ST. MICHAEL’S HOSPITAL Cardiologie UNIVERSITY OF TORONTO RAPPORT DE LA DIVISION DE CARDIOLOGIE S T. M I C H A E L ’ S H O S P I T A L , U N I V E R S I T É D E T O R O N T O Actualités scientifiques MC XVIII E CONGRÈS DE LA SOCIÉTÉ EUROPÉENNE DE CARDIOLOGIE, DU 25 AU 29 AOÛT 1996, BIRMINGHAM, ROYAUME-UNI Le rôle des bloqueurs des canaux calciques réducteurs de la fréquence cardiaque dans la prévention secondaire de l’infarctus du myocarde : hypertension, IM incomplet, traitement d’appoint post-thrombolyse Présenté par : WILLIAM E. BODEN, M.D. Rédigé et commenté par : A n a t o l y L a n g e r , M . D . Au cours des dernières années, les bloqueurs des canaux et la raison qui justifie leur emploi comme traitement calciques (BCC) ont retenu comme jamais auparavant l’at- d’appoint anti-ischémique après une thrombolyse. tention des médias et du public. Des allégations d’effets Innocuité et efficacité après un IM nocifs potentiels, d’innocuité douteuse, et des rapports de fréquence accrue d’événements cardiaques chez les patients souffrant d’hypertension 1 on créé un vent de panique et la controverse chez les médecins, et semé la confusion chez des millions de patients à travers le monde. Lors de sa présentation, le Dr Boden a comparé les effets Les travaux du Dr Boden, qui ont été présentés au cours de rencontres antérieures et qui sont fondés sur des données complètes tirées des essais DAVIT II2 et MDPIT3 portant sur les effets à long terme de ces agents chez les patients ayant subi un infarctus du myocarde incomplet, ont démontré l’effet thérapeutique du vérapamil ou du dil- pharmacologiques et cliniques des anticalciques de la tiazem. En effet, parmi un total de 936 patients, il a noté sous-classe des dihydropyridines à ceux de la sous-classe une réduction de 6 % (relative de 35 %) statistiquement des non-dihydropyridines (réducteurs de la fréquence car- significative (p = 0,0068; intervalle de confiance à 95 % diaque) ; démontré le bien fondé de l’utilisation des inhibi- = 0,42-0,89; risque relatif = 0,61) du taux d’événements teurs des canaux calciques chez des sous-groupes choisis cardiaques. Bien qu’il s’agisse d’une analyse rétrospective de patients cardiaques; et souligné le rôle des bloqueurs à caractère ad hoc, ces données sont les seules sur des canaux calciques réducteurs de la fréquence cardiaque l’utilisation des BCC réducteurs de la fréquence cardiaque Division de cardiologie Luigi Casella, M.D. Robert J. Chisholm, M.D. Paul Dorian, M.D. Michael R. Freeman, M.D. Shaun Goodman, M.D. Robert J. Howard, M.D. Anatoly Langer, M.D. (rédacteur) Gordon W. Moe, M.D. Juan Carlos Monge, M.D. David Newman, M.D. Trevor I. Robinson, M.D. Duncan J. Stewart, M.D. (chef) Bradley H. Strauss, M.D. Kenneth R. Watson, M.D. St. Michael’s Hospital 30 Bond St., suite 701A Toronto, Ontario M5B 1W8 Télécopieur : (416) 864-5330 Les opinions exprimées sont exclusivement celles des membres de la division. Publié grâce à des subventions sans restrictions. chez les patients ayant subi un infarctus du myocarde Méta-analyse des données sur l’IM incomplet incomplet, et suggèrent que ces agents pourraient réduire Dans le cadre d’une analyse connexe mais indépen- la mortalité d’origine cardiaque et les IM non mortels. dante, on6 a démontré à partir des données cumulées un Un réduction de 6 % du taux absolu d’événements cardiaques se traduirait par 43 000 décès d’origine cardiaque ou IM non mortels de moins aux États-Unis sur les 750 000 IM aigus incomplets qui surviennent chaque effet bénéfique notable des BCC réducteurs de la fréquence cardiaque, comparativement aux bêtabloquants, chez des patients ayant subi un IM incomplet (figure 1). année. Ces données, avec celles issues d’autres analyses et En outre, une analyse récente des données sur 5 677 survivants d’un IM (à onde Q ou incomplet) répartis dans trois essais randomisés – DAVIT 14, DAVIT II2 ET MDPIT3 – a révélé qu’il n’y avait aucune augmentation du taux essais 7-10, sont des constatations probantes de l’innocuité des BCC réducteurs de la fréquence cardiaque En outre, ils mettent en relief l’importance de bien différencier les BCC qui sont associés à une activation neurohormonale et d’événements cardiaques à long terme après une période de suivi de 12 à 18 mois5. Plus particulièrement, l’usage du vérapamil ou du diltiazem était associé à une réduction globale des événement cardiaques de 12 % comparativement au placebo (p = 0,35; intervalle de confiance à à une augmentation de la fréquence cardiaque, comme les dihydropyridines d’action brève, qui sont à éviter chez les patients présentant une cardiopathie, de ceux qui réduisent la fréquence cardiaque, et par conséquent ont un