בס"ד ' VAERA Pourquoi et comment faut-il prier ? (Par Rav Yitshak Assuli) Vaera : Changer de nature (Par Dan Dvach) À chacun sa avoda zara (Par Rav Gabriel Haccoun) Le danger de la fin de l'exil (Par Yossef Aflalo) Distinction et libération (Par Rav Emmanuel Bensimon) Le bien dans le mal (Par Rav Yonatan Chocron) Doit-on rallumer les bougies de Chabbat si elles se sont éteintes ? (Par Rav Yoel Hattab) Espace Torah remercie Léa Marciano pour son dévouement et son 1 ' Pourquoi et comment faut-il prier ? (Par Rav Yitshak Assuli) Dans la paracha de Vaéra, nous voyons qu'Hachem est apparu à Moché Rabbénou, et qu'il lui a dit: "Je suis le Dieu de tes pères, Avraham, Yitshak et Yaacov, et J'ai conclu avec eux une alliance disant que Je les amènerais en Erets Kénaane (c'est-à-dire en Erets Israël). Et du fait que j'ai écouté les cris, la souffrance, la misère des Bené Israël, asservis par les Égyptiens, Je me suis rappelé tout-à-coup de cette alliance. C'est pourquoi tu vas dire aux Bené Israël que Je suis Dieu, et que J'ai l'intention de les faire sortir d'Egypte". Ici, les commentateurs demandent: Pourquoi Hachem a-t-Il attendu que les Bené Israël crient pour les délivrer, alors qu'Il avait déjà promis aux patriarches qu'Il les libérerait et les amènerait en Erets Israël ? Pourquoi attendre leur prière ? Pourquoi les faire souffrir tellement ? Pourquoi ne pas accomplir directement ce qui a été promis aux patriarches ? Pourquoi fallait-il la promesse ET la prière ? Parfois, nous avons l'impression que lorsque nous prions, c'est parce que nous voulons quelque part plus que ce qui nous revient. On a l'impression que ce qu'on demande n'aurait normalement pas dû nous être accordé, et qu'on va essayer de l'obtenir quandmême grâce à la prière. Mais le Ram'hal nous dit que cette manière de penser n'est pas juste, qu'il ne faut pas penser ainsi. Que parfois, Hachem a préparé une abondance, a déjà préparé la berakha pour nous; mais que sans tefila, nous ne pouvons pas obtenir ce qu'Il voulait nous donner. C'est ainsi qu'Il a créé le monde, comme nous le voyons avec Adam Harishone, qui, lorsqu'il a ouvert les yeux, lorsqu'il venait à peine d'être créé, a vu un monde inachevé et a alors prié (c'est d'ailleurs pour cela, parce que le premier homme a prié, que la prière n'est pas quelque chose de spécifiquement juif, mais quelque chose d'universel). Et Hachem a volontairement créé le monde dans cet état-là, pour que l'homme puisse l'améliorer par sa prière. En fait, tout existait déjà potentiellement, mais la tefila était indispensable pour concrétiser tout ce potentiel, pour le faire exister dans la réalité (pour faire pousser la pelouse, les arbres etc...) La prière, c'est ce qui va nous permettre d'obtenir même le strict minimum. Sans tefila, même cela on n'obtient pas. Hachem avait certes fait une promesse aux patriarches. Mais il fallait la prière des Bené Israël pour que cette promesse se réalise. Hachem a créé le monde inachevé, et a décidé qu'Il le terminerait suite à la prière de l'homme. Lorsque l'homme demande une chose, il apprécie lorsqu'on la lui donne. S'il 2 ' la reçoit sans avoir rien demandé, il ne l'appréciera pas. C'est pourquoi Hachem veut qu'on Lui demande, avant de nous donner. D'Adam Harishone et des Bené Israël en Égypte, nous pouvons apprendre que pour obtenir même notre dû, Mme ce qu'Hachem a déjà préparé pour nous, il faut obligatoirement prier. Cela est comparable au fait de devoir remonter sa montre. De nos jours, les montres sont certes automatiques. Mais à l'époque, il fallait chaque jour tourner le bouton de la montre, pour qu'elle puisse continuer à fonctionner. La prière, c'est ce bouton qui va permettre à la montre de fonctionner. C'est ce qui va permettre à l’abondance de venir. On ne peut rien obtenir si on ne le demande pas. L'intérêt de la tefila est aussi, évidemment, d'avoir un lien avec Dieu. Il y a des gens qui, lorsqu'ils prient Dieu, ne Lui demandent que des petites choses. C'est une erreur, car Hachem peut tout, et Il a tout. Hachem a créé le monde dans l'intention de nous faire du bien. Il est bon, et veut donc faire du bien. Il est parfait et, par conséquent, lorsqu'il va nous donner quelque chose, Il va le faire de la manière la plus parfaite. Sa donation sera parfaite. Mais si nous ne croyons pas en cela, et que nous pensons ne pas mériter qu'Il nous donne quelque-chose, alors nous nous limitons dans nos demandes. Or c'est l'homme qui crée le récipient. Par conséquent, s'il fait un petite demande (exemple: "Je veux refaire ma chambre"), il recevra une petite chose. Et s'il en fait une grande (exemple: Je veux acheter un appartement), il recevra une grande chose. L'homme créé le récipient, et Dieu le remplit. Certains créent un récipient petit comme un verre, d'autres un récipient plus grand comme une bouteille... Mais dans tous les cas, Hachem remplit ce qu'on Lui apporte. Certains recevront beaucoup, et d'autres moins, chacun selon le récipient qu'il aura préparé, chacun selon la tefila qu'il aura formulée. Si je sais qu'Hachem est capable de tout et que j'y crois, alors pourquoi ne pas Lui demander beaucoup ? Hachem va réagir selon l'espoir que je mets en Lui. Pour essayer d'illustrer tout cela, voici une histoire: Il y a environ 250 ans, le Chaagat Aryé voyageait en direction de Metz, ville où il allait plus tard devenir Rabbin. Avant qu'il quitte sa ville, une dame âgée lui apporta trois 'halot, et les lui donna. Le Rav en fut très content, et la bénit en lui souhaitant que, par le mérite des trois 'halot qu'elle lui a données, Hachem lui donne les moyens de construire trois Synagogues: deux dans la ville où elle habitait, et une en Erets Israël. Cette femme réussi à faire construire les deux Synagogues dans sa ville, et il lui restait encore de l'argent. Mais elle allait presque mourir. Elle alla donc voir le Rav, et lui dit: "Je vais bientôt mourir. Prenez cet argent, et donnez-le à la tsédaka!". Le Rav lui demanda d'où elle avait cet argent, et elle lui raconta qu'une fois, le Chaagat Aryé lui avait fait une berakha, dans laquelle il lui avait souhaité d'avoir de quoi construire trois Synagogues: deux ici, et une en Israël. Le Rav lui répondit: "Tu as reçu une berakha du Chaagat Aryé ? C'est un Rav extraordinaire ! Donc s'il t'a dit que tu vas construire une Synagogue en Israël, c'est que tu vas avoir la vie et les moyens de le faire! Donc même si tu penses être vieille et ne pas avoir la force de le faire, vas en Israël et construit la Synagogue !". Et effectivement, la vie de cette femme s'est prolongée, et elle a réussi à aller en Israël et construire la Synagogue. La moralité de cette histoire, c'est que quand on veut quelque-chose et qu'on y croit, ça marche ! Par contre, juste après, on nous raconte qu'un homme ayant entendu cette histoire est parti chez le Chaagat Aryé, et lui a dit: "Rav, moi aussi je voudrais une berakha 3 ' !". Comme c'était un fermier, et que sa vache (avec laquelle il gagnait sa parnassa) vieillissait, il demanda: "Rav, faites en sorte que la vie de ma vache se prolonge!". Le Rav lui souhaita que la vie de sa vache soit prolongée, mais également que la sienne (la vie du fermier) le soit. Ainsi, il a voulu lui montrer que sa demande (que la vie de sa vieille vache soit prolongée) n'en était pas une. Car il aurait pu demander même dix vaches! Pourquoi donc voir les choses en petit ? Pourquoi ne pas les voir en grand ? On apprend de là qu'en fait, il faut tout demander à Dieu. Parfois, on n'ose pas faire cela, parce qu'on ne se sent pas assez méritants. Mais en vérité, Dieu est prêt à tout donner, mais Il attend que nous le Lui demandions. Lorsqu'on est dans la misère et dans la souffrance, on demande. Contrairement au cas où on n'a pas de besoin particulier. Et c'est peut-être pour cela qu'Hachem a attendu que les Bené Israël souffrent en Égypte. Car, durant toutes ces longues années d'esclavage, il est possible que certains Bené Israël se soient habitués à leur situation au point de ne pas vouloir qu'elle change, et donc de ne pas demander à Dieu autre chose que ce qu'ils avaient déjà. Celui qui sent bien et épanoui dans sa situation ne va pas demander à Dieu d'améliorer celle-ci. Il ne sait pas qu'en fait, il peut y avoir un monde meilleur. Nous-mêmes n'imaginons pas ce que serait le monde avec le Machia'h. Et en Israël, on ne prie pas tellement pour le manque de pluie, car on n'y est pas assez sensible. On n'est pas spécialement dérangé par la situation actuelle, et on ne cherche donc pas à la changer. Une fois, le Baal Chem Tov a été reçu par un homme pauvre. Il s'est installé chez lui pendant une semaine, à tel point qu'à un moment, le pauvre n'avait plus de quoi le nourrir et a emprunté de l'argent à ses voisins. Mais le Rav n'avait pas l'intention de partir de sitôt... Il est resté chez le pauvre plus d'un mois, et celui-ci empruntait de l'argent à toute la ville pour pouvoir le nourrir... Jusqu'à ce qu'à un moment, le président de la communauté est allé en personne voir le Baal Chem Tov, et lui dire: "Excusez-moi, mais votre hôte n'a pas assez d'argent. Il en emprunte à tout le monde et s'endette... Par conséquent, pourriez-vous quitter sa maison ?". Le Baal Chem Tov répondit: "Mon fils, je connais très bien la situation financière de cet homme, et c'est justement pour cela que je suis venu chez lui. Car je sais que dans le Ciel, on a décidé qu'il aurait un grand trésor. Mais comme il ne le demande pas, il ne le reçoit pas. J'ai donc voulu le mettre dans une situation où il va prier Hachem de l'aider financièrement, pour qu'il puisse recevoir ce trésor. C'est pourquoi j'ai fait en sorte qu'il s'endette. Car lorsqu'il n'aura pas de quoi rembourser ses dettes, il va prier Hachem de lui venir en aide! Et il recevra alors le trésor qui l'attend...". De cette histoire, nous apprenons non seulement que pour recevoir, il faut demander (comme nous l'avons déjà vu précédemment). Mais aussi que ce n'est que lorsqu'on ressent un manque qu'on prie. Lorsqu'on a besoin d'une chose, demandons-là! Demandons le maximum, sans se limiter! Demandons non seulement un travail, mais aussi un bon travail ! Demandons la richesse non seulement pour nous-mêmes (pour subvenir à nos propres besoins) mais aussi pour les autres (pour pouvoir les aider) ! Il faut voir large, sinon on reste petit... 4 ' Vaera : Changer de nature (Par Dan Dvach) Inspiré de textes du RaBaSH, Rabbi Baroukh Shalom Ashlag זצ"ל, fils du Baal HaSoulam זצ"ל A la fin de la parasha précédente, les hébreux subissent de très fortes pressions tant du point de vue physique que psychologique, de la part de Pharaon. En effet Moshé et Aaron se sont présentés à ce dernier pour demander qu’il laisse les hébreux servir l’Eternel dans le désert. PHARAON PUNIT LES HEBREUX Pharaon non seulement refuse, mais il décide de durcir leurs conditions de travail. Il ne leur fournira plus la paille nécessaire à la fabrication des tuiles. Dès lors, pressés par leurs gardiens, les hébreux doivent fabriquer le même quota de tuiles, mais se débrouiller par eux-mêmes pour trouver de la paille. Dès lors c’est la course effrénée. De jour comme de nuit il faut chercher la paille. La paille devient pour eux une obsession. La vie devient un enfer. L’espoir qu’avait suscité l’annonce par Moshé et Aaron de leur future délivrance, s’évanouit. Ce n’est pas pharaon le responsable. Les responsables tout désignés de leur malheur ce sont Moshé et Aaron. Le peuple s’en prend à eux. Moshé va se tourner vers D. (Shemot 5, 22-23). LES DOUTES DE MOSHE «…Moshé revient vers l’Eternel et lui dit : ‘Pour quel raison m’as-Tu envoyé ? Depuis (MéAz) que je suis venu chez Pharaon en Ton nom, cela a été néfaste pour ce peuple et de délivrance, il n’y en a