ד"סב - Espace Torah

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‫בס"ד‬
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VAERA
Pourquoi et comment faut-il prier ?
(Par Rav Yitshak Assuli)
Vaera : Changer de nature
(Par Dan Dvach)
À chacun sa avoda zara
(Par Rav Gabriel Haccoun)
Le danger de la fin de l'exil
(Par Yossef Aflalo)
Distinction et libération
(Par Rav Emmanuel Bensimon)
Le bien dans le mal
(Par Rav Yonatan Chocron)
Doit-on rallumer les bougies de Chabbat si elles se
sont éteintes ?
(Par Rav Yoel Hattab)
Espace Torah remercie Léa Marciano pour son dévouement et son
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Pourquoi et comment faut-il prier ?
(Par Rav Yitshak Assuli)
Dans la paracha de Vaéra, nous
voyons qu'Hachem est apparu à Moché
Rabbénou, et qu'il lui a dit: "Je suis le
Dieu de tes pères, Avraham, Yitshak
et Yaacov, et J'ai conclu avec eux une
alliance disant que Je les amènerais en
Erets Kénaane (c'est-à-dire en Erets
Israël). Et du fait que j'ai écouté les
cris, la souffrance, la misère des Bené
Israël, asservis par les Égyptiens, Je
me suis rappelé tout-à-coup de cette
alliance. C'est pourquoi tu vas dire aux
Bené Israël que Je suis Dieu, et que J'ai
l'intention de les faire sortir d'Egypte".
Ici, les commentateurs demandent:
Pourquoi Hachem a-t-Il attendu que
les Bené Israël crient pour les délivrer,
alors qu'Il avait déjà promis aux
patriarches qu'Il les libérerait et les
amènerait en Erets Israël ? Pourquoi
attendre leur prière ? Pourquoi les faire
souffrir tellement ? Pourquoi ne pas
accomplir directement ce qui
a été promis aux patriarches ?
Pourquoi fallait-il la promesse
ET la prière ?
Parfois,
nous
avons
l'impression
que
lorsque
nous prions, c'est parce que
nous voulons quelque part
plus que ce qui nous revient.
On a l'impression que ce
qu'on
demande
n'aurait
normalement pas dû nous
être accordé, et qu'on va
essayer de l'obtenir quandmême grâce à la prière. Mais
le Ram'hal nous dit que cette
manière de penser n'est pas
juste, qu'il ne faut pas penser
ainsi. Que parfois, Hachem
a préparé une abondance, a
déjà préparé la berakha pour
nous; mais que sans tefila, nous ne
pouvons pas obtenir ce qu'Il voulait nous
donner. C'est ainsi qu'Il a créé le monde,
comme nous le voyons avec Adam
Harishone, qui, lorsqu'il a ouvert les
yeux, lorsqu'il venait à peine d'être créé,
a vu un monde inachevé et a alors prié
(c'est d'ailleurs pour cela, parce que le
premier homme a prié, que la prière n'est
pas quelque chose de spécifiquement
juif, mais quelque chose d'universel). Et
Hachem a volontairement créé le monde
dans cet état-là, pour que l'homme
puisse l'améliorer par sa prière. En
fait, tout existait déjà potentiellement,
mais la tefila était indispensable pour
concrétiser tout ce potentiel, pour le
faire exister dans la réalité (pour faire
pousser la pelouse, les arbres etc...)
La prière, c'est ce qui va nous permettre
d'obtenir même le strict minimum. Sans
tefila, même cela on n'obtient pas.
Hachem avait certes fait une promesse
aux patriarches. Mais il fallait la prière
des Bené Israël pour que cette promesse
se réalise. Hachem a créé le monde
inachevé, et a décidé qu'Il le terminerait
suite à la prière de l'homme.
Lorsque l'homme demande une chose,
il apprécie lorsqu'on la lui donne. S'il
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la reçoit sans avoir rien demandé, il ne
l'appréciera pas. C'est pourquoi Hachem
veut qu'on Lui demande, avant de
nous donner. D'Adam Harishone et des
Bené Israël en Égypte, nous pouvons
apprendre que pour obtenir même notre
dû, Mme ce qu'Hachem a déjà préparé
pour nous, il faut obligatoirement prier.
Cela est comparable au fait de devoir
remonter sa montre. De nos jours, les
montres sont certes automatiques. Mais
à l'époque, il fallait chaque jour tourner le
bouton de la montre, pour qu'elle puisse
continuer à fonctionner.
La prière, c'est ce bouton qui va permettre
à la montre de fonctionner. C'est ce qui
va permettre à l’abondance de venir.
On ne peut rien obtenir si on ne le
demande pas. L'intérêt de la tefila est
aussi, évidemment, d'avoir un lien avec
Dieu. Il y a des gens qui, lorsqu'ils prient
Dieu, ne Lui demandent que des petites
choses. C'est une erreur, car Hachem
peut tout, et Il a tout.
Hachem a créé le monde dans l'intention
de nous faire du bien. Il est bon, et veut
donc faire du bien. Il est parfait et, par
conséquent, lorsqu'il va nous donner
quelque chose, Il va le faire de la manière
la plus parfaite. Sa donation sera parfaite.
Mais si nous ne croyons pas en cela, et
que nous pensons ne pas mériter qu'Il
nous donne quelque-chose, alors nous
nous limitons dans nos demandes. Or
c'est l'homme qui crée le récipient. Par
conséquent, s'il fait un petite demande
(exemple: "Je veux refaire ma chambre"),
il recevra une petite chose. Et s'il en fait
une grande (exemple: Je veux acheter
un appartement), il recevra une grande
chose. L'homme créé le récipient, et Dieu
le remplit. Certains créent un récipient petit
comme un verre, d'autres un récipient plus
grand comme une bouteille... Mais dans
tous les cas, Hachem remplit ce qu'on Lui
apporte. Certains recevront beaucoup, et
d'autres moins, chacun selon le récipient
qu'il aura préparé, chacun selon la tefila
qu'il aura formulée. Si je sais qu'Hachem
est capable de tout et que j'y crois, alors
pourquoi ne pas Lui demander beaucoup
? Hachem va réagir selon l'espoir que je
mets en Lui. Pour essayer d'illustrer tout
cela, voici une histoire:
Il y a environ 250 ans, le Chaagat Aryé
voyageait en direction de Metz, ville où il
allait plus tard devenir Rabbin. Avant qu'il
quitte sa ville, une dame âgée lui apporta
trois 'halot, et les lui donna. Le Rav en fut
très content, et la bénit en lui souhaitant
que, par le mérite des trois 'halot qu'elle
lui a données, Hachem lui donne les
moyens de construire trois Synagogues:
deux dans la ville où elle habitait, et une
en Erets Israël. Cette femme réussi à faire
construire les deux Synagogues dans sa
ville, et il lui restait encore de l'argent.