effet cardioprotecteur chez certains patients ayant subi 95 % = 0,77-0,99; indice de risque de Cox = 0,88). Des analyses subséquentes ont révélé des résultats un IM. Le D r Boden a poursuivi sa présentation en émet- semblables chez 1 325 hypertendus ayant subi un IM. Les événements cardiaques à long terme ont été réduits de 27 % dans le groupe placebo comparativement à 21 % tant l’hypothèse selon laquelle l’administration postthrombolyse de BCC réduirait la fréquence cumulative de dans le groupe BCC réducteurs de la fréquence cardiaque récidive d’infarctus et de l’ischémie réfractaire à long (p = 0,004). Après ajustement des principales covariantes terme, étant donné que l’IM incomplet et l’IM à onde Q à l’aide du modèle des hasards proportionnels de Cox, traités par thrombolyse présentent tous deux des caracté- comme l’âge, le sexe, le diabète, ou un antécédent d’IM, on ristiques physiopathologiques semblables, comme la reper- a remarqué une réduction globale de 24 % des taux cumu- fusion précoce, des signes cliniques d’« infarcissement latifs de décès ou d’IM chez les hypertendus ayant subi un incomplet » et une incidence élevée de complications IM et qui avaient été répartis aléatoirement pour recevoir ischémiques récidivantes. Cette hypothèse est actuellement du diltiazem ou du vérapamil, en comparaison à un vérifiée dans le cadre de l’essai INTERCEPT (« Incomplete placebo (indice de risque = 0,76; intervalle de confiance à Infarction Trial of European Research Collaborators 95 % = 0,61-0,95). Evaluating Prognosis Post Thrombolysis »)11. Cardiologie Actualités scientifiques Figure 1 : Risque relatif (Intervalle de confiance à 95 %) BÊTA-BLOQUANTS MORTALITÉ Norvégien (440) BHAT (873) MIAMI (1102) Données groupées (2415) RÉCIDIVE D’INFARCTUS Norvégien (440) BHAT (873) Données groupées (1313) MORTALITÉ + RÉCIDIVE D’INFARCTUS Norvégien (440) BHAT (873) Données groupées (1313) INHIBITEURS CA MORTALITÉ DRS (576) MDPIT (634) DAVIT-I (306) DAVIT-II (302) Données groupées (1818) RÉCIDIVE D’INFARCTUS DRS (576) MDPIT (634) DAVIT-II (302) Données groupées (1512) MORTALITÉ + RÉCIDIVE D’INFARCTUS DRS (576) MDPIT (634) DAVIT-II (302) Données groupées (1512) 0 0,5 1,5 1 Meilleur traitement 2 2,5 3 3,5 Meilleure maîtrise À ce jour, plus de 500 patients sur un total prévu de 920 Innocuité et efficacité du traitement après thrombolyse ont été randomisés. INTERCEPT représente le premier INTERCEPT est un essai multicentrique, randomisé, à double insu, contrôlé contre placebo et avec groupe parallèle, comparant le diltiazem d’action prolongé (300 mg/j) avec de l’aspirine (160 mg/j) à l’aspirine seule chez des patients ne présentant pas d’insuffisance cardiaque ou de dysfonction ventriculaire gauche sérieuse dans les 36 à 96 essai prospectif important à long terme sur les BCC comme traitement d’appoint post-thrombolyse des patients ayant subi un IM aigu avec élévation du segment ST. L’objectif principal de l’essai est d’évaluer à l’insu l’effet du traitement sur la fréquence cumulative pendant 6 mois heures du traitement thrombolytique précoce. Le recrute- de la morbi-mortalité incluant les décès d’origine car- ment actif a débuté en septembre 1994 dans 61 centres au diaque, les infarctus non mortels récidivants et les Royaume-Uni, en Belgique, aux Pays-Bas et au Danemark. ischémies réfractaires aux traitements. Cardiologie Actualités scientifiques Conclusion Les données actuellement disponibles portent à croire à un effet bénéfique notable de l’administration des bloqueurs des canaux calciques réducteurs de la fréquence cardiaque chez certains patients ayant survécu à un infarctus du myocarde, comme ceux ayant subi un IM incomplet. Outre l’efficacité évidente des BCC réducteurs de la fréquence cardiaque, il n’y a plus de doute quant à l’innocuité à long terme de ces médicaments chez les patients souffrant d’hypertension ou de coronaropathie stable. D’autres données sont attendues d’essais cliniques prospectifs importants actuellement en cours. Références 1. Psaty BM, Heckbert SR, Koepsell TD, Sisovick DS, Raghunathan TE, Weiss NS, Rosendaal FR, Lemaitre RN, Smith NL, Wahl PW, Wagner EH, Furger CD. The risk of myocardial infarction associated with antihypertensive drug therapies. JAMA 1995;274:620-625. 2. The Danish Study Group on Verapamil in Myocardial Infarction. 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Imprimé au Canada. Tout recours à un traitement thérapeutique, décrit ou mentionné dans Actualités scientifiques – Cardiologie, doit être conforme aux renseignements d’ordonnance au Canada. Snell Communication Médicale Inc. se consacre à l’avancement de l’éducation médicale continue de niveau supérieur. 120-25-F