pas eu. ». ה ויאמר אדני למה הר־-ו-ה-וישב משה אל י עתה לעם הזה למה זה שלחתני: ומאז באתי אל פרעה לדבר בשמך הרע לעם הזה והצל לא הצלת את עמך: Cette attitude de Moshé est problématique. Comment a-t-il pu, lui, le berger fidèle, douter de la conduite de D. ? Même si les faits sont là, comment peut-il penser que D. a projeté tous ces évènements pour le malheur des enfants de Ya'akov ? A cela le Sifté Haïm répond que Moshé n’a pas voulu mettre en doute la conduite divine, ח"ו. Il a questionné le Créateur, comme le ferait un étudiant, dans le but d’apprendre de la conduite de son maître. Cependant Moshé reconnait lui-même qu’il a commis une faute vis-à-vis de D. comme nous l’enseigne le Midrash (Shemot Rabba 23, 3) : « Ainsi s’est exprimé Moshé devant le Saint ב"ה: ‘Je sais que j’ai fauté vis-à-vis de Toi par le ‘Depuis’(BéAz), comme il est écrit : ‘Depuis (MéAz) que je suis venu chez Pharaon’. » ּומֵ ָאז ּבָאתִ י:) כג, ׁשֶ ּנֶאֱ מַ ר (שמות ה, יֹודֵ עַ אֲ נִי ׁשֶ חָ טָ אתִ י לְפָ נֶיָך ּבְָאז,ּכְָך ָאמַ ר מׁשֶ ה לִפְ נֵי הַ ּקָ דֹוׁש ּבָרּוְך הּוא «אֶ ל ּפַ ְרעֹו La teneur de cette faute selon le Sifté Haim, a été que contrairement à Avraham, qui lors 5 ' du sacrifice de son fils, n’a posé de question à D. qu’après être allé au bout de l’acte ordonné par D., Moshé L’a questionné avant même de parvenir au bout de l’acte pour lequel D. l’avait missionné. La faute vint du fait qu’il y a lieu de craindre que la question posée n’ait pas pour origine le désir de comprendre la conduite de D., mais qu’elle ait été provoquée par un doute sur cette conduite (Sifté Haïm Moadim II p.419). MOSHE S’INTERROGE SUR LA CONDUITE DE D. Il reste encore à résoudre le point le plus délicat, c'est-à-dire le sens de la conduite de D. autrement dit la réponse à la question de Moshé. Pour quelle raison D. fait-il souffrir son peuple aussi durement avant d’aborder le processus de la délivrance ? Pour y répondre nous allons reprendre le récit de cette parasha sous un angle différent. Lorsque Moshé est venu annoncer leur future délivrance au peuple hébreu, tous ont cru aux paroles de Moshé. Ils ont eu foi dans le fait que D. avait vu leur souffrance, et qu’Il avait envoyé Moshé pour les sauver. Dès lors, ils ont en quelque sorte, fait le vœu de Lui obéir et de se soumettre à ses injonctions (Shemot 4, 31). Le peuple eut confiance. Ils comprirent que l’Eternel se souvenait des enfants d’Israël et qu’Il avait vu leur souffrance. Alors ils s’agenouillèrent et se prosternèrent. (ה את בני ישראל וכי ראה את ענים ויקדו וישתחוו-ו-ה-לא) ויאמן העם וישמעו כי פקד י: En quoi consistent ces injonctions ? Il s’agit de servir D., c'est-à-dire d’agir pour son honneur (LiKhevodo), sans chercher à en tirer un quelconque intérêt (Lishma). Mais après plus de deux siècles vécus au milieu des égyptiens, le peuple le plus dépravé du monde, à n’écouter que leur désirs et leur ego, la tâche des hébreux s’avèra difficile. D’autant que, comme l’enseigne Rabbi Akiva la mitzva centrale de la Torah est d’aimer son prochain comme soi-même. Or cette injonction est à vrai dire, totalement irréaliste. Comment un homme peut-il en aimer un autre comme s’il s’agissait de lui-même ? Il est possible, à la limite, de trouver cela chez une mère ou un père vis à vis de leur enfant, mais vis-à-vis d’un voisin même s’il est juif, certainement pas ! Pourtant si l’on doit servir D., il nous faut parvenir à accomplir cette mitzva. C’est vrai qu’à l’époque de leur séjour en l’Égypte ils n’avaient pas encore reçu la Torah. Mais Moshé avait, quant à lui reçu l’enseignement d’Avraham. Et Avraham avait sans aucun doute accompli ce commandement, et il l’avait transmis à ses descendants. Ainsi donc, la perspective de la délivrance aidant, tout le monde se lance éperdument dans cette tâche, d’écarter son égoïsme pour s’occuper de l’autre. Mais voilà que Pharaon, autrement dit le Yetser Hara’ s’y oppose. « Tu dois savoir mon fils, que Pharaon le roi d’Égypte est vraiment le Yetser Hara’. » (Iguérot Moussar HaRambam Livno Rabbi Avraham). ויש לך בני לדעת כי פרעה מלך מצרים הוא יצר הרע באמת.En effet, le fait d’abandonner ses habitudes égoïstes pour se mettre dans la peau d’une personne dévouée aux autres, est une perspective qui ne réjouit guère le Yetser Hara’. Et comme celui-ci règne en maître sur nous depuis longtemps, il va rapidement s’arranger pour épuiser notre énergie, c'est-à-dire ce désir de changer. Alors il nous prive de paille, c'est-à-dire, de la possibilité de fabriquer des briques solides, susceptibles de nous aider à construire cette nouvelle vie.On aura beau courir à droite et à gauche, on ne trouvera pas de paille, le corps s’épuise, le désir de Servir D. s’estompe. En y regardant de près, lorsqu’on était prisonnier de Pharaon, notre Yetser Hara’, 6 ' la vie était plus facile, plus douce. Elle consistait, à l’instar de l’égyptien, à satisfaire les désirs du corps. « Tandis que l’égyptien, c’est tout entier le corps » (id.) ומצרים בכללו הוא הגוף Il est vrai que les désirs du corps et de l’esprit croissent sans cesse et qu’ils nous asservissent en nous poussant à rechercher des plaisirs toujours plus forts. Mais cette servitude cependant, est une prison dorée à côté de la servitude que nous imposent les mitzvot ! Les hébreux arrivent donc à la conclusion que ce nouveau service n’est pas fait pour eux. Si élevé soit-il, puisqu’en fin de compte il doit leur permettre de se libérer du joug de la matérialité, ils se sentent incapables de l’accomplir. Nous pouvons à présent saisir le sens de la question que pose Moshé au Créateur : ‘’ Les Hébreux ont appris qu’ils devaient faire Ta volonté et Te servir avec tout leur cœur (Lishma). Ils pensaient que la force pour le faire leur viendrait naturellement. Au lieu de cela, la situation est totalement inversée, ils y ont perdu toutes leurs forces ! Ils ont crié vers moi : ‘Quel bien nous fait ta promesse que nous sortirons de cet Exil ? Certes, nous avons bien compris que c’est notre conscience qui est en exil. C’est elle qui est prisonnière de Pharaon et des égyptiens, c'est-à-dire des désirs de notre corps. Mais le moyen que tu proposes pour en sortir a épuisé toutes nos forces. Nous sommes arrivés à la conclusion que le projet grandiose que tu proposes, qui est d’échapper à l’emprise des désirs pour s’élever vers D., est irréalisable pour nous.’