Mais elle allait presque mourir. Elle alla
donc voir le Rav, et lui dit: "Je vais bientôt
mourir. Prenez cet argent, et donnez-le
à la tsédaka!". Le Rav lui demanda d'où
elle avait cet argent, et elle lui raconta
qu'une fois, le Chaagat Aryé lui avait fait
une berakha, dans laquelle il lui avait
souhaité d'avoir de quoi construire trois
Synagogues: deux ici, et une en Israël.
Le Rav lui répondit: "Tu as reçu une
berakha du Chaagat Aryé ? C'est un Rav
extraordinaire ! Donc s'il t'a dit que tu
vas construire une Synagogue en Israël,
c'est que tu vas avoir la vie et les moyens
de le faire! Donc même si tu penses être
vieille et ne pas avoir la force de le faire,
vas en Israël et construit la Synagogue
!". Et effectivement, la vie de cette femme
s'est prolongée, et elle a réussi à aller en
Israël et construire la Synagogue.
La moralité de cette histoire, c'est que
quand on veut quelque-chose et qu'on y
croit, ça marche !
Par contre, juste après, on nous raconte
qu'un homme ayant entendu cette histoire
est parti chez le Chaagat Aryé, et lui a dit:
"Rav, moi aussi je voudrais une berakha
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!". Comme c'était un fermier, et que sa vache (avec laquelle il gagnait sa parnassa)
vieillissait, il demanda: "Rav, faites en sorte que la vie de ma vache se prolonge!". Le
Rav lui souhaita que la vie de sa vache soit prolongée, mais également que la sienne
(la vie du fermier) le soit. Ainsi, il a voulu lui montrer que sa demande (que la vie de sa
vieille vache soit prolongée) n'en était pas une. Car il aurait pu demander même dix
vaches! Pourquoi donc voir les choses en petit ? Pourquoi ne pas les voir en grand ?
On apprend de là qu'en fait, il faut tout demander à Dieu. Parfois, on n'ose pas faire
cela, parce qu'on ne se sent pas assez méritants. Mais en vérité, Dieu est prêt à tout
donner, mais Il attend que nous le Lui demandions. Lorsqu'on est dans la misère et dans
la souffrance, on demande. Contrairement au cas où on n'a pas de besoin particulier.
Et c'est peut-être pour cela qu'Hachem a attendu que les Bené Israël souffrent en
Égypte. Car, durant toutes ces longues années d'esclavage, il est possible que certains
Bené Israël se soient habitués à leur situation au point de ne pas vouloir qu'elle change,
et donc de ne pas demander à Dieu autre chose que ce qu'ils avaient déjà.
Celui qui sent bien et épanoui dans sa situation ne va pas demander à Dieu d'améliorer
celle-ci. Il ne sait pas qu'en fait, il peut y avoir un monde meilleur. Nous-mêmes
n'imaginons pas ce que serait le monde avec le Machia'h. Et en Israël, on ne prie pas
tellement pour le manque de pluie, car on n'y est pas assez sensible. On n'est pas
spécialement dérangé par la situation actuelle, et on ne cherche donc pas à la changer.
Une fois, le Baal Chem Tov a été reçu par un homme pauvre. Il s'est installé chez lui
pendant une semaine, à tel point qu'à un moment, le pauvre n'avait plus de quoi le
nourrir et a emprunté de l'argent à ses voisins. Mais le Rav n'avait pas l'intention de
partir de sitôt... Il est resté chez le pauvre plus d'un mois, et celui-ci empruntait de
l'argent à toute la ville pour pouvoir le nourrir... Jusqu'à ce qu'à un moment, le président
de la communauté est allé en personne voir le Baal Chem Tov, et lui dire: "Excusez-moi,
mais votre hôte n'a pas assez d'argent. Il en emprunte à tout le monde et s'endette...
Par conséquent, pourriez-vous quitter sa maison ?". Le Baal Chem Tov répondit: "Mon
fils, je connais très bien la situation financière de cet homme, et c'est justement pour
cela que je suis venu chez lui. Car je sais que dans le Ciel, on a décidé qu'il aurait un
grand trésor. Mais comme il ne le demande pas, il ne le reçoit pas. J'ai donc voulu le
mettre dans une situation où il va prier Hachem de l'aider financièrement, pour qu'il
puisse recevoir ce trésor. C'est pourquoi j'ai fait en sorte qu'il s'endette. Car lorsqu'il
n'aura pas de quoi rembourser ses dettes, il va prier Hachem de lui venir en aide! Et il
recevra alors le trésor qui l'attend...".
De cette histoire, nous apprenons non seulement que pour recevoir, il faut demander
(comme nous l'avons déjà vu précédemment). Mais aussi que ce n'est que lorsqu'on
ressent un manque qu'on prie. Lorsqu'on a besoin d'une chose, demandons-là!
Demandons le maximum, sans se limiter! Demandons non seulement un travail, mais
aussi un bon travail ! Demandons la richesse non seulement pour nous-mêmes (pour
subvenir à nos propres besoins) mais aussi pour les autres (pour pouvoir les aider) ! Il
faut voir large, sinon on reste petit...
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Vaera : Changer de nature
(Par Dan Dvach)
Inspiré de textes du RaBaSH, Rabbi Baroukh
Shalom Ashlag ‫זצ"ל‬, fils du Baal HaSoulam ‫זצ"ל‬
A la fin de la parasha précédente, les hébreux subissent de très fortes pressions tant
du point de vue physique que psychologique, de la part de Pharaon. En effet Moshé
et Aaron se sont présentés à ce dernier pour demander qu’il laisse les hébreux servir
l’Eternel dans le désert.
PHARAON PUNIT LES HEBREUX
Pharaon non seulement refuse, mais il décide de durcir leurs conditions de travail. Il
ne leur fournira plus la paille nécessaire à la fabrication des tuiles. Dès lors, pressés
par leurs gardiens, les hébreux doivent fabriquer le même quota de tuiles, mais se
débrouiller par eux-mêmes pour trouver de la paille. Dès lors c’est la course effrénée.
De jour comme de nuit il faut chercher la paille. La paille devient pour eux une obsession.
La vie devient un enfer.
L’espoir qu’avait suscité l’annonce par Moshé et Aaron de leur future délivrance,
s’évanouit. Ce n’est pas pharaon le responsable. Les responsables tout désignés de
leur malheur ce sont Moshé et Aaron. Le peuple s’en prend à eux. Moshé va se tourner
vers D. (Shemot 5, 22-23).
LES DOUTES DE MOSHE
«…Moshé revient vers l’Eternel et
lui dit : ‘Pour quel raison m’as-Tu
envoyé ? Depuis (MéAz) que je suis
venu chez Pharaon en Ton nom, cela
a été néfaste pour ce peuple et de
délivrance, il n’y en a pas eu. ».
