I N F O R M A T I O N S Insuffisance cardiaque : nouvelles donnes dans l’approche thérapeutique Amicale des cardiologues de Paris et de sa région a organisé à l’hôtel Royal Monceau une réunion sur ce thème. La première communication (Pr Diebold) a porté sur l’apport de l’échocardiographie dans l’insuffisance cardiaque ; le Pr Cohen-Solal a ensuite exposé les preuves récentes et les perspectives dans l’insuffisance cardiaque. L’ Le flux veineux pulmonaire (figure 4), et en particulier la durée de l’onde A pulmonaire sur l’onde A mitrale. Si ce rapport est supérieur à un, il signe des pressions de remplissage élevées. La veine cave inférieure avec le sniff test. Si la veine cave se collabe de plus de 50 % au cours de ce test, la POD est probablement basse. APPORT DE L’ÉCHOGRAPHIE DANS L’INSUFFISANCE CARDIAQUE DIASTOLIQUE EN PRATIQUE QUOTIDIENNE DE VILLE (Pr Diebold) On distingue deux types de dysfonction diastolique : la dysfonction diastolique pure, avec une fraction d’éjection conservée, et la dysfonction diastolique associée à une dysfonction systolique, de plus mauvais pronostic. La fonction diastolique est plus complexe à évaluer que la dysfonction systolique. Plusieurs indices sont utilisés. Il conviendra de les confronter afin d’obtenir une approche de la fonction diastolique du patient. Le flux transmitral (figure 1) : le rapport E sur A et le temps de décélération de l’onde E permettent de définir plusieurs profils. Ceux-ci ont une valeur pronostique. Le flux restrictif est défini par un rapport E/A supérieur à 2 ou compris entre 1 et 2 avec un temps de décélération inférieur à 125 ms. Ce type de flux est de mauvais pronostic. Au contraire, un flux non restrictif aura un rapport E/A compris entre 1 et 2 et un temps de décélération de l’onde E supérieur à 125 ms ou un rapport E/A inférieur à 1. Malgré sa grande valeur pronostique, cet indice est mal corrélé à la pression capillaire pulmonaire. Figure 1. Flux transmitral. Le TM couleur (figure 2) permet de calculer la vitesse de propagation du flux diastolique. Celui-ci est normal entre 50 et 100 cm/s. Le rapport E/Vp (sommet de l’onde E sur pente de propagation) est normal s’il est supérieur à 2. S’il est inférieur à 2, les pressions de remplissage sont élevées. Cet indice E/Vp est mieux corrélé à la pression capillaire pulmonaire. Le doppler pulsé à l’anneau (figure 3) avec le rapport E/Ea est également bien corrélé à la pression capillaire. Inférieur à 8, il est normal ; supérieur à 15, il est pathologique. La Lettre du Cardiologue - n° 371 - janvier 2004 Figure 2. Propagation du flux diastolique en TM couleur. 7 I N F O R M A T I O N S Figure 3. Doppler tissulaire de l’anneau mitral. prolol. À noter que la différence de mortalité commence à apparaître après 3 mois de traitement. Cette différence concerne aussi bien les décès par aggravation de l’insuffisance cardiaque que ceux par mort subite. Elle est notée quel que soit le sous-groupe. Des résultats similaires ont été observés avec le métoprolol et le carvédilol, soulignant l’intérêt majeur des bêtabloquants dans l’insuffisance cardiaque. Actuellement, la plupart des cliniciens instaurent d’abord les IEC, puis les bêtabloquants. L’étude CARMEN, réalisée chez des patients en stade 2 de la NYHA, a tenté de vérifier si cette attitude était fondée. Un premier groupe a reçu un placebo plus de l’énalapril, un deuxième groupe du carvédilol plus un placebo, et un troisième de l’énalapril plus du carvédilol. La tolérance est identique dans les trois groupes ; en revanche, l’association énalapril plus carvédilol donne de meilleurs résultats en termes de remodelage ventriculaire que les deux molécules utilisées séparément. Cette étude souligne l’intérêt d’associer bêtabloquants et IEC le plus rapidement possible dans le traitement de l’insuffisance cardiaque. Y a-t-il une différence entre les molécules proposées dans l’insuffisance cardiaque, ou s’agit-il d’un “effet classe” ? C’est à cette question que l’étude COMET tentera de répondre en comparant métoprolol et carvédilol. Les anti-aldostérones. Une étude a été réalisée avec l’éplérénone. Il s’agit d’un analogue de l’aldactone n’ayant pas d’effet sur l’axe glucocorticoïde, et donc n’ayant pas les effets indésirables de l’aldactone. L’étude compare l’éplérénone et un placebo. On note, dans le groupe éplérénone, une augmentation de la kaliémie et de la créatininémie, mais également une réduction de 15 % de la mortalité. On n’observait pas plus d’effets cliniques indésirables que sous placebo. Cette étude confirme, après l’étude RALES (qui avait montré une réduction de 35 % de la mortalité sous aldactone), l’intérêt de cette classe thérapeutique. Figure 4. Flux veineux pulmonaire. Il est important de rechercher systématiquement une insuffisance diastolique associée à l’insuffisance systolique du fait de son caractère péjoratif. La régression du caractère restrictif sous traitement est également un critère pronostique important. En effet, le pronostic de ce groupe de patients rejoint celui des nonrestrictifs. En conclusion, l’échocardiographie permet de faire le diagnostic de l’insuffisance cardiaque diastolique, d’en préciser le pronostic et d’aider à adapter la thérapeutique. PREUVES RÉCENTES ET PERSPECTIVES THÉRAPEUTIQUES DANS L’INSUFFISANCE CARDIAQUE (Pr Cohen-Solal) Les bêtabloquants. L’étude MERIT a évalué le bisoprolol en recrutant 4 000 patients insuffisants cardiaques avec une fraction d’éjection inférieure à 40 %. Les patients étaient randomisés entre le placebo et le métoprolol à la dose cible de 200 mg. À 21 mois, on note une réduction de mortalité de 34 % dans le groupe biso8 Les traitements non médicamenteux. L’étude COMPANION a comparé trois groupes : un premier groupe recevant un traitement médical optimal, un deuxième groupe un traitement médical plus pacemaker biventriculaire, et un troisième groupe un traitement médical + PM + défibrillateur ; 82 % des patients étaient en classe 3 de la NYHA. La resynchronisation diminue les hospitalisations de 18 %. Le défibrillateur diminue la mortalité. Les traitements adjuvants. Le rôle de l’anémie a récemment été étudié. Une étude a évalué l’EPO chez les insuffisants cardiaques, le but étant d’augmenter le transport en oxygène. Les sujets avaient une hémoglobine entre 10 g et 11,5 g, une FE supérieure à 40 %, et étaient randomisés entre EPO et placebo. Dans le groupe EPO, on note une augmentation de la fraction d’éjection, une diminution de la classe NYHA, une diminution de la mortalité et une diminution de la dose de diurétiques utilisée. Une deuxième étude comparant EPO et placebo a retrouvé une augmentation de la VO2 max. et des performances au test de marche de 6 minutes. Des essais de plus grande ampleur sont sur le point d’être entre■ pris, afin de confirmer ces résultats intéressants. G. Ducrocq, département de cardiologie médicale, institut de cardiologie, hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris La Lettre du Cardiologue - n° 371 - janvier 2004