. Mon Seigneur, demande alors Moshé, pourquoi as-Tu causé du mal à ce peuple ? ’’. D. REPOND A MOSHE La réponse que D. donne à Moshé est en allusion dans le premier verset de notre parasha (Shemot 6, 2). ‘Elokim, le Seigneur, parla à Moshé. Il lui dit : « Je suis Hashem, l’Eternel »’ ה-ו-ה-וידבר אלקים אל משה ויאמר אליו אני י: Le nom d’Elokim évoque les forces de la Nature, soumises à des lois rigoureuses, immuables. Du point de vue de la nature, il est vrai que vous ne trouverez pas la motivation ni les forces nécessaires pour accomplir le travail que Je vous demande. C’est vrai, par exemple, que vous ne pouvez pas aimer votre prochain comme vous-même, agir de manière désintéressée vis-à-vis de lui ou encore par exemple, lui pardonner l’affront qu’il vous fait. Cependant, « Je suis Hashem, l’éternel ». Le nom divin Hashem (ה-ו-ה- )יévoque quant à lui l’amour inconditionnel, à l’image de l’amour maternel (Rahamim). De ce point de vue, D. est en mesure de procurer à l’homme des forces qui dépasse leur propre nature et une motivation qui va au-delà de la logique. COMMENT CHANGER SA NATURE Il nous reste à découvrir de quelle manière chacun peut bénéficier de ces forces et de cette motivation. Pour y parvenir il faut remplir deux conditions : La première, c’est de renforcer sa Foi dans le fait que D. peut nous aider à accomplir des actes qui dépassent nos capacités naturelles, tant physiques et morales que mentales. Il y a une deuxième condition pour recevoir ce qui nous permettra de dépasser notre nature. C’est de parvenir à la situation où il est clair que ce que l’on veut accomplir est irréalisable par nos propres moyens. Tous nos efforts ont échoué et nous amènent au bord du découragement. Cela va nous pousser à nous tourner vers le Ciel, et à demander de l’aide afin de vaincre cet obstacle infranchissable. Moshé tient là, la réponse à sa question. Si D. a agi avec dureté, s’Il a mis les enfants d’Israël dans une situation sans 7 ' issue, c’est précisément parce qu’Il attendait d’eux, qu’une fois découragés ils se tournent vers lui. C’est alors que grâce à ce cri désespéré des enfants d’Israël, D. a pu mettre en œuvre le processus surnaturel de la délivrance avec tous les miracles que l’on connait. Cela ne signifie pas pour autant que D. est tributaire de l’individu pour produire des miracles. Mais l’objectif réel est d’améliorer la nature de l’individu, comme cela a été le cas des enfants d’Israël corrompus par l’exil en Égypte et comme c’est le cas pour chaque individu. Or un changement de nature n’a d’effet que dans la mesure où il est désiré. C’est la raison pour laquelle, même si c’est D. qui entraîne ce changement de nature, c’est malgré tout, l’individu qui le provoque, pour son bien. Cette leçon ne s’arrête donc pas à l’exil d’Égypte. Elle concerne tout juif qui se trouve dans une situation à laquelle il ne voit pas d’issue. Elle concerne également celui qui a le désir de se rapprocher de D. en pratiquant la Torah de manière désintéressée (Lishma). Dans un cas comme dans l’autre, il faut procéder à un véritable changement dans l’ordre de La Nature et cela ne peut se faire qu’avec l’aide du Ciel. Il lui faudra pour y parvenir remplir les deux conditions que nous avons énoncées : 1- Renforcer sa Foi dans le fait que D. a les moyens de passer outre les lois de la Nature. 2- Tenter par tous les moyens d’atteindre l’objectif afin de montrer un désir sincère d’y parvenir et, en cas d’échec, produire une prière à laquelle le Ciel pourra répondre. 8 À chacun sa avoda zara (Par Rav Gabriel Haccoun) ' Dans la paracha de Vaéra, la Torah nous parle de la première plaie d'Égypte: מכת דם, la plaie du sang. Lorsqu'Hachem annonce à Moché Rabbénou cette plaie, Il lui dit: ( והיה דם בכל ארץ מצרים ובעצים ובאבניםil y aura du sang dans tout le pays d'Egypte, dans les arbres et dans les pierres). Cela signifie que, lors de la plaie de דם, ce n'est pas seulement l'eau qui est devenu du sang. Du sang sortait même des arbres et des pierres. Le Ben Ich Haï demande: pourquoi Hachem a-t-Il fait en sorte que du sang sorte aussi des bois et des pierres ? Et il répond que la première plaie d'Egypte (en l'occurrence celle du sang) était très importante car, par elle, Hachem a voulu montrer aux Bené Israël et aux Égyptiens Sa grandeur et Sa force. C'est pourquoi Il a fait en sorte que cette plaie ne touche pas seulement l'eau, mais aussi le bois et les pierres. Car ces deux matériaux étaient ceux avec lesquels les Égyptiens fabriquaient les idoles. Et, en les touchant aussi, Hachem a voulu montrer aux Bené Israël (qui, à cette époque, étaient plongés dans l'idolâtrie, l'Egypte étant en effet le pays de la )עבודה זרהet aux Égyptiens la futilité de l'idolâtrie. Le Ben Ich 'Haï rapporte ensuite l'histoire suivante: Il y avait un Juif qui était très pauvre. Tout ce qu'il essayait d'entreprendre ne réussissait pas. Et, un jour, à l'approche de Pesssa'h, voyant tous ses voisins commencer à acheter les produits de Pessa'h alors que lui n'avait rien à donner à sa famille, il tombe en dépression et décide...de se suicider! À cette époque, les Juifs vivaient dans des ghettos, et il leur était interdit d'entrer dans les quartiers non-juifs. L'homme pauvre décida alors d'entrer là-bas, en se disant que, de toute manière, même si un non-juif le tuait, il n'avait rien à perdre... Il entre dans un village non-juif, y rencontre deux non juifs et s'attend à ce