‫ה ויאמר אדני למה הר־‬-‫ו‬-‫ה‬-‫וישב משה אל י‬
‫עתה לעם הזה למה זה שלחתני‬:
‫ומאז באתי אל פרעה לדבר בשמך הרע לעם‬
‫הזה והצל לא הצלת את עמך‬:
Cette attitude de Moshé est
problématique. Comment a-t-il pu,
lui, le berger fidèle, douter de la
conduite de D. ? Même si les faits
sont là, comment peut-il penser que
D. a projeté tous ces évènements pour le malheur des enfants de Ya'akov ?
A cela le Sifté Haïm répond que Moshé n’a pas voulu mettre en doute la conduite divine,
‫ח"ו‬. Il a questionné le Créateur, comme le ferait un étudiant, dans le but d’apprendre de
la conduite de son maître.
Cependant Moshé reconnait lui-même qu’il a commis une faute vis-à-vis de D. comme
nous l’enseigne le Midrash (Shemot Rabba 23, 3) :
« Ainsi s’est exprimé Moshé devant le Saint ‫ ב"ה‬: ‘Je sais que j’ai fauté vis-à-vis de
Toi par le ‘Depuis’(BéAz), comme il est écrit : ‘Depuis (MéAz) que je suis venu chez
Pharaon’. »
‫ ּומֵ ָאז ּבָאתִ י‬:)‫ כג‬,‫ ׁשֶ ּנֶאֱ מַ ר (שמות ה‬,‫ יֹודֵ עַ אֲ נִי ׁשֶ חָ טָ אתִ י לְפָ נֶיָך ּבְָאז‬,‫ּכְָך ָאמַ ר מׁשֶ ה לִפְ נֵי הַ ּקָ דֹוׁש ּבָרּוְך הּוא‬
‫«אֶ ל ּפַ ְרעֹו‬
La teneur de cette faute selon le Sifté Haim, a été que contrairement à Avraham, qui lors
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du sacrifice de son fils, n’a posé de question à D. qu’après être allé au bout de l’acte
ordonné par D., Moshé L’a questionné avant même de parvenir au bout de l’acte pour
lequel D. l’avait missionné. La faute vint du fait qu’il y a lieu de craindre que la question
posée n’ait pas pour origine le désir de comprendre la conduite de D., mais qu’elle ait
été provoquée par un doute sur cette conduite (Sifté Haïm Moadim II p.419).
MOSHE S’INTERROGE SUR LA CONDUITE DE D.
Il reste encore à résoudre le point le plus délicat, c'est-à-dire le sens de la conduite de
D. autrement dit la réponse à la question de Moshé.
Pour quelle raison D. fait-il souffrir son peuple aussi durement avant d’aborder le
processus de la délivrance ?
Pour y répondre nous allons reprendre le récit de cette parasha sous un angle différent.
Lorsque Moshé est venu annoncer leur future délivrance au peuple hébreu, tous ont
cru aux paroles de Moshé. Ils ont eu foi dans le fait que D. avait vu leur souffrance, et
qu’Il avait envoyé Moshé pour les sauver. Dès lors, ils ont en quelque sorte, fait le vœu
de Lui obéir et de se soumettre à ses injonctions (Shemot 4, 31).
Le peuple eut confiance. Ils comprirent que l’Eternel se souvenait des enfants d’Israël
et qu’Il avait vu leur souffrance. Alors ils s’agenouillèrent et se prosternèrent.
(‫ה את בני ישראל וכי ראה את ענים ויקדו וישתחוו‬-‫ו‬-‫ה‬-‫לא) ויאמן העם וישמעו כי פקד י‬:
En quoi consistent ces injonctions ?
Il s’agit de servir D., c'est-à-dire d’agir pour son honneur (LiKhevodo), sans chercher
à en tirer un quelconque intérêt (Lishma). Mais après plus de deux siècles vécus au
milieu des égyptiens, le peuple le plus dépravé du monde, à n’écouter que leur désirs
et leur ego, la tâche des hébreux s’avèra difficile.
D’autant que, comme l’enseigne Rabbi Akiva la mitzva centrale de la Torah est d’aimer
son prochain comme soi-même. Or cette injonction est à vrai dire, totalement irréaliste.
Comment un homme peut-il en aimer un autre comme s’il s’agissait de lui-même ?
Il est possible, à la limite, de trouver cela chez une mère ou un père vis à vis de leur
enfant, mais vis-à-vis d’un voisin même s’il est juif, certainement pas ! Pourtant si l’on
doit servir D., il nous faut parvenir à accomplir cette mitzva. C’est vrai qu’à l’époque de
leur séjour en l’Égypte ils n’avaient pas encore reçu la Torah. Mais Moshé avait, quant
à lui reçu l’enseignement d’Avraham. Et Avraham avait sans aucun doute accompli ce
commandement, et il l’avait transmis à ses descendants.
Ainsi donc, la perspective de la délivrance aidant, tout le monde se lance éperdument
dans cette tâche, d’écarter son égoïsme pour s’occuper de l’autre. Mais voilà que
Pharaon, autrement dit le Yetser Hara’ s’y oppose.
« Tu dois savoir mon fils, que Pharaon le roi d’Égypte est vraiment le Yetser Hara’. »
(Iguérot Moussar HaRambam Livno Rabbi Avraham).
‫ויש לך בני לדעת כי פרעה מלך מצרים הוא יצר הרע באמת‬.En effet, le fait d’abandonner ses
habitudes égoïstes pour se mettre dans la peau d’une personne dévouée aux autres,
est une perspective qui ne réjouit guère le Yetser Hara’. Et comme celui-ci règne en
maître sur nous depuis longtemps, il va rapidement s’arranger pour épuiser notre
énergie, c'est-à-dire ce désir de changer. Alors il nous prive de paille, c'est-à-dire, de
la possibilité de fabriquer des briques solides, susceptibles de nous aider à construire
cette nouvelle vie.On aura beau courir à droite et à gauche, on ne trouvera pas de
paille, le corps s’épuise, le désir de Servir D. s’estompe.
En y regardant de près, lorsqu’on était prisonnier de Pharaon, notre Yetser Hara’,
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la vie était plus facile, plus douce. Elle
consistait, à l’instar de l’égyptien, à
satisfaire les désirs du corps. « Tandis
que l’égyptien, c’est tout entier le corps »
(id.)
‫ומצרים בכללו הוא הגוף‬
Il est vrai que les désirs du corps et de
l’esprit croissent sans cesse et qu’ils
nous asservissent en nous poussant à
rechercher des plaisirs toujours plus forts.
Mais cette servitude cependant, est une
prison dorée à côté de la servitude que
nous imposent les mitzvot !
Les hébreux arrivent donc à la conclusion
que ce nouveau service n’est pas fait
pour eux. Si élevé soit-il, puisqu’en fin de
compte il doit leur permettre de se libérer
du joug de la matérialité, ils se sentent
incapables de l’accomplir.
Nous pouvons à présent saisir le sens de
la question que pose Moshé au Créateur :
‘’ Les Hébreux ont appris qu’ils devaient
faire Ta volonté et Te servir avec tout leur
cœur (Lishma). Ils pensaient que la force
pour le faire leur viendrait naturellement.
