Pourquoi Florence est-elle la capitale de la Renaisance ? Quelques repères académiques Dans la liste des quelques villes qui ont profondément marqué l’histoire de l’humanité Florence figure en bonne place, aux côtés d’Athènes, Rome, Londres, Paris ou New York. C’est, en effet, entre ses murs que s’est élaborée aux XIVe et XVe une véritable révolution culturelle. Une nouvelle conception du monde, de l’homme et de Dieu s’impose, bouleversement intellectuel qu’un art nouveau ne tardait pas à mettre en scène, portant à un point d’excellence rarement égalé les productions de l’esprit humain ; mouvement historique et culturel que les historiens qualifièrent plus tard de Renaissance pour désigner une modernité puisant aux sources d’un passé antique. C’est tout d’abord dans l’économie médiévale qu’il faut chercher les raisons du rayonnement politique et culturel à venir. Dès le XIIe, la ville assoit sa prospérité sur le commerce de draps. Elle les achète dans le nord de l’Europe, en Champagne et en Flandres, et les teint avec des produits venus d’Orient. L’exceptionnelle qualité de ce travail fait sa renommée et sa richesse. La corporation des marchands s’enrichit et développe aussi des activités bancaires. La ville prospère et frappe, dès 1252, le Florin qui est alors la monnaie de référence. Devenue puissance économique et financière, elle s’émancipe de la tutelle féodale et devient une cité libre, une Commune, s’administrant elle-même sans échapper toutefois à la violence des luttes intestines. Forte de cette puissance nouvelle, elle intervient alors dans le jeu excessivement compliqué des guerres entre cités et Etats italiens. Elle parvient ainsi à soumettre ses rivales les plus proches : Sienne, Pise et Volterra entre autres. Elle intervient aussi dans le grand jeu diplomatique européen où s’affrontent l’Empire et la Papauté, choisissant le plus souvent le parti du Pape. Au XVe, sous l’autorité des Médicis, si elle est à l’apogée de sa puissance, elle doit surtout sa gloire à l’exceptionnelle qualité de sa vie culturelle et artistique, favorisée par le mécénat pariculièrement ambitieux de la dynastie. Mais dès les XIIIe et XIVe, Pétrarque, Dante et Boccace en littérature, Giotto, en peinture, avaient déjà ouvert la voie à un art nouveau. Brunelleschi, Donatello, Fra Angelico et Masaccio accentuent, dans les premières décennies du XVe, la rupture avec l’esthétique ancienne. Le paradigme culturel et religieux médiéval s’effrite, l’humanisme s’affirme. L’homme n’est plus uniquement une créature faible et pécheresse et l’on exalte désormais sa puissance. Sous le règne de Laurent de Médicis de 1469 à 1492, Pic de la Mirandole chante sa capacité à inventer son destin et à accomplir toutes ses virtualités. Laurent le Magnifique, incarnation spectaculaire du prince de la Renaissance, homme d’Etat intraitable, fin lettré et lui même auteur, accueille à sa cour, les représentants de l’humanisme philosophique. Ils y rencontrent les inventeurs de l’art nouveau. Une incroyable concentration de génies et d’exceptionnels talents, véritable académie des Temps modernes, vit ainsi dans l’entourage du prince ; outre Pic de la Mirandole, Marsile Ficin, Ange Politien, Botticelli, Léonard de Vinci, Raphaël, Michel Ange… Autant de gloires universelles qui assurent celle de Florence et lui confèrent ce titre mérité de capitale de la Renaissance. © culture&sens Pourquoi Florence est-elle la capitale de la Renaisance ? La touche culture&sens • La perspective est l’une des grandes questions esthétiques de la Renaissance. Il s’agit d’établir une correspondance adéquate entre l’espace représenté dans l’œuvre et l’espace vécu de l’expérience humaine. De nombreux traités, à partir du XIIe siècle, recensent les méthodes empiriques pour résoudre cette difficulté. Au XIVe siècle, la question de la représentation de l’espace architectural dans la peinture pose de manière de plus en plus prégnante cette question de la perspective. Elle est résolue, le plus souvent, empiriquement en faisant se rejoindre les lignes obliques en un point de fuite, c’est ce qu’on appelle la perspective linéaire. Au siècle suivant, le quattrocento, l’approche théorique de la question se substitue aux solutions empiriques. Elle repose sur la conviction que l’espace représenté sur le tableau s’organise selon des rapports de proportion rigoureusement équivalents à ceux qui structurent l’espace réel. Il s’agit de découvrir cette correspondance mathématique en s’appuyant sur les progrès de l’optique et de la géométrie. C’est la perspective mathématique. Plus tard, Léonard de Vinci, constatant que le traitement de l’espace selon ces règles ne correspond pas toujours avec les données de l’expérience psycho-physiologique, insiste sur la nécessité, pour rendre compte de la distance, de jouer sur l’éclaircissement des couleurs vers la profondeur, c‘est la perspective atmosphérique. • Dans cet extraordinaire moment de créativité qu’est la Renaissance à Florence, la rivalité entre les grands maîtres est l’une des données non négligeables du contexte culturel. Ainsi en 1401, la municipalité met au concours l’attribution du contrat pour le décor sculpté des portes en bronze du baptistère. Brunelleschi et Ghiberti sont finalistes et sculptent pour être départagés un panneau sur le thème du sacrifice d’Isaac. Ghiberti l’emporte, d’où, peut-être, l’insistance plus tard de Brunelleschi pour évincer son rival du chantier de la coupole de la Cathédrale et pour réaliser seul l’exploit de sa construction. Plus amicalement cette fois, Brunelleschi se confronte à Donatello. Celui-ci a sculpté, vers 1411, un crucifix dont, selon la légende, son ami aurait moqué son allure “paysanne” et se serait engagé à faire mieux. De fait, Brunelleschi sculpte, lui aussi, un crucifix et se serait arrangé pour que Donatello entrât dans son atelier et le découvrît en son absence. Brunelleschi serait alors triomphalement entré au moment où Donatello convenait à haute voix de la supériorité du travail de Brunelleschi. Le Christ de Donatello est à Santa Maria Novella, celui de Brunelleschi à Santa Croce. Pour nous contacter et réagir : www.culture-sens.fr Des idées de loisirs A voir sur place : Un peu à l’écart des hauts lieux touristiques : les jardins Bardini. Deux autres coups de coeur : le quartier San Niccolo pour découvrir des coins typiques également fréquentés par les florentins et la piazza Santo Spirito connue pour son église mais qui est aussi un des “lieux tendance” de la ville. A lire : L’art italien, de A. Chastel (Flammarion). Laurent le magnifique, de Y. Cloulas (Fayard). Florence, de D. Wigny (Editions Duculot, 1990). Plus qu’un guide, un livre d’une grande originalité, il est encore disponible sur les sites spécialisés dans les livres épuisés. Parmi les nombreux guides justement : Florence et la Toscane, (Guide Voir, Hachette). © culture&sens