que ceux-ci lui "fassent sa fête". Mais, étonné, il constate que les deux non-juifs, en passant près de lui, le saluent simplement, et ne s'attaquent pas à lui... Il commence alors à "se promener" dans le village, et aperçoit une grosse église. Il décide d'y entrer et, sur l'autel du prêtre, il remarque que sont posés de nombreux objets en or massif. Voyant qu'il n'y a personne autour de lui, il est tenté d'emporter ces objets avec lui, pour vendre l'or et avoir enfin de quoi se nourrir et nourrir sa famille. Et c'est ce qu'il fait: il vole les objets, fait fondre l'or, en fait des lingots, en vend une partie ; et, avec l'argent obtenu, il fait de très nombreuses courses... Entre temps, à l'église, on s'est bien entendu rendu-compte que les objets ont disparus. Et qui est accusé ? Les Juifs ! Un décret est alors édité, avertissant la population juive environnante que si les objets ne sont pas restitués dans un délai de dix jours, ils seront tous massacrés ! Les Juifs se réunissent alors à la Synagogue, et ils prient pour annuler le terrible décret. Le Juif coupable, se rendant compte de ce qu'il a causé, va voir le Rav et lui raconte ce qu'il a fait... Le Rav, très inquiet, lui dit: "Mais qu'est-ce que tu as fait ?? 9 ' Dans quelle situation dangereuse tu nous a mis ??". L'homme lui répond: "C'est moi le coupable, c'est moi le responsable". Et il retourne au village non-juif, et se dénonce lui-même. Curieuse de voir ce Juif reconnaître sa faute, de nombreuses personnes sont là pour l'occasion: tout le clergé, tous les hommes d'église, tous les responsables, le gouverneur... Tous attendent d'entendre ce que ce Juif va avouer... Celui-ci se présente, dit qu'il est Juif, et que c'est lui qui a volé les objets. Mais immédiatement, on le fait taire, en disant: "Vous les Juifs, on vous connaît! Vous êtes solidaires! On sait donc très bien que ce n'est pas toi qui a volé les objets, mais que tu es simplement venu dire que c'est toi pour sauver ta communauté, pour que celle-ci soit épargnée du massacre!". Mais le Juif continue en disant: "Pas du tout! C'est bien moi qui ai volé les objets, et je vais vous raconter mon histoire: Je suis né juif. J'ai grandi juif. Toute ma vie a été une vie de misère. Aujourd'hui, je suis marié, mais je n'ai pas de quoi nourrir les enfants. A l'approche de la fête de Pâques, je suis arrivé dans un désespoir complet, et j'ai prié mon Dieu, en Lui disant: "Si tu es là, viens-moi en aide! Et si Tu ne me viens pas en aide, c'est que 'hass véchalom je dois aller voir ailleurs!". Et puis, Dieu ne m'ayant pas répondu, je suis venu chez vous, pour essayer d'y trouver la vérité. Je me suis approché de l'église, j'y suis rentré, et j'y ai pleuré abondamment, ne sachant que faire. Et puis, tout à coup, j'ai entendu une voix le dire: "Mon fils! Mon fils!". Il n'y avait pourtant personne! Mais la voix a continué "Mon fils! Mon fils!". Je me suis retourné, et j'ai alors aperçu un type accroché à un bout de bois, qui me parlait...". Étonnés, les membres du clergé se regardèrent, d'un air de dire: "Mais il est fou celui-là!"... Le Juif continua alors son récit: "Il m'a demandé: "Qu'y a-t-il, mon fils ? Quel est ton problème ?". Je lui répondis: "Je ne sais plus quoi faire, il me faut du réconfort, il me faut de l'argent, il me faut...". Il m'a dit: "Mon fils, il n'y a pas de problème! Regarde l'or qui est devant toi! Sers-toi, il est pour toi! Mon cœur est tellement meurtri par ta peine...". Je lui ai dit: "Quelle gentillesse, monsieur! Quelle grandeur d'âme!". Et j'ai tout pris, et je suis parti! Quelle est donc la faute ?" Et là, le gouverneur, le clergé..., tout le monde comprend la supercherie! Ils savent pertinemment que l'acrobate, accroché à un bout de bois, ne peut pas parler. Mais ils ne peuvent pas dire cela devant tout le monde, car ce serait remettre en cause toute leur religion... Ils décident alors d'aller dans son sens (en se disant qu'ainsi, peut-être que les chrétiens présents auraient plus de foi), et de jouer le jeu... Ils ont donc dit: "Ah, on est contents que notre dieu t'aie donné cet or! Va en paix, petit Juif, et rentre chez toi!". A travers cette histoire, le Ben Ich Haï montre la futilité de la עבודה זרה. Comme l'indiquent les mots אחרית כרא־ שית, la délivrance finale se passera comme celle d'Egypte. Hachem nous délivrera comme Il nous a sortis d'Egypte. Avant la Sortie d'Egypte, Hachem a montré la futilité de la עבודה זרה. La עבודה זרה, ce n'est pas simplement se prosterner devant une idole. C'est un travail étranger au service d'Hachem. C'est considérer comme essentielle toute chose autre que la ( עבודת היle service d'Hachem). Et, contrairement à ce qu'on pourrait croire, il y a encore plein d'idolâtrie dans le monde. Il y a beaucoup de עבודה זרהautour de nous: pour certains, l'idole est Internet, pour d'autres c'est le football ou les concerts de rock... Chacun a sa עבודה זרהà lui! A la fin des temps (בימהרה בימינו, qu'on ait le mérite de le vivre bientôt!), Hachem nous montera la futilité de la עבודה זרה, du superficiel et de toutes les forces qu'on y investit. 