Au lieu de cela, la situation est totalement
inversée, ils y ont perdu toutes leurs
forces ! Ils ont crié vers moi : ‘Quel bien
nous fait ta promesse que nous sortirons
de cet Exil ? Certes, nous avons bien
compris que c’est notre conscience qui
est en exil. C’est elle qui est prisonnière
de Pharaon et des égyptiens, c'est-à-dire
des désirs de notre corps. Mais le moyen
que tu proposes pour en sortir a épuisé
toutes nos forces. Nous sommes arrivés
à la conclusion que le projet grandiose
que tu proposes, qui est d’échapper à
l’emprise des désirs pour s’élever vers D.,
est irréalisable pour nous.’. Mon Seigneur,
demande alors Moshé, pourquoi as-Tu
causé du mal à ce peuple ? ’’.
D. REPOND A MOSHE
La réponse que D. donne à Moshé est en
allusion dans le premier verset de notre
parasha (Shemot 6, 2).
‘Elokim, le Seigneur, parla à Moshé. Il lui
dit : « Je suis Hashem, l’Eternel »’
‫ה‬-‫ו‬-‫ה‬-‫וידבר אלקים אל משה ויאמר אליו אני י‬:
Le nom d’Elokim évoque les forces de la
Nature, soumises à des lois rigoureuses,
immuables. Du point de vue de la nature,
il est vrai que vous ne trouverez pas la
motivation ni les forces nécessaires
pour accomplir le travail que Je vous
demande. C’est vrai, par exemple, que
vous ne pouvez pas aimer votre prochain
comme vous-même, agir de manière
désintéressée vis-à-vis de lui ou encore
par exemple, lui pardonner l’affront qu’il
vous fait.
Cependant, « Je suis Hashem, l’éternel
». Le nom divin Hashem (‫ה‬-‫ו‬-‫ה‬-‫ )י‬évoque
quant à lui l’amour inconditionnel, à
l’image de l’amour maternel (Rahamim).
De ce point de vue, D. est en mesure
de procurer à l’homme des forces qui
dépasse leur propre nature et une
motivation qui va au-delà de la logique.
COMMENT CHANGER SA NATURE
Il nous reste à découvrir de quelle manière
chacun peut bénéficier de ces forces et
de cette motivation. Pour y parvenir il faut
remplir deux conditions :
La première, c’est de renforcer sa Foi
dans le fait que D. peut nous aider à
accomplir des actes qui dépassent nos
capacités naturelles, tant physiques et
morales que mentales.
Il y a une deuxième condition pour recevoir
ce qui nous permettra de dépasser notre
nature. C’est de parvenir à la situation où
il est clair que ce que l’on veut accomplir
est irréalisable par nos propres moyens.
Tous nos efforts ont échoué et nous
amènent au bord du découragement.
Cela va nous pousser à nous tourner vers
le Ciel, et à demander de l’aide afin de
vaincre cet obstacle infranchissable.
Moshé tient là, la réponse à sa question.
Si D. a agi avec dureté, s’Il a mis les
enfants d’Israël dans une situation sans
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issue, c’est précisément parce qu’Il attendait d’eux, qu’une fois découragés ils se
tournent vers lui. C’est alors que grâce à ce cri désespéré des enfants d’Israël, D. a
pu mettre en œuvre le processus surnaturel de la délivrance avec tous les miracles
que l’on connait.
Cela ne signifie pas pour autant que D. est tributaire de l’individu pour produire des
miracles. Mais l’objectif réel est d’améliorer la nature de l’individu, comme cela a été
le cas des enfants d’Israël corrompus par l’exil en Égypte et comme c’est le cas pour
chaque individu. Or un changement de nature n’a d’effet que dans la mesure où il est
désiré. C’est la raison pour laquelle, même si c’est D. qui entraîne ce changement de
nature, c’est malgré tout, l’individu qui le provoque, pour son bien.
Cette leçon ne s’arrête donc pas à l’exil d’Égypte. Elle concerne tout juif qui se trouve
dans une situation à laquelle il ne voit pas d’issue. Elle concerne également celui qui
a le désir de se rapprocher de D. en pratiquant la Torah de manière désintéressée
(Lishma). Dans un cas comme dans l’autre, il faut procéder à un véritable changement
dans l’ordre de La Nature et cela ne peut se faire qu’avec l’aide du Ciel. Il lui faudra
pour y parvenir remplir les deux conditions que nous avons énoncées :
1-
Renforcer sa Foi dans le fait que D. a les moyens de passer outre les lois de
la Nature.
2-
Tenter par tous les moyens d’atteindre l’objectif afin de montrer un désir sincère
d’y parvenir et, en cas d’échec, produire une prière à laquelle le Ciel pourra répondre.
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À chacun sa avoda zara
(Par Rav Gabriel Haccoun)
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Dans la paracha de Vaéra, la Torah nous parle de la première plaie d'Égypte: ‫מכת דם‬,
la plaie du sang.
Lorsqu'Hachem annonce à Moché Rabbénou cette plaie, Il lui dit:
‫( והיה דם בכל ארץ מצרים ובעצים ובאבנים‬il y aura du sang dans tout le pays d'Egypte,
dans les arbres et dans les pierres).
Cela signifie que, lors de la plaie de ‫דם‬, ce n'est pas seulement l'eau qui est devenu
du sang. Du sang sortait même des arbres et des pierres.
Le Ben Ich Haï demande: pourquoi Hachem a-t-Il fait en sorte que du sang sorte
aussi des bois et des pierres ?
Et il répond que la première plaie d'Egypte (en l'occurrence celle du sang) était très
importante car, par elle, Hachem a voulu montrer aux Bené Israël et aux Égyptiens
Sa grandeur et Sa force. C'est pourquoi Il a fait en sorte que cette plaie ne touche
pas seulement l'eau, mais aussi le bois et les pierres. Car ces deux matériaux étaient
ceux avec lesquels les Égyptiens fabriquaient les idoles. Et, en les touchant aussi,
Hachem a voulu montrer aux Bené Israël (qui, à cette époque, étaient plongés dans
l'idolâtrie, l'Egypte étant en effet le pays de la ‫ )עבודה זרה‬et aux Égyptiens la futilité de
l'idolâtrie. Le Ben Ich 'Haï rapporte ensuite l'histoire suivante:
Il y avait un Juif qui était très pauvre. Tout ce qu'il essayait d'entreprendre ne réussissait
pas. Et, un jour, à l'approche de Pesssa'h, voyant tous ses voisins commencer à
acheter les produits de Pessa'h
alors que lui n'avait rien à donner à
sa famille, il tombe en dépression et
décide...de se suicider!
À cette époque, les Juifs vivaient dans
des ghettos, et il leur était interdit
d'entrer dans les quartiers non-juifs.
L'homme pauvre décida alors d'entrer
là-bas, en se disant que, de toute
manière, même si un non-juif le tuait,
il n'avait rien à perdre...
