymétrique, la question du partage se pose. dans quelle mesure puis je partager l’expérience de l’autre dans la mesure où son expérience est éloignée de la mienne ? puis je m’identifier à une expérience que je n’ai pas connue ? La notion d’empathie (voir sympathie) est le moyen de connaissance d’autrui au sein duquel l’affect tient une place particulière. En théorie, il s’agit de la capacité de ressentir et de comprendre ce qu’une autre personne ressent non par la compréhension rationnelle de la parole mais tout au contraire par un mélange d’affect de cognition et de métacognition. Pour cela il faut parfois (souvent) travailler sur ses propres tendances agressives Etre empathique est donc la capacité à partager de façon partielle, sectorielle mais réellement vécue l’expérience intérieure de l’autre en la ressentant. Ce n’est pas une fusion, un collage mais une identification passagère sans oublier qu’on reste soi même c’est donc la capacité à se mettre à la place de l’autre : cf l’angoisse d’une mère qui entend son enfant gémir sans pouvoir exprimer ce qu’il ressent. cette capacité n’est réellement possible que dans certaines conditions. Les origines de la relation de soin : des conceptions différentes La relation de soin a des origines primitives : l’empathie fait partie de notre patrimoine naturel - les études sur intersubjectivité innée du bébé avec son environnement humain montrent que le bébé a une attention précoce aux intentions et sentiments des autres 3 - le modèle de la réactivité postule par ailleurs que le sujet humain se constitue en miroir dans un lien de réciprocité. Ce lien est perturbé par la maladie et est mis à mal dans la relation soignante car il y a la difficulté à s’identifier au soignant peut entrainer de nombreux mécanismes de défense. En particulier il existe une tendance l’infantilisation du malade par son entourage. - Qu’en est-il du partage émotionnel dans la relation de soin ? Le corps malade subit une double perte : perte de ses propres repères temporo spatiaux mais aussi perte de la communauté de repères avec les autres SI la relation de soins concerne les deux protagonistes qu’en est-il du soignant ? Nous avons besoin de nos patients autant qu’ils ont besoin de nous : lequel des deux est donc le plus malade ? - A nous donc de faire le deuil de la guérison. - Soigner ce n’est pas seulement guérir l’autre mais aussi se soigner soimême : il faut donc se guérir de vouloir guérir (P Ricœur) - Qui se nourrit le plus dans la relation soignante ? - Le soignant dit volontiers être dévoré par l’autre mais n’est-ce pas lui qui se dévore lui-même ? Qu’est-ce que soigner ? Un enjeu qui fonde tous les autres - Une formation réactionnelle contre les pulsions sadiques ? (Freud) La formation réactionnelle ou contre investissement est un processus qui consiste à empêcher que les représentations ou désirs inacceptables dans le cadre du soin ne surgissent à la conscience en favorisant d’autres représentations qui viennent à la place des pensées interdites et ont pour fonction de les masquer Par le retournement en leur contraire ces motions destructrices se transforment en aptitudes opposés à savoir la compassion et la surprotection. 4 VOS AVIS SUR LA QUESTION A PARTIR DE VOS EXPERIENCES ? - 5