Journal Identification = JPC Article Identification = 0218 Date: September 18, 2012 Time: 11:32 am
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De l’Agence franc¸aise du médicament à l’ANSM
décisionnaire qui doit rester séparée des agences de santé
et dépendre du gouvernement est le CEPS, le prix des
soins de santé pris en charge par l’assurance médicale
obligatoire étant le reflet d’une politique gouverne-
mentale et non un dû associé à la mise sur le marché d’un
produit de santé. Cependant Gilles Johanet, président du
CEPS se faisait récemment l’écho d’une volonté au sein
même du CEPS de communiquer avec la HAS «en toute
transparence avec le public »[11].
À l’étranger, des structures
et modes de fonctionnement
différents
Au vu des réformes conduites en France, il est pertinent
de considérer la manière dont les problématiques liées au
financement et la garantie d’indépendance sont gérées au-
delà de nos frontières. Or s’il est un bon exemple de pays
où l’action publique ne manque pas d’être scrutée par
les citoyens – les possibilités d’actions collectives n’étant
certainement pas étrangères à cette pression constante –,
c’est sans doute les États-Unis. Si cet équilibre des pou-
voirs est sujet à controverse, il n’en demeure pas moins
que les questions de transparence dans le financement
et les prises de décision de la Food and drug adminis-
tration (FDA) y sont abordées de manière sensiblement
différente.
Depuis 1938, chaque nouveau médicament doit rece-
voir l’approbation de l’agence américaine avant sa mise
sur le marché sur le territoire américain. Bien entendu,
nombre de réformes de cette administration se sont
depuis succédées, avec comme fil conducteur l’évaluation
de la balance bénéfices/risques du médicament, des pré-
cautions d’emploi et de la notice associée à chacun d’entre
eux, ainsi que l’inspection des établissements de fabrica-
tion et l’évaluation des méthodes de contrôle [12].
En 1992, le Prescription drug user fee act (PDFUA)
autorisa, et par la même occasion encadra de manière
très précise, la collecte de taxes et redevances auprès
des entreprises pharmaceutiques dès lors que celles-ci
soumirent un dossier d’autorisation de mise sur le mar-
ché d’un nouveau médicament. En contrepartie de cette
nouvelle méthode de financement, l’agence mit en place
une nouvelle procédure de soumission et d’évaluation des
dossiers, tout en s’engageant sur des objectifs d’efficacité
dans la revue des dossiers et la conduite du processus
aboutissant à la mise sur le marché de nouvelles spé-
cialités. Tous les cinq ans, le Congrès américain doit se
prononcer sur la reconduction ou non de cette disposi-
tion. En 2012 devrait donc être prolongé un mécanisme
permettant à la FDA de prévoir une part non négligeable
de son budget directement issu de l’industrie pharma-
ceutique. Ainsi pour l’année 2011, le montant total des
sommes prélevées via le PDFUA devait approcher les
700 millions de dollars, soit approximativement un quart
du budget de la FDA – la majeure partie de ce dernier
consistant en un budget fédéral [13].
Les décisions prises par la FDA suivent dans la
grande majorité des cas celles des comités d’experts,
chargés d’évaluer le rapport bénéfices/risques de chaque
nouvelle spécialité soumise, et de délivrer opinions et
recommandations. Ces experts scientifiques et médicaux
étant extérieurs à l’agence, leur indépendance scientifique
est assurée par la structure fédérale qui depuis longtemps
déjà a mis la prévention de conflits d’intérêts au cœur de
ses exigences, ces dernières ayant été encore renforcées
par une loi datant de juillet 2006. Ainsi chaque candidat
postulant à siéger dans l’un des comités se voit deman-
der de déclarer de manière publique ses propres liens
d’intérêts, et ceux de ses proches, avec l’industrie pharma-
ceutique. Une démarche que les États-Unis s’apprêtent à
généraliser avec l’adoption des dispositions du Sunshine
act, qui viennent à obliger l’ensemble des entreprises
pharmaceutiques travaillant avec des experts américains
à déclarer sur internet, et de manière publique, tous les
paiements et avantages sous toutes formes concédés à ces
mêmes experts. Les premières déclarations sont attendues
pour le début de l’année 2013, relatives à l’exercice 2012.
En Angleterre, l’approche est encore différente. Si
le Department of health chapeaute l’ensemble, l’agence
nationale en charge de la régulation des médicaments et
des dispositifs médicaux mis sur le marché anglais – Medi-
cine and healthcare products regulatory agency (MHRA) –
demeure cependant indépendant du célèbre NHS – Natio-
nal health service – qui a elle la mission d’organiser la
prise en charge des patients. Le mode de financement de
la MHRA reste basé sur un système de taxes payées par
l’industrie pharmaceutique. Une proximité nécessitant un
haut niveau d’exigence en termes de transparence, souli-
gné par exemple dans un rapport du Comité santé de la
Chambre des communes [14]. La nature et le montant de
ces taxes sont clairement indiqués sur le site du MHRA
[15], et il est affiché une attention toute particulière en
matière de déclaration publique des conflits d’intérêts, et
la capacité ou non que ceci confère à un expert indépen-
dant de siéger dans l’une des commissions.
En parallèle à ce processus, le National institute for
health and clinical excellence (NICE), rattaché au NHS,
se charge d’éditer des recommandations à destination des
professionnels de santé principalement – notons toute-
fois que bon nombre de ces recommandations sont aussi
déclinées dans une version «patients », démarche en
cohérence avec la volonté d’impliquer et de responsabili-
ser ce dernier (Enpower the patient) –, ainsi que de définir
des standards de qualité destinés à poser les bases de la
prise en charge du patient sur des critères d’efficacité,
de sécurité, mais aussi de coût. Ces dispositions ont un
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