10 ' Le danger de la fin de l'exil (Par Yossef Aflalo) וידבר אלוקים אל משה. Dieu parla à Moché. Ainsi commence notre paracha de Vaéra. Dieu adresse à Moché une réprimande, sur le ton de la critique. Il est écrit אלוקים, le Nom de Dieu qui symbolise la מידת הדין, l'attribut de rigueur. Pourquoi Dieu s'en prend-t-Il si violemment à Moché ? Moché se rend chez Pharaon, et lui demande de libérer son peuple. Non seulement Paro refuse, mais en plus il va accabler le Am Israël en l'alourdissant de charges supplémentaires. ועתה לכו עיבדו ותבן לא ינתן לכם ותוכן לבנים ( תיתננוet maintenant allez au travail, et la paille ne vous sera pas donnée, et vous fournirez la même quantité de briques). Moché Rabbénou ne comprend pas: Dieu l'envoie en messager, pour être le libérateur du peuple juif! Et il va déverser sa colère à Dieu, en Lui disant: למה הרעות לעם הזה למה זה שלחתני ומאז באתי לפרעה הרע לעם הזה ( והצל לא היצלת את עמיך״Pourquoi as-Tu rendu ce peuple misérable ? Dans quel but m'as-Tu envoyé ? Depuis que je me suis présenté à Paro pour parler en Ton Nom, le sort de ce peuple a empiré, Tu es bien loin d'avoir sauvé ton peuple!)". Au même instant, le Midrash ajoute que les anges ont demandé à Dieu de sanctionner Moché pour ces paroles offensantes. Et c'est ce qui est rapporté dans la Guemara Sanhédrine, au דף קיא. Mais qu'est-ce qui a poussé Moché Rabbénou à cette rébellion ? Pourquoi Moché s'en prend-t-il aussi violemment au Maître du monde ? Comment imaginer un seul instant que Moché, ( איש האלוקיםun homme qui a une dimension de l'ordre du divin), le אבי הנ־ ( ביאיםle père des prophètes) puisse-t-il agir ainsi ? Afin de comprendre ce comportement étrange de Moché Rabbénou, rappelonsnous ce qu'il s'est passé il y a environ 370 ans... C'était précisément l'année 5408 du calendrier juif, et cette année était annoncée comme étant l'année de la guéoula, de la venue du Messie. Il avait même été rapporté de nombreuses preuves tirées du Zohar Hakadosh, et notamment du verset בזאת יביא אהרון, en arguant que la guématria du mot זאתvalait 408, et que 408 représente le nombre d'années écoulées du sixième millénaire, et que cette année devait donc être celle de la guéoula. Mais nous, peuple juif, attendons la guéoula chaque jour. C'est un des fondements essentiels du Judaïsme. Nous avons le pouvoir d'accélérer la venue du Messie, même si sa venue à déjà été programmé à une date bien précise. L'année 5408 a été pressentie comme étant celle de la guéoula. Mais que s'est-il réellement passé ? Des émeutes ont éclaté, et des dizaines de milliers de Juif ont été assassinés! La guéoula s'est transformée en une boucherie, en un bain de sang... Plus récemment, en l'année 5700, en 1940, certains avaient également prédit la guéoula. Mais, au lieu de cela, ce sont six millions de nos frères qui sont passé dans les chambres à gaz et ont péri... Nous devons comprendre que la date de la venue du Machia'h n'est pas figée. Il y a des périodes, durant l'histoire de l'humanité, qui sont propices à la guéoula. Et même les dates figurant de manière codée, mystérieuse, dans le livre de Daniel, 11 ' ne sont pas invariables. Ces dates sont des potentialités, des possibilités réelles de dévoilement du Machia'h (les années 5408 et 5700 étaient des dates phares, favorables à la guéoula). Mais ces années présentent un danger car, lorsque la guéoula doit arriver, un grand débat a lieu ( בשמיםdans les cieux). Mikhaël, le défenseur d'Israël, cite alors tous les mérites du peuple juif. Il amène avec lui tous ses défenseurs, qui sont en fait toutes les mitsvot du Am Israël. Les mitsvot sont nos avocats! Avraham, Yitshak, Yaacov, Moché, David Hamélekh, les prophètes, les Tanaim, les Amoraim et tous les Guedolim de toutes les générations implorent le kissé hakavod, par des supplications, d'amener la guéoula... Mais, parallèlement, le procureur, l'ange accusateur, apporte lui aussi ses chefs d'accusation qui sont nos avérot, nos transgressions, toute l'obscurité que nous avons amené dans le monde... Et là, le verdict va tomber: si le peuple juif réagit comme il se doit, par une prise de conscience de l'importance de la Torah et des mitsvot, et qu'il agit dans ce sens, cette période se transformera en guéoula effective; mais s'il reste indifférent, opaque, imperméable à tout éveil spirituel, refusant son examen de conscience en continuant dans sa voie pécheresse, cette guéoula potentielle laissera alors la place à des massacres et des effusions de sang. Et c'est ce qu'il s'est passé en 5408 et 5700. Ces dates étaient pourtant propices à la guéoula. Dieu a décrété un exil de 400 ans en Égypte. Mais quel est le point de départ de ces quatre-cent ans ? Est-ce le brith ben habétarim? La naissance de Yitshak ? La descente en Égypte ? La mort de Yaacov Avinou ? Celle de Yossef ? Ou celle du dernier des fils de Yaacov ? Autant de possibilités... Moché Rabbénou avait connaissance de cela. Lorsqu'il se rend chez Paro, 400 ans se sont écoulés depuis la naissance de Yitshak. Moché comprend que le Am Israël vit une période propice à la fin de l'exil. Mais il est inquiet car Paro refuse d'abdiquer. Mais, plus encore, il va asservir davantage le peuple juif. Moché a compris qu'un kitroug (une accusation) est portée contre le Klal Israël bachamayim: ;אלו ואלו עובדי עבודה זרהle peuple juif, tout comme le peuple égyptien, sont tous deux des serviteurs de la avoda zara. Que le Am Israël est parvenu au quaranteneuvième degré d'impureté, et qu'il ne mérite donc pas la fin de l'exil. Moché tremble de tous ses membres. Il craint que la guéoula soit reportée à une date ultérieure, et il va se plaindre à Dieu. Notre génération est, sans équivoque, propice à la guéoula. Le retour des exilés sur la terre d'Israël, la restauration des centres de Torah, le mouvement de téchouva des Juifs de par le monde, sont autant de signes annonciateurs du Machia'h. Mais nous devons savoir que toute période de guéoula est accompagnée d'un kitroug (d'une accusation). Et il nous importe de ne pas rester indifférent, et de saisir l'opportunité que Dieu nous offre, en nous reliant à nos sources juives. Dieu attend de nous un éveil spirituel. La guéoula est imminente. Mais ne la laissons pas, une fois de plus, s'échapper. 