Il entre dans un village non-juif, y
rencontre deux non juifs et s'attend
à ce que ceux-ci lui "fassent sa fête".
Mais, étonné, il constate que les deux
non-juifs, en passant près de lui, le saluent simplement, et ne s'attaquent pas à lui...
Il commence alors à "se promener" dans le village, et aperçoit une grosse église. Il
décide d'y entrer et, sur l'autel du prêtre, il remarque que sont posés de nombreux
objets en or massif. Voyant qu'il n'y a personne autour de lui, il est tenté d'emporter
ces objets avec lui, pour vendre l'or et avoir enfin de quoi se nourrir et nourrir sa
famille. Et c'est ce qu'il fait: il vole les objets, fait fondre l'or, en fait des lingots, en
vend une partie ; et, avec l'argent obtenu, il fait de très nombreuses courses...
Entre temps, à l'église, on s'est bien entendu rendu-compte que les objets ont
disparus. Et qui est accusé ? Les Juifs !
Un décret est alors édité, avertissant la population juive environnante que si les objets
ne sont pas restitués dans un délai de dix jours, ils seront tous massacrés !
Les Juifs se réunissent alors à la Synagogue, et ils prient pour annuler le terrible
décret. Le Juif coupable, se rendant compte de ce qu'il a causé, va voir le Rav et lui
raconte ce qu'il a fait... Le Rav, très inquiet, lui dit: "Mais qu'est-ce que tu as fait ??
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Dans quelle situation dangereuse tu nous
a mis ??". L'homme lui répond: "C'est moi
le coupable, c'est moi le responsable".
Et il retourne au village non-juif, et se
dénonce lui-même.
Curieuse de voir ce Juif reconnaître sa
faute, de nombreuses personnes sont là
pour l'occasion: tout le clergé, tous les
hommes d'église, tous les responsables,
le
gouverneur...
Tous
attendent
d'entendre ce que ce Juif va avouer...
Celui-ci se présente, dit qu'il est Juif, et
que c'est lui qui a volé les objets. Mais
immédiatement, on le fait taire, en disant:
"Vous les Juifs, on vous connaît! Vous
êtes solidaires! On sait donc très bien que
ce n'est pas toi qui a volé les objets, mais
que tu es simplement venu dire que c'est
toi pour sauver ta communauté, pour que
celle-ci soit épargnée du massacre!".
Mais le Juif continue en disant: "Pas du
tout! C'est bien moi qui ai volé les objets,
et je vais vous raconter mon histoire:
Je suis né juif. J'ai grandi juif. Toute ma
vie a été une vie de misère. Aujourd'hui,
je suis marié, mais je n'ai pas de quoi
nourrir les enfants. A l'approche de la
fête de Pâques, je suis arrivé dans un
désespoir complet, et j'ai prié mon Dieu,
en Lui disant: "Si tu es là, viens-moi en
aide! Et si Tu ne me viens pas en aide,
c'est que 'hass véchalom je dois aller voir
ailleurs!". Et puis, Dieu ne m'ayant pas
répondu, je suis venu chez vous, pour
essayer d'y trouver la vérité. Je me suis
approché de l'église, j'y suis rentré, et j'y
ai pleuré abondamment, ne sachant que
faire. Et puis, tout à coup, j'ai entendu
une voix le dire: "Mon fils! Mon fils!". Il
n'y avait pourtant personne! Mais la
voix a continué "Mon fils! Mon fils!". Je
me suis retourné, et j'ai alors aperçu
un type accroché à un bout de bois, qui
me parlait...". Étonnés, les membres du
clergé se regardèrent, d'un air de dire:
"Mais il est fou celui-là!"...
Le Juif continua alors son récit: "Il m'a
demandé: "Qu'y a-t-il, mon fils ? Quel
est ton problème ?". Je lui répondis:
"Je ne sais plus quoi faire, il me faut du
réconfort, il me faut de l'argent, il me
faut...". Il m'a dit: "Mon fils, il n'y a pas
de problème! Regarde l'or qui est devant
toi! Sers-toi, il est pour toi! Mon cœur est
tellement meurtri par ta peine...". Je lui ai
dit: "Quelle gentillesse, monsieur! Quelle
grandeur d'âme!". Et j'ai tout pris, et je
suis parti! Quelle est donc la faute ?"
Et là, le gouverneur, le clergé..., tout le
monde comprend la supercherie! Ils
savent pertinemment que l'acrobate,
accroché à un bout de bois, ne peut
pas parler. Mais ils ne peuvent pas dire
cela devant tout le monde, car ce serait
remettre en cause toute leur religion...
Ils décident alors d'aller dans son sens
(en se disant qu'ainsi, peut-être que
les chrétiens présents auraient plus de
foi), et de jouer le jeu... Ils ont donc dit:
"Ah, on est contents que notre dieu t'aie
donné cet or! Va en paix, petit Juif, et
rentre chez toi!".
A travers cette histoire, le Ben Ich Haï
montre la futilité de la ‫עבודה זרה‬.
Comme l'indiquent les mots ‫אחרית כרא־‬
‫שית‬, la délivrance finale se passera
comme celle d'Egypte. Hachem nous
délivrera comme Il nous a sortis d'Egypte.
Avant la Sortie d'Egypte, Hachem a
montré la futilité de la ‫עבודה זרה‬. La
‫עבודה זרה‬, ce n'est pas simplement se
prosterner devant une idole. C'est un
travail étranger au service d'Hachem.
C'est considérer comme essentielle
toute chose autre que la ‫( עבודת הי‬le
service d'Hachem). Et, contrairement
à ce qu'on pourrait croire, il y a encore
plein d'idolâtrie dans le monde. Il y a
beaucoup de ‫ עבודה זרה‬autour de nous:
pour certains, l'idole est Internet, pour
d'autres c'est le football ou les concerts
de rock... Chacun a sa ‫ עבודה זרה‬à lui!
A la fin des temps (‫בימהרה בימינו‬, qu'on
ait le mérite de le vivre bientôt!), Hachem
nous montera la futilité de la ‫עבודה זרה‬,
du superficiel et de toutes les forces
qu'on y investit.
10
'
Le danger de la fin de l'exil
(Par Yossef Aflalo)
‫וידבר אלוקים אל משה‬. Dieu parla à
Moché. Ainsi commence notre paracha
de Vaéra. Dieu adresse à Moché une
réprimande, sur le ton de la critique.
Il est écrit ‫אלוקים‬, le Nom de Dieu qui
symbolise la ‫מידת הדין‬, l'attribut de
rigueur. Pourquoi Dieu s'en prend-t-Il si
violemment à Moché ?
Moché se rend chez Pharaon, et lui
demande de libérer son peuple. Non
seulement Paro refuse, mais en plus il
va accabler le Am Israël en l'alourdissant
de charges supplémentaires.
‫ועתה לכו עיבדו ותבן לא ינתן לכם ותוכן לבנים‬
‫( תיתננו‬et maintenant allez au travail, et la
paille ne vous sera pas donnée, et vous
fournirez la même quantité de briques).
Moché Rabbénou ne comprend pas:
Dieu l'envoie en messager, pour être le
libérateur du peuple juif!
Et il va déverser sa colère à Dieu, en
Lui disant: ‫למה הרעות לעם הזה למה זה‬
‫שלחתני ומאז באתי לפרעה הרע לעם הזה‬
‫( והצל לא היצלת את עמיך״‬Pourquoi as-Tu
rendu ce peuple misérable ? Dans quel
but m'as-Tu envoyé ? Depuis que je me
suis présenté à Paro pour parler en Ton
Nom, le sort de ce peuple a empiré, Tu
es bien loin d'avoir sauvé ton peuple!)".
Au même instant, le Midrash ajoute
que les anges ont demandé à Dieu de
sanctionner Moché pour ces paroles
offensantes. Et c'est ce qui est rapporté
dans
la
Guemara
Sanhédrine, au ‫דף קיא‬.
Mais
qu'est-ce
qui
a
poussé
Moché
Rabbénou
à
cette
rébellion ? Pourquoi
Moché s'en prend-t-il
aussi violemment au
Maître du monde ?
Comment imaginer un
seul instant que Moché,
‫( איש האלוקים‬un homme qui a une
dimension de l'ordre du divin), le ‫אבי הנ־‬
‫( ביאים‬le père des prophètes) puisse-t-il
agir ainsi ?
Afin de comprendre ce comportement
étrange de Moché Rabbénou, rappelonsnous ce qu'il s'est passé il y a environ
370 ans... C'était précisément l'année
5408 du calendrier juif, et cette année
était annoncée comme étant l'année de
la guéoula, de la venue du Messie. Il
avait même été rapporté de nombreuses
preuves tirées du Zohar Hakadosh, et
notamment du verset ‫בזאת יביא אהרון‬,
en arguant que la guématria du mot
‫ זאת‬valait 408, et que 408 représente le
nombre d'années écoulées du sixième
millénaire, et que cette année devait
donc être celle de la guéoula. Mais
nous, peuple juif, attendons la guéoula
chaque jour. C'est un des fondements
essentiels du Judaïsme. Nous avons
le pouvoir d'accélérer la venue du
Messie, même si sa venue à déjà été
programmé à une date bien précise.
L'année 5408 a été pressentie comme
étant celle de la guéoula. Mais que
s'est-il réellement passé ? Des émeutes
ont éclaté, et des dizaines de milliers
de Juif ont été assassinés! La guéoula
s'est transformée en une boucherie, en
un bain de sang...
Plus récemment, en l'année 5700, en
1940, certains avaient également prédit
la guéoula. Mais, au lieu de cela, ce
sont six millions de nos frères qui sont
passé dans les
chambres à gaz
et ont péri...
Nous
devons
comprendre que
la date de la venue
du Machia'h n'est
pas figée. Il y a
des
périodes,
durant
l'histoire
de l'humanité, qui
sont propices à la guéoula. Et même
les dates figurant de manière codée,
mystérieuse, dans le livre de Daniel,
11
'
ne sont pas invariables. Ces dates sont des potentialités, des possibilités réelles de
dévoilement du Machia'h (les années 5408 et 5700 étaient des dates phares, favorables
à la guéoula). Mais ces années présentent un danger car, lorsque la guéoula doit arriver,
un grand débat a lieu ‫( בשמים‬dans les cieux).
Mikhaël, le défenseur d'Israël, cite alors tous les mérites du peuple juif. Il amène avec
lui tous ses défenseurs, qui sont en fait toutes les mitsvot du Am Israël.
Les mitsvot sont nos avocats!
Avraham, Yitshak, Yaacov, Moché, David Hamélekh, les prophètes, les Tanaim, les
Amoraim et tous les Guedolim de toutes les générations implorent le kissé hakavod,
par des supplications, d'amener la guéoula... Mais, parallèlement, le procureur,
l'ange accusateur, apporte lui aussi ses chefs d'accusation qui sont nos avérot, nos
transgressions, toute l'obscurité que nous avons amené dans le monde... Et là, le
verdict va tomber: si le peuple juif réagit comme il se doit, par une prise de conscience
de l'importance de la Torah et des mitsvot, et qu'il agit dans ce sens, cette période se
transformera en guéoula effective; mais s'il reste indifférent, opaque, imperméable à
tout éveil spirituel, refusant son examen de conscience en continuant dans sa voie
pécheresse, cette guéoula potentielle laissera alors la place à des massacres et des
effusions de sang. Et c'est ce qu'il s'est passé en 5408 et 5700. Ces dates étaient
pourtant propices à la guéoula.
Dieu a décrété un exil de 400 ans en Égypte. Mais quel est le point de départ de
ces quatre-cent ans ? Est-ce le brith ben habétarim? La naissance de Yitshak ? La
descente en Égypte ? La mort de Yaacov Avinou ? Celle de Yossef ? Ou celle du
dernier des fils de Yaacov ? Autant de possibilités...
Moché Rabbénou avait connaissance de cela. Lorsqu'il se rend chez Paro, 400 ans se
sont écoulés depuis la naissance de Yitshak.
Moché comprend que le Am Israël vit une période propice à la fin de l'exil. Mais il est
inquiet car Paro refuse d'abdiquer. Mais, plus encore, il va asservir davantage le peuple
juif. Moché a compris qu'un kitroug (une accusation) est portée contre le Klal Israël
bachamayim: ‫ ;אלו ואלו עובדי עבודה זרה‬le peuple juif, tout comme le peuple égyptien, sont
tous deux des serviteurs de la avoda zara. Que le Am Israël est parvenu au quaranteneuvième degré d'impureté, et qu'il ne mérite donc pas la fin de l'exil.
Moché tremble de tous ses membres. Il craint que la guéoula soit reportée à une date
ultérieure, et il va se plaindre à Dieu.
Notre génération est, sans équivoque, propice à la guéoula. Le retour des exilés sur la
terre d'Israël, la restauration des centres de Torah, le mouvement de téchouva des Juifs
de par le monde, sont autant de signes annonciateurs du Machia'h. Mais nous devons
savoir que toute période de guéoula est accompagnée d'un kitroug (d'une accusation).
Et il nous importe de ne pas rester indifférent, et de saisir l'opportunité que Dieu nous
offre, en nous reliant à nos sources juives. Dieu attend de nous un éveil spirituel.
La guéoula est imminente. Mais ne la laissons pas, une fois de plus, s'échapper.
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'
Distinction et libération
(Par Rav Emmanuel Bensimon)
Le Ben Ich Haï a écrit un
livre de Halakha, qui ne
donne pas simplement
des lois, mais dans lequel
les Halakhot (lois) sont
introduites en rapport
avec la paracha.