12 ' Distinction et libération (Par Rav Emmanuel Bensimon) Le Ben Ich Haï a écrit un livre de Halakha, qui ne donne pas simplement des lois, mais dans lequel les Halakhot (lois) sont introduites en rapport avec la paracha. Dans notre paracha, le Ben Ich Haï parle de l'interdit de tséda, un des trenteneuf travaux interdits Chabbat, qui consiste à capturer un animal. Mais quel rapport y a-t-il entre ces deux éléments ? Dans la paracha de Vaéra, la Torah nous parle de la quatrième plaie qu'Hachem a envoyée sur l'Egypte: ( ערובles bêtes sauvages). Et elle énonce un verset que le Ben Ich Haï va analyser, et dont il va nous donner la clé de la compréhension à un niveau allégorique: ושמתי פדת בין עמי ובין עמיך ומחר יהיה אות הזה Ces mots signifient "Et Je mettrai une distinction entre Mon peuple et le tien, et demain il y aura ce signe.". Par eux, Hachem avertit Pharaon (par l'intermédiaire de Moché Rabbénou, qui est allé le voir avant la quatrième plaie pour lui transmettre ce message) qu'Il va faire un miracle, en faisant en sorte que les bêtes sauvages ne s'attaquent qu'aux Égyptiens et à leurs biens, et qu'elles ne causent aucun dommage aux Juifs, quel que soit l'endroit où ils se trouvent. Au sujet de mot פדת (pédout), le Ben Ich Haï demande: "Comment se fait-il qu'il ne soit pas écrit selon son orthographe habituelle, c'est-à-dire avec un vav ("? )פדות. Le Ben Ich Haï répond que les lettres de ce mot, employé pour parler de la distinction entre les Juifs et les Égyptiens, indiquent la spécificité du peuple juif. En effet: -la lettre ( פpé) rappelle la bouche (qui, en Hébreu, se dit pé). Or la caractéristique du Juif, c'est sa bouche, puisque nous avons eu le mérite de recevoir la Torah, et que nous avons, par notre bouche, la possibilité d'exprimer des paroles de Torah, de sainteté. Cette possibilité est propre aux juifs. -la lettre דreprésente l'unité. Nous le voyons dans le verset שמע ישראל הי אלוקינו הי אחדque nous disons tous les jours, et dans lequel le דdu mot ( אחדqui veut dire un) est, dans tous les Sidourim, écrit en grand. Or la spécificité du peuple juif est de pouvoir faire l'unité, d'être uni à Dieu. 13 ' Nous le voyons par exemple lorsqu'il est dit que Yaacov est descendu en Égypte avec soixante-dix âmes. En effet, le terme נפש, employé là-bas pour dire "âmes" est au singulier, alors que lorsqu'on parle de Essav (et donc des non juifs), on parle de נפשות, au pluriel. Ceci rappelle l'unité d'Israël et l’absence d’union des nons juifs. L'unité est une des spécificités du peuple juif, que ce soit au niveau horizontal (c'està-dire entre les différentes composantes du peuple) qu'au niveau vertical (entre le peuple et Dieu.) -la lettre תreprésente la Torah (comme le dit le Zohar et comme cela est rapporté dans le livre que Rabbi Aquiva a écrit sur les lettres). Et effectivement, le peuple juif a été délivré d'Egypte par le mérite de la Torah. En effet, même si le Matan Torah n'avait pas encore eu lieu, les Bené Israël étudiaient déjà la Torah (les Lévyim se consacraient à cette étude et n'étaient donc pas asservis par les Égyptiens; et les autres tribus étudiaient sûrement elles aussi la Torah, au moins pendant le temps libre). Et c'est par ce mérite qu'ils ont été sauvé, et n'ont pas eu à subir les dix plaies, l'étude de la Torah a en effet, la capacité de sauver l'homme de la punition. La bouche, l'unité et la Torah sont donc les trois choses qui caractérisent le peuple juif. Et le mot פדות, qui signifie justement "distinction", y fait allusion. Cela signifie que si nous prenons conscience de notre spécificité, c'est-àdire du fait que nous ne devons utiliser notre bouche que pour des choses saintes, que pour l'étude de la Torah et pour des bonnes paroles, et pas -que Dieu préservepour de la médisance ou d'autres choses mauvaises; du fait que nous devons être unis à Dieu et à nos frères juifs quelle que soit leur situation spirituelle; et du fait que nous devons étudier la Torah et réaliser les 613 mitsvot, nous réalisons vraiment le but pour lequel Dieu nous a créé, et nous pourrons arriver à la fin du verset, qui dit: "( מחרdemain), Dieu fera le signe", et dans laquelle le mot " "מחרfait allusion à la fin des temps (comme nous le voyons à plusieurs autres endroits du Tanakh). C'est-à-dire que parce que nous allons faire attention à ces trois choses, par ce mérite, Hachem nous enverra le Machia'h. Nous allons à présent répondre à la question du début: pourquoi le mot pédout est-il écrit sans vav lorsqu'il est employé dans le verset dont nous avons parlé ? Parce que la délivrance d'Egypte n'était pas complète. En effet, lorsqu'Hachem a demandé à Moché de sortir les Bené Israël d'Egypte, Il lui a déjà fait allusion aux prochains exils (à travers Son Nom Ekié acher Ekié, au sujet duquel la Guemara explique: De même que J'ai été avec vous en Égypte, Je serai avec vous dans les prochains exils). La délivrance totale, elle, viendra מחר, c'est-à-dire à la fin des temps, comme l'indique la suite du verset. Mais quel rapport y a-t-il entre tout cela et l'interdit de tséda (de capturer pendant Chabbat) ? Dans Chabbat, nous retrouvons la notion de libération dont nous avons parlé. En effet, Chabbat, on est tranquille: on ne travaille pas, il n'y a pas de téléphone, personne ne nous embête... Nous sommes tranquilles avec notre famille, nous prions, nous étudions la Torah... Nous sommes complètement libérés de tous les jougs que nous pouvons avoir en semaine. Chabbat, c'est la dimension de la fin des temps, de la délivrance totale. Toute l'essence de Chabbat, c'est la libération. Il nous est donc interdit, en ce jour, de capturer un animal. Car ce serait le priver de sa liberté. 