Dans notre paracha, le Ben
Ich Haï parle de l'interdit
de tséda, un des trenteneuf travaux interdits
Chabbat, qui consiste à
capturer un animal. Mais
quel rapport y a-t-il entre
ces deux éléments ?
Dans la paracha de
Vaéra, la Torah nous parle
de la quatrième plaie
qu'Hachem a envoyée sur
l'Egypte: ‫( ערוב‬les bêtes
sauvages). Et elle énonce
un verset que le Ben Ich
Haï va analyser, et dont il
va nous donner la clé de
la compréhension à un
niveau allégorique:
‫ושמתי פדת בין עמי ובין עמיך‬
‫ומחר יהיה אות הזה‬
Ces mots signifient "Et
Je mettrai une distinction
entre Mon peuple et le
tien, et demain il y aura ce
signe.".
Par
eux,
Hachem
avertit
Pharaon
(par
l'intermédiaire de Moché
Rabbénou, qui est allé le
voir avant la quatrième
plaie pour lui transmettre
ce message) qu'Il va faire
un miracle, en faisant
en sorte que les bêtes
sauvages ne s'attaquent
qu'aux Égyptiens et à
leurs biens, et qu'elles ne
causent aucun dommage
aux Juifs, quel que soit
l'endroit où ils se trouvent.
Au sujet de mot ‫פדת‬
(pédout), le Ben Ich Haï
demande: "Comment se
fait-il qu'il ne soit pas écrit
selon son orthographe
habituelle,
c'est-à-dire
avec un vav (‫"? )פדות‬.
Le Ben Ich Haï répond
que les lettres de ce mot,
employé pour parler de la
distinction entre les Juifs
et les Égyptiens, indiquent
la spécificité du peuple
juif. En effet:
-la lettre ‫( פ‬pé) rappelle
la bouche (qui, en
Hébreu, se dit pé). Or
la caractéristique du
Juif, c'est sa bouche,
puisque nous avons eu
le mérite de recevoir
la Torah, et que nous
avons, par notre bouche,
la possibilité d'exprimer
des paroles de Torah, de
sainteté. Cette possibilité
est propre aux juifs.
-la lettre ‫ ד‬représente
l'unité. Nous le voyons
dans le verset ‫שמע ישראל‬
‫ הי אלוקינו הי אחד‬que nous
disons tous les jours, et
dans lequel le ‫ ד‬du mot
‫( אחד‬qui veut dire un) est,
dans tous les Sidourim,
écrit en grand. Or la
spécificité du peuple
juif est de pouvoir faire
l'unité, d'être uni à Dieu.
13
'
Nous le voyons par exemple lorsqu'il est
dit que Yaacov est descendu en Égypte
avec soixante-dix âmes. En effet, le terme
‫נפש‬, employé là-bas pour dire "âmes" est
au singulier, alors que lorsqu'on parle de
Essav (et donc des non juifs), on parle
de ‫נפשות‬, au pluriel. Ceci rappelle l'unité
d'Israël et l’absence d’union des nons juifs.
L'unité est une des spécificités du peuple
juif, que ce soit au niveau horizontal (c'està-dire entre les différentes composantes
du peuple) qu'au niveau vertical (entre le
peuple et Dieu.)
-la lettre ‫ ת‬représente la Torah (comme le
dit le Zohar et comme cela est rapporté
dans le livre que Rabbi Aquiva a écrit sur
les lettres). Et effectivement, le peuple juif
a été délivré d'Egypte par le mérite de la
Torah. En effet, même si le Matan Torah
n'avait pas encore eu lieu, les Bené Israël
étudiaient déjà la Torah (les Lévyim se
consacraient à cette étude et n'étaient
donc pas asservis par les Égyptiens; et
les autres tribus étudiaient sûrement elles
aussi la Torah, au moins pendant le temps
libre).
Et c'est par ce mérite qu'ils ont été sauvé,
et n'ont pas eu à subir les dix plaies, l'étude
de la Torah a en effet, la capacité de sauver
l'homme de la punition.
La bouche, l'unité et la Torah sont donc
les trois choses qui caractérisent le peuple
juif. Et le mot ‫פדות‬, qui signifie justement
"distinction", y fait allusion.
Cela signifie que si nous prenons
conscience de notre spécificité, c'est-àdire du fait que nous ne devons utiliser
notre bouche que pour des choses saintes,
que pour l'étude de la Torah et pour des
bonnes paroles, et pas -que Dieu préservepour de la médisance ou d'autres choses
mauvaises; du fait que nous devons être
unis à Dieu et à nos frères juifs quelle que
soit leur situation spirituelle; et du fait que
nous devons étudier la Torah et réaliser
les 613 mitsvot, nous réalisons vraiment le
but pour lequel Dieu nous a créé, et nous
pourrons arriver à la fin du verset, qui dit:
"‫( מחר‬demain), Dieu fera le signe", et dans
laquelle le mot "‫ "מחר‬fait allusion à la fin des
temps (comme nous le voyons à plusieurs
autres endroits du Tanakh).
C'est-à-dire que parce que nous allons
faire attention à ces trois choses, par ce
mérite, Hachem nous enverra le Machia'h.
Nous allons à présent répondre à la
question du début: pourquoi le mot pédout
est-il écrit sans vav lorsqu'il est employé
dans le verset dont nous avons parlé ?
Parce que la délivrance d'Egypte n'était
pas complète. En effet, lorsqu'Hachem
a demandé à Moché de sortir les Bené
Israël d'Egypte, Il lui a déjà fait allusion aux
prochains exils (à travers Son Nom Ekié
acher Ekié, au sujet duquel la Guemara
explique: De même que J'ai été avec vous
en Égypte, Je serai avec vous dans les
prochains exils).
La délivrance totale, elle, viendra ‫מחר‬,
c'est-à-dire à la fin des temps, comme
l'indique la suite du verset.
Mais quel rapport y a-t-il entre tout cela
et l'interdit de tséda (de capturer pendant
Chabbat) ?
Dans Chabbat, nous retrouvons la notion
de libération dont nous avons parlé. En
effet, Chabbat, on est tranquille: on ne
travaille pas, il n'y a pas de téléphone,
personne ne nous embête... Nous sommes
tranquilles avec notre famille, nous prions,
nous étudions la Torah... Nous sommes
complètement libérés de tous les jougs
que nous pouvons avoir en semaine.
Chabbat, c'est la dimension de la fin des
temps, de la délivrance totale.
Toute l'essence de Chabbat, c'est la
libération. Il nous est donc interdit, en ce
jour, de capturer un animal. Car ce serait le
priver de sa liberté.
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Le bien dans le mal
(Par Rav Yonatan Chocron)
Dans la paracha de Vaéra, la Torah nous
parle de la ‫( מכה‬plaie) de la grêle.
Durant cette plaie, Pharaon, n'en pouvant
plus, demande à Moché Rabbénou de
prier pour qu'elle cesse.