14 ' Le bien dans le mal (Par Rav Yonatan Chocron) Dans la paracha de Vaéra, la Torah nous parle de la ( מכהplaie) de la grêle. Durant cette plaie, Pharaon, n'en pouvant plus, demande à Moché Rabbénou de prier pour qu'elle cesse. Moché lui répond: "Je vais sortir prier et implorer Dieu, et les bruits s'arrêteront (car effectivement, il y avait des fracas, des bruits insupportables), et la grêle aussi s'arrêtera". Et, en effet, suite à la tefila de Moché, la grêle et les bruits se sont arrêtés. Mais Pharaon, au lieu de voir l'intervention de Dieu dans cet événement, protesta: "Moché a dit: "Les bruits et la grêle s'arrêteront. Or les choses ne se sont pas passées dans cet ordre, puisque c'est d'abord la grêle qui s'est arrêtée, et ensuite les bruits qui ont cessé! Il a dit l'inverse de ce qu'il s'est finalement passé! Je ne crois donc plus en son Dieu!". Nous voyons d'ici que lorsqu'une personne veut voir le mauvais côté des choses, lorsqu'elle n'en cherche pas l'aspect positif, elle ne verra toujours que le mal. Par contre, lorsqu'une personne veut voir le bon côté des choses, elle pourra le voir même dans les moments difficiles, comme le montre l'histoire suivante: Un vérificateur de tefilines et mézouzot était de passage dans une ville. Il proposa aux gens de lui amener leurs tefilines et mézouzot afin de les vérifier. Ils les lui déposèrent sur la bima, et devaient les récupérer le soir-même. Dans cette communauté, se trouvait un certain Monsieur Berkovitch. Celuici avait des tefilines qu’il considérait exceptionnelles. A tel point que les gens faisaient la queue pour les lui emprunter, et avoir ainsi le mérite, au moins une fois, d'accomplir la mitsva en les utilisant. Ce Monsieur Berkovitch n'entendait pas bien, et il ne savait pas, par conséquent, qu'un vérificateur de tefilines avait proposé aux gens d'apporter leur tefilines pour qu'il les vérifie. Il n'avait, de toute manière, pas l'intention de faire vérifier sa paire, qu'il considérait être parfaite. Chaque matin, Monsieur Berkovitch déposait ses tefilines sur la bima. Le matin où le vérificateur a fait sa proposition, il les a déposés aussi. Et ses tefilines se sont donc retrouvées parmi les nombreuses paires que le vérificateur a vérifiées. Après la tefila de Min'ha, les gens qui avaient déposé leur paire de tefilines vinrent les récupérer. A un moment, celui-ci, s'étant retrouvé avec les tefilines de Monsieur Berkovitch, que personne n'était venu réclamer, demanda à l'assemblée: "A qui appartiennent ces tefilines ? ". Tout le monde reconnut évidemment les tefilines de Monsieur Berkovitch... Mais, à la stupéfaction générale, le vérificateur annonça: "Elles sont vides!! Elles ne contenaient aucun parchemin!". Comment était-ce possible ? Les gens ne 15 ' comprenaient pas... Mais surtout, ils redoutaient de devoir annoncer la terrible nouvelle à Monsieur Berkovitch, qui était si fier de ces tefilines... Après être entré dans la Synagogue, Monsieur Berkovitch aperçut ses tefilines hors de leur pochette, et remarqua que leurs boîtiers avaient été éventrés... Il s'écria: "Qui a touché à mes tefilines ??". Personne n'osa répondre. Personne ne savait comment lui annoncer ce que le vérificateur avait découvert... Finalement, celui-ci s'approcha de lui, et lui annonça doucement ce qu'il avait remarqué. Pendant ce temps, les gens se cachaient, en se demandant si Monsieur Berkovitch allait supporter ce choc. Mais à la surprise générale, celui-ci, après avoir appris la nouvelle concernant ses tefilines, se mit à danser, et à remercier Hachem d'avoir fait en sorte qu'on ait remarqué cette erreur avant qu'il quitte ce monde...Car ainsi, on pourrait la réparer, et il pourrait alors accomplir la mitsva comme il se doit! Voici l'exemple d'un homme qui, même dans un moment difficile, a su voir le bon côté des choses, au lieu de se laisser dominer par la difficulté. Combien ceci est important ! Dans notre société, il y a deux catégories de personnes: celles qui sont constamment nostalgiques du passé, et celles qui, au contraire, passent leur temps à se dire que le futur sera mieux que ce qu'elles vivent actuellement. Dans les deux cas, ces personnes n'apprécient pas le moment présent. Il est pourtant très important de voir le bien à travers le mal, le bien à travers la difficulté. De se rappeler qu'Hachem est toujours là pour nous protéger, et pour nous faire avancer. Au moment de la difficulté, au moment de l'épreuve, c'est certes difficile. Mais n'oublions jamais que tout ce qu'Hachem fait est pour le bien! 16 Doit-on rallumer les bougies de Chabbat si elles se sont éteintes ? ' (Par Rav Yoel Hattab) La raison de l'allumage des nérot (bougies) de Chabbat, c'est le עונג שבת, c'est-à-dire le שלום בית. En effet, autrefois, avant l’invention de l’électricité, la seule source de lumière était « la bougie ». La mitsva d'allumer les bougies de Chabbat a été donnée à la femme, car elle se trouve plus à la maison que le mari. Dans certains cas cependant, c'est le mari qui devra allumer (À ce sujet, on se renseignera auprès d'un Rav. Chaque question a sa réponse). La mitsva d'allumer les bougies de Chabbat a été donnée pour le שלום בית, pour ne pas se cogner, pour voir ce qu'il se passe devant nous etc...; pour qu'il n'y ait pas de cris pendant Chabbat, et que ce jour soit un jour de chalom. Afin de pouvoir profiter de ces bougies la nuit (c'est-à-dire dès la sortie des étoiles), si celles-ci se sont éteintes avant la ( שקיעהc'est-à-dire avant le coucher du soleil), la femme se doit de les rallumer, mais sans berakha. Rappelons ici que les Séfaradim ne font pas entrer Chabbat par l'allumage des nérot. C'est pourquoi ( בשעת הדחקen cas de nécessité) et avant le coucher du soleil, on pourra continuer à faire tous les travaux nécessaires au Chabbat (exemple: brancher la plata de Chabbat). La femme pourra donc rallumer les nérot de Chabbat, mais elle le fera sans berakha car certains décisionnaires pensent qu'il n'est pas nécessaire de rallumer les nérot, et parce que le fait de dire la berakha sur les nérot de Chabbat n'est pas une condition indispensable pour avoir accompli la mitsva de les allumer. Chez les Achkénazim, par contre, les femmes font entrer Chabbat par l'allumage des nérot. Par conséquent, si celles-ci se sont éteintes, la femme devra demander aux enfants (ou au mari s'il est encore à la maison) de les rallumer (ici encore, on parle évidemment du cas où on rallume les bougies avant le coucher du soleil). 17