Moché lui répond: "Je vais sortir prier et
implorer Dieu, et les bruits s'arrêteront
(car effectivement, il y avait des fracas,
des bruits insupportables), et la grêle
aussi s'arrêtera".
Et, en effet, suite à la tefila de Moché, la
grêle et les bruits se sont arrêtés. Mais
Pharaon, au lieu de voir l'intervention
de Dieu dans cet événement, protesta:
"Moché a dit: "Les bruits et la grêle
s'arrêteront. Or les choses ne se sont
pas passées dans cet ordre, puisque
c'est d'abord la grêle qui s'est arrêtée,
et ensuite les bruits qui ont cessé! Il a
dit l'inverse de ce qu'il s'est finalement
passé! Je ne crois donc plus en son
Dieu!". Nous voyons d'ici que lorsqu'une
personne veut voir le mauvais côté des
choses, lorsqu'elle n'en cherche pas
l'aspect positif, elle ne verra toujours que
le mal. Par contre, lorsqu'une personne
veut voir le bon côté des choses, elle
pourra le voir même dans les moments
difficiles, comme le montre l'histoire
suivante: Un vérificateur de tefilines et
mézouzot était de passage dans une
ville. Il proposa aux gens de lui amener
leurs tefilines et mézouzot afin de les
vérifier. Ils les lui déposèrent sur la bima,
et devaient les récupérer le soir-même.
Dans cette communauté, se trouvait
un certain Monsieur Berkovitch. Celuici avait des tefilines qu’il considérait
exceptionnelles. A tel point que les gens
faisaient la queue pour les lui emprunter,
et avoir ainsi le mérite, au moins une fois,
d'accomplir la mitsva en les utilisant.
Ce Monsieur Berkovitch n'entendait pas
bien, et il ne savait pas, par conséquent,
qu'un vérificateur de tefilines avait
proposé aux gens d'apporter leur tefilines
pour qu'il les vérifie. Il n'avait, de toute
manière, pas l'intention de faire vérifier
sa paire, qu'il considérait être parfaite.
Chaque matin, Monsieur Berkovitch
déposait ses tefilines sur la bima. Le matin
où le vérificateur a fait sa
proposition, il les a déposés
aussi. Et ses tefilines se
sont donc retrouvées parmi
les nombreuses paires que
le vérificateur a vérifiées.
Après la tefila de Min'ha,
les gens qui avaient déposé
leur paire de tefilines vinrent
les récupérer. A un moment,
celui-ci, s'étant retrouvé avec
les tefilines de Monsieur
Berkovitch, que personne
n'était
venu
réclamer,
demanda à l'assemblée: "A
qui appartiennent ces tefilines
? ". Tout le monde reconnut
évidemment les tefilines de
Monsieur Berkovitch... Mais,
à la stupéfaction générale, le
vérificateur annonça: "Elles sont vides!!
Elles ne contenaient aucun parchemin!".
Comment était-ce possible ? Les gens ne
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'
comprenaient pas... Mais surtout, ils redoutaient de devoir annoncer la terrible nouvelle
à Monsieur Berkovitch, qui était si fier de ces tefilines...
Après être entré dans la Synagogue, Monsieur Berkovitch aperçut ses tefilines hors de
leur pochette, et remarqua que leurs boîtiers avaient été éventrés... Il s'écria: "Qui a
touché à mes tefilines ??". Personne n'osa répondre. Personne ne savait comment lui
annoncer ce que le vérificateur avait découvert...
Finalement, celui-ci s'approcha de lui, et lui annonça doucement ce qu'il avait remarqué.
Pendant ce temps, les gens se cachaient, en se demandant si Monsieur Berkovitch allait
supporter ce choc. Mais à la surprise générale, celui-ci, après avoir appris la nouvelle
concernant ses tefilines, se mit à danser, et à remercier Hachem d'avoir fait en sorte
qu'on ait remarqué cette erreur avant qu'il quitte ce monde...Car ainsi, on pourrait la
réparer, et il pourrait alors accomplir la mitsva comme il se doit!
Voici l'exemple d'un homme qui, même dans un moment difficile, a su voir le bon côté
des choses, au lieu de se laisser dominer par la difficulté. Combien ceci est important !
Dans notre société, il y a deux catégories de personnes: celles qui sont constamment
nostalgiques du passé, et celles qui, au contraire, passent leur temps à se dire que le
futur sera mieux que ce qu'elles vivent actuellement. Dans les deux cas, ces personnes
n'apprécient pas le moment présent.
Il est pourtant très important de voir le bien à travers le mal, le bien à travers la difficulté.
De se rappeler qu'Hachem est toujours là pour nous protéger, et pour nous faire avancer.
Au moment de la difficulté, au moment de l'épreuve, c'est certes difficile.
Mais n'oublions jamais que tout ce qu'Hachem fait est pour le bien!
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Doit-on rallumer les bougies de Chabbat si elles se sont éteintes ?
'
(Par Rav Yoel Hattab)
La raison de l'allumage des nérot (bougies) de Chabbat, c'est le ‫עונג שבת‬, c'est-à-dire
le ‫שלום בית‬.
En effet, autrefois, avant l’invention de l’électricité, la seule source de lumière était « la
bougie ».
La mitsva d'allumer les bougies de Chabbat a été donnée à la femme, car elle se
trouve plus à la maison que le mari. Dans certains cas cependant, c'est le mari qui
devra allumer (À ce sujet, on se renseignera auprès d'un Rav. Chaque question a sa
réponse).
La mitsva d'allumer les bougies de Chabbat a été donnée pour le ‫שלום בית‬, pour ne
pas se cogner, pour voir ce qu'il se passe devant nous etc...; pour qu'il n'y ait pas de
cris pendant Chabbat, et que ce jour soit un jour de chalom.
Afin de pouvoir profiter de ces bougies la nuit (c'est-à-dire dès la sortie des étoiles),
si celles-ci se sont éteintes avant la ‫( שקיעה‬c'est-à-dire avant le coucher du soleil), la
femme se doit de les rallumer, mais sans berakha.
Rappelons ici que les Séfaradim ne font pas entrer Chabbat par l'allumage des nérot.
C'est pourquoi ‫( בשעת הדחק‬en cas de nécessité) et avant le coucher du soleil, on
pourra continuer à faire tous les travaux nécessaires au Chabbat (exemple: brancher
la plata de Chabbat).
La femme pourra donc rallumer les nérot de Chabbat, mais elle le fera sans berakha
car certains décisionnaires pensent qu'il n'est pas nécessaire de rallumer les nérot, et
parce que le fait de dire la berakha sur les nérot de Chabbat n'est pas une condition
indispensable pour avoir accompli la mitsva de les allumer.
Chez les Achkénazim, par contre, les femmes font entrer Chabbat par l'allumage des
nérot. Par conséquent, si celles-ci se sont éteintes, la femme devra demander aux
enfants (ou au mari s'il est encore à la maison) de les rallumer (ici encore, on parle
évidemment du cas où on rallume les bougies avant le coucher du soleil).
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